Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
17 janvier 2022 1 17 /01 /janvier /2022 17:13
Les directives européennes appliquées par nos gouvernements successifs ont détruit un grand service public construit à la libération avec le CNR

Retraité d’EDF GDF depuis 15 ans, j’ai fait ma carrière professionnelle à Dijon. Durant 14 ans les adhérents CGT m'ont confié la responsabilité de la région Bourgogne pour EDF GDF, puis j’ai siégé au conseil d’administration de Gaz de France comme administrateur CGT représentant le personnel durant 8 ans, jusqu'à la privatisation en 2004. Voila pourquoi même à la retraite, je suis attentivement les évolutions de mon entreprise.
Politiquement , j’ai milité 23 ans au PCF, membre du secrétariat fédéral de Cote d’or du PCF, plusieurs fois candidat, mais les positionnements de la direction nationale du  PCF en 1998/99 favorable à l’ouverture du capital dans les entreprises publiques et le vote à l’AN sur l’ouverture à la concurrence du gaz et de l’électricité mon fait quitter le PCF. Depuis 2016 je suis militant de la France Insoumise.

 

Sources : par Yves Mestas[1] | mis à jour le 11/12/2022

- Le nucléaire civil a toujours suscité débat en France depuis la mise en œuvre du programme nucléaire

Il a des avantages et des inconvénients comme tous les moyens de production d’électricité.


La CGT a des positions divergentes sur le sujet. La FNME CGT Energie, défend farouchement la production nucléaire alors que la confédération est beaucoup plus nuancée. Surtout depuis 2020, P Martinez ayant signé avec 18 ONG (dont Greenpeace France, Attac….) un plan de sortie de crise[2] mixant sauvegarde de l’emploi et défense de la planète. Très critiqué par la fédération de l’Energie CGT.

 

A l’origine, pour justifier la construction du parc nucléaire français en 1973/74, suite au choc pétrolier, était mis en avant les arguments suivant : assurer l’indépendance en électricité du pays pour se substituer aux centrales thermiques (charbon, fioul). Assurer une production d’électricité pour répondre aux besoins à un coût compétitif (sans prendre en compte le démantèlement) et n’émettant pas de gaz à effet de serre.  D’autres éléments sont moins évoqués car plus négatifs : l’uranium est importé du Niger et du Kazakhstan[3], l’investissement est très lourd donc l’endettement très important pour l’entreprise et la gestion des déchets que personne ne veut près de son domicile.

 

 

- Sont venues se greffer, depuis 20 ans, des mesures qui pénalisent l’entreprise EDF.

L’ouverture à la concurrence votée en mars 1999 à l’AN et mise en œuvre progressivement (directive européenne). Depuis 10 ans, l’ARENh sous la pression de Bruxelles, EDF doit vendre à prix coûtant 25% de sa production nucléaire à ses concurrents au prix de 42€ le MWh. Mesure qui vient d’être réajustée par le gouvernement, s’inspirant des négociations du projet « Hercule » entre Le Maire et la commission européenne. Prochainement, EDF sera contrainte de vendre 40% de sa production nucléaire à ses concurrents au prix de 46.20 € le MWh. Tarif très bas vu les prix du marché. Pour mémoire, la commission européenne demandait que le nucléaire soit séparé du groupe EDF et que la totalité de la production nucléaire soit vendue aux concurrents européens. Peut-être un compromis entre la France et Bruxelles ou une étape transitoire ? Un processus de déréglementation auquel le mouvement syndical n’a pas pu s’opposer, quel que soit le gouvernement en place.

 

Une situation qui prive EDF d’une part importante de sa production nucléaire et contraint l’entreprise, selon les périodes, à acheter de l’électricité sur les marchés européens de l’énergie à des prix exorbitants. La formation des prix des marchés de gros du KWh électricité se fait maintenant sur le cours du marché en fonction du coût de production de la centrale la plus chère (gaz) décidée par Bruxelles en 2016. Conséquences, actuellement 4 réacteurs sont à l’arrêt pour des problèmes de sécurité (Chooz et Civaux) soit 10% de la production nucléaire. EDF doit faire fonctionner ses 2 centrales charbon et importer de l’électricité de Belgique, d’Allemagne et d’Espagne à environ 300€ le MWh (le 22 décembre 2021 près de 400€ le MWh), dans le même temps l’entreprise vend à ses concurrents 25% et demain 40% de sa production nucléaire !

 

 

- À cela s’ajoute un vieillissement du parc nucléaire français avec régulièrement des incidents et mise en arrêt de tranches.

Les deux tiers des réacteurs auront 40 ans de vie en 2027, soit la durée de vie pour laquelle ils ont été conçus. Le gouvernement et EDF souhaitent prolonger la durée de vie de ces réacteurs avec plus de maintenance de rénovations et le grand carénage, pour un coût estimé à environ 100 milliards d’euros. Autre problème, avec le réchauffement climatique et des étés de sécheresse, les cours d’eau sont bas, ce qui a contraint EDF à des arrêts de tranches.

 

Autre problème, les déboires de l’EPR de Flamanville. Il nous avait été vendu pour un budget de 3.4 milliards et livré pour fonctionnement en 2012. Suite à une multitude de mal façons et d’incidents, EDF vient d’annoncer un nouveau retard de démarrage pas avant fin 2023 et pour un budget actuel de 12.7 milliards[4], soit un coût multiplié par quatre. La Chine qui a mis ses deux premiers EPR en fonctionnement en 2018 et 2019, actuellement l’un est à l’arrêt pour fuite radioactive. Le sujet fait débat dans la campagne présidentielle avec des programmes de candidats pour la construction de 6/7 EPR de bords politiques très différents et d’autres sont pour une sortie progressive du nucléaire[5]. Quel que soit le président élu le sujet sera d’actualité dans le prochain quinquennat et va accentuer les fractures dans la société française.

 

 

- Voilà un descriptif qui devrait inciter à la réflexion syndicale 

Sécurité avec le vieillissement des centrales, dérèglementation qui pénalise l’entreprise techniquement et financièrement, le consommateur/client ne bénéficie plus du coût compétitif du nucléaire avec ce marché européen de l’énergie et l’ouverture à la concurrence qui devait faire baisser les tarifs, un EPR qui devient un gouffre financier et une production nucléaire financé par EDF qui est de plus en plus au service des concurrents.

 

Notes :

[1] Retraité, adhérent CGT depuis 1974, Ex-responsable CGT région Bourgogne EDF/GDF, Ex-membre du conseil d’administration de Gaz de France.

[2] Plus Jamais ça : 34 mesures pour un plan de sortie de crise

[3] En 2016, plus des deux tiers de la production mondiale d’uranium provenaient des mines de trois pays dont le Kazakhstan (39,4% de la production mondiale en 2016)

[4] EDF : le coût de Flamanville relevé de 12,4 à 12,7 milliards d'euros

[5] Comparateur de programmes

 

Pour en savoir plus :

- ÉLECTRICITÉ – Un hiver 2022/2023 sous haute tension !

Partager cet article
Repost0
15 décembre 2021 3 15 /12 /décembre /2021 11:03

 

Fin 2019, le déficit budgétaire de la France représentait 72,8 milliards d’euros, «une véritable catastrophe, un mal à éradiquer » pour de nombreuses voix. Un an et une crise sanitaire après, on annonçait que la dette représenterait au moins 220 milliards d’euros fin 2021. Les portes de l'enfer sont-elles pour autant ouvertes ?

 

- En savoir plus

L’exécutif n’a pourtant pas tardé à ressortir le spectre de la dette, prétexte idéal pour justifier ses politiques libérales : baisse des dépenses publiques, réformes « structurelles » qui sont autant d'attaques contre le monde du travail, etc. 

 

Cet ouvrage se veut un antidote à ces politiques. Pour commencer, il propose d’annuler la « dette Covid » (les sommes dépensées pour faire face aux conséquences de l’épidémie et détenues par la BCE). Et plus largement, il explique pourquoi et comment il est temps d’affirmer «  lâchez-nous la dette  », d’arrêter de brandir ce faux problème, tel un épouvantail permettant de faire passer les réformes les plus antisociales.  

 

Un exercice pédagogique et engagé d'autant plus indispensable que la question de la dette, souvent rebattue, devrait être au centre du débat économique des élections de 2022. 

 

Informations sur l’auteur :

Engagé de longue date, Éric Coquerel a cofondé avec Jean-Luc Mélenchon le Parti de gauche en 2008, puis, largement œuvré à la création du Front de gauche. Élu conseiller régional Ile-de-France en 2010, puis député France Insoumise en Seine-Saint-Denis depuis 2017, il est très présent dans les mobilisations, notamment dans les luttes des quartiers populaires et contre les discriminations racistes, il est un des députés les plus assidus de l’assemblée où il siège pour son groupe à la commission des finances..

 

-  Par : Eric Coquerel

Éditions : Les Editions de l'Atelier

Date de parution : 22 septembre 2021

Pages : 96

Disponibilité : chez l'éditeur Les Editions de l'Atelier

Format : 180 mm x 120 mm

Prix papier TTC : 9,80€

 

 

Partager cet article
Repost0
14 décembre 2021 2 14 /12 /décembre /2021 18:07

 

Les trompettes de la renommée n’ont pas retenti dans l’enceinte médiatique lors de la parution du dernier livre de Jacques Généreux. Ce silence assourdissant est un bon indice de la dangerosité idéologique de cet ouvrage pour l’oligarchie en place et ses valets médiatiques.

** Jacques Généreux vient de publier en octobre 2021 aux éditions du Seuil un nouvel ouvrage intitulé : Quand la connerie économique prend le pouvoir.

 

 

- En savoir plus

Aucune crise ne semble altérer la détermination de nos dirigeants à perpétuer le monde d’avant en pire, car l’entendement des élites est durablement embrouillé par une religion néolibérale insensée inculquée à plusieurs générations d’énarques, de journalistes, de professeurs, etc.

 

Jacques Généreux approfondit ici la piste de recherche amorcée dans La Déconnomie[1]. En mobilisant la psychologie sociale et cognitive, il révèle la « banalité de la bêtise » et de sa forme entêtée, la connerie. Il montre comment celle-ci imbibe l’idéologie économique qui inspire la parole, l’arrogance et la politique de Macron, comme elle a inspiré la gauche et la droite européennes depuis trente ans. La connerie économique, c’est aussi la maladie d’une société dont toutes les sphères sont contaminées par le virus de la compétition (la politique, l’usine, le bureau, l’école, la recherche, les médias). Un virus qui stimule la bêtise et pervertit la démocratie en piège à cons.

 

 

- L’antidote existe.

C’est l’intelligence collective qui peut surgir de la délibération citoyenne. Sans installation de cette dernière au pouvoir, la meilleure des reconstructions sociales pourra toujours être anéantie par une prochaine génération d’abrutis.

 

Informations sur l’auteur :

Jacques Généreux, membre des Économistes atterrés et de l’Association française d’économie politique, enseigne l’économie à Sciences Po depuis près de quarante ans. Il a publié de nombreux best-sellers d’initiation à l’économie et des essais qui tentent de refonder l’économie et la politique sur les sciences de l’homme (La Dissociété, L’Autre Société, La Grande Régression).

 

-  Par : Jacques Généreux

Éditions : Les Editions Seuil

Date de parution : 07 Octobre 2021

Pages : 304

Disponibilité : chez l'éditeur Les Editions Seuil

Format : 20;5 cm x 15 cm 

Prix papier TTC : 19,00 €

 

Note :

[1] La Déconnomie

 

 

Partager cet article
Repost0
17 novembre 2021 3 17 /11 /novembre /2021 16:53
L’histoire du libre-échange et du protectionnisme... et demain...
L’histoire du libre-échange et du protectionnisme... et demain...

...Pour aboutir à quoi : l'instauration d'un protectionnisme solidaire pour produire en France comme le propose l'Avenir en Commun[15] ?

 

La querelle entre libre-échange et protectionnisme naît pratiquement avec le capitalisme. Mais l’histoire nous montre qu’il y a eu alternance de ces deux options. Nous verrons quelles forces sociales les ont promues.

 

Sources : gauchemip.org & Durand Eric | 

- I. Naissance du concept de libre-échange

Le Lorrain, Port de mer au soleil couchant, 1639.

Jusqu’au début du XVIIIe siècle le mercantilisme a été la doctrine sur les échanges internationaux[1]. Son principe était qu’il fallait réduire au minimum les importations et accroître au maximum les exportations. Tout cela dans le but de concentrer dans le pays le maximum de métaux précieux qui étaient considérés comme étant à la base de la richesse nationale...

 

En 1760, les physiocrates Quesnay, Turgot préconisent le libre-échange. Mais son premier théoricien est Adam Smith (1723 - 1790) qui publie en 1776 recherche sur la nature et les causes de la richesse des nations. Il est l’inventeur de la parabole de la main invisible, selon laquelle chaque individu, en ne suivant que ses fins propres « est conduit par une main invisible à remplir une fin qui n’est nullement dans ses intentions ». Contrairement à ce que disent aujourd’hui les néolibéraux, Smith n’était pas partisan du laisser-faire. Il allouait un rôle économique à l’Etat qui outre ses fonctions régaliennes devait prendre en charge les activités que les entrepreneurs ne pouvaient assumer. La première application de ses théories fut la signature du traité de commerce anglo-français de 1786. Ce traité favorisait l’exportation des vins du bordelais mais ce fut une catastrophe pour l’industrie française, moins développée que sa concurrente anglaise. Ce fut probablement une des causes de la Révolution française[2]. Le XVIIIe siècle se termina par un retour au protectionnisme à cause des espoirs déçus du traité de 1786 ainsi que de la guerre.

 

David Ricardo (1772 - 1823) est le véritable théoricien du libre-échange avec la théorie des « avantages comparatifs »[3]. Il affirme que le commerce enrichit les deux partenaires, car rapidement chacun fait ce pourquoi il est le plus doué. Pourtant, ces deux théoriciens oubliaient que l’Angleterre avait construit son industrie lainière dans les siècles précédents à l’abri de la concurrence hollandaise. Alors qu’au XVe siècle l’Angleterre exportait sa laine brute en Hollande, elle en avait ensuite fortement taxé ses exportations et avait pu construire son industrie.

 

 

- II. 1815 - 1914, ou le rôle moteur de la Grande Bretagne dans les périodes d’ouverture ou de fermeture au commerce international...

L’histoire économique du monde développé de 1815 à 1914 peut être découpée en cinq phases selon l’économiste belge Paul Bairoch (1930 - 1999) :

  • 1 - 1815-1846 : adoption graduelle de libre-échange au Royaume Uni, mais maintien du protectionnisme dans le reste de l’Occident ;

En 1815, le parlement anglais sous la pression de la noblesse terrienne vota les Corn Laws. Lors des bonnes récoltes les droits de douane étaient relevés et ils étaient abaissés lors des mauvaises. La gentry était ainsi assurée de revenus réguliers. Mais les ouvriers de l’industrie payaient cher les produits alimentaires, ce qui obligeait les industriels à leur payer des salaires relativement élevés. Avec le libre-échange, les industriels paieraient des salaires faibles, ce qui, compte tenu de la forte mécanisation rendrait leurs usines compétitives.

- Les intérêts de l’industrie, donc du libre-échange furent défendus par le Political Economy Club, fondé par David Ricardo et ses amis afin de promouvoir la nouvelle pensée économique.

- Ils profitèrent des mauvaises conditions climatiques de 1845, auxquelles s’ajouta la récolte catastrophique de pommes de terre en Irlande et le 6 juin 1846 les Corn Laws étaient abrogées[4].

  • 2 - 1846-1860 : efforts du Royaume-Uni pour étendre la politique libérale à l’Europe continentale ;

- de 1846 à 1860, l’Angleterre s’efforça de propager le libre-échange en Europe continentale.

L. Palmerston débats traité franco-britannique
  • 3 - 1860-1879 : phase libre-échangiste dans la plupart des pays européens ; mais maintien ou accentuation du protectionnisme dans les pays développés d’outre-mer ;

- 1860-1879 : phase libre-échangiste dans la plupart des pays d’Europe. En 1860, Napoléon III négocia secrètement un traité de commerce avec le Royaume-Uni (Traité Cobden-Chevalier) que la grande majorité des membres de la Chambre des députés qualifia de nouveau coup d’état[5]. Le reste de l’Europe continentale adopta le libre-échange, mais eut à subir une dépression de 1869 à 1873 qui fut plus forte que celle de 1929, en ce qui concerne le recul du PNB.

- En totale opposition avec le virage libéral de l’Europe, pratiquement tous les pays développés d’outremer renforcèrent ou adoptèrent le protectionnisme dans les années 1860-1880. Aux Etats-Unis, la guerre de Sécession (1861-1865) entre le Nord anti-esclavagiste et le Sud favorable au système esclavagiste est aussi une guerre entre le Nord protectionniste et le Sud libre-échangiste. 1879-1892, retour de l’Europe continentale au protectionnisme : l’Allemagne montre la voie avec la Realpolitik de Bismarck. La France, quant à elle, ne retourna au protectionnisme réel qu’avec le tarif dit « de Méline » de 1892[6].

  • 4 - 1879-1892 : retour de l’Europe continentale au protectionnisme ;
  • 5 - 1892-1914 : accentuation de la pression protectionniste au Royaume-Uni et renforcement du protectionnisme en Europe continentale et dans les pays de peuplement européen.

- 1892-1914 : tandis qu’au Royaume-Uni, Chamberlain militait sans succès pour le « Fair Trade » (qu’on peut traduire par commerce loyal ou équitable), opposé au « free trade », on assistait au renforcement du protectionnisme dans le reste du monde développé[7].

- Les Etats-Unis qui n’avaient pas pris part au mouvement de libre-échange, et au contraire, avaient relevé le niveau de leur protection, connurent une période de forte croissance, alors que l’Europe était en pleine dépression.

- Cette période est même une des plus prospères de l’histoire des Etats-Unis.

- En Europe continentale, il y eut reprise dès qu’une politique protectionniste fut décidée.

- D’ailleurs, au cours de la phase d’expansion économique 1889/1892 à 1913, la croissance a été de 0,9% par habitant au Royaume-Uni, resté fidèle au libre-échange tandis qu’en Europe continentale devenue protectionniste, elle était de 1,5%. Entre 1891/1893 et 1913, le volume des exportations européennes s’accrut de 3,9% par an, contre moins de 3% pendant la période de libre-échange[8].

 

 

- Conclusion sur le XIXe siècle

Trois enseignements peuvent être tirés de cette période :

  • I. Le libre-échange ne peut être efficace qu’entre pays ayant le même niveau de développement ;
  • II. les pays les moins avancés ont besoin du protectionnisme pour rattraper les plus développés. Les Etats-Unis d’Amérique furent protectionnistes de leur création à la fin de la seconde guerre mondiale, leur suprématie industrielle étant alors fermement assurée. Ulysses Grant, président des Etats-Unis de 1768 à 1876 avait anticipé cette évolution : « Pendant des siècles, l’Angleterre s’est appuyée sur la protection, l’a pratiquée jusqu’à ses plus extrêmes limites, et en a obtenu des résultats satisfaisants. Après deux siècles, elle a jugé commode d’adopter le libre-échange, car elle pense que la protection n’a plus rien à lui offrir. Eh, Messieurs, la connaissance que j’ai de notre pays me conduit à penser que dans moins de deux cents ans lorsque l’Amérique aura tiré tout ce qu’elle a à offrir, elle adoptera aussi le libre-échange[9]».

Il ne s’était pas trompé dans la prédiction, seulement sur le délai.

Le développement économique des pays s’est toujours fait à l’abri de frontières fermées, et les périodes d’ouverture, correspondent au désir des pays développées soit de s’assurer des approvisionnements de matières premières à bas coût, soit de s’assurer de débouchés au-delà de leur marché national (kicking away the ladder, théorie de « l’échelle tirée » de Friedrich List qui disait que les prêches britanniques en faveur du libre-échange faisaient penser à celui qui parvenu au sommet d’un édifice, renvoie l’échelle d’un coup de pied afin d’empêcher les autres de le rejoindre). List le promoteur du Zollverein, l’union douanière allemande dont les débuts datent de 1818, ne voyait aucune contradiction entre celui-ci, et la protection des industries naissantes, car il considérait que les états allemands avaient des niveaux de développement relativement proches[10].

  • III. A l’intérieur d’un pays, les luttes entre protectionnistes et libre-échangistes masquent des conflits de classe (en Angleterre, de 1815 à 1846 la noblesse terrienne contre la bourgeoisie industrielle, aux Etats-Unis à l’époque de la guerre de sécession, la classe colonialiste du Sud contre la bourgeoisie industrielle du Nord). La classe la plus pauvre d’un pays (les ouvriers anglais et les esclaves noirs américains) pâtit encore plus que les autres du libre-échange. Le libre-échange signifie la guerre économique et les pays qui le pratiquent cherchent à améliorer leur compétitivité en jouant sur les conditions de vie de leurs travailleurs.

 

 

Du GATT à l'OMC

- Problèmes des XXe et XXIe siècles.

Au XXe siècle, le monde connut une période de libre-échange débridé jusqu’à la crise de 1929. Devant la catastrophe, les états sortirent de la crise au moins partiellement grâce à des mesures protectionnistes. Certains économistes libre-échangistes ont accusé le protectionnisme d’avoir été la cause de la guerre, alors que le protectionnisme était seulement une réponse à la crise de 1929. Dans tous les pays industriels, le chômage avait diminué à la veille de la guerre.

 

Après la seconde guerre mondiale, il y eut une période protectionniste. Les Etats-Unis étaient devenus la principale puissance économique du monde et selon la prédiction d’Ulysses Grant, ils devinrent libre-échangistes[9]. A leur initiative, le GATT (signé le 30 octobre 1947 par 23 pays)[11] fut créé dont le but était la baisse des tarifs douaniers dans le monde. Cette entreprise mit un certain temps. La Communauté européenne à sa création pratiquait la préférence communautaire, tandis que les dragons asiatiques se développaient à l’abri de barrières douanières. En 1995, le GATT se transformait en OMC[12] et le monde entier s’est mis à l’heure du libre-échange.

 

  • Dans les pays occidentaux, le libre-échange entraîne les délocalisations vers les pays à bas salaires, dans les pays du Sud la destruction de l’agriculture locale par la concurrence des de l’agriculture mécanisée et subventionnée du Nord.

 

  • Le protectionnisme a mauvaise presse, il est accusé de protéger des activités non rentables, donc ringard. D’après certains économistes d’Attac, ce serait une réaction égoïste des pays industrialisés voulant conserver des situations acquises et empêcher le développement du tiers monde[13]. Pourtant les ouvriers occidentaux voient leurs emplois détruits par la concurrence des ouvriers du tiers monde dont les salaires sont 20 fois plus faibles pour la Chine. Ce pays ne ferait-il pas mieux de développer le niveau de vie de son peuple au lieu de se faire un avantage de ses faibles salaires ?

 

  • Des économistes comme Jacques Sapir et Maurice Lauré ont inventé la notion de protectionnisme altruiste et écologiste[14]. Pour répondre à l’accusation de xénophobie, ils proposent d’appliquer des droits de douane proportionnels à la différence des salaires du pays importateur et les salaires du pays exportateur. Ces droits de douane modulés par une taxe écologique seraient reversés au pays exportateur, afin qu’il améliore les droits sociaux de ses salariés et prenne en compte les contraintes écologique dans la production. Rappelons que le protectionnisme n’est pas l’autarcie.

 

 

---------------------------------------------------

 

 

- Pour les présidentielles de 2022 (comme pour celles de 2017) la France insoumise propose l'instauration d'un protectionnisme solidaire dans son programme l'Avenir en commun[15]

En partant du constat :

Instaurer un protectionnisme écologique et solidaire pour produire en France et assurer notre indépendance
  • des droits sociaux soumis au chantage permanent du dumping ;
  • un bilan écologique désastreux ;
  • une industrie dévastée ;
  • une agriculture désorganisée ;
  • des régions entières condamnées... 

le grand déménagement du monde doit cesser.

 

La France ne doit pas dépendre d’autres États pour ses productions essentielles : lorsqu’une crise éclate, il est déjà trop tard pour relocaliser la production. 
 

Le protectionnisme que nous souhaitons mettre en place n'est pas le même que celui prôné par l'extrême droite, nous souhaitons un protectionnisme solidaire, c'est à dire un protectionnisme écologique et social :

- Mesure clé : relocaliser d’urgence les productions essentielles à la vie de notre pays ;

 

- Pour un protectionnisme écologique, nous voulons mettre en place une taxation écologique aux frontières qui prend en compte les modes de production et de transport. Ainsi, nous taxerons les produits venant de pays éloignés et/ou étant produits avec du charbon par exemple, pour privilégier les circuits courts ;

 

- Pour un protectionnisme social, nous voulons déjà faire l’inventaire et l’évaluation des accords déjà appliqués et souhaitons interdire complètement les produits réalisés dans des conditions inacceptables, issus de l'esclavage comme au Pakistan ou en Inde, du travail d'enfants ou de pays n'ayant aucun droit syndical ;

 

- Nous souhaitons aussi arrêter immédiatement d'appliquer la directive des travailleurs détachés, en étendant les cotisations et le salaire sur le droit français. Aussi, nous voulons réaliser une taxation sociale aux frontières sur la base du droit social du pays exportateur, concernant le salaire minimum ou le droit à la retraite en l'absence d'accord entre le pays et la France ;

 

- Et aller plus loin : nous voulons réviser le Code des marchés publics pour favoriser les entreprises sociales et solidaires, écologiques et locales...

 

 

- Clémence Guetté vous présente chaque semaine une des mesures de notre programme " L'Avenir en commun " pour les élections présidentielles de 2022.

Cette semaine : Le protectionnisme solidaire ⤵️

 

Notes

[1] Mercantilisme

[2] Georges Weulersse. La physiocratie à l’aube de la Révolution, 1781 - 1792, p. 264.

[3] David Ricardo, né le 18 avril 1772 à Londres et mort le 11 septembre 1823 à Gatcombe Park, est un économiste et philosophe britannique, également agent de change et député.

[4] Paul Bairoch. Victoires et déboires. Histoire économique et sociale du monde du XVIe siècle à nos jours, t. 2, pp. 279-284.

[5] Par la clause de la nation la plus favorisée, on entend le principe que tout avantage qu’un pays accorde à n’importe quel autre pays doit être automatiquement accordé aussi au pays avec lequel on a signé une telle clause : si la France est liée à la Suisse par un traité comportant la clause de la nation la plus favorisée, et si elle réduit ses droits de douane sur le fromage hollandais, elle est tenue d’accorder les mêmes tarifs au fromage suisse (Traité Cobden-Chevalier)

[6] C’est à cette époque qu’il y eut une sophistication des tarifs. L’un dit autonome ou statutaire est un tarif établi et modifié par des lois, le second type est qualifié de conventionnel, c’est à dire qu’il peut être modifié ou établi avec d’autres pays (11 janvier 1892 : Méline fait voter la loi protectionniste du double tarif).

[7] idem, pp. 291-300.

[8] Paul, Bairoch. Mythes et paradoxes de l’histoire économique, pp. 233-234.

[9] Ulysses Grant, président des États-Unis de 1868 à 1876

[10] Ha-Joon Chang : « L’amnésie des économistes libéraux » in Manière de voir, Janvier-Février 2007, pp. 15-18.

[11] Le GATT est l'acronyme de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, conclu en 1947 et en vigueur jusqu'en 1994.

