Séparatismes : Le macronisme nous fait courir le risque d’accélérer “ l’archipélisation ” d’un pays toujours plus divisé[1]
Le faux débat Le Pen/Darmanin et la névrose anti-musulmans s'inscrivent dans cette stratégie dangereuse pour notre démocratie[1ter]
Quand les nazis accusaient les juifs de séparatisme... exactement ce que disent Darmanin et Le Pen vis à vis des musulmans[1bis]
Dans le film de propagande nazie « Le péril juif » (1940), la Bête immonde accusait les Juifs de séparatisme du fait qu’ils ne se mettraient pas « au service d’objectifs communs ». Le film pointait l’incompatibilité entre les valeurs aryennes et les pratiques cultuelles juives qui étaient présentées comme des lois... Exactement ce que disent Darmanin et Le Pen[1bis].
Sources : l'Ère du peuple |
Pour une fois, le rouleau compresseur médiatique du covid qui dure depuis un an en écrasant tout le reste de l’actualité a du bon
Le débat parlementaire contre le séparatisme n’intéresse personne et ne sort pas des murs de l’Assemblée. Le pays se voit donc épargné des heures de meurtrières tirades infamantes contre les musulmans. Quel moment lamentable. Mais dans l’hémicycle, c’est une torture. On « débat » actuellement sous le régime du « temps programmé ». Mais il faut beaucoup se taire. Car nous n’avons que 3H35 de temps de parole attribuées pour la discussion de 51 articles et 400 alinéas. La droite LR, pour sa part, dispose de 9h heures. LREM 7h45 (temps de parole du ministre et des rapporteurs en plus). Le modem 3H15. L’UDI 2H25 Le PCF 3h30 et le PS 4h20. Les présidents de groupe ont droit à une expression personnelle supplémentaire d’une heure. Nous devons donc subir le flot des interventions des autres sans broncher pour conserver un temps de parole sur chacun des articles les plus sensibles. Les non-inscrits (50 minutes) ont été purement et simplement privés de temps parole avant même la fin de la discussion de l’article 1. Ce n’est pas normal ni souhaitable.
Je ne reviens pas ici sur le contenu des débats
Nos interventions sont en ligne en vidéo. Pour ma part j’ai bénéficié de la présence de 8000 auditeurs présents sur Facebook et YouTube en permanence pendant mon discours sur la motion de rejet du texte. Près de 400 000 personnes ont regardé la vidéo depuis. Mes camarades, Alexis Corbière, Ugo Bernalicis, Éric Coquerel, Jean Hugues Ratenon ont fait de magnifiques interventions. Alexis et moi avons parlé au milieu d’un hourvari permanent de cris et hurlements. À leur banc, les ministres participaient activement à la tactique de déstabilisation des orateurs par leur rires et bavardages. Cela, le téléspectateur ne le voit pas ni ne l’entend. Ils nous voient seulement forcer la voix pour dominer le vacarme et parfois ils s’en étonnent auprès de nous : « pourquoi criez-vous ? ».
Certes on a vu pire
Le 2 février, Mathilde Panot avait été grossièrement insultée en séance[2]. L’alcool avait fait son œuvre, semble-t-il, chez certains marcheurs. Jaurès avait droit aussi à ces interruptions permanentes et on a même vu une occasion où un député est monté à la tribune pour le frapper tandis qu’il parlait[3]. Heureusement, nous n’en sommes pas là. Puis la réplique du ministre (Darmanin) et celle du rapporteur (de Rugy) se fit sur un mode très personnel, politicien et offensant. On a vite vu où serait l’angle des éléments de langage. Comme je défends la liberté du culte, et que je l’ai déjà fait contre la fermeture des lieux de culte, je serai un « porte-parole du cléricalisme ». Ni plus ni moins. Que j’ai félicité la conférence des évêques de France pour avoir dit que la loi de 1905 était « une loi de liberté » fait ricaner des bancs d’ignorants qui ne savent rien de la bataille de l’époque ou le pape avait appelé a ne pas appliquer cette loi[4]. Face au public d’un beuglant, quelle musique s’entend ?
