Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
24 novembre 2024 7 24 /11 /novembre /2024 16:59
Sliman Mansour, 2021.

Sliman Mansour, 2021.

Sources : Mona Chollet |

- « Tu es restée bien silencieuse le 7 octobre. »
Quelques semaines après l’attaque du Hamas contre des soldats et des civils israéliens, il y a un an, une de mes connaissances racontait sur Facebook avoir reçu ce message d’une amie. Je n’ai pas échappé non plus à ce flicage de l’expression de la sympathie pour les victimes israéliennes, la mienne ayant été jugée trop tardive. Horrifiée, je l’étais ; mais j’étais aussi tétanisée, et désespérée.

 

🔴 Tétanisée, parce que je voyais combien le choc provoqué par le massacre du Hamas était immédiatement instrumentalisé, y compris par une surenchère d’allégations mensongères « bébés décapités », « femme enceinte éventrée », « bébé placé dans un four », afin de mieux exciter la soif de vengeance. Il a été utilisé pour justifier les bombardements sur Gaza, qui ont commencé dès le 7 octobre, puis ce qui n’allait pas tarder à devenir le génocide du peuple palestinien. Israël a « transformé le traumatisme en arme de guerre », comme Naomi Klein vient de le décrire dans un article époustouflant [0].

 

🔴 Et désespérée, parce que je comprenais brusquement une chose : la justice pour les Palestiniens, que ne cessaient d’attendre – sans doute naïvement – toutes les personnes qui, comme moi, suivent avec attention la situation en Israël-Palestine depuis trente ans ou plus, cette justice ne viendrait jamais.

  • Les bombardements sur Gaza et la décimation de familles entières, en particulier en 2008-2009 et en 2014[1] ;
Mort de Shireen Abu Akleh : comment l’armée israélienne a sciemment exécuté une journaliste
  • La répression de la Grande marche du retour, en 2018, au cours de laquelle les snipers israéliens, en plus de tuer 223 manifestants, ont pulvérisé des rotules à la chaîne ;
  • le meurtre d’Ahmad Erekat[1bis], en 2020, et tant d’autres exécutions sommaires ;
  • l’assassinat de la journaliste Shireen Abu-Akleh, en mai 2022, puis l’attaque de son convoi funéraire par la police israélienne, qui a presque renversé son cercueil (Abu-Akleh était chrétienne) [2] ;
  • Nora Sub Laban expulsée de sa maison de famille à Jérusalem, en juillet 2023, après des années de bataille judiciaire, et l’emménagement immédiat de colons qui ont jeté les meubles dans la rue et accroché des drapeaux israéliens aux fenêtres...

rien de tout cela – pour ne citer que quelques faits marquants – n’avait ému l’opinion ou la classe politique.

 

 

- Absente au cours des années précédentes, l’émotion du grand public a déferlé comme une vague le 7 octobre, puis elle a aussitôt reflué, alors que la descente aux enfers définitive des Palestiniens commençait.

Que l’humanité et la sacralité de la vie ne soient accordées, sur un même territoire, qu’à une partie de la population est un scandale qui n’en finit plus de me bouleverser. Le découpage minutieux par lequel les médias et les dirigeants occidentaux distinguent les victimes dignes d’être pleurées de celles qui ne méritent pas une seconde d’attention me fait penser à ces vieilles photos de l’URSS sur lesquelles la censure effaçait soigneusement les contours des dignitaires tombés en disgrâce.

 

C’est d’autant plus révoltant que cela brouille totalement la réalité du rapport de forces. On en vient à avoir l’impression que ce ne sont pas les Palestiniens qui sont sous la botte, opprimés, dépossédés, expulsés et tués depuis des décennies, mais les Israéliens. Une amie qui a fait ses études en Allemagne me racontait qu’une autre étudiante lui avait un jour dit très sérieusement : « Tout de même, les Palestiniens ont envahi Israël. » D’où, aussi, les comparaisons aberrantes entre Israël et l’Ukraine – alors qu’Israël est dans le rôle de la Russie (à cette différence près que la Palestine, territoire occupé et morcelé, n’est pas un État souverain comme l’Ukraine).

 

Depuis un an, celles et ceux qui continuent de suivre la situation en Palestine, essentiellement à travers les journalistes palestiniens présents sur les réseaux sociaux, voient tous les jours des images qui leur retournent l’estomac. Tous les jours, tous les jours, tous les jours :

  • les immeubles pulvérisés ;
  • les enfants blessés allongés sur le sol d’un hôpital ;
  • les corps vivants ou morts coincés sous les décombres ;
  • les blessés dont les bras ou les jambes pendent, presque détachés du reste de leur corps ;
  • les cadavres alignés dans des linceuls, les proches hagards de douleur ;
  • les cohortes d’estropiés [3] ;
  • la jubilation mauvaise des soldats israéliens pillant et saccageant les intérieurs de familles déplacées ou tuées ;
Nuit d’horreur à Gaza : des Palestiniens brûlés vifs dans le bombardement d’un campement
  • les enfants agonisants, squelettiques, en raison du blocus sur la nourriture et l’eau annoncé par le ministre de la défense israélien Yoav Gallant dès le 9 octobre 2023. Je reste aussi hantée par les images, vues à deux reprises, d’enfants au visage intact, mais à la boîte crânienne explosée, béante, complètement vide.
  • Et enfin, ce matin, les images insoutenables de Palestiniens prisonniers des flammes[3bis] après le bombardement d’abris de fortune installés dans la cour de l’hôpital Al-Aqsa.

 

 

- Au cours de l’année écoulée, Israël a commis à Gaza l’équivalent d’un massacre du 7 octobre chaque semaine

▶️ En octobre, le journaliste Wael Al-Dahdouh apprenait en direct, pendant qu’il travaillait, la mort de sa femme et de deux de ses enfants (en décembre, il a vu son cameraman, Samer Abu Daqqa, mourir à ses côtés, puis, en janvier, il a perdu un autre fils, Hamza Al-Dahdouh, également journaliste).