[12] Organisation mondiale du commerce

[13] Thomas Coutrot. Quelles alternatives au libre-échange ? Quelques éléments pour lancer un débat. Février 2006. par Christian Schneider

[14] Jacques Sapir : "Il faut accepter des formes de protectionnisme au sein de l'Europe"

[15] L'Avenir en commun

 

Pour en savoir plus :

Jean-Luc Mélenchon : “La lutte contre la délocalisation passe par du protectionnisme sélectif et solidaire”

- Pour en savoir plus : Le #20 des « Livrets de la France insoumise » aborde le thème du commerce et de l’industrie.

 

 

Et pour ceux qui veulent en savoir encore plus :

livret thématique produire en France
  • Le #20 des « Livrets de la France insoumise » de l'Avenir en commun version 2017 aborde le thème du commerce et de l’industrie.
  • Il a été préparé par un groupe de travail animé par Jean-Charles Hourcade, ancien directeur générale du fonds France Brevet et membre de l’Académie des technologies, et Antoine Pyra, socio-écononomiste.
Partager cet article
Repost0
16 février 2021 2 16 /02 /février /2021 11:41
On en parle : partage de la valeur ajoutée entre salaires et profits
On en parle : partage de la valeur ajoutée entre salaires et profits

Où sont passés les salariés dans la répartition des richesses créées ?

Ce n'est pas le coût du travail qui est un problème mais celui du capital[4] !

Comment la baisse tendancielle du taux de profit explique le capitalisme d'aujourd'hui[5]

 

La création de richesses brutes d’une entreprise est appelée la valeur ajoutée (VA). Cette richesse créée est répartie sous trois formes : salaires pour les travailleurs, profits et dividendes pour les propriétaires du capital, et enfin l’impôt, prélevé par l’État. La lutte syndicale dans l’entreprise se cristallise autour de la question de partage de la valeur ajoutée entre le capital et le travail, c’est à dire autour de la répartition de la richesse créée à l’entreprise : salaire ou dividende ?

 

Sources : CGT - CGT Métallurgie - Regards.fr | mis à jour le 14/10/2022

- La part des salaires dans la Valeur ajoutée
Ces dernières années, la part du total des salaires dans le total de la valeur ajoutée, au niveau macroéconomique, a beaucoup évolué. Cette part salariale est restée stable dans les années 1960, et jusqu’à la crise du milieu des années 1970 qui la fait brusquement augmenter. Puis intervient au début des années 1980 un retournement de tendance qui conduit à une baisse régulière puis à une relative stabilisation à un niveau historiquement très bas. Le partage de la valeur ajoutée devient plus favorable au capital à partir des années 2000, cette situation s’explique par la transformation du rapport de forces entre classes sociales à cette période et la financiarisation de notre économie.


Ainsi, la part des salaires dans la valeur ajoutée des entreprises est de 65,8 % en 2006 contre 74,2 % en 1982, soit un recul de 8,4 points. Selon la Commission européenne, la part des salaires dans l’ensemble de l’économie est passée de 66,5 % en 1982 à 57,2 % en 2006, soit une baisse de 9,3 points.

 

 

- La part des dividendes a beaucoup augmenté

Elle est passée de 4,6 % en 1998 à 9,5 % en 2013, soit un doublement en quinze ans. Cette augmentation s’est faite dans un premier temps au détriment des salariés. Entre 1998 et 2008, la baisse de la part de la rémunération des salariés (-5,9 points de pourcentage) est venue compenser l’augmentation des dividendes (+4,7 points de pourcentage).

 

Depuis la crise financière e 2008, la part des salaires dans la valeur ajoutée est remontée à 59% (+6 points). Pas parce que les salaires ont beaucoup augmenté mais parce que la valeur créée par l’entreprise était plus faible du fait de la crise, et que la part des salaires restant stable, relativement son poids a été plus élevée. Ceci s’explique clairement par les effets de la conjoncture économique : en général, lors d’une récession, les profits (- 10,2 % en 2009) baissent plus que les salaires (- 1,2 %).

 

 

- Une situation contrastée
Néanmoins, la situation n’est pas la même pour tous. Entre 1996-2006, on constate une envolée des très hauts salaires en France, les 0,1 % les mieux rémunérés avaient vu leur salaire mensuel brut progresser (inflation déduite) de 19 374 à 24 000 euros, un gain de 28 % soit 5 426 euros. Pour la plupart des 60 % des salariés les moins bien payés, le gain n’avait pas dépassé les 130 euros. Par ailleurs, entre 2009 et 2014, les dividendes ont augmenté de 58% et les grandes entreprises françaises se sont fortement financées auprès des marchés financiers, par le biais d’émissions d’actions. En conséquence, elles ont consacré jusqu’à la crise de 2008 une part croissante de leurs profits à rémunérer leurs actionnaires sous forme de dividendes ; et ce, au détriment de l’investissement et de l’emploi.


Pour l'année 2018 par exemple, les entreprises du CAC 40 ont gâté leurs actionnaires. Elles ont versé 46,8 milliards d’euros de dividendes, soit 48% de leurs résultats sur l’exercice écoulé. Ce chiffre est supérieur à celui de 2017 (45,1 milliards).

 

 

- Quelle est la tendance en Europe ?
D’après une estimation de la Confédération européenne des syndicats (CES), si la part des salaires dans le PIB de l’Union européenne était restée identique à ce qu’elle était au début des années 90, les salariés auraient gagné, en moyenne, 1764 € de plus en 2017. De fait, la part des salaires dans le PIB est en déclin dans tous les pays de l’UE depuis le milieu des années 1970. Les salaires comptaient pour 72 % du produit intérieur brut en 1975, leur part est tombée à moins de 63 % en 2017.
Le travail est à l’origine de la création des richesses. C’est un formidable atout pour l’économie française. Les salaires et les cotisations sociales sont primordiaux pour vivre, se soigner, bien vieillir.
Chaque augmentation de salaires gagnée améliore l’économie du pays et la pérennité de la sécurité sociale.

 

 

- Une autre vue qui représente les dividendes versés dans les entreprises en jours de travail de 1981 à 2012

En un seul coup d’œil, la dégradation produite par trente années de contre-réformes libérales se révèle dans sa brutalité : en 1981, les dividendes versés aux actionnaires représentaient 10 jours de travail par salarié dans les sociétés non financières, en 2012, ils en représentent 45 jours. Dit autrement, un salarié travaille 45 jours par an, soit 9 semaines, uniquement pour payer les dividendes des actionnaires[2].

 

Les modifications dans la répartition capital/travail sont observées depuis bien longtemps. Ainsi des études[3] sur la part des salaires dans la valeur ajoutée montrent une forte diminution de ceux-ci aux profits de la rémunération du capital. On sait aussi que la part des dividendes versés aux actionnaires est passée de 4% de la masse salariale en 1980 à 13% aujourd’hui (en 2012). Dans un livre très remarqué, Le capital au XXIème siècle, Thomas Piketty présente la dynamique de la répartition des revenus et des patrimoines depuis le XVIIIème siècle et démontre que le capitalisme contemporain est un capitalisme de rentiers.

 

La force du graphique produit par la CGT est sans doute de rendre cette réalité accessible à tous.

 

 

- Et les insoumis, ils en disent quoi ?
Ce n’est pas le coût du travail qui pose problème, mais le coût du capital ! 

Depuis 2009, les dividendes des actionnaires du #CAC40 ont augmenté trois fois plus vite que les salaires des employés. Ce n’est pas le coût du travail qui pose problème, mais le coût du capital[1] !

 

 

 

Le 7 mars 2018, Adrien Quatennens, député France insoumise, était l'invité de David Pujadas sur LCI. Au programme : "super riche, super profit : chance ou scandale ?"

 

- " Jour du dépassement capitaliste : à partir de ce 22 septembre 2022, vous travaillez pour... les actionnaires " titrait Marianne[6]

Comme tous les ans, le 22 septembre marque l’anniversaire de la proclamation, en 1792, de la République. Elle n’est alors pas encore « sociale », mais la Fraternité s’apprête à rejoindre l’Égalité et la Liberté dans la trinité républicaine.
Ironie du calendrier, cette année, la date coïncide avec le jour du dépassement capitaliste pour les salariés.

  • À partir de ce jour d’équinoxe, les salariés des multinationales françaises bosseront uniquement pour rémunérer les actionnaires des sociétés du CAC 40.
  • En dix ans, ils ont capté 45 jours supplémentaires... En détail ci-dessous...

 

"Jour du dépassement" capitaliste : à partir de ce 22 septembre, vous travaillez pour... les actionnaires


 

Partager cet article
Repost0
19 décembre 2020 6 19 /12 /décembre /2020 15:19
On en parle : annulation dette publique, inflation, échelle mobile des salaires...
On en parle : annulation dette publique, inflation, échelle mobile des salaires...
On en parle : annulation dette publique, inflation, échelle mobile des salaires...
On en parle : annulation dette publique, inflation, échelle mobile des salaires...

Coronavirus : E. Macron appelle à « annuler » les dettes des pays africains[1]...

 

...et en France, J.L. Mélenchon est le seul à vouloir abattre le mur de la dette, notamment pour financer la bifurcation écologique[5]et [5bis]...

 

ainsi, l'argument de l'impossibilité ne tient pas, Macron le proposant pour l'Afrique... !

 

 

En Préambule... (Extrait de " Pourquoi et comment annuler la dette des États européens ? "[4])

Peu de gens le savent parce qu’ils n’en entendent jamais parler. Mais la dette publique des États est moins importante que la dette privée. Cela se vérifie dans chaque pays, dans l’Union européenne et d’une façon générale dans le monde. Cette dette est évidemment la plus incertaine car les débiteurs peuvent disparaitre d’un jour sur l’autre par la faillite ou la mort. D’énormes secteurs de dettes privées sont ainsi à la merci de n’importe quel évènement privé parfois minuscule. Ce fut le cas des dettes immobilières en subprime aux États-Unis : un divorce raté de trop ruina d’un coup de longues chaînes de gens, par centaines de milliards comme par un effet de boule de neige. Idem pour la dette des étudiants qui reste une bombe à retardement aux USA.

 

Pourtant, c’est à l’État que les libéraux font leur reproche. Les arguments pleuvent. Les libéraux reprochent par exemple à la dette des États de peser sur le marché financier et de faire monter les taux pour l’emprunt et l’investissement privé. Ils lui reprochent de générer des remboursements qui créent des impôts, ce qu’ils ont en horreur. En effet ils pensent que l’argent privé doit rester dans les mains des « investisseurs » privés, plutôt qu’en impôts utilisés par l’État. Pour eux l’argent est toujours mieux utilisé et placé par le privé et plus efficacement que par le public. Pour finir, ils répandent le bruit, rabâché sur les plateaux de télé, qu’à partir d’un certain niveau, la dette publique étouffe l’économie. Par exemple on entend dire régulièrement qu’au-delà de 100% de dette par rapport à la richesse produite pendant un an (PIB) par le pays c’est la catastrophe (Mauvaise plaisanterie[3] ). Cela n’a jamais été prouvé. Mais par contre on connaît au moins un pays endetté à plus de 200 % et qui n’en est pourtant loin d’en être mort : le Japon[2].

 

 

Sources : Eric DURAND | mis à jour le 25/09/2022

- On nous dit : en 2017, Jean-Luc Mélenchon faisait le pari de l'inflation
" Les dangers de l'inflation "... c'est, en effet, quand nous débattons de " la dette " et des propositions de J.L. Melenchon en la matière, l'un des arguments que l'on nous ressort régulièrement.

 

Alors, oui, en 2017, il souhaitait que la Banque centrale européenne rachète toutes les dettes souveraines afin que les États «puissent à nouveau respirer ». Quitte à ce qu'il y ait de l'inflation ce « qui nous permettra d'une part de dévaloriser la capital dû et de permettre à tous les pays de retrouver de la respiration pour repartir de l'avant[6». Plus d'un an auparavant, en avril 2013, Jean-Luc Mélenchon avait défendu exactement la même position, dans l'émission " Des paroles et des actes sur France 2, face à l'économiste Jacques Attali ".

 

Or, la position de Jean-Luc Mélenchon risquait d'engendrer une hyperinflation (une hausse extrêmement rapide des prix) qui toucherait le pouvoir d'achat des plus modestes. Le rachat de la totalité des dettes souveraines pouvant se traduire par une inflation largement supérieure à 4 à 5 points.

 

Mais en France, face à ce risque, nous n'étions pas sans arme :

  • d'un côté nos concitoyens vivant d'allocations et autres aides, auraient bénéficié d'une revalorisation systématique ;
  • et pour les salariés,  le blocage des prix[6bis] et l'instauration ou la négociation d'une échelle mobile des salaires avec les organisations syndicales aurait permis d'y faire face

 

 

- En 2022, pour Jean-Luc Melenchon : coronavirus oblige, « Il faut annuler la dette »

Comment annuler la dette pour redémarrer l’économie : " Plutôt que de racheter aux banques privées des titres de dettes des États , la BCE les achèterait directement aux États. Elle les stockerait en dette perpétuelle à intérêt négatif[7] (c’est le cas des emprunts de long terme aujourd’hui). Les États retrouveraient leur capacité de financement pour de nouveaux emprunts et l’ancienne dette fondrait petit à petit, au fil de l’inflation dans les coffres de la Banque Centrale Européenne. Et ne serait jamais payée. Car bien sûr ces dettes ne seront jamais payées " déclare J.L. Melenchon le 15 décembre 2020[8].

 

  • Décryptage de la solution Melenchon (par Antoine Léaument pour LE BON SENS)
    • Pour faire face à la crise économique provoquée par la crise sanitaire du coronavirus, le gouvernement a décidé de creuser la dette, pour ultérieurement tenter de faire payer toute ou partie de la facture au peuple par une austérité renforcée et une baisse des dépenses publiques. Celle-ci va maintenant dépasser les... 115% du PIB selon le discours libéral (en réalité TAUX D'ENDETTEMENT de la France en 2020 : 👉 14,5 % du Pib annuel ! EXPLICATIONS 👉 [3]).
    • En tout état de cause, elle est devenue impayable, sauf à vouloir y consacrer tous les moyens de l'État pendant les cent prochaines années ce qui est impensable alors qu'il nous faut engager au plus vite la transition écologique et développer de nouveau nos services publics. C'est pourquoi Jean-Luc Mélenchon propose de l'annuler. EXPLICATIONS 👉 [9].

 

 

- Revenons à l’échelle mobile des salaires : " une revendication oubliée " selon Albert Ricchi[10]

En bref : L'échelle mobile des salaires consiste à augmenter les salaires en fonction de l'augmentation des prix afin de conserver le pouvoir d'achat des salariés face à l'inflation[11].

 

➡️ Explication...

Si ne pas être au chômage constitue une chance pour beaucoup, travailler donne de moins en moins la possibilité de vivre décemment, en particulier pour les salariés les moins qualifiés, en CDD, contrats d’intérim, CNE, travail à temps partiel subi, etc.

 

➡️ Aujourd’hui :

  • la France compte plus de 7 millions de pauvres (10 millions en 2020[12]), au sens des critères retenus par l’union européenne - 60% du revenu médian, soit environ 780 € par mois - et 2 540 000 personnes sont payées au SMIC[13] ;
  • 30 % des salariés à temps plein (hors intérim) touchent un salaire inférieur à 1,3 SMIC (moins de 1 630 € bruts par mois[13]). Moins mal lotis, mais loin d’être aisés, près de la moitié de l’ensemble des salariés, soit 8,5 millions de personnes, touchent entre 1,3 et 2 fois le SMIC (soit entre 1 630 € et 2 500 € bruts par mois)[13] ;

 

 

🔴   Depuis la suppression de l’échelle mobile des salaires au début des années 80, le niveau réel des salaires baisse régulièrement.

Un tel dispositif indexant les salaires sur l’indice des prix et visant à maintenir le pouvoir d’achat des salariés était une vieille revendication du mouvement syndical mais elle ne semble plus aujourd’hui d’actualité, ni pour les organisations syndicales, ni pour les partis politiques...

 

Chaque année, c’est à peu près le même scénario qui se produit :

  • les pouvoirs publics et le patronat proposent, dans les secteurs public et privé, un pourcentage d’augmentation des salaires inférieur à l’indice des prix ;
  • les organisations syndicales soumettant, quant à elles, un pourcentage supérieur.

 

Puis, dans un second temps, souvent après quelques manifestations ou grèves, les pouvoirs publics et le patronat, faisant mine de reculer, proposent un pourcentage d’augmentation supérieur à celui proposé initialement mais cependant toujours inférieur à l’inflation ! Ce scénario se reproduit ainsi, cahin-caha, depuis le début des années 80, alors que la protection du pouvoir d’achat des salariés devrait dépendre d’un mécanisme précis, s’appliquant de façon automatique chaque année, au même titre que l’indexation de certains avantages sociaux ou prestations familiales.

 

C’est le 13 juin 1982, sous la présidence de François Mitterrand, que la gauche a opéré un tournant historique [Jacques Delors (PS) était ministre des Finances, dans le deuxième gouvernement de Pierre Mauroy (PS)][14]. Voulant lutter contre l’inflation, le blocage des salaires et des prix fut imposé de juin à novembre. Ainsi, dans la fonction publique, l’Etat bloqua les salaires qui avaient suivi l’évolution des prix les années précédentes. Il incita ensuite les employeurs du secteur privé à faire de même, en les invitant à faire évoluer les salaires en fonction non de la hausse réelle des prix, mais du taux d’inflation " prévu " par le gouvernement.

Pour avoir accès à l'original, cliquer sur l'image
  • Les clauses d’indexation des salaires sur les prix furent une à une retirées des conventions collectives dans les années qui suivirent. Elles étaient de fait considérées comme illégales depuis une ordonnance d’Antoine Pinay en 1959, mais après mai 1968, elles réapparaissaient dans certaines conventions ;
  • Puis les lois Auroux ont réaffirmé leur interdiction dans le Code du travail, article L.141-9 : " Sont interdites, dans les conventions ou accords collectifs de travail, les clauses comportant des indexations sur le salaire minimum de croissance ou des références à ce dernier en vue de la fixation et de la révision des salaires prévus par ces conventions ou accords. " ;
  • En 1983, Jacques Delors, ministre de l’Economie et des Finances, décida de deux plans d’austérité[15] et le pouvoir d’achat des salariés commença à diminuer régulièrement, l’échelle mobile des salaires ayant été supprimée sans pour autant que le chômage diminue.
  • Enfin, la réforme des 35 heures, (mesure mise en place par le gouvernement Lionel Jospin à partir de l’année 2000 et obligatoire pour toutes les entreprises à compter du 1er janvier 2002, par deux lois votées en 1998 et 2000), a eu, de part ses modalités de mise en œuvre, contestées par la CGT pour conséquences de brider le pouvoir d'achat des milieux les plus populaires et d'entraîner une « smicardisation » de nombres de salariés (notamment dans la masse des entreprises ou ils ne sont pas syndicalement organisés, voire dans un syndicat de collaboration de classe) car la loi n'avait pas tranché cette question de la compensation salariale, renvoyant le sujet à la négociation[15bis].

 

➡️ Aujourd’hui

Outre la revalorisation annuelle du SMIC[16]), les salaires évoluent en pratique :

  • soit à l’occasion d’une négociation individuelle entre l’employeur et le salarié ;
  • soit au cours de négociations conclues entre les partenaires sociaux.

 

Lorsqu’un accord est conclu, un avenant s’ajoute à la convention collective et s’applique à tous les employeurs concernés, après parution d’un arrêté ministériel. Des accords peuvent également être prévus dans le cadre de l’entreprise. Ils se superposent alors aux conventions collectives, ce qui signifie qu’ils ne peuvent en aucun cas prévoir des salaires inférieurs à ceux déjà fixés par la convention collective.

 

Si les salaires les plus bas sont automatiquement réévalués en fonction du SMIC, ces augmentations n’entraînent pas, par contre, la réévaluation des salaires supérieurs à cette rémunération minimale. En effet, la loi interdit la réévaluation automatique des salaires en fonction du SMIC ou de tout autre indice. Cette pratique, renouvelée chaque année, tasse de plus en plus les grilles hiérarchiques vers le bas...

 

Mais la situation des salariés est aussi aggravée par un indice officiel des prix à la consommation qui ne reflète pas la réalité.

- Aujourd’hui, en vue des négociations salariales 2007, les directions d’entreprise s’appuient sur le chiffre officiel de l’inflation, environ 1,5%, pour négocier comme d’habitude a minima. En réalité, la hausse des loyers autorisée par le tout nouvel indice de référence des loyers (IRL) est de 3,19% et l’augmentation des prix des produits alimentaires se situe entre 1,7% et plus de 3,6%[13] !

- En fait, même si les prix des produits manufacturés restent maîtrisés (diminution de 0,10%), la mesure de l’inflation ne concerne que les prix à la consommation. Cet indice ne dit donc rien, par exemple, de la fiscalité, et gageons qu’entre impôts directs et indirects, la fiscalité augmentera de plus de 1,5%[13] !

- Enfin, même pour la consommation, quand un nouveau produit est mis en vente, l’augmentation de prix par rapport au produit ancien n’est pas intégré dans l’indice.

- L’indice des prix calculé par l’INSEE est d’autant plus fantaisiste qu’il n’a jamais intégré l’augmentation des prix camouflée par les « arrondis » opérés nettement à la hausse après le passage à l’euro et par un blocage ou une diminution de salaires liés au passage aux 35 heures dans la plupart des entreprises.

 

➡️  En ayant négligé le problème de la défense du pouvoir d’achat, tous les gouvernements successifs, depuis 1983, ont une lourde part de responsabilité dans les difficultés que rencontrent aujourd’hui des millions de personnes...

 

➡️   Afin d’enrayer l’érosion continue du pouvoir d’achat des salariés, il est donc urgent de réintroduire un système d’indexation des salaires à l’indice des prix, car l’inflation, même si elle est plus faible aujourd’hui que dans les années 80, touche en priorité les salariés et les couches sociales les plus fragiles.

 

 

- Echelle mobile des salaires, nous ne partons pas de rien

undefined
Pour accéder au projet de loi législatif, cliquer sur l'image

Retrouvez le projet de Loi déposé par les députés communistes à l'Assemblée Nationale le 26 juin 2013

 

" Mesdames, Messieurs,

L’échelle mobile des salaires consiste à augmenter les salaires en fonction de l’augmentation des prix afin de conserver le pouvoir d’achat des salariés face à l’inflation.

 

Cette mesure de bon sens a été introduite en France en juillet 1952 sous la présidence de Vincent Auriol, par le Gouvernement Pinay.

 

Elle a malheureusement été supprimée en 1982 par Jacques Delors et Pierre Mauroy, qui marquait le début du tournant libéral de la rigueur et de la construction européenne.... "

 

Pour lire la suite, cliquez sur l'image 👉 

 

Notes :

[1] Coronavirus : Emmanuel Macron appelle à son tour à «annuler» les dettes des pays africains !

[2] L'endettement à 250 %, souci mineur du Japon

[3] 2020 : La dette à nouveau agitée pour que le peuple ait peur et se taise...

[4] Pourquoi et comment annuler la dette des États européens ?

[5En France, J.L. Mélenchon est le seul à vouloir abattre le mur de la dette, notamment pour financer la bifurcation écologique

[5bisComment annuler la dette pour redémarrer l’économie

[6] 2017 : Dette publique Jean-Luc Mélenchon faisait le pari de l'inflation

[6bis] Jean-Luc Mélenchon : LE BLOCAGE DES PRIX C’EST POSSIBLE TOUT DE SUITE !

[7] Coronavirus : J.L. Melenchon, transformer la dette,... en dette perpétuelle...

[8] Ce n'est pas à la jeune génération de payer la dette. Il faut mettre un terme à cette comédie ! Il faut annuler la dette publique détenue par la BCE.

[9Décryptage de la solution Melenchon (par Antoine Léaument pour LE BON SENS)

[10] L’échelle mobile des salaires : une revendication oubliée par Albert Ricchi 

[11] Échelle mobile des salaires

[12] PLUS DE 10 MILLIONS DE PAUVRES EN FRANCE EN 2020 : LES PRÉVISIONS ALARMANTES DU SECOURS CATHOLIQUE

[13] Chiffres 2007

[14] 13 juin 1982 : le blocage des prix et des salaires

[15] Tournant de la rigueur

[15bis] « Bosser moins, mais tous et mieux ! » : les 35 heures ont 20 ans

[16] Salaire minimum interprofessionnel de croissance

 

Pour en savoir plus :

- « Echelle mobile » ou « indexation » des salaires en France ? [article]

- Il faut envisager la dette de l’État comme un outil au service d’une politique d’investissement public ambitieuse, estime l’économiste Eric Berr

- Pour l’après-Covid, plus de 100 économistes demandent à la BCE d’annuler les dettes publique

- Mélenchon : " Mes solutions pour nous libérer d'un futur enchainé au remboursement sans fin de la dette "

- 150 économistes proposent comme Mélenchon l’annulation de la dette détenue par la BCE

ANNULATION DE LA DETTE ÉTUDIANTE AUX ÉTATS-UNIS : LA FIN D’UN TOTEM NÉOLIBÉRAL

- Europe : 18 ans après le « non » au TCE, l’annulation des dettes publiques, une priorité politique absolue

 

Partager cet article
Repost0
29 octobre 2020 4 29 /10 /octobre /2020 14:29
Vous avez dit “ islamo-gauchisme " ?... et si nous parlions de l'islamo-capitalisme !
Vous avez dit “ islamo-gauchisme " ?... et si nous parlions de l'islamo-capitalisme !
Vous avez dit “ islamo-gauchisme " ?... et si nous parlions de l'islamo-capitalisme !
Vous avez dit “ islamo-gauchisme " ?... et si nous parlions de l'islamo-capitalisme !
Vous avez dit “ islamo-gauchisme " ?... et si nous parlions de l'islamo-capitalisme !
  • Le concept d’islamo-gauchisme est « un épouvantail créé pour unir ceux et celles qui veulent stigmatiser les musulmans, s’opposer à la gauche sociale, délégitimer les sciences sociales[6] » et servir un tête à tête lREM/RN en 2022 ;
  • Alors que... la France est « complice » de la crise humanitaire au Yémen en armant les pays islamistes[1bis] ;
  • ... Et que pour le CNRS, l’« islamogauchisme » n’est pas une réalité scientifique[1ter]

 

L’assassinat de Samuel Paty, les victimes de l'attentat de Nice par des terroristes islamistes nous a tous bouleversés, profondément, intimement, dans notre chair. 

La lutte contre le terrorisme est une chose sérieuse : elle appelle à des débats sur les moyens humains et techniques du renseignement, la capacité de la police et de la Justice à remplir effectivement leurs missions, la politique étrangère et les alliances militaires de la France, etc. Elle demande aussi à une réflexion plus globale sur les manquements de notre République et le terreau qui permet aux fondamentalistes de “recruter” : la misère, la relégation, les inégalités, les discriminations, exacerbées par des décennies de politiques néolibérales. 

Mais rien de tout ça n’a été discuté. A la place, nous avons eu droit à des débats nauséabonds imposés par les droites et appuyés par les médias qui ne peuvent rester sans réponse. 

En commençant par répondre aux attaques en “ islamo-gauchisme[6] ” portées contre la France insoumise, coordonnées directement par l’Elysée et relayées par une extrême-droite qui n’en demandait pas tant. Que veut dire ce terme ? Personne ne le saura. Que reproche-t-on aux insoumis ? Personne ne nous le dira. Le but est de salir, d’insinuer un doute, pour intimider et empêcher toute critique des discours et des politiques du gouvernement (Manon Aubry, députée européenne France insoumise).

C'est pourquoi, moi, je vais vous parler de l'islamo-capitalisme, vous savez ce que c'est ? " C'est faire du business avec des monarchies réactionnaires, qui fouettent les opposants (Alexis Corbière député France insoumise) " !