En fait, je n’attends rien de Darmanin et De Rugy, et surtout pas de la culture historique républicaine
Les deux procèdent par amalgames, insinuations et contrepèteries sur fond d’une culture contre-républicaine qu’ils ne peuvent me cacher. L’un nous rebat les oreilles avec son grand-père musulman et l’autre avec la chouannerie. Leur mépris pour les autres et leurs railleries à deux sous sont une honte visible. Car pour le reste, à l’honneur des collègues, dans les échanges entre députés, personne n’est aussi vulgaire et agressif dans les prises de parole. Nous n’avons jamais répliqué dans le même registre quand bien même admettez que ces deux-là auraient pourtant de quoi faire parler… Mais c’est désolant de voir des esprits hier si libres, répéter sur tous les tons les absurdités cuisinées de longue main dans l’extrême droite. Ainsi de madame Caroline Fourest désormais murée dans un fanatisme qui lui interdit de partager les principes qu’elle défendait hier : l’État chez lui, l’Église chez elle et la liberté de culte pour tous. La liberté de conscience est à ce prix.
La société n’a pas à être laïque.... l’espace public ne l’est donc pas.
Cependant la société peut être de culture laïque. C’est même souhaitable. C’est à dire être à la fois respectueuse de l’engagement de chacun et refusant un point de vue imposé par le culte majoritaire ou un pouvoir. Par contre l’État est les services publics le sont par nécessité et sans exception. Je ne sais pas ce qu’il faudrait ajouter à cela. C’est en tous cas la position historique de l’école de pensée dans la tradition de 1905. La traduction de ces principes est très concrète.
- Par exemple : elle exclut la police des habillements dans l’espace public et, à l’inverse, la présence des élus en écharpe dans les manifestations religieuses.
Dans le débat...
- Nous avons donc été dans un premier temps assimilé à des défenseurs des religion et même du cléricalisme quand nous refusions la police du vêtement contre le port du voile ;
- Puis nous fumes repeints en « laïcards » ennemi des religions. Par les mêmes !!!! au moment où nous demandions que les élus ne cautionnent pas, par leur présence, les manifestations religieuses. Et dans chacune de ces postures contradictoires ce furent les mêmes lazzis, les mêmes moqueries. Le débat semblait patauger dans la mauvaise foi. Mais tout autant dans la bêtise la plus crasse. Les mêmes qui meuglaient en cadence contre le foulard dans l’espace public ne trouvaient rien à redire à la qualité de chanoine de Latran du président de la République ou à la participation des élus à des cérémonies comme celle de reconnaissance à la vierge pour la délivrance de la peste de 1630 !!! Au contraire, ils se posèrent soudain en défenseur de l’Église. Mais qui l’attaquait ? Personne. Au point qu’un de ces brillants amis des Lumières, l’instant d’avant, se risqua à dire que nous n’avions pas à discuter pour savoir si la vierge avait ou non protégé la ville de la peste ! Non ce n’étaient pas des républicains qui parlaient mais des croisés. Les brillantes plumes fermaient la marche de cette croisade. Dans Le Figaro une nouvelle fois la technique de prétendus « anciens cadres » de LFI , évidemment anonymes compte tenu du risque qu’il y a nous critiquer, viennent dire que Coquerel parle comme il le fait par électoralisme. Car, bien-sûr, il est bien connu qu’il n’y a aucun calcul électoral dans la propagande contre les musulmans. Nous parlons des 500 communes sans école publique ? Des élus dans les manifestations religieuses ? C’est que nous serions gênés par la question de l’islam, psalmodie Marianne. Le journal est désormais converti à l‘intérêt du débat sur les certificats de virginité et la lutte contre la polygamie et reste sans voix sur la question du Concordat ou des immeubles de rapport. Dommage que Macron ne soit pas imam d’honneur de la mosquée du Caire, on aurait été mieux compris dans ces colonnes-là.
Le résultat des simagrées du pouvoir est simple :
- moins de liberté pour les associations ;
- un serment pour tous ceux qui touchent des subventions ;
- une latitude plus grande pour les préfets de dissoudre, contrôler et ainsi de suite.