 

▶️ En novembre, il y a eu la vieille femme tuée par un sniper alors qu’elle tenait la main de son petit-fils, le petit Taim Abd Al-Aati, qui agitait un drapeau blanc. Ce même mois, les cadavres décomposés des bébés prématurés de l’hôpital Al-Nasr, que le personnel a été forcé d’abandonner dans leurs couveuses par l’armée israélienne.

 

▶️ En janvier, le meurtre de Hind Rajab, six ans, qui a vu les siens mourir autour d’elle quand leur voiture a été prise pour cible par un char, et qui a supplié les secours de venir la sauver avant d’être à son tour tuée, de même que deux ambulanciers qui tentaient de l’atteindre. (En avril, les étudiants de l’université Columbia à New York, qui occupaient leur campus, ont renommé le Hamilton Hall « Hind’s Hall » en son honneur ; c’est également le titre que le rappeur américain Macklemore a donné à sa chanson en soutien au mouvement étudiant pour la Palestine.)

 

▶️ En février, le corps de Sidra Hassouna, petite fille de sept ans, accroché au mur sur lequel il avait été projeté par la déflagration. Le « massacre de la farine », quand l’armée israélienne a ouvert le feu sur les Palestiniens affamés par le blocus qui se pressaient autour d’un convoi d’aide alimentaire, tuant au moins 118 d’entre eux. À l’hôpital Nasser, un prisonnier, Jamal Abu Al-Ola, envoyé par les soldats, les mains liées, pour dire aux patients et au personnel d’évacuer, puis abattu sous les yeux de sa mère.

 

▶️ En mars, Razan Muneer Arafat, onze ans, dans un fauteuil roulant, pleurant à chaudes larmes ses jambes perdues.

 

▶️ En mai, le cadavre sans tête d’Ahmad Al-Najar, dix-huit mois, décapité quand l’armée israélienne a bombardé des tentes de personnes déplacées à Rafah, faisant quarante-cinq victimes, la plupart brûlées vives.

 

▶️ En juin, le massacre de Nuseirat, lorsque des soldats israéliens ont tué plus de 270 civils palestiniens pour libérer quatre otages – une opération fêtée comme un « grand succès » dans les chancelleries et les médias occidentaux.

 

▶️ En juillet, Muhammed Bhar, jeune homme atteint du syndrome de Down, déchiqueté par un chien de l’armée ; les soldats l’ont laissé agoniser, en empêchant ses proches de lui porter secours.

 

▶️ En août, le journaliste Ismail Al-Ghoul, dans sa voiture visée par un tir de drone, vêtu de son gilet « presse », la tête arrachée – tué avec son cameraman Rami Al-Rifi, ce qui portait alors à 165 le nombre de journalistes tués à Gaza en moins d’un an.

Investigating war crimes in Gaza I Al Jazeera Investigations

 

▶️ En septembre, un fœtus sanguinolent tiré des décombres d’un immeuble. Un père embrassant le pied arraché de sa petite fille – tout ce qu’il restait de son corps. Un soldat rigolard fumant une cigarette tandis qu’une mosquée brûle dans son dos. Une effarante accumulation de crimes de guerre, qu’Al-Jazeera a tenté de répertorier dans un documentaire récent [4].

 

🔴 Au cours de l’année écoulée, selon les calculs de Joseph Confavreux dans un article de Mediapart, Israël a commis à Gaza l’équivalent d’un massacre du 7 octobre chaque semaine[5]. Et pourtant… Rien de tout cela ne semble s’être imprimé dans les esprits des gens autour de nous – pas plus que tout ce qui a précédé ne s’y était imprimé. Pour tout le monde, seul existe le massacre du 7 octobre en Israël.

 

Cette insensibilité explique la grossièreté de ces intervieweurs occidentaux qui reçoivent des Palestiniens endeuillés, ayant perdu plusieurs membres de leur famille (parfois des dizaines), et qui leur lancent d’un seul souffle : « Toutes mes condoléances, est-ce que vous condamnez le meurtre de civils par le Hamas ? ».

Un sommet d’obscénité a été atteint ce 7 octobre avec l’interview sur BFMTV du journaliste Rami Abou Jamous, qui témoigne chaque semaine sur Orient XXI de l’enfer qu’est devenu Gaza. Il n’a été interrogé que sur le Hamas et le 7 octobre[6]. On parle d’un homme épuisé et traumatisé, dont – pour ne citer qu’un exemple – la belle-sœur a été grièvement blessée par un quadricoptère (un petit drone) qui l’a poursuivie jusque sous sa tente de déplacée[7].

 

 

- Arwa Mahdawi : « Les mêmes personnes qui nous sommaient de désavouer la violence salivent sur notre mort et célèbrent le meurtre à une échelle inimaginable »
Au fil des mois, déjà, on avait pu mesurer l’ampleur du « deux poids, deux mesures ». Les massacres, les viols[8] : au vu de l’indignation générale soulevée, à juste titre, quand des Israélien·nes en ont été victimes, on avait pu en déduire, naïvement, que ces crimes étaient condamnables en eux-mêmes. Mais l’indifférence, voire l’approbation, rencontrées quand des Palestinien·nes en sont victimes à leur tour nous force à en déduire que ce qui est réellement terrifiant, ce n’est pas d’être violé·e, décapité·e, massacré·e : c’est de l’être par des Arabes. Les mêmes personnes qui s’étranglaient d’indignation à l’idée que le Hamas se soit attaqué à des civils reprennent sans sourciller la rhétorique raciste des « boucliers humains » ou des « victimes collatérales » concernant les morts palestiniens.

 

Des témoignages de viols au moyen de barres de métal brûlantes et d’autres objets émanent de la prison israélienne de Sde Teiman - information enterrée tout à la fin d’un article du New York Times [9]. Pourtant, quand, fin juillet, dix soldats ont été arrêtés pour avoir violé en réunion un prisonnier – lequel a été hospitalisé –, viol dont la vidéo a fuité, des manifestants d’extrême droite, parmi lesquels des ministres, ont pris d’assaut la prison pour les faire libérer.