 

Sources : Manon Aubry - Alexis Corbière | mis à jour le 23/12/2021

-Le point sur les échanges de la France avec les pays islamistes

  • Koweït[1] :
    • La France compte une vingtaine d’entreprises implantées au Koweït, telles que : Accor, Air Liquide, BNP Paribas, Bureau Veritas, CMA CGM, DCI, Egis, Eiffage, Engie, Ipsos, Saint-Gobain, Schneider Electric, Thalès, TechnipFMC, Veolia. Par ailleurs, plus de 50 autres entreprises françaises sont présentes au travers d’accords de franchise, parmi lesquelles Carrefour, Dior, Lactalis, L'Oréal, LVMH, Michelin, PSA, Renault.
    • En 2019, l'excédent commercial de la France avec le Koweït triple et s'établit à 312 M€, le 31ème à l'échelle mondiale, le Koweït gagnant 30 places par rapport à 2018. L'émirat koweïtien est notre 74ème partenaire commercial et demeure notre 4ème partenaire au sein de la péninsule arabique.

 

  • Qatar[2] :
    • A ce jour, plus de 120 implantations françaises sont recensées au Qatar (majoritairement des grands groupes, mais les PME/ETI se font plus nombreuses) ainsi qu’environ 80 franchises.
    • Les entreprises françaises affichent une forte présence au Qatar. Selon les données de la Banque de France, le stock d’IDE français au Qatar a été multiplié par trois depuis 2008, pour atteindre 2,7 Mds EUR en 2018 (0,2% du stock d’investissements français à l’étranger). Mesurés en flux, nos investissements directs au Qatar, négatifs en 2017 (dans un contexte de prix bas des hydrocarbures et de ralentissement économique), sont de nouveau positifs en 2018 à 1 Md EUR. Ces investissements sont principalement dirigés vers l’industrie pétro-gazière, l’industrie manufacturière et les services financiers.
    • En 2019, les échanges de biens entre la France et le Qatar ont poursuivi leur expansion et se sont élevés à 4,5 Mds EUR, en hausse de 28% par rapport à 2018. Notre solde vers le Qatar est largement excédentaire (3,2 Mds EUR en 2019), en progression de 24% par rapport à l’année 2018. Le Qatar constitue ainsi le 6ème excédent commercial de la France en 2019, devant les Emirats Arabes Unis.

 

  • Arabie saoudite[3] :
    • Délégation d’entreprises menée par MEDEF International en Arabie saoudite (27-29 janvier 2020) : l'importante délégation d’entreprises françaises menée par le MEDEF International en Arabie saoudite du 27 au 29 janvier 2020 a pu recueillir de nombreuses informations sur les opportunités qu’offre le marché saoudien, notamment liées aux grands projets, et sur la meilleure manière d’aborder ce marché. Elle a permis aussi aux sociétés participantes de nouer des contacts avec des décideurs publics et privés de haut niveau.
    • La France est toujours l'un des plus gros fournisseurs d'armes de l'Arabie Saoudite[9] [1bis].

 

  • Émirats arabes unis[4] :
    • Malgré une légère baisse des échanges bilatéraux en 2017, les EAU demeurent le deuxième partenaire commercial de la France dans le Golfe.
      Le volume des échanges commerciaux bilatéraux s’est établi à 4,5 Mds € en 2017, en repli de 3,3 % par rapport à l’exercice précédent. Ces chiffres placent la Fédération au 2ème rang de nos partenaires commerciaux au sein du Conseil de coopération des Etats arabes du Golfe (CCEAG), derrière l’Arabie Saoudite (8,6 Mds €).
    • Une présence économique forte et diversifiée[5]Les EAU accueillent le plus grand nombre d’implantations françaises au Moyen-Orient avec plus de 600 filiales employant environ de 30 000 collaborateurs (parmi lesquels près de 200 Volontaires Internationaux en Entreprise), dont la plupart relèvent de grands groupes du CAC 40 (qui implantent leur siège régional à Dubaï, notamment dans des zones franches) mais aussi de nombreuses ETI et PME. 
    • Décembre 2021, achat de 80 avions de chasse Rafale, de 12 hélicoptères Caracal et d'armements au fabriquant de missiles MBDA pour un montant total de 17 milliards d’euros, dont 14 pour les seuls Rafales selon l'Elysée [5bis].

 

  • Egypte[7] :
    • Les échanges commerciaux entre la France et l'Egypte ont atteint en 2019 leur plus haut niveau historique depuis 2012 à 3 mds€.
    • Notre excédent commercial avec l'Egypte est en forte progression (+68%) à 1,6 md€ en 2019 après une forte contraction en 2018 (937 M€).
    • Avec environ 160 filiales qui emploient directement plus de 50 000 personnes pour un chiffre d’affaires supérieur à 5 Mds €, les entreprises françaises ont su s’inscrire durablement dans le paysage économique égyptien avec une présence diversifiée :

- Construction & Industrie : Air Liquide, Vinci, Bouygues, Saint Gobain, Total, Arkema, Vicat, Lafarge-Holcim, Consolis etc…
- L’énergie : Groupe Total (Distribution, Total Eren), Engie, Voltalia, EDF EN, etc…
- Eau & Assainissement : Véolia, Suez etc…
- Les transports : Alstom, Colas Rail, ETF, Systra, Poma, Thalès, Valéo, NGE-TSO, etc…
- La production manufacturière d’équipements électriques, électroménager ou automobiles : Schneider Electric, Legrand, Nexans, Groupe Seb, Groupe Atlantic,  etc…
- L’agroalimentaire : Lactalis, Danone, Bel, Savencia, Lesaffre, Soréal, etc…
- L’industrie pharmaceutique et cosmétique : Servier, Ceva, L’Oréal, Sanofi, etc…
- Les services : Orange, Crédit Agricole, Axa, Téléperformance, ATOS, Cegedim, Gide, etc…
- La logistique : CMA-CGM, Bolloré, etc…
- La grande distribution : Carrefour, Décathlon, etc…
- Les franchises : Paul, Brioche Dorée, 5àSec, Fauchon, Yves Rocher, GoSport, Intersport etc…
- Le tourisme : Air France, Groupe Accor, etc…

  • Le principal fournisseur d’armes de l’Égypte... la France !

La France vend à l’Égypte des armes utilisées à des fins de répression interne. Après un premier rapport publié cet été par plusieurs ONG, Amnesty International accuse à son tour Paris de « bafouer le droit international »[8].

 

 

-Et pour ceux qui n'ont pas compris...

La publication d'Eric Zemmour[10] témoigne de l'hypocrisie de l'extrême droite, ça hurle à l'islamisme 24h/24 pour semer la peur, la division dans le pays, mais ça ne voit pas de problème quand on vend des armes (qui pourraient se retourner un jour contre la France) à ceux qui financent les terroristes

 

Bravo à Dassault, Thales et Safran pour la vente de 80 Rafales.

 

 

-L'islamo capitalisme, vous savez ce que c'est ?

Invité d'Audition publique ce 26 octobre 2020, le député La France insoumise Alexis Corbière a répondu aux accusations du ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, selon lequel LFI serait liée à un « islamo-gauchisme ».

Notes :

[1] koweit : Relations bilatérales

[1bis] La France continue d'alimenter en armes le conflit au Yémen

[1terCNRS : L’« islamogauchisme » n’est pas une réalité scientifique

[2] Quatar : Relations bilatérales

[3] Arabie saoudite : Relations bilatérales

[4] Émirats arabes unis : Relations bilatérales

[5] La présence économique française aux Emirats arabes unis

[5bisAchat de matériel de guerre pour un montant total de 17 milliards d’euros.

[6] L’islamo-gauchisme : comment (ne) naît (pas) une idéologie

[7] Egypte : Relations bilatérales

[8] Le principal fournisseur d’armes de l’Égypte ? La France

[9La France est toujours l'un des plus gros fournisseurs d'armes de l'Arabie Saoudite

[10Zemmour/Le Pen : l'extrême droite véritable " roue de secours des puissants "

 

Pour en savoir plus :

- Exportations d'armes : Koweït, Qatar, Emirats, les trois principaux clients de la France en 2017

- Ventes d'armes : Une entente indigne entre la France et les Émirats arabes unis

La France de poursuivre ses livraisons de matériels de guerre aux principaux pays impliqués : l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis.

- Lafarge : financement de terrorisme et complicité de crimes

- Daech en Syrie : c’est un ancien candidat du RN qui négociait avec les terroristes pour le compte du cimentier Lafarge

- En Arabie saoudite, « la flagellation ne disparaît pas du droit »

- Haine anti-musulmans et procès en «islamo-gauchisme»: ça suffit !

- « Islamo-gauchistes » : une chasse aux sorcières médiatique

- Quand Jaurès parlait des " fanatiques de l'Islam "

- Toi qui m'appelles islamo-gauchiste, laisse-moi te dire pourquoi le lâche, c'est toi

- La France insoumise réprouve la visite d’État du maréchal Al-Sissi (Egypte) en France

- Loujain Al-Hathloul, militante des droits humains en Arabie saoudite, condamnée à cinq ans et huit mois de prison 

- Islamo-gauchisme et capitalo-fascisme

- "ISLAMOGAUCHISME" : LE PIÈGE DE L’ALT-RIGHT SE REFERME SUR LA MACRONIE

- “Islamo-gauchisme” : quand la macronie s’inspire du vocabulaire fasciste pour lancer son ultime chasse aux sorcières

- Hervé Kempf ; Islamo-gauchisme et capitalo-fascisme. Il faut cibler les causes du phénomène, à savoir ces alliances coupables et notre dépendance au pétrole qui en est le ressort

- Islamo-gauchisme ou islamo-vallsisme : Lorsque Manuel Valls était Premier ministre, la France a vendu des armes à l’Arabie saoudite.

- « L’islamo-gauchisme est une insulte qui sert à désigner tout ce qu’on n’aime pas, à condition que ce soit de gauche », Eric Fassin

- Ventes d'armes : ce que Macron veut cacher :

rapport parlementaire sur les ventes d’armes françaises

Partager cet article
Repost0
8 octobre 2020 4 08 /10 /octobre /2020 09:41
2020 : La dette à nouveau agitée pour que le peuple ait peur et se taise...
2020 : La dette à nouveau agitée pour que le peuple ait peur et se taise...

STOP à l'enfumage !

👉 La dette atteindra 2 798 Mrd d'€ en 2021 soit 116,2% du PIB.
👉 Du jamais vu depuis la 2iéme guerre mondiale[
1]

...C'EST FAUX !

👉 TAUX D'ENDETTEMENT 2020 de la France 14,5 % du Pib annuel !

 

Sources : Eric DURAND | mis à jour le 25/09/2022

-Les titres provocateurs et des chiffres manipulés pour faire peur !
Les gouvernements se succèdent, la méthode reste la même.
Pour imposer des politiques de rigueur ou d'austérité, justifier la remise en cause des conquis sociaux, la casse des services publics, il faut marteler à coup d'éditoriaux, d'émissions, éminents " spécialistes " (tous issus des mêmes cercles patronaux et de la finance) à l'appui, que les français vivent au dessus de leur moyen..... et pour ça, tout est bon !

 

En deux mots, pour les défenseurs du système et autres experts, on vivrait (enfin le peuple... pas eux !) au dessus de nos moyens et il n'y aurait pas d'argent pour répondre aux attentes sociales (ex : revalorisation du RSA) !

 

 

-A présent, voyons ce qu’il en est de la dette française elle-même en août 2020
1️⃣ Tout d'abord la durée moyenne de la dette à la fin août 2020 est de : 8 ans et 6 jours[2] ;


2️⃣ On nous dit : « l’endettement public atteindra 2 798 Mrd d'€ en 2020 sur un PIB de 2 407 Mrd d'€, soit 116,2 % du PIB » ;


3️⃣ ✍️ ✍️ FAUX : car le PIB, c’est le PIB d’une année... et la dette, ça court sur plusieurs années (8 ans et 6 jours en août 2020) ;

  • L’honnêteté pour évaluer sérieusement la situation voudrait qu’on " rapporte la dette à ce qu’il faudrait payer si on devait la rembourser en fin de course ".


4️⃣ La durée moyenne d’un emprunt d’Etat étant selon l'Agence France Trésor de 8 ans et 6 jours : il convient donc de comparer le niveau d’endettement de la France au PIB du pays... pendant 8 ans et 6 jours, soit près de 19 256 Mrd d'€ ;

 

  • ✍️✍️ AINSI DONC : 2 798 Mrd d'€ de dette publique totale divisé par 2926 jours (8 ans et 6 jours) : cela fait 349,03 Mrd d'€ d’euros par an ;
  • Et une dette de 2 798 Mrd d'€ sur 8 ans ou de 349,03 Mrd d'€ par an, ça fait seulement 14,5 % du PIB de la France sur 8 ans..... ou.... 14.5 % du Pib annuel !

👉 moins que l'endettement de nombre de ménages qui parfois dépasse 30% des revenus !

 


-On est loin des 116,2 % du PIB agités pour affoler le monde et ôter toute idée revendicative aux plus pauvres qui s'enfoncent dans la misère !

  • Car il est stupide de rapporter toute la dette à la valeur d’une seule année de production. Pourquoi le fait-on ?
  • C’est d’autant plus absurde que le remboursement de la dette n’est pas exigible dans ce délai !
  • Il donc est absurde de comparer un stock pluriannuel à un flux annuel. C’est pourtant ce qui se fait à longueur de catéchismes médiatiques ;
  • Si votre banque vous demandait de rembourser tout d'un coup votre dette immobilière, vous auriez certainement un problème ?

 

- Une autre comparaison indispensable est de rapporter la dette aux avoirs du pays (Patrimoine économique national) !

Combien le pays possède-t-il ? C’est important pour savoir s’il a « les reins » solide face à la somme qu’il emprunte.

 

RAPPEL : le patrimoine économique national est composé[5] :

  • du patrimoine non financier dont :

- le capital naturel, valeur du stock des ressources renouvelables et non-renouvelables (terres agricoles, forêts, minéraux, gisements de gaz et de pétrole, ...) ;

-  les actifs produits : machines, équipements, structures, terrains urbains ;

- les ressources humaines ou la "valeur économique des individus".

  • du patrimoine financier net (solde des créances et dettes de l’ensemble des agents résidents vis-à-vis de l’étranger).

 

👉 Prenons l'année 2014 : combien le pays possédait-il ?

🔴 Montant du Patrimoine économique national en 2014 : 13 064 Mrd d'€ fin 2014[6]

... a rapporter au montant de la dette 2014 : 1 985 Mrd d'€ ([1985/13 064]*100)...

 

➡️ ➡️ Au total, la dette ne représentait en 2014 que 15,19% des avoirs de notre pays.

 

👉 Et pour 2018 : combien le pays possédait-il ?

🔴 Montant du Patrimoine économique national en 2018 : 15 482 Mrd d'€ fin 2018[3]

... a rapporter au montant de la dette 2018 : 2 315,3 Mrd d'€[4] ([2 315,3/15 482]*100)...

 

➡️ ➡️ Au total, la dette ne représentait en 2018 que 14,95% des avoirs de notre pays.

➡️ Pas de quoi engager une campagne permanente de culpabilisation du peuple si ce n'est pour tenter de le dissuader de faire valoir ses droits et exigences sociales !

 

 

-Vous n'avez pas tout compris ? Prenons l'exemple d'un citoyen lambda !
Cette personne (cas réel) achète une voiture en n'ayant pas d'autres emprunts en cours (Toyota Yaris hybride 4 portes) :

  • prix de la voiture neuve : 19 900 €
  • revenus annuels de cette personne (son PIB) : 26 400 €
  • Le taux d'endettement pour cette voiture rapporté à 1 an de revenu est de 19 900 € / 26 400 € = 75,37 %..... et là on à peur.... on n’achète pas la voiture !

    👉 Or le remboursement est effectué sur 36 mois
    ➡️ Le taux d'endettement réel pour cette voiture par rapport aux revenus est donc de :
    [revenus totaux sur 36 mois (26 400 €/12x36) = 79 200 €] / (19 900 € prix de la voiture) = 25,12 % et là on n'a plus peur.... on achète la voiture !

 

 

-Alors, ensemble, disons STOP à l'enfumage !

 

2020 : La dette à nouveau agitée pour que le peuple ait peur et se taise...
2020 : La dette à nouveau agitée pour que le peuple ait peur et se taise...
2020 : La dette à nouveau agitée pour que le peuple ait peur et se taise...

Pour en savoir plus :

- Charge de la dette pour 2020 et 2021 

- Coronavirus : J.L. Melenchon, transformer la dette,... en dette perpétuelle...

- 2014 : La dette agitée pour que le peuple ait peur : STOP à l'enfumage !

- " maturité de la dette " : Bruno Lemaire donne raison à J.L. Mélenchon

- Covid et dette publique : Retour au financement public via le Trésor

- « Comment la pandémie sert de prétexte pour relancer la spéculation financière »

- Pour la Sécurité sociale aussi, l’avenir ne peut pas être consacré au remboursement de la dette.

- Il faut envisager la dette de l’État comme un outil au service d’une politique d’investissement public ambitieuse, estime l’économiste Eric Berr

- L'économiste Thomas Porcher : « La dette a toujours été utilisée comme un épouvantail »

- CGT : La dette publique : un épouvantail bien utile

- Pour l’après-Covid, plus de 100 économistes demandent à la BCE d’annuler les dettes publiques

- Mélenchon : " Mes solutions pour nous libérer d'un futur enchainé au remboursement sans fin de la dette "

- Pourquoi et comment annuler la dette des États européens ?

- 150 économistes proposent comme Mélenchon l’annulation de la dette détenue par la BCE

- COMPARER LA DETTE AU PIB, "ÇA NE VEUT RIEN DIRE" : "Ces ratios n'ont aucun sens" - Dépenses publiques et PIB n'ont rien à voir - Un instrument idéologique

- Le montant de la dette publique a atteint des records, mais elle coûte deux fois et demie moins cher à financer qu’il y a vingt ans.

ce que nous en disions en 2014/2016

- En 2014 : 59% de la dette publique est illégitime

Comment ne pas rembourser la dette illégitime ?

- L'Avenir en commun, version 2016 : Réaliser un audit citoyen de la dette publique.

ANNULATION DE LA DETTE ÉTUDIANTE AUX ÉTATS-UNIS : LA FIN D’UN TOTEM NÉOLIBÉRAL

Partager cet article
Repost0
24 septembre 2020 4 24 /09 /septembre /2020 16:39
La fermeture de l’usine Bridgestone : tout sauf une surprise, fruit de l’impasse des politiques néolibérales
La fermeture de l’usine Bridgestone : tout sauf une surprise, fruit de l’impasse des politiques néolibérales

Le bal des hypocrites : Regarder les pleurer sur Bridgestone !

..., il faut reprendre le pouvoir, plutôt que de pleurer sur les conséquences du renoncement à tout pouvoir.

 

Depuis 30 ans ils regardent les usines partir. Depuis 30 ans ils laissent faire : zéro protection de l'industrie, zéro quota d'importation, zéro taxe aux frontières et aujourd'hui ils viennent faire les pleurnicheurs sur le parking de Béthune... Mais, comme le dit François Ruffin les traîtres, c'est eux !

 

Sources : Europe Solidaire Sans Frontières par GODIN Romaric, JARDINAUD Manuel | mis à jour le 04/0/2021

- La fermeture de l’usine Bridgestone : tout sauf une surprise
Le fabricant de pneus a annoncé la fermeture de son usine de Béthune avec 863 licenciements à la clé. Des politiques de tous bords s’émeuvent de cette « trahison ». Mais en contrepartie des aides publiques déversées depuis des années, (entre 2008 et 2016 620 000 d'€ d'aides régionales, en 2008, la CDA de Béthune a versé presque 1,2 million d'€ au groupe japonais, en complément du versement de 620.000 euros de la Région mentionné précédemment. A cela s'ajoute 500.000 € du FEDER (fonds européen) ainsi que 320.000 € de l'Etat. Au total, les aides publiques depuis 2008 avoisinent donc 2,6 millions d'euros et ce n'est pas tout. , 1,8 million d'€ de CICE en 2017[1] et autant en 3018[4]), rien n’était exigé de l’entreprise.

 

La fermeture annoncée, le 16 septembre, de l’usine de Bridgestone à Béthune (Pas-de-Calais) risque de priver d’emploi 863 salariés. Soit la totalité de l’effectif. Face au désastre social à venir, chacun y va de son cri d’orfraie. Et découvre une nouvelle fois les limites des politiques publiques de subventions et d’aides aux industriels.

 

 

🔴 Pour la direction du fabricant japonais de pneus, les données sont simples : le site de Béthune n’est plus adapté au marché des véhicules de tourisme.

Dans un communiqué au ton compassionnel pour les salariés concernés, elle met en cause une tendance économique mettant une pression sur les prix alors que « l’usine de Béthune est la moins performante parmi toutes les usines européennes de Bridgestone ».

 

Cette dernière phrase dit évidemment tout du dumping social en marche dans l’Union européenne (UE) où Bridgestone continue de développer ses implantations au détriment de territoires historiques comme dans le Nord.

 

Le député communiste Fabien Roussel a immédiatement dénoncé les millions d’euros investis par l’industriel en Europe de l’Est au détriment de l’usine française [2]. Selon lui, Bridgestone a dépensé 140 millions d’euros en Pologne et 190 millions d’euros en Hongrie pour moderniser sa production.

 

« Avec de l’argent de l’UE », précise l’élu. De fait, dans un exercice de vérification, le site du Figaro confirme que l’un des investissements a bénéficié d’une large subvention européenne. En Pologne, accepté en 2013, le projet « a bénéficié d’une subvention européenne à hauteur de 24 millions d’euros ». Bruxelles participe à la création de déséquilibres au sein de l’Europe en déversant une manne quand, de l’autre côté du continent, l’outil de production se meurt à petit feu.

 

La course aux subventions et aux aides diverses est devenue une spécialité de ces industriels qui bénéficient des largesses des pouvoirs publics pour maintenir l’emploi au maximum, dans des territoires souvent sinistrés. En jouant le chacun pour soi, au-delà des frontières.

 

Aujourd’hui, les politiques de tous bords s’émeuvent, de tribunes en interviews, d’une supposée trahison de Bridgestone qui n’aurait pas respecté ses engagements en contrepartie des aides publiques touchées au fil des ans. Contreparties qui, dans les faits, n’existent pas.

 

  • " L’État ne doit plus verser d’aides publiques aux grandes entreprises sans contrepartie. L’État doit exiger le remboursement des aides publiques de la part des licencieurs en série. L’État ne doit pas hésiter à envisager la nationalisation des sites industriels que les financiers désintègrent pour leurs profits ", déclare la France insoumise[3].

 

Selon plusieurs médias reprenant des sources syndicales, Bridgestone a récupéré 1,8 million d’euros en 2018 au titre du CICE. Depuis, c’est sous forme d’allégements de cotisations sociales que l’entreprise a pu bénéficier de cette forme de subvention que vient de largement étriller, quant à son efficacité, un rapport d’évaluation.

 

 

🔴 Mais comme toute société éligible, l’industriel n’avait aucune obligation en terme d’emploi.

Il avait d’ailleurs décidé de se passer des services d’une centaine d’intérimaires en 2019 sans que cela n’émeuve aucun personnel politique.

 

En outre, et cela a provoqué la colère de Xavier Bertrand, le président de la région Hauts-de-France, l’équipementier a récupéré une subvention régionale de 120 000 euros en 2017 pour financer de la formation. L’ex-ministre du travail, pourtant au fait de la liberté laissée aux entreprises aidées, a eu des mots très durs : « Une fermeture complète de ce site, c’est un assassinat. Et c’est un assassinat prémédité, prévu de longue date. […] On a affaire à des menteurs. »

 

Malgré cela, et pour ne pas perdre sa crédibilité d’élu aux côtés des salariés, il a indiqué que, si le groupe est prêt à « discuter d’un projet d’investissement sur ce site », l’État et les collectivités mettront alors de l’argent sur la table.

 

  • Au risque que l’histoire se répète ?

Car c’est exactement ce qui s’est déroulé pour l’ancienne usine Whirlpool à Amiens (Somme), devenue WN, qui a été vendue en licenciant à nouveau en juillet 2019 après avoir mobilisé énergie et fonds publics pour sauver le site industriel. « Un fiasco généralisé pour ce qui devait être la reprise pérenne du site de Whirlpool », écrivait Mediapart à l’époque [5].

  • Du côté du gouvernement, même aveuglement, où l’on feint la surprise face à une telle pratique de la part de Bridgestone et où l’on ne retient pas les leçons du passé.

Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État à l’industrie, et Élisabeth Borne, ministre du travail, ont été dépêchées sur place le 21 septembre. Pour Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement, il s’agit d’une « trahison ». Pour le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, c’est une décision « révoltante ».

La première, au micro d’Europe 1 [6], indiquait peu après l’annonce de Bridgestone : « Je trouve incroyable que dans ce moment particulier, où il y a des moyens pour investir dans les salariés, dans de nouveaux équipements, on ne donne pas un avenir au site de Bridgestone. » Elle faisait ainsi allusion au dispositif d’activité partielle longue durée (APLD) notamment, censé être l’arme antichômage au cœur de la crise. L’entreprise a déjà bénéficié du chômage partiel, en fermant momentanément son usine pendant le confinement.

 

 

🔴 Pourtant, et quand bien même le fabricant de pneus accepterait de surseoir provisoirement à fermer son usine en recueillant de l’argent public, ses déclarations sont claires

« Il n’existe pas d’alternative qui nous permettrait de surmonter les difficultés auxquelles nous sommes confrontés en Europe. Cette étape est nécessaire pour pérenniser les activités de Bridgestone à long terme », a déclaré Laurent Dartoux, le président de Bridgestone EMIA. Façon de dire que l’avenir est bien ailleurs, en Asie par exemple[6 bis].

 

  • Le député François Ruffin (La France insoumise), qui a vu les mêmes causes produire les mêmes effets dans l’Amiénois (Goodyear, Continental, Whirlpool), a quant à lui vertement critiqué les outrances du pouvoir local et du gouvernement. « Ces politiques qui viennent jouer les pleurnicheurs […], il n’y en a pas un qui a commencé à mettre en œuvre une solution protectionniste. [...] Je considère que les traîtres, les cyniques, les menteurs, c’est le gouvernement. Ce sont les anciens ministres, les ministres qui ont ces propos-là », a-t-il dénoncé sur RMC (Voir ci dessous " Regarder les pleurer sur Bridgestone ").

 

À l’issue de la rencontre entre les ministres, la direction de Bridgestone et l’intersyndicale, un accord de méthode a été conclu afin d’expertiser des pistes alternatives à la fermeture du site. S’il échoue, l’usine éteindra définitivement ses machines avant l’été 2021.

 

 

- L’impasse des politiques néolibérales

Les mêmes qui prônent la liberté d’action pour les entreprises feignent de se lamenter de ses effets sur l’emploi. L’incapacité de lier les deux reflète l’aveuglement de cette politique de l’offre, version managériale du « ruissellement[7] ».

 

 

🔴 Derrière les larmes de crocodile et les indignations de façade, l’affaire Bridgestone révèle la faillite des politiques économiques menées depuis plus de 30 ans.

Des politiques soutenues, conçues et imaginées par les politiques qui se lamentent aujourd’hui sur le sort du site du fabricant de pneus japonais et qui pourraient se résumer en une seule phrase : faire confiance aux choix des entreprises.