Où est le terrorisme islamiste là-dedans ? Nulle part évidemment. On finit par se demander si c’était vraiment le sujet. La « démocratie défaillante » en France défaille un peu plus. Mais qui a la liberté de le dire à part la presse étrangère ?
1er février 2021 : Jean-Luc Mélenchon s’exprime sur la loi séparatisme à l’Assemblée nationale
Il intervention contre le projet de loi dit de renforcement « des principes républicains » et a dénoncé une loi inutile et dangereuse qui va semer de la division dans le peuple français en stigmatisant les musulmans.
Après avoir rappelé que le gouvernement a réussi à mettre d'accord contre cette loi tous les cultes, le député insoumis a interpellé la majorité sur les défis qui sont devant nous. La pandémie, le dérèglement climatique, les 800 plans sociaux, les 10 millions de pauvres, l'augmentation du gaz, des péages, de l'électricité, les millions de personnes à l'aide alimentaire... Alors que le Parlement va discuter pendant deux semaines du voile, de la polygamie, des certificats de virginité, du contenu des cantines scolaires ou de la mixité dans les horaires des piscines.
Il a enfin dénoncé ensuite l'hypocrisie du gouvernement, a a parlé des différents séparatismes qui existent bel et bien dans notre pays dont il n'est pourtant pas question dans cette loi : le séparatisme social des riches, le séparatisme religieux du Concordat, le séparatisme institutionnel de l'Union européenne.
Il a fait valoir que l'État est indifférent aux religions et que c'est le gage de notre liberté. Puis il a dénoncé l'amalgame insupportable entre islam et islamisme. Il a pris à partie l'Assemblée en demandant aux députés quand les musulmans avaient manqué à l'appel de la patrie et a conclu son discours en disant que la France est grande parce qu'elle fait France de tout bois et que l'amour de la République, comme tout amour, ne vaut rien sous la menace.
16 février 2021 : l'Assemblée adopte, en première lecture, le projet de loi relatif aux " Principes Républicains "
Ce texte qui s'attaque officiellement au " séparatisme ", mais constitue une loi de stigmatisation inutile des musulmans. Les députés France insoumise qui n'ont eu de cesse que de défendre la laïcité et la République Sociale, de dénoncer la suspicion généralisée ont unanimement voté contre[5].
A noter qu'à l'image des élus RN qui se sont abstenus, plus divisés, huit élus du groupe communiste se sont abstenus, 7 ont voté contre et 1 pour[5].
Notes :
[1] Séparatismes : Le macronisme nous fait courir le risque d’accélerer “ l’archipélisation ” d’un pays toujours plus divisé
[1bis] QUAND LES NAZIS ACCUSAIENT LES JUIFS DE SÉPARATISME…
[1ter] Le Pen et Darmanin : faux débat et névrose anti-musulmans
[2] Scandale : Mathilde Panot insultée en plein hémicycle par un député LREM
[3] Un député de droite monte même à la tribune et frappe Jaures tandis qu'il...
[4] Le pape Pie X condamne la loi, considérant qu'il s'agit d'une rupture
[5] Analyse du scrutin n° 3421, deuxième séance du 16/02/2021 : scrutin public sur l'ensemble du projet de loi confortant le respect des principes de la République (première lecture).
Pour en savoir plus :
- Face à toutes les haines : la laïcité... “ L’Eglise chez elle, et l’État chez lui ”
- Religion et politique : un couple infernal à séparer de toute urgence !
- Jean-Luc Mélenchon : " Nous combattons l'islam politique...avec les musulmans "
- Séparatisme : Mélenchon dénonce la «mise en scène» politicienne de Macron
- Patrick Le Hyaric : « Séparatisme » : une entorse inquiétante à la loi de 1905
- Jean-Luc Melenchon : De quoi la lutte contre l’« islamo-gauchisme » est le nom ?
- Jean-Luc Melenchon : Vous stigmatisez les musulmans avec une loi inutile et dangereuse
- Débat parlementaire contre le séparatisme : un moment lamentable
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