  • Le ministre Itamar Ben-Gvir a clamé que tout était permis, même le viol, face à l’ennemi palestinien.
  • Son collègue Bezalel Smotrich a exigé une enquête, non pas sur le viol lui-même, mais sur la fuite de la vidéo.
  • Les soldats ont finalement été libérés, et l’un d’eux a été invité sur les plateaux de télévision pour se défendre [10].

 

L’idée selon laquelle les crimes du 7 octobre justifient une vengeance aveugle, cruelle, sans limite, sur toute une population (soit exactement ce qui était condamnable dans l’attaque du 7 octobre elle-même), a normalisé les discours sanguinaires, voire génocidaires. La Une jubilante du New York Post après l’attaque des bipeurs au Liban, alors que cette attaque a fait des milliers de victimes civiles, qui ont eu des bras, des yeux arrachés, au point que les hôpitaux libanais ont été débordés par l’afflux des blessés, l’illustre bien. De même que la décomplexion des appels au meurtre sur les plateaux de télévision français. « Qu’ils crèvent tous. Israël fait le travail de l’humanité ici », a par exemple osé déclarer Louis Sarkozy sur LCI le 26 septembre[10bis].

 

🔴 « Nous, Palestiniens, n’avons pas le droit d’ouvrir nos bouches sans que quelqu’un nous demande de dénoncer la violence et de condamner le Hamas. Puis on nous ordonne de la fermer et de rester silencieux tandis que les mêmes personnes qui nous sommaient de désavouer la violence salivent sur notre mort et célèbrent le meurtre à une échelle inimaginable », écrit la journaliste palestinienne-américaine Arwa Mahdawi[11].

 

 

- Lina Mounzer : « Nos quartiers ne sont pas des endroits où nous avons joué, grandi, élevé des enfants et rendu visite à des amis : ce sont des “ bastions ” »
Une analyse de la presse américaine publiée par le média indépendant The Intercept en janvier dernier a montré que des termes chargés d’émotion, comme « massacre » ou « horrible », étaient réservés aux victimes israéliennes[12]. On observe le même phénomène dans la presse française, par exemple avec ce titre du Monde : « 7 octobre 2023 : une journée atroce, une année tragique » (5 octobre 2024 ; c’est moi qui souligne). L’atrocité, ce sont les crimes du Hamas, et eux seuls ; ce qui a suivi est simplement « tragique » – autrement dit : ce n’est réellement la faute de personne. L’analyse de The Intercept mettait aussi en lumière la façon dont les journaux américains multiplient les contorsions pour éviter de nommer le perpétrateur israélien, ce qui produit des titres en forme de haïkus étranges, dont l’insurpassable et énigmatique « Lives ended in Gaza[12bis] » – « Des vies ont pris fin à Gaza » –, dans le New York Times (2 mars 2024).

 

Ancienne responsable du bureau du New York Times à Jérusalem, Jodi Rudoren assume ce choix lexical : « Il y a eu un massacre le 7 octobre. Des atrocités ont été commises. Elles étaient barbares. La réponse a été… intense [sic], elle a impliqué beaucoup de mort, de destruction et de déplacement, mais je ne suis pas sûre que “massacre”, “atrocités” et “barbare” soient des termes appropriés, en tout cas pas pour la guerre dans son ensemble (…). Vous parlez de deux choses très différentes, qui nécessitent des adjectifs différents[13]. » Je l’avoue, ces mots, et la décontraction avec laquelle ils sont prononcés, me donnent envie de hurler.

 

🔴 Le post du dessinateur libanais Mazen Kerbaj (ci-dessous 👇) traduit, je crois, l’état d’esprit de beaucoup.

 

Dans un article brillant, l’autrice libanaise Lina Mounzer a parfaitement décrit le désespoir que l’on peut ressentir devant ces yeux qu’aucune souffrance palestinienne ou libanaise ne semble assez grande pour dessiller. « Nos quartiers ne sont pas des endroits où nous avons joué, grandi, élevé des enfants et rendu visite à des amis : ce sont des “ bastions ”, écrit-elle. Les corps de nos hommes ne sont pas les poitrines bien-aimées contre lesquelles nous nous appuyons, ni les mains que nous tenions ou par lesquelles nous étions tenus, ni les bras forts qui nous portaient, ni les lèvres douces qui nous embrassaient pour nous souhaiter une bonne nuit. Ce sont des “ suspects ”, des “ militants ”, des “ terroristes ”, et leur mort est toujours justifiable parce qu’ils sont des hommes et nos hommes sont mauvais, et c’est comme ça que ça a toujours été, c’est comme ça que nous avons toujours été pour eux.[14] »

 

Elle observe : « L’Occident cherche à préserver l’image de sa propre humanité en effaçant complètement la nôtre. Comment peuvent-ils être coupables de meurtre si ceux qu’ils tuent ne sont que des “ terroristes ” ou des “ animaux humains ” ? En fait, non seulement ils ne sont pas coupables de meurtre, mais ils sont des héros qui nettoient le monde. Je ne sais pas quel langage il est possible d’employer avec des gens qui ne vous verront jamais comme un être humain. Qui entendront toujours un animal braire lorsque vous parlez.[14] »

Répression : Yannis Arab, historien et soutien de la Palestine, perquisitionné et arrêté à son domicile

 

Le soutien massif à Israël dans un paysage politique et médiatique français qui penche de plus en plus nettement vers l’extrême droite – une évolution très loin de se cantonner aux médias Bolloré – n’a guère de quoi étonner. Nous avons globalement quitté la normalité (si relative qu’elle ait pu être) : il faut rappeler que, depuis quelques mois, nous ne vivons plus en démocratie. Cela implique de s’exposer à quelques désagréments quand on a la mauvaise idée de vouloir plaider la cause des Palestiniens. Dernier cas en date : celui de Yannis Arab, doctorant en histoire et auteur de plusieurs ouvrages sur la Palestine, arrêté et perquisitionné par la gendarmerie le 8 octobre pour « apologie du terrorisme[14bis] ».