 

Toute l’action publique a été fondée sur cette idée que, puisque ce sont les entreprises qui « créent des emplois », il faut leur donner les moyens de le faire, soit par des subventions directes, soit par de généreuses exonérations de cotisations sociales, soit par la baisse de la charge fiscale.

 

  • Cette vision était logique au regard de l’idéologie dominante et des méthodes qui en découlaient.

Tous les modèles macro-économiques sont « microfondés », autrement dit, ils sont la projection des comportements individuels des acteurs économiques au niveau d’une économie. Pour créer des emplois, il faudrait donc donner plus de moyens financiers d’embaucher aux entreprises. C’est, dans la vulgate politique, le fondement de la « politique de l’offre », qui consiste à penser que rendre le travail moins cher pour les employeurs les conduira à créer des emplois.

  • Cette pensée n’est donc rien d’autre qu’une forme de la théorie du « ruissellement[7] », qui s’appuie sur les entreprises.

Le calcul était le suivant : les exonérations, subventions et autres crédits d’impôts devaient retomber sur la population sous la forme d’une pluie d’emplois. Mais rien ne s’est produit comme prévu.

 

Dans un monde où la mobilité des capitaux est un totem, où la financiarisation des entreprises est généralisée, où la valeur actionnariale domine et où la production est un mal nécessaire, ces politiques, qui ne sont rien d’autre qu’une version naïve de la « main invisible » d’Adam Smith, sont vouées à l’échec. Les groupes internationaux agissent selon les « opportunités ». Ils viennent pour s’emparer de savoir-faire ou profiter de certaines « opportunités », et repartent dès qu’ils ont l’occasion d’accroître ailleurs leurs profits. Derrière le mirage de « l’attractivité » (la France a toujours été dans le trio de tête des pays les plus attractifs du monde), il y a une constante déception. Ces flux de capitaux repartent aussi vite qu’ils arrivent ; ils ne viennent pas pour assurer un développement mais pour opérer des razzias.

 

 

🔴 Jamais les promesses de ces politiques n’ont été tenues, ni le CICE, ni les exonérations de cotisations, ni les baisses d’impôts aux entreprises ni les réformes du marché du travail n’ont stoppé la dégradation de l’outil productif français.

Cette dégradation n’est pas une spécificité française, du reste. Malgré une politique fiscale et sociale ultra-agressive, le Royaume-Uni a connu le même phénomène de désindustrialisation massive depuis 40 ans.

 

  • On peut, certes, comme le font certains, prétendre que tout cela n’est pas suffisant.

Ce n’est pas assez d’avoir dépensé entre 2013 et 2019 134 milliards d’euros de CICE, d’avoir dépensé autant par an de subventions, d’avoir les taux de financement les plus bas de l’histoire, de promettre la baisse des impôts de production pour 10 milliards d’euros par an et celle de l’impôt sur les sociétés d’autant. Le tout dans un contexte où « l’optimisation fiscale » reste une pratique courante des grands groupes. On peut toujours le penser. Mais est-ce sérieux ?

  • En réalité, l’affaire Bridgestone vient appuyer à l’endroit précis de l’échec de ces politiques.

Car, enfin, voici une entreprise qui, non contente d’avoir bénéficié de toutes les aides, subventions et exonérations passées, pouvaient compter sur des promesses alléchantes : baisse des impôts sur la production et du taux d’impôt sur les sociétés, nouveau round de réforme du droit du travail, nouvelles aides directes dans le cadre du plan de relance. Mais rien n’y a fait. Les « anticipations rationnelles » de la multinationale l’ont conduite à fermer l’usine.

 

 

🔴 La vraie source de la colère des membres du gouvernement et de l’exécutif régional est donc avant tout la révélation de l’inanité de ces politiques qu’ils défendent depuis des décennies et qui sont prétendument créatrices d’emplois. 

En transférant aux entreprises seules la tâche de créer des emplois dans un contexte de mondialisation financiarisée, ils se retrouvent régulièrement les dindons de la farce. Car si les entreprises sont libres, dans leur intérêt, de créer des emplois, elles sont tout aussi bien libres d’en détruire.

 

 

🔴 Le piège se referme alors sur ces dirigeants qui touchent du doigt cette réalité que l’intérêt général n’est pas la somme des intérêts des entreprises.

Lorsque l’on accepte le chantage à l’emploi comme un pilier de la politique économique, on transfère aux entreprises les principaux choix économiques et sociaux. On peut ensuite venir s’en plaindre, mais il y aurait là de quoi rire si la situation n’était pas aussi dramatique pour les salariés. Car ce sont bien les mêmes qui, par temps calme ou lors des grands discours théoriques, prétendent que l’économie, cela consiste à soutenir les entreprises.

  • N’est-ce pas Emmanuel Macron qui avait promis dans Forbes [8], le 1er mai 2018, la fin de « l’exit tax », cette taxe contre les fuites de capitaux, parce qu’elle découragerait les investissements ?
  • N’est-ce pas Jean Castex qui, lors de son discours de politique générale le 15 juillet, prétendait que « l’économie, c’est l’entreprise et l’initiative » [9] ; et que donc il fallait laisser faire ?
  • N’est-ce pas Bruno Le Maire qui refusait toute demande de contreparties aux baisses d’impôts sur la production parce que, comme il l’a dit aux Échos [10], « imposer des conditionnalités nous ferait perdre du temps pour la relance et conduirait à un échec » ?

Mais s’il n’y a pas de contreparties, c’est bien que les entreprises font toujours les bons choix. Pourquoi ensuite venir blâmer Bridgestone ? Parce que l’entreprise japonaise prouve déjà l’inefficacité du plan de relance par l’offre du gouvernement, venant démentir directement Bruno Le Maire, qui affirmait dans cette même interview que ce plan « produisait déjà ses effets » ?

 

 

🔴 Il est vrai que, parfois, ces choix ne sont pas désintéressés.

Que penser du délégué interministériel aux restructurations Marc Glita, qui a participé aux négociations avec Bridgetone et qui, soudainement, selon le site Contexte, devient conseiller [11] du patron de Plastic Omnium et de l’AFEP, l’association des grandes entreprises, Laurent Burelle, par ailleurs un des plus farouches partisans du refus de toute contrepartie au plan de relance ? Peut-on sérieusement la veille prétendre défendre les emplois contre une entreprise « voyou » et le lendemain défendre la liberté totale des entreprises d’utiliser les cadeaux fiscaux à leur guise ? Et peut-on croire à l’engagement de l’État dans ce cas pour défendre réellement les emplois menacés par sa propre politique ?

 

 

🔴 Concrètement, cette politique est un désastre.

Elle désarme la puissance publique, décrédibilise l’action syndicale et ne stoppe nullement la désindustrialisation. Il n’y a là rien d’étonnant. La désindustrialisation est un phénomène assez général en Occident, la production à faible valeur ajoutée ayant été transférée dans des pays à bas coûts. Quant au haut de gamme, l’Allemagne s’en est assuré le monopole par sa politique mercantiliste fondée sur la modération salariale. Les autres en sont réduits à des expédients : bulle immobilière, destruction de l’État-providence ou encore fuite en avant financière.

 

 

 

🔴 Pendant longtemps, on a pensé que tout cela n’était pas si grave.

C’était le discours sur la « destruction créatrice ». Sauf que, là encore, la promesse a perdu de sa superbe. En théorie, cette destruction créatrice concerne l’industrie : les emplois les moins productifs sont remplacés par des emplois plus productifs, plus nombreux grâce aux investissements. Mais le schéma n’est plus pertinent dans le capitalisme contemporain. Les gains de productivité sont minimes et le bas de gamme industriel, comme le haut de gamme, repose très largement sur une baisse relative du coût du travail. Comment en serait-il autrement ? Les investissements productifs sont coûteux et incertains, tandis que les marchés financiers et l’immobilier affichent de beaux rendements.

 

Le résultat de tout cela, c’est que les emplois créés ont été souvent d’assez mauvaise qualité : soit mal payés, soit précaires, soit fragmentés dans le temps. Les réformes du marché du travail, les subventions aux entreprises et autres baisses de cotisations sur les bas salaires ont encore aggravé le phénomène. Mais, progressivement, la numérisation et la destruction du droit du travail ont transformé pour beaucoup la tertiarisation en un cauchemar de précarité. On comprend que ces perspectives ne fassent pas rêver les ouvriers de Bridgestone et que même les hommes politiques n’osent plus défendre un tel mythe.

 

D’autant que la crise sanitaire est venue donner le coup de grâce à ce beau modèle. Les services connaissent avec les mesures sanitaires et les changements de comportement un choc négatif de productivité qui laisse présager de nouvelles pressions sur le travail. Parallèlement, les entreprises industrielles, elles, cherchent à maintenir leurs marges en accélérant les délocalisations, et ce ne sont pas les cadeaux fiscaux du gouvernement qui pourront freiner le phénomène.

 

 

🔴 Le cas Bridgestone est donc un nouveau symptôme de l’échec flagrant d’une politique économique qui transfère entièrement aux entreprises la création d’emplois et identifie leurs intérêts avec l’intérêt général.

Mais les choix micro-économiques ne sont que les conséquences des choix macro-économiques. La naïveté de la pensée du libre-échange, de la financiarisation et de la libre circulation des capitaux a produit des effets que les ouvriers de l’équipementier japonais peuvent amèrement constater, après tant d’autres. C’est bien pour cette raison que les rodomontades de politiques qui, partout, défendent le libre choix des entreprises comme créateur d’emplois ne sont pas sérieuses.

 

 

 

🔴 Le vrai enjeu, c’est bien celui du pouvoir.

Qui décide de quels emplois une société a besoin et de la manière d’assurer un niveau de vie décent à tous ? Le transfert de ces choix au seul marché, par ailleurs pas réellement libre dans les faits, tant la tendance oligopolistique du capitalisme contemporain est forte, conduit à un double effet : l’affaiblissement d’un État désarmé devenu l’idiot utile du capital et le creusement des inégalités de revenus et de conditions sociales.

 

Il semble donc urgent d’en finir avec ce « ruissellement » par les entreprises et le chantage à l’emploi. Et pour cela, il ne faut pas des hochets comme cette « charte des contreparties » proposée par Bruno Le Maire. Il faut un changement complet de logique.

 

Plutôt que de déverser des dizaines de milliards d’euros sur les entreprises, il faut assurer la création directe d’emplois dans la production et les services en rapport avec une définition démocratique des besoins, rendre l’intérêt de la délocalisation de certains sites moins attractif en renonçant à une mondialisation naïve et briser tout chantage à l’emploi par une vraie garantie de l’emploi et une assurance-chômage élargie. Bref, il faut reprendre le pouvoir, plutôt que de pleurer sur les conséquences du renoncement à tout pouvoir.

 

 

- Que faire contre les ayatollahs de la concurrence ?

Par François Ruffin, député France insoumise. Bridgestone, 5G, néonicotinoïdes, même combat ! Vous me croyez pas ? Vous allez voir : derrière tout ça, il n’y a qu’une seule et même injonction, à la concurrence. La course en avant, qui devient une course au néant.

Partager cet article
Repost0
15 août 2020 6 15 /08 /août /2020 13:10
Auteur : Benoît Borrits | 26 Juin 2020 | https://autogestion.asso.fr/virer-les-actionnaires-pourquoi-et-comment-sen-passer/

Auteur : Benoît Borrits | 26 Juin 2020 | https://autogestion.asso.fr/virer-les-actionnaires-pourquoi-et-comment-sen-passer/

Il y a urgence à mettre fin à la dictature de l'actionnariat !

 

Les gouvernements du monde entier déversent des aides massives pour les sociétés de capitaux (exonération de cotisations sociales, chômage partiel, prêts bonifiés…) au nom de la prétendue sauvegarde de l’économie et de l’emploi. Nos budgets publics sont donc massivement sollicités pour sauver le patrimoine des actionnaires sans aucune contrepartie : la reprise boursière en est le témoin le plus criant.

Cette crise sanitaire et économique ne fait que renforcer la tendance lourde à un ralentissement généralisé de la croissance mondiale qui, comme le livre Virer les actionnaires, pourquoi et comment s’en passer ? le démontre, empêche un quelconque compromis entre les classes sociales.

Pour le dire autrement, on peut vouloir une reprise du progrès social, il est urgent d’engager la transition écologique de nos sociétés mais ceci ne pourra se faire sans poser la question du départ des actionnaires et de la transformation des sociétés de capitaux en unités de production autogérées par leurs travailleur.ses et usager.ères.

Nous publions ici, avec l’aimable autorisation des Éditions Syllepse, l’introduction de ce livre écrit quelques mois avant la crise du covid-19.

 

Sources : ASSOCIATION AUTOGESTION | mis à jour le 17/09/2020

-  Le paysage politique semblait stable après la chute du mur de Berlin

Cet événement nous a été présenté comme le glas de toute alternative possible au capitalisme. S’il y avait toujours une gauche et une droite dans les pays de démocratie parlementaire, les différences entre les deux s’estompaient au point où certains théorisaient la fin de l’Histoire dans une combinaison heureuse de démocratie, de liberté et de croissance[1]. Dans les pays anciennement industrialisés, la réalité de ces trente dernières années s’est révélée bien différente. Le chômage de masse et la précarité n’ont cessé de croître. De nombreuses avancées sociales ont été remises en cause par des « réformes » successives présentées comme « inévitables ». Dans le même temps, ce système s’avère incapable de répondre aux enjeux écologiques et le réchauffement climatique nous menace à très court terme : nous assistons impuissants à la destruction méthodique de l’ensemble de nos écosystèmes.

 

 

-  La crise des subprimes de 2008 est révélatrice de l’instabilité fondamentale de ce système

Comme les salaires étaient insuffisants pour générer une demande satisfaisante pour les profits des entreprises, on a endetté des ménages à faibles revenus en leur proposant d’emprunter à taux élevés à des conditions intenables pour qu’ils deviennent propriétaires de leurs logements. C’était côté pile. Côté face, les banques ont revendu ces prêts sous forme de produits financiers à haut rendement – Collateralized Debt Obligation (CDO) – réputés sûrs du fait de l’adjonction d’un dérivé d’assurance – Credit Default Swap (CDS). Il est arrivé ce qui devait arriver : les ménages n’ont pu rembourser. Mais trop, c’est trop : les contreparties des dérivés d’assurance se sont avérées défaillantes alors que ces produits insolvables étaient dans tous les bilans des banques et des institutions financières. La banque Lehmann Brothers a fait faillite entraînant des pertes gigantesques dans tous les établissements financiers et bloquant les prêts à l’économie. Cette crise a entraîné la plus grande récession depuis 1929 et d’une certaine façon, et comme nous le verrons, le capitalisme ne sera plus jamais comme avant. Il a certes été sauvé mais les populations en ont payé le prix fort.

 

 

-  Ceci ne pouvait pas avoir d’effets sur le plan politique

Les anciennes forces dominantes – conservatrices et sociales-démocrates – vont toutes, sous des formes différentes et selon les pays, connaître des chutes de popularité sans précédent. En France, le Parti socialiste et les Républicains ne sont plus que des forces d’appoint. En Allemagne, il a été nécessaire d’établir une coalition entre les partis chrétien-démocrate et social-démocrate. L’hégémonie de ces partis est contestée par des forces dites populistes qui se présentent comme anti-système dont l’origine vient soit de l’extrême droite historique comme en France ou en Italie, soit de partis conservateurs comme en Hongrie ou aux États-Unis. En France, l’émergence d’Emmanuel Macron et de son nouveau parti En marche se présente comme le rempart contre ces courants tout en poursuivant le programme néolibéral sous couvert d’incarner la « révolution »[2]. Ceci nous rappelle étrangement un certain Matteo Renzi en Italie, venu de la démocratie chrétienne et qui intègre le Parti démocrate issu de l’ancien Parti communiste… Même jeunesse, même volonté de « réformes », même volonté de relancer l’économie du pays et de renouveler les institutions… pour décevoir et laisser la place à une improbable coalition de la Liga, issue d’un mouvement séparatiste nord-italien d’extrême droite, et du nouveau Mouvement cinq étoiles, qui a siphonné les voix de la gauche avec un discours mêlant démocratie radicale, écologie et rejet des immigrés et des syndicats.

 

 

-  Partout ce populisme progresse avec au moins un point commun : le refus de l’étranger

Aux États-Unis, c’est l’arrivée de Donald Trump à la présidence sous les couleurs du Parti républicain. Au programme, la contestation des conditions actuelles du libre-échange avec le retour de barrières protectionnistes censées recréer des emplois locaux et une chasse totalement inhumaine et sans précédent contre les immigrés, le tout sous un refus éhonté de l’évidence du réchauffement climatique. Au Royaume-Uni, il a pris la forme de la sortie de l’Union européenne à la suite d’un référendum dont les instigateurs, trop sûrs d’eux-mêmes, pensaient qu’il confirmerait le statu quo. Le pire est de penser que ce sont les couches populaires qui ont voté cette sortie, comme si elle allait résoudre leurs problèmes dans ce pays malmené par des années de thatchérisme et de blairisme. En attendant, la crise politique est à son comble et risque de réveiller des tensions historiques en Irlande. En Italie, c’est surtout l’extrême droite qui profite de cette coalition hétéroclite avec l’institutionnalisation d’un discours anti-immigrés et l’instauration d’une flat tax qui fera les choux gras des plus riches.

 

 

-  Libéralisme ou populisme ?

Tel semble désormais être l’alternative peu réjouissante qui nous est proposée. Certes, on constate ici et là l’émergence d’une troisième voie de gauche qui s’incarnerait par un renouveau social-démocrate assez net du côté des pays anglo-saxons, notamment aux États-Unis, ou par un renforcement de l’écologie politique qui s’explique, entre autres, par l’urgence de conjurer le réchauf­fement climatique. D’une façon générale, ces forces politiques ne remettent pas en cause le capitalisme : il s’agit d’introduire de la justice sociale et une reconversion écologique de l’économie par des redistributions, des législations et des incitations. Nous avons ici affaire à un paradoxe énorme. Sur ces trente dernières années, la social-démocratie a échoué dans son projet politique qui consiste à aménager le capitalisme dans un sens favorable à la classe salariée. Plus nous avançons dans le temps, plus on s’aperçoit que le capital est incapable d’accepter le moindre progrès social et plus les électeur/trices salarié·es ont assimilé la social-démocratie au consensus néolibéral au point qu’une fraction non négligeable de cet électorat s’est tournée vers l’extrême droite. Qu’est-ce qui ferait qu’aux États-Unis, un Parti démocrate conquis par son aile gauche sociale-démocrate réussirait là où leurs homologues européens ont échoué ? Comment expliquer que de nouvelles forces de gauche qui n’ont pas de programme de sortie du capitalisme, telles que Podemos en Espagne ou La France insoumise[6], réussiraient là où la social-démocratie traditionnelle a échoué ? Parce que les sociaux-démocrates ont trahi alors que ceux-ci ne faibliront pas ? La thèse de la trahison n’est guère crédible tant le renoncement a été général : les raisons de la faillite de la social-démocratie sont plus à trouver dans l’irréalisme de leurs programmes d’aménagement du capitalisme.

 

 

-  Concernant l’écologie politique, on peut tout autant s’interroger

La mise en œuvre de la reconversion écologique de l’économie impose des mesures de restrictions de certaines productions et consommations, de taxations et de redistributions à visées incitatives. Le capital n’y est jamais favorable : il rejette toute décision politique qui fixe des limites à sa valorisation. De ce point de vue, le projet actuel de l’écologie politique a ceci de commun avec celui de la social-démocratie qu’il ne remet pas en cause le capitalisme. L’écologie politique veut certes constituer un nouveau paradigme politique autour d’une écologie qui intégrerait la justice sociale. Ceci a beaucoup de sens, mais en l’état actuel de ses programmes, elle rencontrera les mêmes obstacles que la social-démocratie.

 

 

-  Dépasser le capitalisme ? Sortir du capitalisme ?

Combien de fois entend-on ces expressions au point où elles semblent parfois relever de la pure rhétorique. Pour nous,  la définition du capitalisme est simple : il s’agit d’une économie dominée par des sociétés de capitaux[2][3], à savoir des entreprises privées qui appartiennent à des personnes, physiques ou morales, extérieures à l’entreprise et qui ne les détiennent que dans le but de valoriser leur patrimoine. Il ne s’agit donc pas de l’économie marchande en tant que telle même si celle-ci, sans contrepoids politique, mène directement au capitalisme. Le capitalisme n’est pas non plus le néolibéralisme même si nous défendons que ce dernier est l’évolution naturelle et terminale du capitalisme. Sortir du capitalisme correspond donc à quelque chose de précis : évincer les actionnaires.

 

Comme nous allons le montrer dans ce livre (Virer les actionnaires, pourquoi et comment s'en passer ?), nous ne voulons pas évincer les actionnaires parce nous serions des gens au mieux radicaux, au pire méchants. Nous voulons les évincer parce que ce système est aujourd’hui incapable de nous apporter de nouveaux progrès – ce qu’il a su faire dans le passé sous la pression de luttes sociales – et de répondre à l’urgence écologique. L’objet premier de ce livre est de démontrer qu’il n’y a plus de possibilités de progrès social, de transition écologique de l’économie si nous maintenons les sociétés de capitaux.

 

 

-  Face à l’augmentation sans précédent des profits des entreprises, la tentation est grande – et facile – de penser qu’il suffirait que les entreprises gagnent un peu moins pour que tout aille mieux.

On avancera même que si les salaires étaient plus élevés, la population dépenserait plus auprès des entreprises et que cela pousserait celles-ci à investir pour répondre à cette demande nouvelle. Ceci a l’apparence d’un raisonnement infaillible d’autant que cela a fonctionné dans le passé. Pourtant cela ne marche pas à tous les coups et fonctionnera encore moins demain qu’hier. La raison ? Des changements structurels en termes de croissance et de taux d’intérêt.

 

 

- Ceci suppose de tordre le cou à une erreur fondamentale : une assimilation de la valeur de l’entreprise avec celle de son patrimoine net.

Le patrimoine net ou les fonds propres de l’entreprise – ces deux termes sont synonymes – se définit par la différence entre ce que l’entreprise possède – ses actifs – et ce qu’elle doit – ses dettes. Or une transaction sur une entreprise – qu’elle se fasse lors d’un rachat ou par l’échange quotidien de ses actions en bourse – ne se fait jamais sur la base de ses fonds propres. La valeur d’une action ou d’une entreprise est toujours déterminée, comme pour n’importe quel actif financier, par la valeur actualisée de ses revenus futurs. Pour une action, l’évaluation par le marché de ses dividendes futurs déterminera sa valeur. Autrement dit, la valeur d’une entreprise est purement spéculative : si tout le monde est convaincu que l’entreprise ne versera jamais aucun dividende dans le futur, alors cette entreprise ne vaut strictement rien, et ce, même si elle dispose d’un patrimoine net significatif. Inversement, si le marché estime que les dividendes à venir vont être fabuleux, sa valeur tend parfois vers le déraisonnable. Ceci se comprend aisément : le seul intérêt d’être propriétaire d’une entreprise est d’en recevoir des rémunérations.

 

 

- On peut trouver technique ce distinguo entre patrimoine net et valeur.

Il n’en reste pas moins que confondre les deux a des implications politiques fondamentales. Si on assimile à tort la valeur de l’entreprise à son patrimoine net, on considère alors qu’il est tout à fait acceptable pour des actionnaires que l’entreprise gagne moins : il est donc possible d’établir un compromis entre les classes. À l’inverse, si on fait ce distinguo, on comprend alors que si les profits sont moindres, ceci signifie que les perspectives de dividendes vont baisser et donc les valorisations des entreprises. Dit autrement, si l’entreprise gagne toujours de l’argent, les actionnaires, eux, vont en perdre. En soi, cela ne saurait nous émouvoir sauf que ceux-ci conservent le pouvoir et décident, par l’intermédiaire des directions qu’ils ont mises en place, du niveau de l’emploi et des investissements. Ils n’embaucheront et n’investiront que si leurs projets répondent aux critères financiers des marchés, à savoir un rendement supérieur au taux d’intérêt et à la prime de risque. Or en cas de baisse des profits, ce dernier paramètre ne pourra que bondir et raréfier les projets. Pour le dire plus crûment, les actionnaires vont pratiquer la grève des investissements… C’est ce que nous verrons dans le premier chapitre.

 

 

- Il est possible que ces notions apparaissent techniques, voire compliquées.

Ce premier chapitre et les suivants détailleront celles-ci de la façon la plus didactique qui soit. Afin de faciliter la compréhension de ces notions fondamentales, on signalera entre crochets […] des vidéos disponibles sur le site economie.org. Au nombre de treize, celles-ci sont regroupées en quatre sessions : l’entreprise, la finance, la monnaie et la macroéconomie. Il n’est pas forcément indispensable de les écouter dans la mesure où ce livre se suffit à lui-même mais celles-ci peuvent apporter un éclairage complémentaire sur un sujet donné. Ces vidéos n’ont qu’une vocation pédagogique et on pourra les écouter à son rythme si on souhaite approfondir certaines des notions évoquées dans ce livre.

 

 

- C’est dans cette confusion entre patrimoine net et valeur de l’entreprise que se trouve l’impasse de toutes les politiques sociales-démocrates et de l’écologie politique.

On veut pratiquer des politiques socialement et écologiquement nécessaires et on se heurte immédiatement au « mur d’argent » ou plus exactement au pouvoir du capital. L’actualisation des dividendes attendus qui nous donne la valeur de l’entreprise fait aussi appel à d’autres paramètres tels que le taux d’intérêt ou la croissance. La croissance mondiale se ralentit partout et, pour soutenir celle-ci, les banques centrales n’ont de cesse depuis plus de trente ans de baisser les taux d’intérêt. Depuis la récession de 2009, ceux-ci sont désormais proches de zéro, voire négatifs. Le taux d’intérêt représente la rémunération du capital sans risque. Si le taux d’intérêt est nul ou négatif, ceci signifie que le capital en tant que tel ne rémunère plus : il est alors nécessaire de prendre des risques pour obtenir une rémunération. Voilà une situation qui tranche largement avec celle qui a prévalu durant deux siècles durant lesquels la rente tournait autour de 5 %. N’est-ce pas un symptôme qui nous indique qu’il est désormais nécessaire de tourner la page du capitalisme ? En ne la tournant pas, nous nous trouvons alors face à un capitalisme de plus en plus féroce et intransigeant. Comme la valorisation du capital est purement spéculative et que les anticipations de résultats sont intégrées dans les cours, la hausse du capital ne peut donc se réaliser que par une pression accrue sur les salaires et le refus de toute hausse de la fiscalité. Le fait que le capital et les gouvernements libéraux ou populistes qui le soutiennent deviennent de plus en plus autoritaires ne saurait nous étonner dans ce contexte. Et quand bien même le capital réussirait dans ses desseins, ne serait-ce pas une victoire à la Pyrrhus ? Une pression accrue sur les salaires sape la demande adressée aux entreprises et nuit à la croissance. Et si tel n’est pas le cas, cette croissance nous mène tout droit à la catastrophe écologique. Tel est l’objet du second chapitre.

 

 

- Mais que proposent la gauche et les écologistes dans cette situation ?

La théorisation de la finance a commencé dans les années d’après-guerre pour n’être appliquée dans les entreprises que dans les années 1980 et 1990. Assez paradoxalement, celle-ci n’a pas été intégrée dans le camp progressiste qui continue de préconiser des recettes keynésiennes datant de l’entre-deux-guerres et des années 1950. Avec la chute du mur de Berlin, la gauche a mis en veilleuse sa volonté de transformation sociale en se rabattant sur des politiques qui étaient précédemment pratiquées par des conservateurs au moment où ces derniers abandonnent le keynésianisme pour lui préférer la violence du néolibéralisme. Incroyable paradoxe qui donne à la gauche son image délicieusement passéiste et ne la vaccine nullement contre quelques rares convergences très ponctuelles, néanmoins interpellantes, avec l’extrême droite. Le troisième chapitre questionnera donc le caractère progressiste du keynésianisme et l’insuffisance des politiques de redistribution.

 

 

- La critique est aisée mais l’art est difficile.

Dès lors, que substituer au capitalisme ? Le cœur du conflit entre le capital et le travail est le partage de la valeur ajoutée, à savoir ce qui est produit. Comme la valorisation du capital productif est basée sur les anticipations de dividendes, ceci signifie que si une configuration sociale et politique remet en cause ces dividendes, alors la valorisation du capital sera nulle et la question de la relève sera posée. Qui doit dès lors diriger les unités de production ? C’est ici que la pratique du Commun[4] nous est utile pour penser le dépassement du capitalisme et de la propriété productive[5] : ce sont les utilisateurs des moyens de production à savoir les travailleur·euses et les usager·ères de l’entreprise qui sont appelé·es à diriger celle-ci, à constituer un commun productif qui sera en interaction avec d’autres communs de financement des actifs et de sécurisation des revenus des salarié·es. Nous reviendrons sur ces questions dans le quatrième chapitre.

 

 

- Enfin le cinquième et dernier chapitre

Celui-ci décrira un scénario qui permet d’envisager cette transition entre le capitalisme et une société plus humaine qui permettra de garantir à toutes et tous un avenir digne dans un monde qui aura surmonté – hélas, non sans dégâts irréparables – les défis écologiques qui se posent à nous. Nous avons bien dit « permettra » car le monde que nous décrivons sera profondément démocratique et cela n’exonérera nullement la population de devoir faire les bons choix au bon moment. Mais, à l’inverse du capitalisme où l’horizon des possibles est bloqué par la nécessité d’assurer une valorisation au capital, cette société nous autorisera enfin à prendre les décisions qui s’imposent face au péril écologique. En tout état de cause, il ne s’agit que d’un scénario et comme tout scénario, il ne se déroulera jamais tel quel. Mais son objectif est de montrer qu’une transition pacifique est possible.

 

Le capitalisme a largement fait son chemin ; il est urgent d’en sortir.

 

Notes :
[1] Francis Fukuyama, La Fin de l’histoire et le dernier homme, Paris, Flammarion 2009.

[2Qu'est-ce que le «capitalisme populaire» prôné par Emmanuel Macron ?

[3Capitalisme, Libéralisme : quelles différences entre ces deux notions ?

[4] Pierre Dardot et Christian Laval, Commun : essai sur la révolution au 21e siècle, Paris, La Découverte, 2014

[5] Benoît Borrits, Au-delà de la propriété : pour une économie des communs, Paris, La Découverte, 2018.

[6] La France insoumise avec l'Avenir en commun mis à jour

 

Pour en savoir plus :

- Le Macronisme, la maladie infantile du Parti Socialiste

- De la nécessité de la fédération populaire

- Coronavirus : cause unique de la crise économique et financière, ou déclencheur et accélérateur d’une crise majeure du système capitaliste ?

- Barbara Stiegler : “ la crise sanitaire actuelle est le pur produit du néolibéralisme ”

- CGT : Les actionnaires ne connaissent pas la crise

Comment la baisse tendancielle du taux de profit explique le capitalisme d'aujourd'hui

Partager cet article
Repost0
14 mai 2020 4 14 /05 /mai /2020 20:32
Barbara Stiegler : “ la crise sanitaire actuelle est le pur produit du néolibéralisme ”

En cette journée de printemps Barbara Stiegler[1] est radieuse. Le succès qu’elle remporte actuellement n’enlève rien à la simplicité qui est naturellement la sienne. Avant le confinement, ses conférences faisaient déjà un carton.


Il y a deux ans, la spécialiste de Nietzsche s’installe à Bordeaux où elle enseigne depuis quinze ans, (elle y est responsable du master : soin, éthique et santé). A cette époque elle n’imagine pas à quel point la société va traverser de telles turbulences.


Et alors qu’elle découvre la capitale girondine son quotidien est confronté aux mobilisations citoyennes. Elle va s’en faire le témoin privilégié. Entretien par Marie Neuville 

 

 

Sources : france3 Aquitaine Entretien par Marie Neuville | mis à jour le 13/08/2021

-La crise sanitaire semble être le révélateur des failles du modèle néolibéral français de la santé publique. Vous l’aviez expliqué dans votre livre "Il faut s’adapter"[2]. Etait-ce prémonitoire ?

Barbara Stiegler : Je n’ai eu aucune prémonition, j’ai même pris tardivement la mesure de cette pandémie. Mais c’est vrai sur le fond, mon livre démontre l’écueil du modèle néolibéral, un choix qui entraîne l’explosion des mobilités, l’accélération des rythmes, la compétition effrénée pour les ressources, autant de facteurs qui conduisent à une destruction des systèmes, qu’ils soient sanitaires, éducatifs, sociaux ou qu’ils touchent des corps vivants et des écosystèmes.
Des crises comme celle-là vont se reproduire si on ne change pas.

 

 

-Pourquoi une telle improvisation dans la gestion de cette crise ?
Barbara Stiegler : C’est vrai que nous ne sommes pas dans un pays pauvre, nous sommes la 6e puissance économique mondiale ; les causes sont liées à une vision néolibérale de la manière de gouverner. 

 

  • La pénurie n’est pas involontaire, elle a été sciemment orchestrée par les dirigeants des entreprises pour s’adapter à la compétition mondiale. 

Le modèle néolibéral organise une société de flux basée sur des ressources rares. Une entreprise qui a des stocks perd des points.

 

Moins il y a de lits de matériels, de médicaments, de personnels, plus il y a d’agilité, d’innovation de dépassement, d’adaptation et cela est considéré comme moteur de progrès. C’est une façon de montrer que l’on est en avance au regard du monde d’avant.
Il faut être performant, moderne, autrement dit "Il faut s’adapter"  ! C’est avec cette injonction que s’est faite la gestion de l’hôpital.

 

  • Sauf qu’à flux tendu il est impossible de faire face à l’imprévu. Cette vision néolibérale est totalement contraire aux conditions de la vie et aux besoins fondamentaux des vivants. Et ce n’est pas valable que pour l’hôpital.

C’est aussi le cas dans le monde de la recherche et de l’enseignement, détruit par cette culture de l’optimisation et de l’innovation sur fond de pénurie.

 

 

-Vous dénoncez la médecine proactive, est-ce une erreur d’avoir voulu remplacer le bon vieux docteur ?
Barbara Stiegler : Dans la médecine classique, on tient compte du patient de sa plainte, de son mal. Mais cela est jugé archaïque et  dépassé. La médecine proactive, portée par les prouesses du numérique, tourne le dos à la médecine traditionnelle qui porte assistance à la personne malade.
La médecine dite " proactive " demande à l’individu de taire sa souffrance, de s’adapter, y compris dans un environnement dégradé et d’être comptable de la manière dont il optimise les risques.

 

Elle fait l’impasse sur ce qui est négatif, refuse d’avoir une vision critique sur les causes de nos pathologies.  Refusant de regarder en face la souffrance, la mort et le négatif, elle fantasme l’optimisation de la performance.

 

  • De plus cette médecine de l’innovation, focalisée sur les nouvelles technologies et le biomédical, est incapable de prévenir ce genre de crise sanitaire car elle est dépourvue de toute réflexion critique  sur les facteurs environnementaux des maladies et sur nos organisations sociales, qui sont pourtant des déterminants fondamentaux en santé publique.

 

A la lumière de ce modèle, ce virus venu d’Asie ne pouvait qu’être sous-évalué, il ne pouvait apparaître que comme une « grippette » n’ayant aucune incidence sur la puissance de notre système sanitaire.

 

Dans la vision néolibérale, la conduite des individus doit être  modelée par les recommandations des experts. Mais cette crise du coronavirus, comme la crise climatique, révèle le retard des gouvernants, dont les visions sont de plus en plus inadaptées aux réalités et dont les décisions sont de plus en plus éloignées du bon sens des populations.

 

  • C’est leur aveuglement du flux et leur phobie irrationnelle des stocks qui leur a, par exemple, fait détruire nos stocks de masques, nos contingents de lits et nos effectifs de soignants.

C’est le même aveuglement qui les conduit à supprimer des postes de chercheurs et d’enseignants capables d’avoir une vision sur le temps long, pour leur substituer une main d’œuvre précaire, fluide, adaptable.

 

Il y a en réalité beaucoup d’argent dans la santé et l’éducation mais affecté à une logique de flux, qui détruit la stabilité nécessaire réclamée par ces métiers.
Cette pression du flux conduit à installer la pénurie et la compétition partout, alors même qu’il y a une débauche de dépenses du côté du management, de l’évaluation, de la machine normative et réglementaire.

 

Dans ces métiers de santé, d’éducation et de recherche, nous passons de plus en plus de temps à l’évaluation, à l’optimisation, à la compétition et de moins en moins de temps à soigner, éduquer et faire de la recherche.  

  • C’est cela le néolibéralisme : un Etat très fort, tatillon et bureaucratique, avec, dans les entreprises des dirigeants et des managers qui donnent des caps, appliquent  des politiques intrusives, invasives, qui harcèlent.

C'est un Etat qui est dans le contrôle de tout, à la différence de l’ultra-libéralisme " trumpien " qui lui " laisse faire " et abandonne les populations aux forces sauvages du privé ou du marché. Ces deux formes de libéralisme, qui servent le marché de manière très différente, sont tout aussi dangereuses l’une que l’autre.

 

 

Barbara Stiegler : “ la crise sanitaire actuelle est le pur produit du néolibéralisme ”
Barbara Stiegler : “ la crise sanitaire actuelle est le pur produit du néolibéralisme ”
Barbara Stiegler : “ la crise sanitaire actuelle est le pur produit du néolibéralisme ”

-

Comment pouvons-nous parvenir à cette démocratie sanitaire que vous appelez de vos vœux ?
Barbara Stiegler : A l’hôpital mais pas seulement, dans tous les domaines, les premières lignes doivent reprendre la main.
Dans la santé, l’éducation, la recherche, les médias, les institutions culturelles….

  • Les politiques et managers ont transformé ces métiers qui formaient la base de nos démocraties, ils leur ont imposé des réformes permanentes, exigé de la flexibilité et de l’adaptabilité, c'est-à-dire en fait, une forme de soumission, en imposant l’idée que c’était aller dans le sens de l’histoire. 

 

Sauf que, mobilisations après mobilisations, la colère ne retombe pas, les élites continuent de se discréditer.

  • Au lieu de passer leur temps à dénoncer les fake news des réseaux sociaux et à expliquer que pouvoir rime avec savoir, les gouvernants gagneraient à reconnaître leur retard, ce décalage qui sape leur autorité.

 

C’est pourquoi les choix de santé publique, d’éducation, d’environnement doivent être l’affaire de tous et non des experts et des dirigeants.
Le néolibéralisme n’est pas seulement sur les places financières ou dans les entreprises il est en chacun de nous, dans nos minuscules façons de vivre, il est temps de retrouver notre puissance vitale et d’agir sur notre propre environnement local. 

 

  • Gilets jaunes, manifestations hospitalières, crise du corona virus, l’individu comprend qu’il n’est plus tout seul face à  son écran, face à son chef, face à sa hiérarchie et que les populations de citoyens peuvent elles aussi " s’armer " collectivement, par-delà les clivages de secteurs, de classes et de générations.

 

 

-On comptera les morts
Barbara Stiegler : J'avoue regarder le futur avec un mélange d’inquiétude et d’espérance, celui d’une philosophe qui a trouvé ici et maintenant une autre façon de respirer.
Même si elle sait que la lutte sera âpre et qu’il faudra tenir dans le temps, elle croit au réveil politique … En ce jour de printemps le ciel est clair et l’horizon dégagé. 

 

Lors des manifestations, on pouvait lire sur les banderoles des hospitaliers " vous comptez votre argent, on comptera les morts ". C’était il y a un an, aujourd’hui les soignants du terrain se disent prêts à reprendre les clés du camion.

 

Notes :

[1Barbara Stiegler

[2] « Il faut s’adapter » paru chez Gallimard en Février 2019

 

Pour en savoir plus :

- Economie. Le néo-libéralisme contaminé

- Covid-19 : Une crise globale, systémique, sans précédent

- Barbara Stiegler : « Les autorités détournent les questions sanitaires pour instaurer une société de contrôle »

Partager cet article
Repost0
19 avril 2020 7 19 /04 /avril /2020 13:31
Coronavirus : J.L. Melenchon, transformer la dette,... en dette perpétuelle...
Coronavirus : J.L. Melenchon, transformer la dette,... en dette perpétuelle...

Jean-Luc Melenchon : " Autant le dire clair : la crise sociale va être terrible ! " 


Si l’économie productive n’est pas réanimée, le choc de la récession va détruire des millions d’emplois dans le monde, désorganisant les chaînes longues d’interdépendances des capacités productives.

À conditions et méthodes capitalistes égales, la violence du choc économique va donc avoir un impact social de très grande magnitude. Ce qui s’est toujours traduit dans l’Histoire par de grosses secousses politiques. Je ne développe pas ici. Je veux attirer l’attention sur autre chose. Les observateurs sans naïveté savent que la compétition pour que la sortie de crise donne un avantage comparatif est commencée. C’est dire l’état d’esprit qui règne. La date de sortie de confinement des Allemands en est une illustration des plus criantes.

Il faut donc tenter deux opérations en même temps : retrouver du crédit en grande quantité et faire bifurquer le modèle de production pour écologiser et relocaliser les appareils de production pour réduire les bien trop longues chaînes d’interdépendance qui les constituent d’un bout à l’autre de la planète. Le contexte aura été utile si nous le faisons car il n’y a pas de meilleure préparation aux chocs qui vont suivre : celui d’autres épidémies désormais certaines, et celui du changement climatique. Sinon, souvenons nous que des deux précédentes impasses de l’économie capitaliste mondiale sont sorti deux guerres mondiales qui ont failli emporter la civilisation humaine (pour lire l'intégrale[2]) .

Ainsi, le 17 avril 2020 à l’Assemblée nationale, Jean-Luc Mélenchon a affirmé que la dette des États ne pourrait pas être remboursée et qu’il fallait « abattre le mur de la dette ».

Il a aussi soutenu que face à une situation aussi dangereuse qui peut mener les États à la guerre ou à la banqueroute, l’Europe se dérobait. Il a dénoncé l’échec subi par notre pays sur la question des eurobonds et a expliqué que la banque centrale du Royaume-Uni prêtait directement au gouvernement britannique et que la banque centrale américaine avait carrément aboli le risque en rachetant les dettes publiques et privées.

Jean-Luc Mélenchon a infine proposé que la dette des États soit rachetée par la Banque centrale européenne pour être transformée en dette perpétuelle à intérêt nul afin que les États retrouvent leurs capacités de financement et préparent la transition écologique[1].

 

Source : Eric Durand | mis à jour le 25/09/2022

-

Commençons déjà par dresser l'état des lieux de la dette en 2020

Car aujourd'hui, elle est à nouveau agitée pour que le peuple ait peur et se taise... alors que Le ministre du Budget a annoncé l'installation d'un groupe de travail chargé de réfléchir au redressement, à terme, des finances publiques françaises, c'est à dire au retour de l'austérité[6] :

  • On nous dit en effet : la dette atteindra 2 798 Mrd d'€ en 2021 soit 116,2% du PIB. Du jamais vu depuis la 2iéme guerre mondiale[4]
  • C'EST FAUX !... TAUX D'ENDETTEMENT 2020 de la France 14,5 % du Pib annuel[5] !

 

 

-La dette perpétuelle, une vieille idée qui a déjà fait ses preuves

Le principal avantage d’une obligation perpétuelle est de ne pas avoir à rembourser le capital de la dette vu qu’il n’y a pas d’échéance, mais seulement à verser des intérêts calculés sur le capital (dans le cadre de la proposition de J.L. Melenchon à intérêt nul) et ce, théoriquement de façon illimitée.

  • L’idée d’une dette perpétuelle est loin d’être nouvelle.

En plus d’être un spécialiste des obligations à très long terme (50 voire 100 ans), le Royaume-Uni a déjà émis, à plusieurs reprises, des obligations perpétuelles. Certains titres de dette datant du 18ème siècle sont ainsi toujours actifs mais l’inflation a depuis rendu leur remboursement quasi-insignifiant. Lors de la première guerre mondiale, le gouvernement britannique a aussi émis le « War Loan », qui reste la plus importante dette perpétuelle du Royaume aujourd’hui, estimée à 2,5 milliards d’euros. Mais plus pour longtemps, puisque le Trésor britannique a décidé de racheter le 9 mars prochain l’intégralité de cette dette, qui versait 5 puis 3,5% d’intérêt par an. La majorité des 120,000 détenteurs en détiennent toutefois pour moins de 1.000 livres. Le gouvernement britannique veut en effet profiter des taux extrêmement bas à l’heure actuelle pour racheter ses vieilles dettes et n’exclut pas d’émettre de nouvelles obligations perpétuelles, qui deviennent encore plus intéressantes dans ces conditions.

  • La France n’est pas non plus une débutante dans le domaine.

Le premier véritable emprunt public émis en 1535 sous François 1er était une dette perpétuelle, alors appelée « rente ». En 1825, l’Etat français a émis une obligation perpétuelle de 3% qui a couru jusqu’en 1987, date à laquelle ces titres de dette, mis en Bourse, ont tous été rachetés par le Trésor. De la même manière, une dette perpétuelle émise à la Libération a été définitivement rachetée à la fin des années 80.

 

Samedi 18 avril à l'occasion de la première manif numérique en ligne Jean-Luc Mélenchon expliquait que la dette des États doit être rachetée par la Banque centrale européenne pour être transformée en dette perpétuelle à intérêt nul.

 

 

-Jean-Luc Melenchon : coronavirus, « Il faut annuler la dette »

Comment annuler la dette pour redémarrer l’économie : " Plutôt que de racheter aux banques privées des titres de dettes des États , la BCE les achèterait directement aux États. Elle les stockerait en dette perpétuelle à intérêt négatif (c’est le cas des emprunts de long terme aujourd’hui). Les États retrouveraient leur capacité de financement pour de nouveaux emprunts et l’ancienne dette fondrait petit à petit, au fil de l’inflation dans les coffres de la Banque Centrale Européenne. Et ne serait jamais payée. Car bien sûr ces dettes ne seront jamais payées " déclare J.L. Melenchon le 11 avril.

 

-Décryptage de la solution Melenchon (par LE BON SENS - Antoine Léaument)

Pour faire face à la crise économique provoquée par la crise sanitaire du coronavirus, le gouvernement a décidé de creuser la dette. Celle-ci va maintenant dépasser les... 115% du PIB. Elle est devenue impayable, sauf à vouloir y consacrer tous les moyens de l'État pendant les cent prochaines années. Impensable alors qu'il nous faut engager au plus vite la transition écologique et développer de nouveau nos services publics. C'est pourquoi Jean-Luc Mélenchon propose de l'annuler.

 

Dans cette vidéo, j'explique pourquoi la dette est d'abord un outil politique utilisé par les libéraux pour détruire les services publics et les remplacer petit à petit par le privé. Je montre aussi comment ils l'utilisent pour faire toujours plus de cadeaux fiscaux aux plus riches alors qu'il faudrait au contraire les imposer davantage. 

 

Je parle également de la politique dite de « quantitative easing » mise en place par la BCE pour racheter aux banques privées une partie de leurs titres de dettes, y compris des dettes d'État. Je présente enfin la proposition de Jean-Luc Mélenchon d'une annulation de la dette des États qui passerait en sa transformation en une dette perpétuelle à taux nul. Une proposition de bon sens désormais partagée même par des libéraux comme Alain Minc. 

Notes :

[1Coronavirus : le mur de la dette doit tomber !

[2] Pourquoi et comment annuler la dette des États européens ?

[4] Covid-19 : la France et le piège de la dette

[52020 : La dette à nouveau agitée pour que le peuple ait peur et se taise...

[6] Le ministre du Budget a annoncé l'installation d'un groupe de travail chargé de réfléchir au redressement, à terme, des finances publiques françaises, c'est à dire au retour de l'austérité

 

Pour en savoir encore plus :

Quand on parle de rapport dette/PIB (produit intérieur brut) de quoi parle-t-on ?

- En 2014 : La dette agitée pour que le peuple ait peur : STOP à l'enfumage ! Le principe de calcul de la dette par rapport au PIB est toujours d'actualité

- " maturité de la dette " : Bruno Lemaire donne raison à J.L. Mélenchon

- 2020 : La dette à nouveau agitée pour que le peuple ait peur et se taise...

- Coronavirus : cause unique de la crise économique et financière, ou déclencheur et accélérateur d’une crise majeure du système capitaliste ?

- Comment annuler la dette pour redémarrer l’économie ?

- J.l. melenchon : En Europe, le mur de la dette doit tomber »

- Excellente tribune qui démontre qu'il n'y a pas obstacle juridique à l'annulation des dettes publiques par la BCE.

- Annuler les dettes ? Un choix politique, pas magique

- 2020 : Emmanuel Macron appelle à son tour à «annuler» les dettes des pays africains ,.... elle est seulement suspendue 

- Pour la Sécurité sociale aussi, l’avenir ne peut pas être consacré au remboursement de la dette.

- Pour l’après-Covid, plus de 100 économistes demandent à la BCE d’annuler les dettes publique

- Pourquoi et comment annuler la dette des États européens ?

- Mélenchon : " Mes solutions pour nous libérer d'un futur enchainé au remboursement sans fin de la dette "

ANNULATION DE LA DETTE ÉTUDIANTE AUX ÉTATS-UNIS : LA FIN D’UN TOTEM NÉOLIBÉRAL

- Europe : 18 ans après le « non » au TCE, l’annulation des dettes publiques, une priorité politique absolue

 

Partager cet article
Repost0
5 avril 2020 7 05 /04 /avril /2020 11:19
Coronavirus : cause unique de la crise économique et financière, ou déclencheur et accélérateur d’une crise majeure du système capitaliste ?
Coronavirus : cause unique de la crise économique et financière, ou déclencheur et accélérateur d’une crise majeure du système capitaliste ?

Depuis début mars, la crise économique et boursière s’est développée avec rapidité, menaçant l’ensemble du système financier international, sans que l’on puisse prédire quelle sera son ampleur et sa durée.

La lecture dominante qui est faite de cette crise, dans la presse économique en particulier, est qu’il s’agit d’un « accident », d’une crise imprévue provoquée par une épidémie, et que tout peut revenir dans l’ordre au plus vite quand l’épidémie aura été surmontée.

Mais une autre lecture apparaît dès que l’on aborde certains des principaux développements de cette crise : celle d’une profonde crise du système capitaliste, qui était en gestation avant le début de l’épidémie, et dont l’épidémie est le déclencheur puis l’accélérateur, une crise du mode de production capitaliste lui –même.

 

Source : Midi Insoumis Populaire et Citoyen par Serge Goudard, PG Lyon | Mis à jour le 27/12/2020

-Une cause « extérieure » à l’économie ?
Un éditorial du quotidien Les Échos (17 mars) est significatif de l’analyse dominante : « Les frontières européennes vont être fermées. Ce moment dramatique va causer des dégâts économiques. Bruno Le Maire s’emploie avec énergie à les minimiser en utilisant les instruments éprouvés en 2008. Tant mieux (…) Contrairement à 2008, le virus n’est pas dans l’économie, mais extérieur : elle pourra rebondir. En Chine, la production industrielle a plongé de 13% en janvier-février, mais elle repart. Cela signifie que ce moment Sur cette base, l’auteur (Dominique Seux) affirme donc : « Le meilleur moyen de limiter la catastrophe économique est que la crise sanitaire dure le moins longtemps possible ».

 

Formellement, l’auteur a raison sur un point : le point de départ de la crise relève d’abord d’un fait « biologique », non de l’économie (sachant qu’on peut aussitôt faire remarquer : sa diffusion a été facilitée par la mondialisation accrue de l’économie, par les politiques d’austérité qui ont affaibli les systèmes de santé, et par le retard à agir des gouvernements qui craignaient d’abord le coût financier des mesures à prendre). terrible n’est pas indépassable ».

 

  • Mais il y a une contradiction dans ce raisonnement formel : comment peut-on écrire que la cause de la crise actuelle est fondamentalement différente de celle de 2008 (alors interne à l’économie) et se féliciter que les outils pour surmonter cette crise soient les mêmes que ceux utilisés en 2008 ? Un même remède pour deux causes inverses ?
  • Or, ce sont bien les mêmes « instruments éprouvés » (sic) qui sont mis en oeuvre aujourd’hui comme en 2008 : taux d’intérêts quasi nuls et achats massifs de titres obligataires par les banques centrales, pour sauver les banques privées et éviter la faillite des États, explosion des dettes des États pour surmonter la crise économique.

 

Ce paradoxe pose question :

- si les « remèdes » sont les mêmes qu’en 2008, n’est-ce pas précisément parce que, au-delà de la cause immédiate, il s’agit de soigner les mêmes faiblesses fondamentales du système économique ?

- Et parce que le virus a activé, au sein de l’économie, les mêmes contradictions qu’en 2008, et avec une plus grande intensité encore ?

 

-Au point de départ

  • Le discours des médias ne laisse guère de place au doute : la crise économique qui se développe a une cause simple et manifeste, qui est l’épidémie de coronavirus.
  • Les faits semblent parler d’eux-mêmes : l’épidémie a commencé en Chine, dans la région de Wuhan, sans doute fin novembre 2019, et cette épidémie ainsi que les mesures sanitaires (doublées de mesures policières), a brisé la production manufacturière de cette région. Trois premières villes, dont Wuhan, sont mises en quarantaine le 22 janvier. Puis des mesures de restriction de la circulation sont étendues.​​​​​​​ La production de marchandises et les exportations plongent aussitôt, mettant en difficulté la production dans d’autres pays du fait de l’étroite imbrication des chaînes de productions industrielles mondiales. La politique de flux tendu appliquée à ces « chaînes de valeurs » a aggravé la situation.
  • Puis, l’épidémie a essaimé : touchant notamment la Corée du sud et le Japon, puis l’Italie, la France, et plus ou moins rapidement tous les continents. Et, partout, les mêmes conséquences : effondrement de l’activité touristique, du transport aérien des personnes, chutes des ventes (automobile notamment). Puis, dans un deuxième temps, fermetures d’entreprises et crise boursière pouvant ouvrir la voie à une crise financière (bancaire, monétaire…).

 

 

-Une crise qui se développe au pas de charge (janvier-mars)
La situation évolue rapidement. Chaque jour les principaux indicateurs – niveau de la production et des transports, cours du pétrole, indices boursiers, situation des banques, etc – subissent de fortes variations, le plus souvent à la baisse. Dès la mi-mars, nombre d’éléments attestent de la violence de la crise.

 

Le 2 mars déjà, l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) avait procédé à une première révision, à la baisse, de ses prévisions de croissance mondiale, estimées à 2,4% pour 2020 au lieu de 2,9% prévus antérieurement.