 

Pour ma part, j’y suis résignée. Ce que peuvent penser de moi des gens qui défendent un génocide m’est complètement indifférent. Ma seule préoccupation est désormais de ne pas décevoir ou trahir celles et ceux – chrétien·nes, juif·ves, musulman·es, athées ou croyant·es – dont je partage la sensibilité sur ce sujet. Comme l’écrit encore Lina Mounzer, le niveau de violence mis en œuvre par Israël dès octobre 2023 était « si bouleversant qu’il a immédiatement divisé le monde en deux : entre ceux qui savaient ce qui se passait et ceux qui le niaient ».

 

 

- Les anglophones ont un acronyme pour cela : PEP, ou « progressive except for Palestine » – « progressiste, sauf sur la Palestine »
Ce qui est réellement douloureux, cependant, c’est de se heurter aux mêmes préjugés, au même hermétisme, chez des journalistes et des personnalités de gauche, dont on se sent politiquement proche, que l’on estime, avec qui l’on est par ailleurs d’accord sur à peu près tout. Les anglophones ont un acronyme pour cela : PEP, ou « progressive except for Palestine » – « progressiste, sauf sur la Palestine ».

 

Ainsi, dans une interview à Télérama, en avril, à l’occasion de la publication de son livre sur le choc du 7 octobre, l’avocat Arié Alimi expédiait en quatre lignes la question des agissements de l’armée israélienne à Gaza : « Soyons clairs, je suis aussi révolté par une forme d’insensibilité à ce qui est en train de se passer à Gaza ; par le fait qu’aujourd’hui, il y a un risque plausible de génocide – et de plus en plus de traces laissent penser qu’un jour cette qualification sera retenue [15][15bis]. » Pardon, mais si on pense sincèrement qu’un génocide risque de se dérouler, cela ne justifierait-il pas d’en faire son sujet principal ?

 

De même, plus récemment, dans sa critique du livre remarquable de Didier Fassin, Une étrange défaite, qu’elle disqualifie d’un « Bof », Valérie Lehoux reproche à l’auteur d’user de procédés malhonnêtes pour « mieux affirmer que le drame gazaoui est un génocide – il est tout à fait possible que la justice le reconnaisse un jour comme tel – qu’il est honteux de ne pas arrêter ». Elle aussi admet donc l’hypothèse d’un génocide… mais, à nouveau, entre tirets, sans en tirer aucune conséquence[16]. Un génocide est donc moins grave qu’un massacre ?

 

- La conviction profonde selon laquelle il est moins grave de s’en prendre à des colonisés qu’à des colons
Autre exemple, qui me semble révélateur des hésitations d’une gauche par ailleurs impeccable sur tant de sujets. Dans l’article de Joseph Confavreux déjà cité plus haut, et par ailleurs excellent, quelques lignes me font sursauter : « Certes, d’un point de vue anthropologique, le théâtre de la cruauté déployé par le Hamas durant les massacres d’octobre dernier n’est pas similaire, terme à terme, avec les actes commis par l’armée israélienne depuis un an[16bis]. »

Une guerre pas comme les autres : des médecins affirment que des enfants ont été pris pour cible par des snipers israéliens à Gaza

 

Je me frotte les yeux. Si la mutilation de dix enfants par jour en moyenne, les parents tués devant leurs enfants et inversement, l’agonie durant des heures ou des jours sous les décombres d’un immeuble (des milliers de cadavres y sont ensevelis), les enfants visés à la tête par des snipers [17], les civils désarmés poursuivis et pulvérisés par des tirs de drone, le fait de priver toute une population d’eau et de nourriture (mais aussi de produits d’hygiène, de sorte que les maladies de peau se propagent), de diffuser ses crimes de guerre sur TikTok avec des musiques entraînantes, ne relèvent pas également d’un « théâtre de la cruauté », et cette fois à l’échelle de tout un peuple, j’aimerais vraiment savoir comment il faut les qualifier.

 

Quelques jours après la parution de l’article, ce passage a été modifié. On lit désormais : « Les façons de mettre à mort, les projets plus larges dans lesquels les meurtres s’inscrivent, l’intentionnalité de tuer des civils, la volonté d’effrayer et/ou d’éliminer une population sont aussi à prendre en compte. Tout ne se mesure pas avec le décompte macabre des cadavres. » J’avoue que j’y perds mon latin. Faut-il en déduire que l’armée israélienne n’a pas de « projet plus large » ? Qu’elle n’a pas de volonté de « tuer des civils » ou « d’effrayer et/ou d’éliminer une population » ? Que tous ces crimes relèvent d’une touchante maladresse ?

 

Difficile de ne pas déceler ici la conviction profonde selon laquelle il est moins grave de s’en prendre à des colonisés qu’à des colons. Cela me rappelle ce que m’avait raconté il y a quelques mois l’une de mes amies, qui est algérienne et qui enseigne dans une université américaine. Alors qu’elle évoquait le cas d’un colon violemment battu lors d’une révolte au XIXe siècle en Algérie, ses étudiants s’étaient mis à pousser des exclamations horrifiées. Exaspérée, elle leur avait lancé : « Mais enfin, je viens de vous parler d’enfumades[17bis] et d’autres atrocités, et vous n’avez pas bronché ! »

 

 

- Une incapacité à renoncer à l’image vertueuse d’Israël
L’indulgence irréelle manifestée envers l’armée israélienne procède aussi, je crois, d’une réticence persistante à renoncer à l’image d’Israël comme un État vertueux, peuplé de gens cultivés, progressistes, démocrates, humanistes, en refusant de voir que ces Israéliens, s’ils existent bien, sont aujourd’hui une toute petite minorité, dans un pays que des décennies de racisme institutionnalisé et d’impunité internationale ont mené au fanatisme, avant que le 7 octobre le radicalise encore davantage.