 

Trois semaines plus tard, ce n’est plus la perspective d’une croissance moindre dont il s’agit, mais d’une possible récession mondiale (Les Échos du 23 mars). En Chine même, la production industrielle se serait rétractée de 13,5% en janvier-février. Pour la zone euro, on prévoit une baisse réelle du PIB de 24% au deuxième trimestre (en taux annualisé) selon la Deutsche Bank, dont 28% pour l’Allemagne. Pour l’année 2020, le PIB de la zone euro reculerait de 2,9%. D’autres estimations évoquent un recul du PIB allemand de 5% en 2020, et de 6% pour l’Italie…

 

 

-

Recul du transport maritime, effondrement du trafic aérien et de l’activité touristique

  • En février, le nombre de porte-conteneurs partis de Chine se serait effondré de moitié, sachant que la Chine est à l’origine de 20% du trafic mondial de produits manufacturés intermédiaires. En volume, le commerce mondial devrait reculer de 2,5% (sur une base annualisée) au premier trimestre. Pour la suite, c’est l’incertitude, certains prévoyant un nouveau recul de 1% au deuxième trimestre ;
  • Pour le transport aérien, c’est un cataclysme. En quelques jours, les compagnies suppriment 75 à 100% de leurs vols. Leurs pertes financières sont colossales, qui laissent prévoir de nombreuses faillites. Le 17 mars, l’Association internationale du transport aérien (Iata) chiffre entre 150 et 200 milliards l’aide globale nécessaire. Le 24 mars, l’estimation dépasse 250 milliards ;
  • Pour l’activité touristique, qui représente plus de 10% du PIB mondial, le désastre est total. Quant à l’industrie automobile, marquée d’abord par des arrêts de production en Chine, elle est ensuite touchée par l’effondrement des ventes. En France (le 16 mars), aux États-Unis et ailleurs, toutes les usines sont mises à l’arrêt.

 

 

-Chute du prix du pétrole
Cette chute commence fin février du fait de la baisse de la consommation chinoise. Vendredi 6 mars, l’OPEP et la Russie échouent à trouver un nouvel accord de réduction de la production qui aurait permis de faire remonter le prix du pétrole. L’Arabie Saoudite prend alors la décision unilatérale de brader son pétrole pour préserver ses parts de marché. Le lundi 9 mars, les prix s’effondrent alors de 30%.

 

 

-Krach boursier historique
Le niveau, très élevé, que les principales Bourses avaient atteint en 2019, était resté relativement stable en janvier 2020 puis durant les trois premières semaines de février. Ainsi l’indice parisien du CAC 40, entre le 1er janvier et le 21 février, oscillait entre 6040 et 6100 points.

 

Puis il commence à tomber, lourdement le 28 février : une baisse de 8,3%. La même semaine, le Dow Jones perd plus de 9% (de 28 800 points à 25 400) et l’indice Nikkei perd 6,5%.

 

Après de nouvelles baisses du 2 au 7 mars, le lundi 9 mars prend le caractère d’un « lundi noir », avec des chutes historiques de l’ordre de 8%. Cette chute est accentuée par la guerre des prix du pétrole engagée par l’Arabie Saoudite.

 

Après un petit rebond, la descente reprend. Le jeudi 12 mars, c’est l’effondrement général : le CAC 40 se retrouve à 4025 points, après avoir perdu plus de 2000 points en moins de 3 semaines. Le Dow Jones est tombé à 21 150 points, soit une chute de 7650 points durant la même période, les autres Bourses tombent dans les mêmes proportions, perdant de 20 à 30%.

 

La descente se poursuit ensuite : le lundi 16 mars, le CAC 40 est à 3880 points. Tout ce qui avait été gagné depuis 2013 est effacé. Les pertes, sur les principales places mondiales, sont de 35 à 40% : une débâcle historique. Plus violente qu’en 2008. Puis, du fait notamment de l’intervention des banques centrales, le marché rebondit partiellement. Le mercredi 25 mars, le CAC 40 est remonté à 4430 points. Ce n’est que provisoire : le 1er avril, le CAC 40 est redescendu à 4230 points, le Dow Jones à 21 260.

 

En apparence donc, c’est bien l’épidémie de coronavirus et les mesures sanitaires qu’elle implique qui est la seule cause de cet effondrement économique puis des Bourses.

 

Coronavirus : cause unique de la crise économique et financière, ou déclencheur et accélérateur d’une crise majeure du système capitaliste ?

-Des capacités de production excédentaires avant même la crise
Pourtant, durant les mois précédents le début de cette épidémie, nombre d’indicateurs montraient clairement que, douze ans après la crise de 2007-2008, une nouvelle crise du système capitalisme menaçait, sans qu’on puisse dire alors quel en serait l’élément déclencheur ni le moment précis du début de cette crise.

 

Prenons quelques exemples :

  • La croissance globale ? Celle de la zone euro était déjà proche de zéro fin 2019 (1,9% pour l’année 2019 contre 2,5% en 2017). Selon le FMI, la Chine était entrée dans une « phase de ralentissement » en 2019 ;
  • L’automobile ? Ses capacités mondiales de production étaient déjà largement excédentaires, et les ventes, qui avaient fortement progressé de 2009 à 2018, étaient en baisse depuis 2018. Pour la seule année 2018, les ventes avaient reculé de 0,8% dont 3.5% pour le Chine ;
  • Le transport maritime ? Dès août 2018, les entreprises de transport avaient commencé de réduire leurs capacités sur la plupart des voies commerciales. Puis la baisse s’est accélérée à partir de la mi-janvier 2020 ;
  • Le transport aérien ? La hausse croissante de ce mode de transport avaient conduit les compagnies aériennes à une avalanche de commandes auxquelles les fabricants d’avions n’arrivaient que péniblement à faire face ;

Mais en même temps, ce mode de transport ultra-concurrentiel à l’échelle internationale ne laissait aux compagnies qu’une faible marge de profit, les poussant à faire des économies de personnels. Ainsi, le 27 février, la direction de KLM présente un plan de réduction des effectifs de 1770 postes sur trois ans, plan préparé dès avant l’ouverture de la crise. Dès lors, le moindre imprévu majeur s’avère catastrophique, et va se traduire par des faillites et des annulations de commandes.

  • Le pétrole ? La situation de surproduction mondiale (due notamment aux nouveaux modes d’extraction en Amérique du nord) poussait depuis des années à la baisse des prix. Celle-ci avait été partiellement endiguée depuis trois ans par un accord de cartel passé entre l’OPEP et la Russie pour réduire la production. La baisse plus forte de la demande, début 2020, a fait – pour un temps au moins – voler en éclats cet accord. « L’endettement bon marché a créé des bulles complètement folles »
  • La situation est analogue en ce qui concerne la Bourse et différents secteurs tels l’immobilier. Le formidable krach actuel est provoqué par l’épidémie, mais cela fait des mois (voire des années) que nombre d’économistes s’inquiétaient de la formation de bulles spéculatives, et en avaient identifié la cause majeure.

L’un des fondateurs de la société de gestion et d’investissement Tikehau Capital a beau jeu de rappeler (Les Échos du 20 mars 2020) : « Cela fait au moins deux ans que nous alertons sur l’existence d’une bulle tout à fait inhabituelle. À la suite des interventions des banques centrales après 2008, le levier a augmenté partout dans la sphère financière, que ce soit dans le coté ou dans le non coté. Cet endettement bon marché a fait s’envoler le prix des actifs et créé des bulles complètement folles. Il y aura des ajustements, que ce soit dans l’immobilier, le capital-investissement, la dette et même le marché de l’art… ». L’ennui pour ce financier (qui gère « seulement » 23,8 milliards d’actifs quand certains fonds en gèrent plus 500 milliards…), c’est que ce qui se prépare, ce ne sont pas seulement des « ajustements », mais un effondrement.

 

C’est cette montagne de dettes, déjà considérable en 2008 et qui n’a fait que croître depuis, qui constitue aujourd’hui une menace majeure : la brutale incapacité des entreprises à rembourser leurs emprunts met en difficulté les banques et fissure, par des mécanismes divers, l’ensemble du système financier.

 

C’est ce qui conduit les Banques centrales et les gouvernements à utiliser les mêmes instruments qu’en 2008, à une échelle plus importante encore. Mais ces dettes gigantesques, cet Himalaya de capital fictif, ce n’est pas un coronavirus qui les a créées …

 

-Une crise prévisible… et prévue

  • Le 29 novembre 2018, Capital publiait un article : « La prochaine crise pourrait être un véritable tsunami, selon l’économiste Georges Nurdin, consultant et écrivain ».
  • Sur le caractère prévisible de cette crise, et prévue par divers économistes, on peut relire aussi les articles publiés par L’insurgé d’octobre-novembre 2019, le premier étant titré : « L’économie mondiale au point de bascule ». L’épidémie de Covid-19 intervient dans une situation déjà instable : elle fait basculer la situation, puis accélère le développement de la crise.
  • L'économiste Jean-Luc Ginder confirme cette analyse : « La crise financière et économique était annoncée. La crise sanitaire causée par le coronavirus n’en est pas la cause mais l’accélérateur ». 

Car au-delà des secteurs particuliers ci-dessus évoqués, il faut rappeler que – pour une part majeure - la crise de 2007-2008 avait été surmontée par le recours à des taux d’intérêts quasi nuls (voire négatifs) pratiqués par les banques centrales qui avaient inondé la planète de liquidités, permettant aux États, aux entreprises et aux particuliers d’accroître leur endettement. À cela s’étaient ajoutées des mesures exceptionnelles, les banques centrales prenant en pension, massivement, titres d’états et obligations d’entreprises. Dans le cas de la Banque centrale européenne (BCE), les rachats d’actifs étaient encore, peu avant la crise, de 20 milliards d’euros mensuels.

 

Ces mesures, appliquées des années durant, ont permis de prolonger la phase de croissance et de maintenir en vie des « entreprises zombies ». C’est cet extraordinaire château de cartes qui menace de s’effondrer.

 

En quelques semaines, nombre d’entreprises ne peuvent plus rembourser leurs dettes, mettant les banques en difficulté. Le marché des titres à très court terme émis par les entreprises commence à vaciller.

 

Le marché des obligations d’État est lui aussi menacé, les états risquent de ne plus pouvoir refinancer leurs dettes… Jusqu’à la première semaine de mars, les États pouvaient encore emprunter à des taux dérisoires. Refinancer leurs dettes monstrueuses sans problème. Mais très vite, à la mi-mars, la situation dérape : pour les obligations à 10 ans, l’Allemagne reste à taux négatif, mais la France passe d’un taux négatif à un taux positif (quasi + 0,5% le 13 mars). Le taux italien passe de 1% à 2,5%.

 

Il ne s’agit plus donc seulement d’un choc sur le système productif provoqué par une épidémie. Ce sont notamment les dettes accumulées antérieurement qui peuvent transformer le choc en une grande récession. Il s’agit désormais d’une crise générale du capitalisme et de son système financier.

 

 

-Mars 2020 : mesures chocs et tirs de bazooka
Très vite, des mesures massives sont décidées par les banques centrales et par les gouvernements :

  • Mardi 3 mars, la Réserve fédérale américaine (FED) annonce par surprise une baisse de ses taux directeurs, désormais situés entre 1 et 1,25%. L’impact est limité. Une semaine plus tard, l’Allemagne annonce que 550 milliards d’euros de prêts bancaires aux entreprises seront garantis par l’État ;
  • Dimanche 15 mars, la FED baisse ses taux à 0% et annonce de nouveaux achats de titres ;
  • Lundi 16 mars, en France, nouvelle salve de mesures faisant suite à celles annoncées le 12 mars. Une enveloppe de 300 milliards d’euros permettra de garantir tous les nouveaux prêts sollicités par les entreprises auprès des banques ;
  • Le mercredi 18 mars, la BCE frappe un grand coup : un programme d’urgence de 750 milliards d’euros pour acheter des obligations publiques et privées afin de calmer les marchés obligataires et éviter notamment que les emprunts des États ne deviennent prohibitifs. Dès le lendemain, elle achète de la dette d’État à pleines brassées. Ce même jour, l’État français peut donc lever 7,5 milliards à moyen terme sans trop de mal ;
  • Le vendredi 20 mars, le taux pour l’obligataire Français à 10 ans retombe en partie (+ 0,24%), et pour l’italien à 1,74 : les marchés sont donc rassurés, partiellement. Mais le risque d’une envolée des taux demeure élevé : d’ores et déjà, on prévoit pour la zone euro 350 milliards d’euros d’émissions publiques en 2020, en plus des emprunts prévus avant la crise.

 

-Des circonstances extraordinaires exigent une action extraordinaire
Cette déclaration de Christine Lagarde, la présidente de la BCE, le jeudi 19, vaut pour l’ensemble de banques centrales. Toutes baissent leurs taux d’intérêt. Pour les banques des puissances dominantes, le taux à 0% devient la règle.

 

Le recours au « quantitative easing » (QE, ou assouplissement quantitatif) mis en oeuvre depuis 2008 par la FED, la BCE et la Banque du Japon repart de plus belle : cela consiste à émettre du papier monnaie pour racheter des titre de dette, ce qui revient à financer sans limite la dette privée et publique.

 

Ce PEPP (programme d’achat urgence pandémique) lancé par la BCE représente 6% du PIB de la zone euro et monte à 1100 milliards d’euros le total des achats de dette prévus cette année. Au Royaume-Uni, la BoE renforce de 200 milliards ses achats de titres, etc.

 

Pour la FED, ce sera sans limites. Le 23 mars, elle annonce qu’elle achètera des titres « dans les quantités nécessaires » alors qu’elle avait déjà annoncé une relance de QE à hauteur de 700 milliards de dollars (500 milliards de titres du Trésor et au moins 200 milliards de titres adossés à des créances hypothécaires…). À cela vont s’ajouter d’autres mesures à hauteur de 300 milliards, en particulier l’achat sur le marché secondaire d’obligations émises par de grandes entreprises. Des mesures concernent aussi les marchés des prêts aux étudiants et des crédits à la consommation.

 

Le qualificatif d’« extraordinaire » s’applique aussi à l’intervention des États. Finies, les politiques cherchant à contenir l’endettement ! C’est déficit à tout va : non seulement les États garantissent à hauteur exceptionnelle les emprunts bancaires des entreprises, mais ils augmentent les dépenses publiques alors même que les ressources fiscales vont s’effondrer.

 

Ainsi, le 25 mars, le Sénat américain annone un accord entre Républicains et Démocrates, et avec le gouvernement, pour un plan « historique » de soutien à l’économie à hauteur de 2000 milliards. Ce plan prévoit des aides directes aux Américains et des prêts aux entreprises, en particulier du secteur aérien.

-Bis repetita ?
En fait, ce ne sont pas seulement les remèdes déjà utilisés en 2008 qui sont mis en oeuvre. D’emblée, les premières décisions vont bien au-delà des doses utilisées en 2008.

 

Qu’on en juge :

  • Les garanties d’emprunts données par l’État ? En Allemagne (réputée pour sa prudence) cette garantie équivaut à 16% du PIB. C’est énorme. Certes, ce n’est pas à proprement parler une « dépense » qui doit être budgétée car les emprunts garantis doivent être remboursés. Mais qui peut croire qu’ils seront tous remboursés, et dans quelle part ?

Le plus vraisemblable, c’est qu’une grande partie (voire la totalité) ne sera jamais remboursée.

 

  • L’envolée du déficit budgétaire ? Selon la banque UBS, les mesures budgétaires adoptées dans le monde représentent déjà 2% du PIB mondial, qui s’ajoutent aux déficits prévus avant la crise : un montant supérieur aux mesures adoptées en 2009, l’année la plus difficile pour l’économie lors de la précédente crise. Le seul plan américain équivaut à 10% du PIB du pays, sans comparaison avec le plan décidé en 2008 par Obama, à hauteur de 400 milliards.

 

  • Les mesures de « quantitative easing » ? Elles passent outre les limites que la BCE s’était fixée à elle-même, par exemple ne pas détenir plus de 33% de la dette d’un État, limite qui était déjà atteinte pour plusieurs d’entre eux.

 

Ce faisant, on entre dans des territoires inconnus : rien ne garantit que les brèches qui s’ouvrent dans le système financier seront colmatées. D’autant que les principaux leviers disponibles pour limiter la crise ont déjà été utilisés à l’excès, ce qui les rend moins efficaces.

 

Ainsi, avant même l’ouverture de la crise, les taux directeurs des banques centrales étaient très bas, une constante depuis 2008 : ce qui limite les possibilités de baisses supplémentaires. De ce fait, les deux baisses de taux décidées par la FED (3 mars et 15 mars) n’ont pas suffi pour arrêter la panique boursière.

 

Quant à la Banque Centrale européenne, son principal taux directeur (le taux de dépôt) était déjà négatif, à moins 0,5%.

 

Sans parler des défaillances d’États : avant même l’ouverture de la crise, l’Argentine est contrainte une fois encore de restructurer sa dette monumentale. Au FMI, elle demande de pouvoir rééchelonner le remboursement de 44 milliards de dollars. Et, le 9 mars, c’est le Liban – écrasé par une dette publique équivalente à 170% de son PIB - qui se déclare incapable de rembourser une échéance de 1,2 milliards de dollars. D’autres pays suivront.

 

 

-Vers une baisse massive des investissements
Dans cette situation, mêmes les entreprises qui pourront tenir le choc – avec ou sans l’aide des États – vont réduire leurs investissements, voire les arrêter complètement. Ce qui va aggraver la crise économique. Mais le propre du capitalisme, c’est que chaque capitaliste fait comme bon lui semble pour ses profits. L’industrie pétrolière est ainsi l’une des premières à annoncer des réductions d’investissements, de l’ordre de 20%, soient 100 milliards de dollars (250 milliards de dollars en 2020 et 2021 dans l'exploration-production) à l’échelle mondiale selon des estimations faites en mars.

 

Par contre, les plans de soutien gigantesques vont permettre de sauver des entreprises qui étaient, dès avant la crise, au bord de la faillite.

  • Ainsi Boeing : son nouveau modèle, le 737 MAX est cloué au sol depuis un an, et cet avion a été qualifié, le vendredi 6 mars, par la commission des transports du Congrès américain, d’avion « fondamentalement défectueux et dangereux ». En janvier 2020, sa production est à l’arrêt. Pour Boeing, c’est une catastrophe.
  • Puis, le 25 mars, c’est la production des avions long-courriers qui est suspendue pendant 14 jours. Aussitôt, Boeing appelle l’État américain à son secours… Et obtient satisfaction : on lui garantirait ses emprunts à hauteur de 60 milliards. À cela s’ajoute une aide directe de 17 milliards. Avant même que la décision soit officielle, l’action de Boeing rebondit en Bourse.
  • En Italie, Alitalia était en quasi faillite, aucun repreneur n’en voulait… La crise du transport aérien l’achève, et la sauve : le 17 mars, le gouvernement italien annonce qu’il va prendre le contrôle de ce fleuron italien du transport aérien. 500 millions d’euros pourraient être injectés.

 

 

-« Helicopter money » et crise monétaire
Aussi importants soient les moyens mis en oeuvre par les banques centrales et les gouvernements durant le mois de mars, il est certain qu’ils ne suffiront pas à entraver la crise qui se développe par paliers. Dans les pays dominés (dits « en voie de développement »), le recours au confinement n’est même pas envisageable pour des raisons financières, et c’est une catastrophe sanitaire qui se prépare. Au Bénin, le Président vient de renoncer au confinement : « Si nous prenons des mesures qui affament tout le monde, elles finiront très vite par être bravées et bafouées. ».

 

Dans les pays dominants, aussi puissants soient-ils, la crise sanitaire et sociale est encore en plein développement : aux États-Unis mêmes, le système de santé n’est pas préparé à un tel choc, et déjà les travailleurs mis en chômage se comptent par millions (3,3 millions de travailleurs ont fait une première demande d’allocations-chômage entre le 14 et le 21 mars[2])... et la France entre en récession le 6 avril après le recul de 6% du PIB au premier trimestre.

 

Dans cette situation, les banques centrales, y compris la BCE, vont devoir multiplier les mesures « non orthodoxes » : acheter des actifs financiers risqués, et recourir à l’arrosage financier direct, sans contrepartie, pour soutenir l’investissement et la consommation en chute libre. C’est ce que l’on appelle, métaphoriquement, l’ « helicopter money ». Et si la BCE n’a pas le droit, théoriquement, de s’engager dans cette politique, elle pourrait contourner l’interdiction : ce serait les gouvernements qui mettraient eux-mêmes en oeuvre ce soutien financier direct, et émettraient pour cela des titres du Trésor… que la BCE achèterait.

En outre, aux Etats-Unis, l’argent distribué par cette mesure spectaculaire pourrait mettre jusqu’à quatre mois pour tomber du ciel : L’« helicopter money arrivera en retard ». La preuve que les appellations choc ne tiennent pas toujours leurs promesses !

 

Mais le risque d’une telle politique, ce n’est pas seulement la formation de nouvelles bulles, cela pourrait être une crise monétaire majeure, une fuite générale devant la monnaie. Ce serait un véritable cataclysme !

 

 

-Les travailleurs devront payer

- Les travailleurs paient dés à présent : c’est la seule certitude pour les capitalistes. Dès aujourd’hui au prix de leur santé, car les entreprises qui ont des clients s’opposent à ce que les salariés exercent leur droit de retrait avec le soutien du gouvernement (C’est surtout quand la fuite des clients les contraint à fermer – comme dans l’automobile - qu’elles disent se soucier de la santé des salariés.)

 

- Et ils devront payer demain, que la crise sanitaire soit ou non surmontée :

  • Déjà, la loi que vient de faire voter Macron[1] en donne un avant-goût, puisqu’elle prévoit notamment de réduire les droits concernant les congés et d’augmenter le nombre d’heures supplémentaires ;
  • Dans un entretien au JDD, le numéro 2 des Républicains préconise de supprimer jusqu'à 5 jours de RTT pour financer la santé et l'agriculture. Il propose en contrepartie d'augmenter les salaires en permettant par exemple "aux entreprises d’accorder jusqu’à 5000 euros de prime totalement défiscalisée et désocialisée"....

et nous n'en sommes qu'au début !

 

Cela laisse présager d’importants combats sociaux. Déjà, alors mêmes qu’ils sont entravés par les mesures de confinement, des travailleurs ont organisé des grèves en Italie et en Espagne. Mais au-delà de ces combats à venir, rarement la nécessité de remettre en cause les fondements du capitalisme n’aura été si grande.

 

-----------------------------------

 

-

" Les trois quarts " des restructurations n'ont pas de rapport avec le Covid-19, dénonce Philippe Martinez (CGT)

Face aux suppressions de postes en cascade annoncées ces dernières semaines, le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez réclame un engagement des entreprises à ne pas licencier pour prétendre aux prêts accordés par l'Etat[3].

 

Coronavirus : cause unique de la crise économique et financière, ou déclencheur et accélérateur d’une crise majeure du système capitaliste ?

Notes :

[1]  22 mars 2020 : l'Assemblée adopte définitivement le projet de loi relatif à l'état d'urgence sanitaire qui s'attaque aux congés payés, aux 35h, au repos dominical.... . Les députés insoumis dénoncent les conséquences sociales, et rejoints par la Gauche Démocrate et Républicaine, 3 du Groupe Socialistes et apparentés et 1 Groupe Libertés et Territoires et votent contre. Et Olivier Falorni député de la 1ére circonscription de Charente Maritime ? Il ne trouve rien à y redire... et, de concert avec LREM, Les Républicains, Le Mouvement Démocrates et apparentés, l'UDI et Libertés et Territoires et le RN, il vote pour !

[2CORONAVIRUS : CHÔMAGE RECORD AUX ETATS-UNIS AVEC 3,3 MILLIONS DE CHÔMEURS SUPPLÉMENTAIRES EN UNE SEMAINE

[3] " Les trois quarts " des restructurations n'ont pas de rapport avec le Covid-19, dénonce Philippe Martinez (CGT)

 

Pour en savoir plus : 

- « La pandémie du coronavirus s’inscrit dans une crise multidimensionnelle du capitalisme »

- J.L. Melenchon : « C’est un temps propice aux grands basculements intimes ou sociaux » – Interview dans « Le Figaro »

- Parti de Gauche : L’aléas de trop

- Coronavirus, effondrement et monde meilleur… Comment le COVID19 remet notre monde en question

- FI : Les 10 leçons du Coronavirus pour l’écologie politique

- FI : Loin de gommer les inégalités sociales, le Coronavirus ne fait que les accroître

- FI : Coronavirus : les 11 mesures d’urgence proposées par la France insoumise

- Crise du coronavirus : Nicolas Framont, sociologue « Le virus exacerbe les inégalités »

TRIBUNE UNITAIRE - POUR QUE LE JOUR D’APRÈS SOIT EN RUPTURE AVEC LE DÉSORDRE NÉOLIBÉRAL

- Transformation écologique, services publics, communs : c’est l’heure d’oser !

- Des issues à la crise sans changer d’économie ?

- Le Vent se lève : LE PIRE EST DEVANT NOUS ! Il faut en effet tenter de mettre au jour ce qui se joue dans l’extraordinaire crise devant nous.

- « Le coronavirus est le jugement dernier sur la globalisation ». Emmanuel Todd.

- Economie. Le néo-libéralisme contaminé

- Alors que la conjoncture mondiale cumule les déboires, les dividendes versés aux actionnaires au deuxième trimestre 2019 affichent un nouveau record, avec 51 milliards de dollars de dividendes, la France conforte sa place de meilleur rémunérateur d'actionnaires en Europe.

- « Comment la pandémie sert de prétexte pour relancer la spéculation financière »

- Les marchés financiers restent les gagnants de la crise économique et sanitaire

Partager cet article
Repost0
24 septembre 2018 1 24 /09 /septembre /2018 13:40
Pourquoi les capitalistes ont une « aversion » pour le plein-emploi : l’explication de Kalecki

Trop méconnu, Michal Kalecki[1], né en Pologne en 1899 et fortement influencé par Karl Marx et Rosa Luxembourg, est un des auteurs dont les travaux, avec John Maynard Keynes, sont au fondement de la théorie post-keynésienne. Ici, nous montrons l’acuité et l’actualité de sa vision de l’économie politique.

 

Source : Le Vent se lève

Auteur en 1933 d’un livre remarquable intitulé Essai sur la théorie du cycle des affaires, Michal Kalecki est souvent présenté, à juste titre, comme celui qui a anticipé de nombreux développements théoriques que Keynes abordera trois ans plus tard dans la Théorie Générale, à commencer par l’importance de l’investissement et du rôle de l’Etat dans l’économie.  Mais nous allons plutôt ici nous intéresser à un autre article majeur de Michal Kalecki, publié en 1943 et intitulé « Political Aspects of Full Employment » (Political Quarterly, 4), où l’auteur développe sa vision de l’économie politique, qui est comme vous allez le voir, toujours d’actualité.

 

 

-

Le paradoxe du refus du plein-emploi

Le but de Kalecki est de montrer que si le plein emploi est réalisable de fait via une augmentation des dépenses gouvernementales, il n’en demeure pas moins qu’une opposition politique au plein-emploi est possible. C’est pourquoi Kalecki écrit : « Parmi les opposants à cette doctrine, il y avait (et il y a encore) d’éminents prétendus « experts économiques » étroitement liés aux banques et aux industries. Cela suggère qu’il y a un arrière-plan politique dans l’opposition à la doctrine du plein emploi, même si les arguments invoqués sont économiques ». Notons avec un certain plaisir que les “prétendus experts économiques”, que l’on trouve aujourd’hui dans de nombreux médias faisaient, semble-t-il, déjà rage en 1943.