 

Ainsi, beaucoup de gens veulent croire que les manifestations parfois massives contre le gouvernement Netanyahou qui se déroulent en Israël ces temps-ci concernent aussi les crimes commis à Gaza, alors que ce n’est pas le cas. « Netanyahou est peut-être méprisé par la moitié de la population, mais sa guerre contre Gaza ne l’est pas, et, selon des sondages récents, une majorité substantielle d’Israéliens pensent que sa riposte est appropriée, voire qu’elle n’est pas allée assez loin », écrivait Adam Shatz en juin[18].

 

Partout s’exprime cette « obsession de la symétrie » que Joss Dray et Denis Sieffert pointaient déjà il y a plus de vingt ans[19].

  • Si on dit un peu de mal des Israéliens, alors on s’empresse d’en dire aussi des Palestiniens pour faire bonne mesure ;
  • Si on dit un peu de bien des Palestiniens, alors on s’empresse d’en dire aussi des Israéliens.

On ne manque pas de souligner qu’un deuil est toujours une tragédie, qu’une vie vaut une vie, que chaque vie est précieuse, que « les chiffres ne disent pas tout », en renvoyant à leur supposée mesquinerie ceux qui pointent la folle disproportion du bilan des victimes entre le camp de l’occupé et celui de l’occupant.

 

 

- Est-il vraiment si difficile d’appeler à l’arrêt des massacres, au lieu d’aligner des propos creux sur « la valeur de chaque vie », « l’empathie » ou « la paix » ?
Oui, bien sûr, sur le plan intime et privé, c’est vrai : un deuil est toujours une tragédie. Mais on ne devrait pas se servir de cette vérité pour occulter une réalité politique. Cette réalité n’est pas celle de « deux peuples qui se déchirent depuis très longtemps pour une même terre sans qu’on y comprenne grand-chose », comme on l’entend si souvent, mais celle d’un État qui pratique le nettoyage ethnique et le massacre depuis sa création, qui occupe un autre peuple militairement et qui s’emploie actuellement à le rayer de la surface de la Terre sans rencontrer aucun frein.

 

À l’heure où j’écris, le massacre continue imperturbablement à Gaza ;

  • la Cisjordanie est elle aussi à feu et à sang ;
  • le tourbillon de souffrances infligées à la Palestine s’étend au Liban ;
  • Israël bombarde Beyrouth, rase des villages entiers au Sud-Liban, attaque les casques bleus de l’ONU[19a].
L'armée israélienne tire sur des Casques bleus au Liban

Est-il vraiment si difficile d’appeler à l’arrêt de tout cela, au lieu d’aligner des propos creux sur « la valeur de chaque vie », « l’empathie » ou « la paix » ? Comme le rappelait Rob Grams, rédacteur en chef adjoint de la revue Frustration, sur X, l’empathie pour les otages israéliens est « tout à fait présente, médiatique, officielle. Celle pour les Palestiniens est criminalisée[19b] ». Est-il si difficile de le souligner ? « Pourquoi Gaza a-t-elle disparu derrière des sophismes, des approximations, des murmures désolés ? », interroge à raison l’écrivain palestinien Karim Kattan[19c].

 

- « Mourir en un seul morceau est devenu un luxe à Gaza »
Même si l’on s’en tient au plan intime et privé, ces déclarations bien-pensantes négligent une autre différence de taille.

  • Les Israéliens qui ont perdu un proche l’année dernière ont la possibilité de vivre leur deuil, qui est respecté et partagé dans tout l’Occident et au-delà. (Même les soldats d’une armée génocidaire sont honorés dans les médias occidentaux comme des héros.).
  • Les Palestiniens, traumatisés par des deuils multiples, obligés d’assurer quotidiennement leur survie, n’en ont pas les moyens. Certains n’ont pas de corps à pleurer : leurs proches ont disparu dans une prison, ou sont restés ensevelis sous les décombres de leur immeuble. Parfois, ils sont contraints de rassembler leurs restes dans des sacs en plastique. (Cette année, on a aussi vu, en mars, le garçon qui transportait dans son sac à dos le corps de son petit frère[19d].)

 

Le luxe de la mort Les Gazaouis meurent-ils vraiment lorsque leur corps n’est pas entier ou ne peut être retrouvé et lorsqu’ils ne peuvent pas être correctement attristés ?

Parmi les enfants rencontrés à Gaza par la journaliste et écrivaine Susan Abulhawa (toujours dans le documentaire d’Al-Jazeera), certains lui ont confié qu’ils voulaient mourir, mais qu’ils espéraient seulement rester entiers. « Mourir en un seul morceau est devenu un luxe à Gaza », confirme Mariam Mohammed Al Khateeb [20]. Le 25 septembre, l’armée israélienne – qui a par ailleurs ravagé plusieurs cimetières, à Gaza mais aussi au Liban – a envoyé à Gaza un camion contenant des dizaines de corps, sans aucun document permettant de les identifier. Les proclamations vertueuses sur la valeur égale des vies, auxquelles je n’ai rien à redire, me semblent un peu vaines si on ne commence pas par dénoncer cette situation.

 

 

- L’Orient vu comme un espace abstrait, insignifiant, appropriable ; comme une annexe de la scène européenne
L’image bienveillante d’Israël que conservent beaucoup de gens à gauche procède pour une large part du fait qu’ils transposent telle quelle la réalité de l’oppression historique subie par les juifs en Europe dans le contexte du Proche-Orient[21]. Par là, ils reproduisent à leur insu la désinvolture du rapport colonial à une terre étrangère, l’habitude de la traiter comme un espace abstrait, insignifiant, appropriable ; comme une annexe de la scène européenne.

 

C’est cette désinvolture qu’Edward Saïd, dans L’Orientalisme, mettait en exergue chez Lamartine lors de son voyage en Orient, entrepris en 1833. L’écrivain français envisageait ce voyage comme un « grand acte de [s]a vie intérieure » : il s’agissait de projeter des fantasmes, plutôt que de rencontrer une autre réalité. Saïd observe : « Ses pages sur la pensée arabe, sur laquelle il disserte avec une confiance suprême, ne laissent paraître aucune gêne quant à son ignorance totale de la langue. ».

 

Le voyageur s’enthousiasme : « Cette terre arabe est la terre des prodiges, tout y germe, et tout homme crédule ou fanatique peut y devenir prophète à son tour. » Il traite l’Orient comme une « province personnelle », selon les mots de Saïd, qui résume plus loin : « La Palestine était considérée – par Lamartine et par les premiers sionistes – comme un désert vide qui attendait de fleurir ; les habitants qu’il pouvait avoir n’étaient, pensait-on, que des nomades sans importance, sans véritable droit sur la terre et, par conséquent, sans réalité culturelle ou nationale. »

 

Après avoir toujours clamé que la Palestine n’existait pas, certains colons israéliens affirment aujourd’hui que « le Liban n’existe pas[21bis] » et rêvent d’y implanter des colonies. L’automne dernier, peu après le 7 octobre, j’ai encore été effarée par la façon dont des gens pouvaient discuter, sur X, du pays arabe où il conviendrait d’expulser les Palestiniens. Il ne leur venait pas à l’idée, visiblement, que les Palestiniens étaient chez eux sur leur terre. Cela me donnait une furieuse envie d’envoyer mes interlocuteurs vivre sous une tente dans une banlieue de Turin ou de Copenhague – au hasard ; après tout, tous ces gens sont des Européens, ce sont plus ou moins les mêmes, non ?

 

 

- Croire qu’on peut réparer l’écrasement d’un peuple en cautionnant l’écrasement d’un autre

La tolérance est un désert La Palestine et la culture du déni

Ainsi, en espérant réparer l’écrasement d’un peuple, nos amis de gauche pro-israéliens cautionnent, sans même s’en apercevoir, l’écrasement d’un autre. Dans un livre saisissant, l’universitaire américain d’origine palestinienne Saree Makdisi souligne ce fait qui dit tout : depuis le Mémorial de Yad Vashem, à Jérusalem, dédié aux victimes de la Shoah, on aperçoit les ruines du village palestinien de Deir Yassin, théâtre d’un massacre en avril 1948, lors de la fondation de l’État d’Israël, qui vit l’expulsion de quelque 750 000 Palestiniens[22] – la Nakba, ou « catastrophe », toujours en cours, aujourd’hui plus que jamais.

 

« Si des juifs avaient simplement voulu vivre en Palestine, cela n’aurait pas été un problème, écrivait soixante-dix ans après, en 2018, la juriste palestinienne-américaine Noura Erakat. En fait, juifs, musulmans et chrétiens avaient coexisté pendant des siècles dans tout le Moyen-Orient. Mais les sionistes voulaient la souveraineté sur une terre où d’autres gens vivaient. Leur ambition requérait non seulement la dépossession et le déplacement des Palestiniens en 1948, mais aussi leur exil forcé, leur effacement juridique et le déni qu’ils aient jamais existé[23]. ».

 

Comme le remarque Saree Makdisi, les innombrables élus démocrates américains qui clament leur attachement à un État « juif et démocratique » oublient – ou feignent d’oublier – la contradiction contenue dans cette formule :

  • soit Israël est un État juif, qui, pour se maintenir comme tel, doit opprimer, expulser, tuer, et dans ce cas il n’a rien de démocratique ;
  • soit il est réellement démocratique, et alors il doit accorder les mêmes droits et les mêmes libertés aux populations musulmanes et chrétiennes présentes sur son sol.

 

La forêt plantée pour dissimuler les ruines du village palestinien de Saffourieh, détruit en 1948 lors de la Nakba. Photo : Jason Bechtel, Interface Peace-Builders, 2010

 

Si la vision vertueuse d’Israël persiste à gauche, c’est aussi en raison des stratégies de relations publiques mises en œuvre par cet État afin de dissimuler son racisme structurel, que détaille Saree Makdisi dans son livre. Il raconte notamment comment, dès 1948, sous l’égide du Fonds national juif (FNJ), Israël a planté des arbres afin de recouvrir les ruines des villages palestiniens détruits – stratégie qui continue aujourd’hui avec les villages bédouins dans le Néguev.

 

 

- Kamala Harris en 2017 : « Quand je me suis rendue en Israël pour la première fois, j’ai vu que l’ingéniosité israélienne avait réellement fait fleurir le désert »
Le paysage naturel palestinien, avec ses oliviers, ses figuiers de barbarie et ses citronniers, a été éradiqué à coup d’herbicides et remplacé par des monocultures de conifères qui donnent à certains lieux des allures de paysage alpin. Depuis 1967, environ 800 000 oliviers ont été déracinés sur les territoires occupés cette année-là (ces derniers temps, cependant, la tendance est à l’appropriation plutôt qu’à la destruction[24]. Et quand un hôte de marque arrive dans le pays, on l’invite à planter un arbre : un geste pacifiste, écologiste, humaniste, dont personne ne songerait à questionner l’innocence.

 

C’est peu dire que cette stratégie de séduction fonctionne. En 2017, lors d’une conférence de l’American Israel Public Affairs Committee (Aipac), Kamala Harris déclarait : « Ayant grandi dans la baie de San Francisco, je me souviens avec tendresse de ces boîtes du Fonds national juif que nous utilisions pour collecter les dons afin de planter des arbres pour Israël. Des années plus tard, quand je me suis rendue en Israël pour la première fois, j’ai vu les fruits de ces efforts, et que l’ingéniosité israélienne a réellement fait fleurir le désert. »

Inauguration sous tension de l'ambassade des États-Unis à Jérusalem
14/05/2018. Inauguration ambassade USA à Jérusalem

Le livre de Saree Makdisi vient de paraître[22], mais il a été écrit avant le 7 octobre 2023. Dans sa conclusion, l’auteur observe que, « à l’époque des Trump, Bolsonaro, Duterte, Modi et cie », les autorités israéliennes semblent estimer qu’elles peuvent abandonner leurs campagnes de communication destinées à se concilier le public occidental progressiste, et assumer désormais ouvertement leur racisme. Ce que confirment les bonnes relations entre Netanyahou et Trump – qui, durant son mandat, fit déplacer l’ambassade américaine de Tel Aviv à Jérusalem[24bis], un geste hautement symbolique.