 

Pour étayer son argumentation, Kalecki invoque l’opposition des grandes entreprises aux programmes d’augmentation des dépenses gouvernementales mises en œuvre lors du New Deal du président Américain Roosevelt, ou lors de l’expérience du Front Populaire en France. Il s’agit là d’un paradoxe, car une augmentation des dépenses publiques bénéficie en théorie autant aux travailleurs qu’aux entreprises, puisque la dépense gouvernementale supplémentaire conduit à une augmentation des profits. Michal Kalecki cherche donc à résoudre ce paradoxe et invoque pour cela trois raisons principales.

 

 

-

La Résolution du paradoxe

Tout d’abord, Michal Kalecki affirme que les capitalistes n’ont pas intérêt au plein emploi, du fait des changements politiques et sociaux qu’il induit. On retrouve là dans une certaine mesure la théorie de “ l’armée de réserve ” de Karl Marx[2]. En effet, lorsque le plein emploi est atteint, la menace du licenciement n’agit plus comme contrainte disciplinaire, et produit une modification du rapport de force en faveur des salariés, qui conduira, à travers l’essor de la syndicalisation par exemple, à une hausse des salaires. Pourtant, une hausse de la part des salaires, pour Kalecki, est plus de nature à augmenter les prix et à générer de l’inflation (au détriment des rentiers) qu’à baisser les profits en tant que tels. Ainsi Kalecki conclut : « la discipline dans les usines et la stabilité politique sont plus appréciées que les profits par les chefs d’entreprises. Leur instinct de classe leur dit qu’un plein emploi durable est malsain, et que le chômage fait partie intégrante d’un système capitaliste normal ».

 

La seconde raison consiste en une « aversion » des capitalistes contre l’intervention de l’État en matière d’emploi. En effet, lorsque l’État n’intervient pas, l’économie est selon Kalecki tributaire du « niveau de confiance » des capitalistes, et tout ce qui pourrait l’affecter est par conséquent à bannir, puisqu’il en résulterait une chute de l’investissement et de la production.

 

Les capitalistes ont de ce fait un « contrôle indirect » sur le gouvernement. Or, à partir du moment où l’État utilise la dépense publique pour redresser l’économie, les capitalistes perdent le contrôle, et l’économie n’est dès lors plus dépendante du niveau de confiance. Ainsi Kalecki écrit : « la fonction sociale de la doctrine des « finances saines » est de rendre le niveau d’emploi dépendant du niveau de confiance ». Comment ne pas faire ici le parallèle avec les mentions incessantes d’une partie de la classe politique et des milieux d’affaires à la “confiance” (“restaurer la confiance”, “climat de confiance”), qui serait dès lors l’élément clé, la condition sine qua non d’une reprise économique ? En réalité, l’explosion de la référence à la “confiance” est le pendant, la conséquence de l’affaiblissement de la maîtrise de l’économie par la puissance publique qui trouve son origine dans tournant néo-libéral à partir de la fin des années 1970.

 

La dernière raison consiste en une méfiance des capitalistes envers les investissements étatiques, mais aussi envers les subventions à la consommation. Dans le cas des investissements étatiques, les capitalistes craignent que l’État, en nationalisant un secteur donné par exemple, n’empiète sur des débouchés réservés aux « affaires privées ». Nous pouvons ici remarquer que depuis le début des années 1980, c’est par ailleurs bien une dynamique inverse de privatisation des grands groupes publics qui est à l’oeuvre dans nos économies. Concernant les crédits à la consommation, Kalecki écrit : « on pourrait s’attendre à ce que les hommes d’affaire et leurs experts soient d’autant plus favorables aux subventions à la consommation de masse qu’à l’investissement public ; puisque celle-ci ne s’engage dans aucune sorte d’entreprise ». Or, comme le remarque l’auteur, il n’en n’est rien, car on toucherait alors au plus profond de « l’éthique capitaliste », qui veut que « chacun gagne son pain à la sueur de son front ». Là encore, nous pouvons constater que le texte de Kalecki est toujours éminemment d’actualité compte tenu des références permanentes au mérite, au rejet de “l’assistanat”, ou encore à la valeur travail.

 

Pression à la hausse sur les salaires, discipline des salariés, volonté de rendre l’économie tributaire du “niveau de confiance”, et donc du bon vouloir des capitalistes, peur de voir des débouchés potentiels aspirés par la puissance étatique, maintien de l’éthique capitaliste du mérite, voilà autant de raisons qui expliquent la méfiance, voire l’aversion des capitalistes pour le plein-emploi. Et voici aussi pourquoi le problème du chômage de masse, qui pourrait, dans une économie mondialisée, être combattu par des actions étatiques coordonnées, n’est pas résolu.

 

Note

[1] https://fr.wikipedia.org/wiki/Micha%C5%82_Kalecki

[2] L'Armée de réserve de travailleurs est un concept d'économie politique étudié par Karl Marx. Il est développé dans le chapitre 25 de son livre Le Capital. Ce concept entretient des rapports avec le phénomène du chômage dans les sociétés capitalistes. ... Le terme « chômeurs » suppose un filtre idéologique particulier.

 

Partager cet article
Repost0
29 août 2018 3 29 /08 /août /2018 14:25
« Il est faux de dire que les profits sont la condition de l’emploi »

Ni « théorème de Schmidt »... ni « théorème de Macron »

 

Rappel : Le « théorème de Schmidt » est un slogan politique devenu célèbre, énoncé par le chancelier ouest-allemand Helmut Schmidt le 3 novembre 1974 : « Les profits d'aujourd'hui sont les investissements de demain et les emplois d'après-demain[2] ».

Or, l'orientation économique donnée aujourd'hui à la France serait plus proche du « théorème » de Macron » : «  Les profits d’aujourd’hui sont les dividendes de demain et l’évasion fiscale d’après-demain[3] ».

Ceci étant dit, pour Nasser Mansouri-Guilani, économiste et syndicaliste, les normes de rentabilité toujours plus élevées du CAC 40 jouent contre le travail en alourdissant le coût du capital (voir entretien)

A noter que pour près de 7 Français sur 10, le rôle principal de l'entreprise c'est de créer de l'emploi avant de dégager du profit[1]

 

Sources : L'Humanité par  Sébastien Crépel

- Sébastien Crépel : Selon le recensement de l’Humanité, les entreprises du CAC 40 sont engagées dans des plans de suppression d’au moins 15 000 emplois. Il n’y a donc pas de corrélation entre profits et emploi ?

Nasser Mansouri-Guilani : Le discours libéral selon lequel il faut que les profits s’améliorent pour que l’on crée des emplois est infondé. C’est un discours idéologique, à l’instar du théorème de Schmidt (chancelier de la RFA de 1974 à 1982 – NDLR) qui dit que « les profits d’aujourd’hui sont les investissements de demain et les emplois d’après-demain ». Depuis au moins trois décennies que ce théorème est appliqué, la part des profits monte sans que l’investissement et encore moins l’emploi n’augmentent nécessairement. Il n’y a pas de mystère : si ça augmente pour le capital, ça baisse pour le travail. Depuis les années 1980, la part des salaires a chuté dans la valeur ajoutée. On est toujours dans ce schéma qui fait que la priorité est donnée aux profits. Dans ce conflit entre les intérêts du travail et ceux du capital, les libéraux disent qu’il faut réduire le coût du travail en quantité et en qualité de l’emploi, mais aussi en termes de rémunérations. La contrepartie, c’est la hausse du coût du capital, c’est-à-dire qu’une part croissante des richesses produites par les travailleurs est mobilisée pour rémunérer les détenteurs de capitaux, et notamment les actionnaires.

 

 

- Sébastien Crépel : Les outils qu’Emmanuel Macron a inventés par ordonnances, comme la « rupture conventionnelle collective[4] » qu’utilisent les banques ou encore PSA, donnent-ils des possibilités nouvelles à ces entreprises très profitables pour réduire encore le « coût du travail » ?

Nasser Mansouri-Guilani : Ce qui est nouveau, ce sont en effet les politiques du gouvernement, et notamment les ordonnances Macron, qui donnent plus de facilité aux patrons pour réduire le « coût du travail » en se débarrassant des travailleurs dont ils ne veulent plus. D’autres facilités nouvelles sont accordées aux détenteurs de capitaux, en particulier les plus riches, comme la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune, là aussi sous prétexte de favoriser l’investissement et l’emploi. Cela participe de la même logique. Mais, quand on regarde concrètement, on voit que l’emploi n’augmente pas et que la croissance économique ralentit. On reste dans une phase de faiblesse de l’activité en regard des besoins de la population, avec un chômage officiellement à 9 %, mais en réalité deux fois plus élevé si l’on compte tous les exclus du travail pour des raisons économiques, c’est-à-dire, en dernière analyse, parce que les détenteurs de capitaux demandent plus de profits.

 

 

- Sébastien Crépel : Certaines sociétés du CAC 40 qui suppriment des postes affichent des profits en baisse : exemple BNP Paribas ou Sanofi. Une perte de profitabilité est-elle une raison acceptable pour se résigner aux destructions d’emplois ?

Nasser Mansouri-Guilani : Ce phénomène est typique de la logique de la financiarisation de l’économie, qui, pour résumer, correspond à la généralisation de l’exigence de rentabilité des capitaux les plus puissants. Ainsi, si la norme pour ces derniers est un rendement de 10 %, alors tout le monde doit se caler dessus : dans ce cas, 7 %, ce n’est pas suffisant. Cette logique de rentabilité maximale et à court terme joue contre le monde du travail, en termes d’emplois mais aussi de conditions de travail et de salaires. Cette financiarisation va aussi de pair avec la désindustrialisation. On nous sert toujours l’argument qu’être plus compétitif va nous permettre d’exporter davantage, mais l’état de notre commerce extérieur montre que cela ne se vérifie pas. Plus cette financiarisation se développe, plus s’affaiblit le potentiel productif du pays, et plus le commerce extérieur se dégrade.

 

 

- Sébastien Crépel : Une récente étude montrait que 93 % des entreprises se refusent à procéder à des augmentations collectives de salaires[5] . Est-ce un effet de cette financiarisation de l’économie que vous dénoncez ?

Nasser Mansouri-Guilani : La financiarisation se traduit par la réduction des droits et protections collectives des travailleurs, et donc par l’individualisation des rémunérations. Les négociations collectives ont des conséquences sur le long terme : c’est autre chose que de payer à la tête du client. Tout cela est cohérent. De même, la désindustrialisation affaiblit l’ensemble des travailleurs, dans la mesure où les conventions collectives dans l’industrie sont plus protectrices pour les salariés. En affaiblissant l’industrie, on tire l’ensemble des travailleurs vers le bas.

 

- Sébastien Crépel : Que faudrait-il faire pour sortir de cette logique ?

Nasser Mansouri-Guilani : Il faut valoriser le travail et dévaloriser le capital. C’est tout l’inverse de ce qu’ont fait les gouvernements depuis plusieurs décennies. Quand on dit « valoriser le travail », cela veut dire améliorer la qualité de l’emploi, les salaires, l’avancement, les conditions de travail… Cela passe par exemple par appliquer l’égalité femmes-hommes au travail. Tant que la moitié de la force de travail est dévalorisée par les bas salaires et la précarité ou le blocage des carrières, on ne peut pas parler de valorisation du travail. 

 

Note :

[1] https://fondation-entrepreneurs.mma/news/174653/le-role-des-entreprises-c-146-est-de-creer-de-l-146-emploi-avant-de-degager-du-profit.htm

[2] " Les profits d'aujourd'hui sont les investissements de demain et les emplois d'après-demain" : 40 ans après, quel bilan réel pour le théorème d’Helmut Schmidt en Allemagne

[3] Jean-Luc Mélenchon : C’est la reprise ! La re-crise approche

[4] Les ruptures conventionnelles en hausse de 3,7% en un an

[5] Salaires, une augmentation en trompe-l'oeil

 

Pour en savoir plus :

- La " théorie du ruissellement ", fable des années 1980, moteur de la politique à Macron

- 407 milliards, des profits sans partage

Partager cet article
Repost0
3 août 2018 5 03 /08 /août /2018 15:48
Qu'est-ce que le « capitalisme populaire » prôné par Emmanuel Macron ?

Sources : notamment Libération, Midi Insoumis, Populaire et Citoyen le 03 aout 2018, mis à jour le  31/05/2023

Dans son discours du 9 juillet 2018 devant le Congrès[1], Emmanuel Macron a défendu un « capitalisme populaire » qui « passe par un investissement des salariés dans les entreprises avec un nouvel élan de la participation et de l'intéressement ». Cette notion de « capitalisme populaire » qui permettrait notamment au public d'acheter des parts d'une entreprise, y compris nationalisée, renvoie à l'ère Thatcher au Royaume-Uni et au programme du Rassemblement National (ex FN).

 

Ainsi, la Première ministre britannique voyait dans le capitalisme populaire|2] « une croisade destinée à permettre au plus grand nombre de participer de plein droit à la vie économique de la nation » en 1986. David Cameron avait repris l'idée en 2012[3], déclarant qu'un des « thèmes consistants des conservateurs a toujours été l'ambition de construire une nation d'actionnaires, d'épargnants et de propriétaires immobiliers ».

 

En France, la notion de « capitalisme populaire » faisait partie du programme de Marine Le Pen[4] lors de la campagne présidentielle de 2012. La candidate du Front national proposait ainsi « l'instauration d'une réserve légale de titres » pouvant atteindre 10% du capital dans les entreprises de plus de 50 salariés, qui leur donnerait « l'accès aux dividendes mais pas au vote[8] ».

 

 

- Macron passe aux actes...

Ainsi, Macron reprend la sémantique d’extrême-droite, défendu durant la première cohabitation[7] par le club de l’Horloge, ou de Michel de Poncins (fondateur d'un Parti capitaliste populaire, dont le manifeste Tous capitalistes rencontre un certain succès « dans les milieux frontistes et traditionalistes catholiques[8]. »), un rédacteur du programme FN (aujourd'hui Rassemblement National) dans les années 80.

 

Et c’est Macron qui dit faire barrage à l’extrême-droite ? !

 

 

- Première mise en œuvre concrète : la vente des logements sociaux !

" Pour un capitalisme populaire ", comment faire de la France un pays de propriétaires et d'investisseurs comme s'interrogeait  Xavier Rolet le 08/12/2014 dans Les Échos[6] ? Pourquoi ne pas commencer par le parc HLM ? Il vaut quelque 225 milliards d'euros, en se basant sur les loyers perçus sur 4,5 millions d'unités converties en emprunt à trente ans. Offrons aux locataires, à coût égal, un titre de propriété !

 

Ainsi, le texte de loi "évolution du logement, de l’aménagement et du numérique" (Elan), adopté le 12 juin 2018 en 1ére lecture (voir détail du scrutin) à l'Assemblée nationale et qui prévoit, véritable vente à la découpe du patrimoine commun[9][10], de multiplier par cinq les ventes de logements sociaux à leurs occupants ou à des tiers constitue une première mise en œuvre pratique de ce concept de « capitalisme populaire » en donnant l'illusion de s'attaquer à la concentration des richesses au mains de quelques uns.

 

 

- La " réforme de l'entreprise " second volet

L’édifice du macronisme medefiste pour reconfigurer l’entreprise capitaliste et ses modalités de domination s’appuient sur trois piliers législatifs ultralibéraux :

  • une refonte du code du travail, ce sont les ordonnances Macron de 2017 véritable coup d'état social ;
  • une nouvelle loi sur la protection du secret des affaires parue au JO du 30 juillet 2018 et ce malgré le dépôt, par les groupes France Insoumise, Gauche Démocrate et Républicaine, Nouvelle gauche d'un recours devant le Conseil constitutionnel[15] ;
  • une loi sur la structure et le fonctionnement des entreprises donnant encore plus d’importance à l’actionnariat, dite Loi PACTE.

 

Sur ce dernier point, s’inspirant des conclusions du Rapport Notat- Senard[11] sur la réforme de l’entreprise, Macron entend redéfinir le rôle de l’entreprise jusque dans le Code civil au travers d'une Loi PACTE[12].

 

Nicole Belloubet, ministre de la Justice, l'affirme  : «  On a bien déjà changé le Code du travail, alors pourquoi pas le Code civil… Il ne faut rien s’interdire.[14]  »

 

Pour les Économistes atterrés " le rapport Notat- Senard lui-même (121 pages) est dense, et formule 20 propositions. Toutes évidemment ne sont pas de la même importance. Nous nous concentrerons ici sur trois d’entre elles, à notre sens largement principales. Mais auparavant et pour en saisir le sens et la portée, un préalable est nécessaire. Il a trait à ce qu’on peut considérer comme la toile de fond sur laquelle le débat sur l’entreprise se mène aujourd’hui en France. "... et accouche d'une souris[13].

 

Pour lire cette note dans son intégralité, téléchargez le fichier en PDF.

A suivre donc de prés !

 

 

- Ce qu'il en dit : Jean-Marie Dormian[5]

Sources : RoueLibre

L’oxymore trompeur et désuet du « capitalisme populaire »

 

Dans son discours devant le Congrès, Emmanuel Macron a défendu le principe moderniste d’un « capitalisme populaire » qui « passe par un investissement des salariés dans les entreprises avec un nouvel élan de la participation et de l’intéressement ». L’association de la référence au « capitalisme » avec celle du « peuple » relève véritablement de la supercherie la plus complète et même du miroir aux alouettes ! Il s’agit d’une pure invention ultra-libérale qui surgit dans le périodes où il faut trouver un moyen de lier l’entreprise avec des salarié(e)s pour lesquels on prépare de mauvais coups. Posséder des actions n’accorde aucun privilège et aucune part au pouvoir dirigeant. En fait cette notion de « capitalisme populaire » qui permettrait donc au public d’acheter des parts d’une entreprise, y compris nationalisée, renvoie à l’ère Thatcher au Royaume-Uni dont on connaît les effets produits sur l’emploi. La Dame de Fer voyait en effet dans le capitalisme populaire « une croisade destinée à permettre au plus grand nombre de participer de plein droit à la vie économique de la nation » en…. 1986. Une conception qui n’a pas produit les effets escomptés dans bien des secteurs comme les mines, les transports, l’énergie. Elle a été reprise par son disciple David Cameron qui en 2012, déclarait qu’un des « thèmes consistants des conservateurs a toujours été l’ambition de construire une nation d’actionnaires, d’épargnants et de propriétaires immobiliers »....

 


...Il serait aussi utile de rappeler que de Gaulle n’avait pas eu l’audace d’associer « capitalisme » et « populaire » mais qu’il avait préféré lancer la notion de « participation » en juillet 1967 confirmé par un texte paru le 17 août. il avait forcé son gouvernement peu enclin à de telles initiatives De Gaulle à promulguer une ordonnance à laquelle il a personnellement veillé sur la mise en œuvre obligatoire de la « participation » dans les entreprises de 100 salariés et plus. C’est d’après des témoignages de l’époque le Général de Gaulle lui-même qui avait imposé contre toutes les oppositions ces dispositions dans le train de mesures économiques et sociales prises par ordonnances en plein été, et qui les a défendues pour éviter qu’elles soient vidées de leur substance. Il aurait même rédigé de sa main une note comminatoire pour le Gouvernement dont le témoin de l’époque qui faisait le lien entre l’Élysée et le Gouvernement sur ce sujet indique qu’elle portait en haut de la page la mention « Voici ce qu’il faut faire » !- allant plus loin que le projet que ce dernier, sur lequel de nombreuses personnalités politiques de l’époque ont travaillé. Nous voici donc revenus plus d’un demi-siècle en marche arrière. Il semble que le Président de la République n’ait pas lu jusqu’au bout les principes édictés par de Gaulle car ils étaient bien plus révolutionnaires et modernes que ceux qui ont été vaguement évoqués à Versailles !


« Il faut encore que dans la grande évolution très considérable et inévitable, toutes nos activités, le travail et les travailleurs trouvent leur sécurité en dépit des changements d’emploi ou d’emplacement qui sont nécessaires. Ce à quoi l’aide publique est maintenant employée sous toute sorte de formes, soit à l’échelle de la nation, soit à l’échelle des régions et il faut enfin que dans les entreprises, la participation directe du personnel au résultat, au capital et aux responsabilités deviennent une des données de base de l’économie française. Très vaste transformation sociale dans laquelle l’intéressement  qui est maintenant prescrit par la loi constitue une importante étape. Comme le bonheur, le progrès ça n’existe que par comparaison. » Des propos qui ouvraient bien d’autres avancées sociales que celles du « capitalisme populaire » principe étriqué issu de l’imagination de ces penseurs qui considèrent que l’argent virtuel reste le meilleur moyen de détourner les consciences citoyennes. De Gaulle ne ut jamais mettre en œuvre sa réforme sociale puisque mai 68 vint donner d’autres droits aux salarié(e)s qui depuis n’ont cessé d’être rabotés par des gouvernements dévoués au « capitalisme impopulaire ».


Chaque mesure, chaque réforme, chaque décision est en lien direct avec le « pognon » susceptible, dans une société de surconsommation, de régler tous les problèmes. Pour la pauvreté il est ainsi envisagé de réduire… les frais bancaires. Pour la sécurité routière on invente le 80km/h qui procurera… des subsides pour les hôpitaux. Pour les collectivités locales il invente le malus… contraint qui doit rapporter du bonus à l’État sans améliorer d’un iota sa situation réelle ! Partout on ne parle que de milliards à économiser… au titre de la participation au redressement des finances publiques.

 

Bref le « capitalisme populaire » n’est qu’un oxymore de plus à mettre au rang des bizarreries politiciennes.

 

Notes :

[1] Emmanuel Macron devant le Congrès de Versailles - Son discours en intégralité

[2] https://www.margaretthatcher.org/document/106498

[3] David Cameron pledges era of 'popular capitalism'

[4] Marine Le Pen dévoile son "capitalisme populaire"

[5] Jean-Marie Darmian

[6] Xavier Rolet  : Pour un capitalisme populaire

[7] La première cohabitation en France a lieu de mars 1986 à mai 1988 : alors que François Mitterrand est président de la République depuis 1981, les élections législatives de mars 1986 portent à l'Assemblée nationale une majorité de droite.

[8] CHAPITRE 10. " UN PROGRAMME « RÉVOLUTIONNAIRE » ? " par Pierre-André Taguieff source : Nonna Mayer et Pascal Perrineau " Le Front national à découvert "

[9] Loi Logement : les députés décident de faciliter la vente des HLM

[10] la France insoumise et la loi ELAN

[11] L'entreprise, objet d'intérêt collectif : rapport NOTAT Nicole, SENARD Jean-Dominique, BARFETY Jean-Baptiste

[12] Projet de Loi PACTE (Plan d’Action pour la Croissance et la Transformation des Entreprises)

[13] Changer l'entreprise ? Quand la montagne accouche d'une souris

[14] Réforme. Redéfinir le rôle de l’entreprise jusque dans le Code civil

[15] Loi secret des affaires : LFI, GDR et NG déposent un recours devant le Conseil constitutionnel

 

 

- Emmanuel Todd : " Macron est un enfant du Front National "

« On a eu pendant une longue période une sorte de comédie gauche-droite, où Sarkozy faisait semblant d’être raciste, Hollande faisait semblant d’être hostile aux banques, puis finalement tout le monde faisait la même chose. »

 

Emmanuel Todd était l'un des invités de notre dernier débat : « La finance a-t-elle pris le pouvoir ? », dans Vraiment Politique, l'émission d'Aude Lancelin.

 

Partager cet article
Repost0
10 juillet 2018 2 10 /07 /juillet /2018 13:57
Capitalisme, Libéralisme : quelles différences entre ces deux notions ?

" Il serait absurde de penser qu’on peut « réformer », « améliorer » ou « adoucir » le capitalisme. On n’a pas pu, par le passé, « améliorer » l’esclavage, « réformer » le colonialisme ou « corriger » les défauts du système de discrimination entre les hommes et les femmes. Les révolutionnaires de 1789 ont détruit la féodalité, la monarchie absolue et le servage. Impossible d’« améliorer » la féodalité ! " Jean Ziegler

 

 

Entretien avec Jean-Marie Harribey, Professeur d’économie à l’université de Bordeaux

 

Sources : Altermonde-sans-frontières par  Pascale Fourier | mis à jour le 16/02/2023

- Pascale Fourier : Quelle est la différence entre libéralisme et capitalisme ?

Jean-Marie Harribey : Ces deux termes au cours des dernières années ont souvent été pris l’un pour l’autre et cette assimilation, pour ne pas dire cette confusion, est le fait à la fois des tenants du système comme de ses adversaires, ce qui rend cette confusion d’autant plus surprenante. Pour le dire simplement, capitalisme et libéralisme ont quelque chose à voir mais cependant renvoient à des niveaux différents :

  • Le libéralisme est d’abord une philosophie politique née, pour aller vite, à la suite du siècle des Lumières, une philosophie politique qui assure la primauté de l’individu et déclare tous les individus libres et égaux. Mais c’est aussi une doctrine économique que l’on peut décliner sous deux aspects : une présentation du capitalisme et un discours normatif sur le capitalisme. Ce système économique qu’est le capitalisme est fondé sur une déclaration de principe : la propriété privée est un droit naturel et la recherche de l’intérêt individuel mène à l’intérêt collectif. La somme des intérêts individuels recherchés par chacun d’entre nous doit nous mener spontanément à l’intérêt collectif et de ce fait on peut considérer que la société au sein de la philosophie libérale naît de la multiplication des contrats marchands que nouent les individus. Voilà la présentation, par le libéralisme, du capitalisme dans sa version doctrine économique. Mais c’est aussi un discours normatif sur le capitalisme que l’on peut résumer ainsi : rien ne doit entraver le marché, rien ne doit entraver son fonctionnement et donc l’État doit être réduit à sa plus simple expression c’est-à-dire doit se limiter à garantir que les règles du jeu sont respectées par tous et sanctionner éventuellement les agents qui contreviendraient à ces règles.

 

  • Le capitalisme n’est pas une philosophie politique et n’est pas non plus une doctrine économique : c’est un système, c’est-à-dire une organisation de la société qui trouve sa légitimation dans le libéralisme à la fois dans sa version philosophie politique et dans la doctrine économique. Système économique, organisation de la société donc, qui est fondé sur le fait que les uns sont propriétaires des outils de production tandis que les autres, dépossédés de ces outils, sont obligés de vendre leur force de travail, les premiers salariant les seconds et donc vivants sur le fruit du travail effectué par les salariés. Par conséquent ce système économique ne peut connaître une extension qu’en généralisant l’emploi de la force de travail salarié c’est-à-dire en prélevant une partie de la richesse produite par ceux-ci. La philosophie politique, qui est le premier volet du libéralisme, est née à peu près à partir du siècle des Lumières tandis que la doctrine économique est née un peu plus tardivement, pratiquement simultanément à l’avènement du capitalisme. Les premiers économistes, que l’on peut appeler libéraux, ont écrit, pensé au moment où la révolution industrielle et le capitalisme sont apparus, à savoir en Angleterre qui a été le premier pays européen à connaître la révolution industrielle et dans lequel est né le capitalisme ; l’Angleterre qui est aussi le premier pays qui a vu une pensée économique constituée avec notamment Adam Smith à la fin du XVIIIème siècle. Avant cela il y avait une forme de pré-capitalisme mais qui était essentiellement axée sur l’échange des marchandises, c’est pour cela que l’on parle de capitalisme marchand. Pour aller vite, depuis la fin du Moyen-Age jusqu’au XVIIIème siècle une bourgeoisie commerçante s’est peu à peu enrichie, non pas en faisant produire des marchandises pour les vendre ensuite, mais en faisant du négoce à travers le monde (dès lors qu’ont été ouvertes la route de l’Amérique, la route des Indes, etc… ) pendant deux ou trois siècles, et ce n’est qu’au bout de cette période-là qu’il y a eu une première mutation, c’est-à-dire que les capitaux, au lieu de s’investir exclusivement dans la transaction de marchandises exotiques, se sont investis dans la production ce qui a donné naissance à l’industrie.