 

De fait, en persistant dans leur soutien à Israël, Joe Biden et Kamala Harris ignorent le tournant pro-palestinien de plus en plus marqué qui s’opère dans l’électorat démocrate, tandis que la droite, et en particulier la droite évangélique, violemment islamophobe (et antisémite !), s’affirme, elle, comme fanatiquement pro-israélienne. Il est dommage, alors, que tant de progressistes français s’accrochent encore à leur sympathie pour Israël. Sympathie qui est d’ailleurs le pire service à rendre y compris à Israël lui-même, enfermé dans une spirale sans issue de haine et de folie destructrice.

 

 

- « Nous avons découvert l’étendue de notre déshumanisation, à tel point qu’il n’est plus possible de fonctionner dans le monde de la même façon »
Cela ne m’amuse pas particulièrement de critiquer mes amis politiques. Mais je le fais parce que je crois que nous avons besoin de serrer les rangs. Le génocide en Palestine opère aussi comme une scène sur laquelle se joue, par procuration, le passage à l’acte d’un racisme anti-Arabes qui travaille à peu près toutes les sociétés occidentales. Avec l’afflux de doubles nationaux dans l’armée israélienne[25], la Palestine semble être devenue le stand de tir de tous les islamophobes de la Terre. En soutenant le carnage (ce génocide est américain au moins autant qu’israélien), les dirigeants occidentaux envoient aussi un clair message d’abandon, pour ne pas dire plus, à leurs citoyens d’origine arabe.

 

« Le niveau de traumatisme créé chez les Palestiniens-Américains par la normalisation du meurtre de leurs proches a laissé une communauté en lambeaux », écrit le journaliste Azad Essa[26]. « C’est comme être dans une relation abusive avec le monde », témoigne Nada al-Hanooti, qui vit à Dearborn, la ville américaine (dans le Michigan) où cette communauté est le plus présente[27]. Lina Mounzer lui fait écho : « Demandez à n’importe quel·le Arabe quelle prise de conscience a été la plus douloureuse cette année, et il ou elle vous répondra : nous avons découvert l’étendue de notre déshumanisation, à tel point qu’il n’est plus possible de fonctionner dans le monde de la même façon[28]. »

 

🔴 La hantise de beaucoup – et notamment de Francesca Albanese[29], la rapporteuse spéciale des Nations unies pour les territoires palestiniens – semble être que la violence déchaînée, en plus de détruire la Palestine, ne s’arrête ni aux limites de ce territoire, ni à celles des communautés arabes. La légitimation d’un tel degré de barbarie devrait inquiéter tout le monde. Et rend d’autant plus urgente une clarification des positions de la gauche.

 

 

Notes :

[0] Naomi Klein, « How Israel has made trauma a weapon of war », The Guardian, 5 octobre 2024

[1] Le bilan humain du conflit israélo-palestinien

[1bisUn Palestinien en route pour le mariage de sa sœur tué par des soldats israéliens

[2] Forensic Architecture et Al-Haq, « Mort de Shireen Abu Akleh : comment l’armée israélienne a sciemment exécuté une journaliste », Mediapart, 22 septembre 2022

[3] Cf. Kaoutar Harchi, « Israël-Palestine : handicaper est une politique coloniale », L’Humanité, 3 septembre 2024

[3bis] Nuit d’horreur à Gaza : des Palestiniens brûlés vifs dans le bombardement d’un campement

[4] « Investigating war crimes in Gaza », Al Jazeera English, 3 octobre 2024

[5] Joseph Confavreux, « Crimes israéliens, complicité occidentale », Mediapart, 30 septembre 2024

[6] Cf. Daniel Schneidermann, « BFM : Victime palestinienne, accusez-vous ! », Arrêt sur images, 10 octobre 2024

[7] Rami Abou Jamous, « “Apparemment, on n’a pas le droit de rêver ici” », Orient XXI.info, 29 août 2024. Le 12 octobre 2024, au prix Bayeux Calvados-Normandie des correspondants de guerre, trois trophées ont été décernés à Rami Abou Jamous – une première en trente-et-une éditions.

[8] Sur la question des violences sexuelles commises le 7 octobre, lire l’enquête publiée en avril par le quotidien israélien Haaretz : Liza Rozovsky, « 15 Witnesses, Three Confessions, a Pattern of Naked Dead Bodies. All the Evidence of Hamas Rape on October 7 », Haaretz, 18 avril 2024.

[9] « Inside the Base Where Israel Has Detained Thousands of Gazans », The New York Times, 6 juin 2024.

[10] Cf. Simon Speakman Cordall, « ’Everything is legitimate’ : Israeli leaders defend soldiers accused of rape », Al-Jazeera, 9 août 2024.

[10bis"Qu'ils crèvent tous" : Louis Sarkozy provoque l'indignation après ses propos sur le Hamas et le Hezbollah

[11] Arwa Mahdawi, « As a Palestinian living in the US, I have lost friends, job opportunities – and my faith in humanity », The Guardian, 6 octobre 2024.

[12] Article traduit ici : Adam Johnson et Othman Ali, « La couverture de la guerre de Gaza par le New York Times et d’autres grands journaux a fortement favorisé Israël, selon une analyse », Agence Médias Palestine, 9 janvier 2024.

[12bis] Des Vies ont pris fin à Gaza

[13] « Inside Western media’s reporting on Gaza », « The Listening Post », Al-Jazeera English, 5 octobre 2024.

[14] Lina Mounzer, « A Year of War Without End », The Markaz Review, 4 octobre 2024.

[14bisYannis Arab, doctorant en histoire et auteur de plusieurs ouvrages sur la Palestine, a été arrêté et perquisitionné par la gendarmerie ce mardi dans le cadre d'une énième enquête pour " apologie du terrorisme "

[15] Valérie Lehoux, « L’avocat Arié Alimi : “Je sais que l’antisémitisme existe à gauche, mais le savoir n’a rien à voir avec l’éprouver” », Télérama, 7 avril 2024.