 

 

- Pascale Fourier : Qu’est-ce qui est remis en cause dans la critique du libéralisme ?

Jean-Marie Harribey : Dans la différenciation que nous avons faite entre capitalisme et libéralisme, le premier étant le système et le second légitimant dans le domaine des idées ce système, devant les dégâts provoqués par la libéralisation accélérée que le capitalisme a connu au cours des deux ou trois dernières décennies, un certain nombre de mouvements sociaux, de syndicats s’opposent à cette évolution que l’on appelle indifféremment mondialisation, mondialisation libérale, mondialisation financière. Pour que les choses ne soient pas trop obscures, disons que ce qu’on appelle la mondialisation est le résultat d’une évolution qui s’est produite au cours des trente dernières années qui a vu une liberté totale de circuler pour les capitaux leur être accordée, les capitaux circulaient déjà auparavant mais un certain nombre d’obstacles avaient été mis en place et maintenus dans l’après seconde guerre mondiale et progressivement, à partir des années 70-80, ces obstacles sont tombés un à un. Et aujourd’hui une liberté totale de circuler pour les capitaux existe, de fait ceux-ci ne s’en privent pas pour aller participer à la production de la richesse dans le monde et s’en approprier la plus grande part. Ce que l’on appelle la mondialisation, c’est donc cette ouverture généralisée des frontières à la circulation des capitaux et par voie de conséquence à la circulation des marchandises.

 

 

- Pascale Fourier : Le libéralisme mène-t-il forcément à la mondialisation ?

Jean-Marie Harribey : Je disais tout à l’heure que le libéralisme était un discours normatif sur le système, sur le capitalisme, parce que le libéralisme s’exprime par des politiques qui sont menées par des Etats ou par des groupements d’Etats à tel ou tel moment. Au cours de la décennie 70-80 un certain nombre de décisions ont été prises pour abaisser toutes les barrières à la libéralisation des capitaux pour passer des changes fixes aux changes flottants, pour rendre ses prérogatives aux marchés en privatisant un petit peu partout dans le monde des entreprises publiques et maintenant un certain nombre de services publics. Donc il y a eu une régression de l’intervention régulationniste des Etats au cours de cette période, et au contraire a été donné aux forces du marché des champs d’actions nouveaux ou en tout cas plus étendus puisque aujourd’hui des secteurs traditionnellement reconnus comme d’utilité publique et donc maîtrisés par la collectivité sont menacés de privatisation ou de privatisation rampante comme dans l’énergie, la santé, l’éducation, les retraites qui sont dans le collimateur des libéraux aujourd’hui pour justement donner au système économique capitaliste toujours de nouveaux champs d’activités où ils puissent rentabiliser les capitaux.

 

 

- Pascale Fourier : Cela suppose donc une extension aussi dans l’espace ?

Jean-Marie Harribey : C’est justement un des problèmes car l’extension dans l’espace a des limites, il n’y a plus aucune contrée de la planète dans laquelle le capitalisme n’a pas pénétré. Alors certes il a pénétré à des degrés divers, il y a encore des régions dans le monde où les paysans vivent sur leur petite parcelle de terre et n’ont pas encore beaucoup de rapport avec le marché mondial mais ça vient. Quand on voit la pression exercée par les multinationales pour imposer des OGM on comprend pourquoi ils ont l’ambition d’assujettir définitivement tous les paysans de la planète à la fourniture des semences puisque les semences OGM sont stériles et obligent les paysans du monde entier à venir se réapprovisionner chaque année. Il n’y a donc plus aujourd’hui un seul espace géographique qui soit encore préservé de la pénétration du capitalisme, en revanche il y a encore des espaces sectoriels qui sont plus ou moins préservés de cette pénétration et ces derniers espaces sectoriels qui étaient préservés jusqu’à présent sont ceux que j’ai cité, le système des retraites, celui de la santé et assez largement le système éducatif, ce sont ces trois domaines-là qui sont au centre du bras de fer qui se déroule actuellement au sein de l’OMC au sujet du fameux Accord général sur le commerce des services (AGCS) qui vise à libéraliser tous les secteurs évoqués et puis il faudrait mentionner également le fait que l’ensemble des connaissances du savoir humain et notamment toutes les découvertes scientifiques qui sont faites aujourd’hui sur le génome humain et sur l’ensemble des espèces vivantes sont menacées de privatisation dans la mesure où si les multinationales ont la possibilité de déposer des brevets sur ces découvertes, alors cela voudra dire qu’à l’avenir, tous ceux qui utiliseront pour leur activité économique ce progrès des connaissances, devront payer des royalties à ceux qui détiennent les brevets. On se rappelle la tentative de procès des firmes multinationales pharmaceutiques contre l’Afrique du Sud et le Brésil parce que ces derniers avaient eu le projet de distribuer à bas prix des médicaments génériques contre le SIDA à leurs malades. Devant le tollé que cette menace de procès avait soulevé, les multinationales avaient fini par reculer et enlever leur plainte contre ces deux pays. Mais la menace reste quand même présente car si le rapport de forces s’inversait en leur faveur il ne faut pas douter qu’elles reviendraient à la charge pour mettre des restrictions considérables à l’utilisation des découvertes scientifiques à tous les peuples de la terre.

 

 

- Pascale Fourier : La mondialisation n’est-elle pas aussi née au tournant des années 70 lorsque les marchés occidentaux ont été quasiment saturés de biens de production ?

Jean-Marie Harribey : Il y a effectivement un lien entre cette marche forcée, cette accélération de l’histoire, cette volonté d’abolir très rapidement toutes les barrières à la circulation des capitaux et des marchandises et le fait qu’au tournant des années 70 et 80 le système économique capitaliste connaissait une grave crise structurelle et profonde (car touchant à l’organisation même du système économique), cette marche forcée peut donc s’interpréter comme une réponse à cette crise structurelle. A cette époque, tous les pays développés ont connu dans un premier temps une baisse des taux de profit, des taux de rentabilité du capital et donc une moindre incitation à investir et donc un ralentissement très net de la croissance économique (même un arrêt pendant quelques années pour certains pays) et la réponse trouvée par les classes dirigeantes dans le monde et par les gouvernements qui en sont le plus souvent les porte-paroles fut la fuite en avant, c’est-à-dire profiter de cette crise-là pour d’abord imposer un recul au salariat, et c’est ce qui s’est produit : la montée du chômage a favorisé un affaiblissement des positions salariales dans le monde entier aussi bien dans les pays pauvres que dans les pays riches. Le système économique a ainsi rebondi sur ce renversement de rapport de forces, mais ce renversement qui lui a été profitable (puisque aujourd’hui il se trouve avoir rétabli considérablement ses taux de rentabilité, en tout cas jusqu’à la dernière période) a un effet pervers pour lui-même parce que plus vous laminez les positions salariales plus au bout d’un certain temps vous rencontrez la difficulté de l’écoulement des marchandises et la crise que nous connaissons de nouveau aujourd’hui après une euphorie et des espoirs faramineux qui avaient été placés dans la soi-disant « nouvelle économie », cette crise-là est en grande partie une crise de surproduction, c’est-à-dire que la plupart des marchés traditionnels aujourd’hui sont encombrés parce que les marchandises n’arrivent pas à s’écouler aussi facilement que les entreprises le souhaiteraient et le fait de ne pas pouvoir suffisamment écouler cette marchandises a des retombées ensuite sur les marchés financiers. L’éclatement de la bulle financière qui s’est produit depuis un peu plus d’un an est consécutif à cette difficulté de rentabilité pour le capital : la bulle ne peut pas éternellement enfler, il arrive un moment où elle a tellement enflé que les perspectives de rentabilité espérées ne se concrétisent pas et à ce moment-là elle éclate et c’est à cette situation-là que nous assistons aujourd’hui.

 

 

- Pascale Fourier : Y a-t-il quelque chose à faire contre ça, contre ce qui apparaît comme une pieuvre avec ses bras tentaculaires ?

Jean-Marie Harribey : Bien sûr, sinon nous n’en parlerions même pas ! D’abord il y a des urgences auxquelles il faut répondre. L’urgence, c’est de mettre un terme à l’appauvrissement général de la plupart des pays pauvres. Les mesures d’urgences les concernant sont assez simples, c’est-à-dire qu’il faut fournir une véritable aide à un véritable développement qualitatif ; il faut mettre en place un certain nombre de taxes internationales qui seraient affectées à cette aide publique internationale : taxe globale sur les transactions de change, type taxe Tobin, mais aussi taxe sur les profits des multinationales qui pourraient servir à assurer la satisfaction des besoins essentiels qui sont aujourd’hui niés. Ça c’est l’urgence, et en prenant ces mesures d’urgence on est amené à réintroduire une forme de régulation qui a été laminée au cours des deux dernières décennies. Cette réintroduction d’une régulation démocratique internationale suffit-elle ? Elle est absolument nécessaire mais à mon sens elle ne suffit pas parce que et c’est ça qui oppose d’une part les tenants d’un retour à une régulation pour refaire partir (j’allais dire conforter) le système sur des bases plus saines, moins spéculatives, moins dévastatrices, à ceux qui, d’autre part, pensent que de toutes façons le système économique fondé sur la recherche du profit est incompatible avec une véritable émergence de la solidarité à l’échelle du monde, est incompatible avec la préservation de la planète pour nos enfants à venir et donc il s’agit de savoir si on se sert de cette nouvelle régulation que l’on voudrait introduire pour pallier les méfaits les plus criants de ce système, ou bien si on s’en sert pour construire d’autres rapports sociaux. Car comme le disait déjà Keynes dans les années 30, l’humanité sait à peu près résoudre, si elle le veut bien, ses problèmes d’intendance mais elle a une très grande difficulté, cette humanité, c’est la tâche de construire d’autres relations entre les êtres humains, c’est-à-dire d’autres rapports sociaux comme disait Marx. Et là je crois que ces deux grands économistes se révèlent tout à fait : l’un qui voulait inventer de nouvelles relations humaines et l’autre qui pensait qu’on pouvait les construire en bâtissant d’autres rapports sociaux que ceux légués par le capitalisme. Donc une régulation est nécessaire, non pas pour conforter ce système mais au contraire pour s’en servir de levier, de tremplin de façon à ce que des processus démocratiques véritables voient le jour, il y a des exemples dans le monde qui montrent qu’on peut construire une véritable démocratie dont la ville de Porto Alegre est un exemple célèbre mais ce n’est pas un cas isolé, il y a d’autres expériences dans le monde qui sont menées. Je crois qu’il faut se servir de ces exemples-là pour montrer qu’il n’y a pas d’échéance fatale, que le capitalisme n’est pas la fin de l’histoire humaine et que celle-ci peut connaître de nouveaux et meilleurs rebondissements si, justement, on ne se contente pas de réaménager un système économique dont la logique est profondément dévastatrice à la fois socialement et écologiquement, et si progressivement on met en place un certain nombre de mécanismes et de mesures susceptibles d’inverser cette logique-là. Alors quelles mesures ?

 

Des mesures, pour être tout à fait simple et concret, qui peuvent être prises dans un laps de temps relativement raisonnable : chaque fois qu’on renforce les droits sociaux dans les entreprises, dans la cité, alors on enfonce un coin dans les mécanismes du capitalisme ; chaque fois qu’on réduit le temps de travail on réintroduit une réappropriation des gains de productivité ; chaque fois qu’on renforce le pouvoir des salariés on fait en sorte que la spéculation à la Bourse soit moins forte,… donc l’inversion de la logique du système ne viendra pas nécessairement comme on l’a cru autrefois d’un renversement violent voire militaire ou paramilitaire, on ne prendra pas l’Elysée de force mais je crois que si les mouvements sociaux et syndicaux aujourd’hui sont capables d’unir leurs efforts sur des terrains autrefois complètement séparés (le travail et le hors-travail) autour d’idées assez simples : réintroduire ou introduire des droits démocratiques partout, affecter prioritairement les gains de productivité à ceux qui les produisent et non pas à ceux qui s’enrichissent parce qu’ils possèdent le capital, je crois que là on tient une des pistes qui peuvent nous permettre de retrouver l’espoir et sortir de cette vision catastrophique dans laquelle nous craignions au départ de nous enfermer.

 

 

 

- Le néolibéralisme se met à jour : Macron, Rivera et Renzi

Le Vent Se Lève a organisé sa première université d'été à l'espace Main D'Oeuvres. Cette première édition s'intitule "Le Vent du Changement" pour mener un travail de renouveau intellectuel et de dialogue entre les forces progressistes.

 

Vous n’avez pas pu assister à notre Université d’été ? Revisionnez le débat autour des dernières évolutions du néolibéralisme. Nous recevions Vincent Dain (LVSL), Pierre Musso, François Cocq (France insoumise) et Juan Branco.

Partager cet article
Repost0
16 avril 2018 1 16 /04 /avril /2018 20:37
Le capitalisme est aujourd’hui obligé de casser les conquis sociaux. Voilà donc l’ennemi : le capitalisme

" Il serait absurde de penser qu’on peut « réformer », « améliorer » ou « adoucir » le capitalisme. On n’a pas pu, par le passé, « améliorer » l’esclavage, « réformer » le colonialisme ou « corriger » les défauts du système de discrimination entre les hommes et les femmes. Les révolutionnaires de 1789 ont détruit la féodalité, la monarchie absolue et le servage. Impossible d’« améliorer » la féodalité ! " Jean Ziegler

 

Sources :  ResPUBLICA* par Évariste

- Quand le sage montre la lune, beaucoup regarde le doigt !

Quand on est mécontent de Sarkozy, on choisit Hollande, puis mécontent de Hollande on vote Macron. Bientôt Macron deviendra impopulaire. Est-ce que la solution sera de voter pour un autre représentant de l’oligarchie capitaliste ? La question devient la suivante : « Est-ce que les citoyens, les travailleurs ont intérêt à se bouger uniquement pour changer de gérant du capital ? » La société du spectacle souchée sur le dispositif médiatique du mouvement réformateur néolibéral tente toujours de nous pousser à changer de gérant du capital dès que celui qui est au pouvoir n’a plus assez de soutiens populaires. Et pour l’instant, il réussit à nous diviser.

 

D’abord, en attaquant le principe de laïcité. Jean Jaurès disait que sans la laïcité, il y aurait une division entre ouvriers catholiques et ceux qui ne le seraient pas. Et qu’avec la laïcité et la loi de séparation, la religion était reléguée dans la sphère privée des citoyens et que cela unifiaient le prolétariat en vue de satisfaire les revendications ouvrières (repos du dimanche-1906, retraites ouvrières et paysannes-1910, impôt sur le revenu-1914). En développant le relativisme culturel inhérent au mouvement réformateur néolibéral, le dispositif Macron réussit, pour l’instant, de diviser le camp progressiste sur ce thème mais en même temps, il développe le communautarisme religieux pour lui faire jouer certaines missions de service public qui lui sont transférées suite au processus de privatisation des services publics.

 

Mais aussi, en réussissant ici et là, à diviser le salariat en faisant rentrer dans les têtes que le malheur des chômeurs et des salariés sans statuts spéciaux sont dus à ceux qui ont des statuts spéciaux (salariés de l’énergie, de la SNCF, des trois fonctions publiques, etc.). Alors que le but du mouvement réformateur néolibéral est en fait de baisser le ratio de tous les salaires par rapport à la somme des richesses produites. Tout simplement parce qu’il a besoin de plus de dividendes pour alimenter la spéculation immobilière, seule possibilité d’avoir pour l’oligarchie des taux de profits élevés (but du capitalisme) depuis que les taux de profits dans l’économie réelle sont très bas (période néolibérale).

 

Aucune innovation technologique n’a réussi à faire remonter les taux de profits de l’ensemble de l’économie capitaliste contrairement aux innovations précédentes (électricité, machine à vapeur, automobile, train, avions, etc.). La guerre, moyen d’augmenter les taux de profits grâce à la destruction du capital ne peut avoir lieu qu’en dehors du monde développé vu les capacités de destruction massive des grands pays impérialistes en concurrence entre eux. L’intensification et la déshumanisation du travail a entraîné des nouvelles maladies professionnelles (surmenage, stress, troubles musculo-squelettiques, etc.) voire une augmentation du nombre de suicides sur les lieux du travail y compris dans la fonction publique. Il ne reste donc, pour les dirigeants du système, que la baisse des salaires directs et socialisés. D’où l’attaque contre le salariat et pour l’auto-entreprenariat, contre le Code du travail, l’attaque contre les statuts, contre la Sécurité sociale, l’école et les services publics. Et qu’il faut un autre modèle politique basé sur un nouveau mode de production pour retrouver le chemin de l’émancipation par l’augmentation du niveau de vie du plus grand nombre avec le développement de la sécurité sociale, de l’école et des services publics.

 

Comprenons également que pour faire baisser les salaires socialisés, il faut faire baisser toutes les retraites. Pour ce faire, le projet est de mettre tous les salariés et indépendants dans une caisse unique fonctionnant par points ou en comptes notionnels. Mais cela demande de casser préalablement les statuts spéciaux (type SNCF par exemple) et remplacer des fonctionnaires par des contractuels de droit privé. Voilà pourquoi la résistance de tous les travailleurs à l’attaque contre les cheminots, contre la privatisation des services publics, contre les fonctions publiques est nécessaire. Si nous perdons cette bataille, ce sera encore plus dur pour tous après.

 

Avec ce que nous venons de dire, on comprend pourquoi le nouveau gérant du capital, Emmanuel Macron, soutenu par les dirigeants de la finance internationale, de l’Union européenne, du grand patronat, de la haute technocratie administrative, de la quasi-totalité des médias, des intellectuels organiques du capital, et des artistes également organiques du capital, veut aller vite. Car il doit faire cela avant la mi-mandat.

 

Voilà pourquoi le dispositif macronien s’est sorti du bourbier de Notre-Dame-des-Landes pour se concentrer sur l’attaque contre les cheminots et pour développer la privatisation massive des services publics et la suppression de 120.000 postes de fonctionnaires (50.000 dans la fonction publique d’Etat et 70.000 dans la fonction publique territoriale) via le Comité Action Publique 2022 (CAP 22). Le premier ministre a annoncé le 13 octobre dernier que le but était d’organiser « des transferts au secteur privé, voire des abandons de missions ». Il devrait annoncer en mai 2018 les mesures précises. Outre les suppressions de postes de fonctionnaires et la déstructuration des missions de service public, on aura des embauches de contractuels de droit privé, la totale dématérialisation électronique d’ici 2002, la rémunération à la rentabilité, le renforcement du pouvoir des directeurs technocrates et la généralisation du « nouveau management public » (avec son lot de harcèlement, de stress, de maladies professionnelles nouvelles, de suicides sur les lieux de travail, etc.). Et là cela va impacter la vie quotidienne vu que tous les services publics y compris les services de proximité seront impactés.

 

 

- Et nos tâches dans tout cela ?

  • Pour l’instant, suite aux manifestations du 22 mars, nous avons le conflit des cheminots qui perdure avec un début de solidarité financière par collecte électronique, la journée interprofessionnelle de la CGT le 19 avril et la montée parisienne pour une marche le 5 mai 2018 lancée par Ruffin et Lordon avec une partie des forces syndicales le 4 avril dernier à la Bourse du travail de Paris, marche soutenue par la France insoumise. Notre première tâche est de faire converger l’ensemble de ces forces syndicales et politiques car sans convergence pas de victoire possible.

 

  • Notre deuxième tâche consiste à mener dans un moment de luttes sociales la bataille pour une nouvelle hégémonie culturelle pour combattre la division populaire comme notée en début d’article. Refusons la division du peuple et ciblons nos vrais adversaires qui participent de l’oligarchie capitaliste et de leurs alliés. Rassemblons le salariat et refusons le recul des conquis sociaux. Développons le lien entre le combat laïque et le combat social pour rassembler et promouvoir la souveraineté populaire. Le tout en utilisant toutes les méthodes d’éducation populaire refondée (réunions publiques, conférences populaires sans conférenciers, cinés-débats, débat théâtral, ateliers de lecture, etc.)

 

  • Notre troisième tâche est de prendre le temps de la formation politique pour ne pas déléguer le processus décisionnaire à des élites même populaires.

Si le combat social est une priorité immédiate pour lutter contre la politique mortifère et destructrice d’Emmanuel Macron, deux enjeux demeurent que nous aurions tort de mettre en seconde priorité. La crise écologique (climat, biodiversité, pollutions) demeure n’en déplaise au silence de Nicolas Hulot et la planification écologique est une exigence par rapport à l’appétit sans limite des tenant du néo-libéralisme. Raison de plus pour soutenir également le versant écologique de la lutte des cheminots dans la période car un politique écologique appelle le transfert programmé de la route vers le train tant pour les voyageurs que pour le fret. C’est-à-dire tout le contraire de la politique du gouvernement et de la direction de la SNCF. Cette dernière a développé des filiales privées de transport par route pour concurrencer le rail !

 

Le second enjeu est la crise migratoire que l’on peut résumer par ces deux chiffres, 25 millions de réfugiés climatiques en 1998, 250 millions à l’horizon 2050. Le bouleversement attendu de nos sociétés ne sera pas réglé par la loi Asile et Immigration telle qu’elle est présentée par Gérard Collomb, le sinistre d’Etat, au nom du gouvernement actuel.

 

Il y a encore loin de la coupe aux lèvres mais l’espoir demeure. Hauts les cœurs et échangeons entre nous.

Partager cet article
Repost0
14 décembre 2017 4 14 /12 /décembre /2017 15:41
« Un crime social » ?

Ne serait ce pas le nom de ces politiques qui laissent s'échapper les richesses nécessaires aux besoins sociaux et à la transition écologique ?

 

Sources : Pascal Anger : Pascal.anger@univ-angers.fr

Des faits: le volume des richesses augmente et l'inégalité de leur répartition ne cessent de s'aggraver, ce qui constitue non seulement un problème moral, mais également économique. Aujourd'hui, les 8 personnes[1] les plus riches du monde possèdent autant que la moitié la plus pauvre de l'humanité. Selon l'OCDE et le FMI la théorie du ruissellement[7] des riches vers les pauvres ne fonctionne pas. Au contraire, ces inégalités et fraudes nuisent à la croissance économique.

 

Le magazine Challenges publiait en juin 2017 son classement annuel, qu'il fait depuis 1996, des 500 premières fortunes de France. On y constate une augmentation du nombre de milliardaires de 11 à 91 ( plus 700 %) entre 1996 et 2017. Le montant des 500 premières fortunes a été multiplié par 7 pour passer de 81 milliards (Mds) à 570 Mds d’euros. Ce total de 570 Mds représente 25 % du PIB national, contre 6 % en 1996!

 

Ce gouvernement avec le budget[2] 2018 (386 Mds) organise un choc fiscal jamais vu où plus de 10 milliards de recettes sont abandonnées en faveur des plus riches et des multinationales ; pendant que l'on demande à la sécurité sociale de faire 4,5 Mds d'économie sur l’hôpital et les malades, ou qu'il faudrait selon la StraNES[3], 3 Mds supplémentaires par an sur dix ans pour mettre à niveau et démocratiser l'ESR, etc.

 

La fraude et l'optimisation fiscale représentent des sommes considérables en France, dans l'UE et le monde[4]. Le livre de G. Zukman sur « La richesse cachée des nations » réactualisé en octobre 2017 ou de Antoine Peillon « Ces 600 Mds qui manquent à la France » sont là pour nous le rappeler ainsi que bien d'autres rapports officiels. Nous pourrions ajouter nombre d'éléments dont le surcoût du capital [5].

 

Une grande partie de toutes ces richesses qu'elles soient des très riches ou des multinationales est la somme manquante pour financer les besoins sociaux de l'humanité et la transition écologique nécessaire afin d'éviter la catastrophe. Là est le problème fondamental et la solution pour régler les défis auxquels est confrontée l'humanité. Ne pas mener politiquement à tous les niveaux la ré orientation de cette richesse n'est ce pas le nom d'un crime social et plus ? Le sociologue Bruno Latour (sur le site du nouvel Obs) lui émet l'hypothèse que les très riches auraient renoncé à faire société commune avec le reste de la population[6]. Nous ne pouvons accepter ces décisions politiques.

 

D'autres choix doivent se faire.

 

Note

[2] Source PLF 2018 – Pointons aussi que le gouvernement met fin le 31/12/2017 au service de régularisation des avoirs à l'étranger (fraude fiscale) et que les différents gouvernements ont diminué considérablement le nombre d'agents au ministère des finances.

[3] Rapport 2016 de la stratégie nationale sur l'enseignement supérieur.

[4] Selon l'enquête de G Zucman, en 2017 on en serait à minima à 7900 Milliards d'Avoirs dans les paradis fiscaux.

Partager cet article
Repost0

Rédacteur

  • Pour une Révolution citoyenne par les urnes
  • Retraité SNCF, engagé politiquement depuis l'âge de 15 ans, militant du PCF de 1971 à 2008, adhérent au Parti de Gauche et à la France Insoumise depuis leur création, ex secrétaire de syndicat, d'Union locale et conseiller Prud'homme CGT  de 1978 à 2022.
  • Retraité SNCF, engagé politiquement depuis l'âge de 15 ans, militant du PCF de 1971 à 2008, adhérent au Parti de Gauche et à la France Insoumise depuis leur création, ex secrétaire de syndicat, d'Union locale et conseiller Prud'homme CGT de 1978 à 2022.

La France insoumise

-Pour une MAJORITÉ POPULAIRE, renforcer la France insoumise pour GAGNER !

🔴  La France insoumise et ses 71 députés sont au service des Françaises et des Français face à l'inflation et l'accaparement des richesses par l'oligarchie.

✅ La dissolution, nous y sommes prêts ! 
Avec la #Nupes, la France Insoumise propose l’alternative 


📌 Pourquoi La France insoumise, ses origines ? La France insoumise : comment ? La France insoumise : pour quoi faire ?

Autant de questions dont vous trouverez les réponses... ✍️ en cliquant ci-dessous 👇

 

Qu’est-ce que La France insoumise ? - Nouvelle brochure

 

-N'attendez pas la consigne !

✅ Pour rejoindre la France insoumise et AGIR ENSEMBLE pour GAGNER : cliquez ci-dessous 👇

 

La France insoumise

 

- La chaîne télé de Jean Luc Melenchon : cliquez ci-dessous 👇

 

- Le blog de Jean Luc Melenchon : cliquez ci-dessous 👇

Jean-Luc Mélenchon le blog

 

Recherche

La France insoumise à l'Assemblée Nationale

 Pour accéder au site : cliquez ci-dessous 👇

Sur les réseaux sociaux  :

Facebook  - Twitter

Le JOURNAL L'INSOUMISSION

✍️ cliquez ci-dessous 👇

L'Insoumission

 

✅ S'inscrire à la Newsletter 👇

 

 

Le site du Parti de Gauche

 Pour accéder au site : cliquez ci-dessous 👇

 

Manifeste pour l'Ecosocialisme

 Pour accéder au site : cliquez ci-dessous 👇

 

Mouvement pour la 6e République

 Pour accéder au site : cliquez ci-dessous 👇

 

Des outils pour combattre le FN et l'idéologie d'extrême droite française

🔴  Observatoire de l’extrême droite de l'Insoumission

 Pour accéder au site (cliquez ci-dessous) 👇

Observatoire de l’extrême droite l'insoumission

 

 Pour accéder au site (cliquez ci-dessous) 👇


🔴  et aussi : Observatoire national pour « mettre sous surveillance » l’extrême droite

 Pour accéder au site (cliquez ci-dessous) 👇