[15bis] Novembre 2024 ; Décision prise par la Cour pénale internationale de délivrer un mandat d’arrêt contre Benjamin Netanyahu, le général Gallant et un responsable du Hamas, est un événement important et constructif sur la scène de la vie internationale

[16] Valérie Lehoux, « “ Une étrange défaite, consentement à l’écrasement de Gaza ”, essai peu convaincant de Didier Fassin », Télérama, 5 septembre 2024.

[16bisJoseph CONFAVREUX " De Gaza au Liban : Crimes israéliens, complicité occidentale "

[17] Chris McGreal, « Une guerre pas comme les autres : des médecins affirment que des enfants ont été pris pour cible par des snipers israéliens à Gaza », The Guardian via Agence Médias Palestine, 2 avril 2024.

[17bisLes enfumades sont une technique utilisée par le corps expéditionnaire français durant la conquête de l'Algérie, en 1844 et 1845

[18] Adam Shatz, « Israël dans l’abîme de Gaza », Orient XXI, 24 juin 2024.

[19] Joss Dray et Denis Sieffert, La Guerre israélienne de l’information. Désinformation et fausses symétries dans le conflit israélo-palestinien, La Découverte, « Sur le vif », Paris, 2002.

[19aAu Liban, Israël attaque les Casques bleus, derniers témoins de ses agissements

[19bPersonnellement j'ai tout à fait de l'empathie pour les otages israéliens et leurs familles. Mais cette empathie est déjà tout à fait présente, médiatique,  officielle. Celle pour les Palestiniens est criminalisée

[19cKarim Kattan, écrivain palestinien : « Pourquoi Gaza a-t-elle disparu derrière des sophismes, des approximations, des murmures désolés ? »

[19dYoumna El Sayed d'Al Jazeera sur le garçon qui avait son petit frère décédé dans un sac à dos

[20] Mariam Mohammed Al Khateeb, « The luxury of death », We Are Not Numbers, 10 juin 2024

[21] Qualifier le massacre du 7 octobre en Israël de massacre antisémite, ou de pogrom, relève de la même logique. À ce sujet, lire le texte de Tsedek !, « 7 octobre : un massacre antisémite ? », 12 février 2024

[21bis« Il n’existe pas de pays comme le Liban. Les gens qui. Tous eux-mêmes Libanais, font semblant de vivre dans un pays.» C’est tellement illusoire, c’est comique

[22] Saree Makdisi, Tolerance Is a Wasteland : Palestine and the Culture of Denial, University of California Press, 2024

[23] Noura Erakat, « Palestinians have no choice but to continue the struggle », The Washington Post, 16 mai 2018

[24] Cf. également l’article d’Aïda Delpuech, « En Israël, l’arbre est aussi un outil colonial », Le Monde diplomatique, octobre 2024 ; et Rob Goyanes, « La guerre écologique contre Gaza », Jewish Currents, 9 septembre 2019.

[24bis] Le 14 mai 2018, les États-Unis transféraient leur ambassade en Israël de Tel-Aviv à Jérusalem

[25] La France n'envisage pas d'enquêter sur les Franco-israéliens qui ont rejoint l'armée israélienne

[26] Azad Essa, « ’I call my brother knowing he won’t pick up’ : The anguish felt by Palestinian Americans over Gaza », Middle East Eye, 5 octobre 2024.

[27] Yasmine El-Sabawi, « ’Unlike anything’ : A year of collective grief for Palestinians in the West over Gaza », Middle East Eye, 7 octobre 2024.

[28] Lina Mounzer, « A Year of War Without End », art. cit.

[29FRANCESCA ALBANESE : Il ne faut pas dire cessez-le-feu, il faut dire cessez le GENOCIDE !

 

Partager cet article
Repost0
20 novembre 2024 3 20 /11 /novembre /2024 21:52
Des Etats-Unis à la France : Après la victoire de Trump, quelles leçons pour la gauche ?
Des Etats-Unis à la France : Après la victoire de Trump, quelles leçons pour la gauche ?

La précondition pour pouvoir gagner est d’affirmer clairement un programme de rupture, partant des besoins des classes populaires et se donnant les moyens politiques et économiques de les concrétiser.

Ce qui importe c’est comment les électrices et électeurs ressentent le projet dont le NFP est porteur.

 

 

La victoire de Trump est porteuse de leçons pour la gauche à condition de dépasser le niveau superficiel de l’analyse qui met l’accent sur le personnage et son comportement. Loin de s’y réduire, sa victoire, comme les autres montées de l’extrême droite, pose des questions qui, pour ne pas être nouvelles, sont plus que jamais d’actualité.

 

 

Sources : Pierre Khalfa |

- Il parait difficile dans le flot de commentaires qui a suivi la victoire de Trump d’y ajouter un point de vue tant soit peu original.

Néanmoins, il parait nécessaire d’y revenir pour essayer d’aller au-delà de l’écume de l’évènement. Il faut pour cela distinguer trois niveaux de réflexions.

 

🔴 Le premier, le plus superficiel, concerne les méthodes employées par Trump lors de la campagne électorale : tout a été dit sur le sujet : invectives, mensonges, démagogie, violence des propos. Trump a fait du Trump en portant à l’incandescence un discours de haine. Mais ce constat n’explique strictement rien.

  • Pourquoi cela a-t-il marché en 2024 et pas lors de l’affrontement avec Biden ?
  • Qu’est-ce qui lui a permis, non seulement de remporter les swings states, mais aussi, résultat a priori inconcevable, largement le vote populaire ?

 

🔴 Le deuxième niveau de réflexion a été parfaitement résumé par Bernie Sanders : « Cela n’a rien d’étonnant que le parti démocrate, qui a abandonné la classe ouvrière, voie que la classe ouvrière l’a abandonné ». Et d’ajouter : « nous n’avons même pas présenté de législation visant à augmenter le salaire minimum, malgré le fait que quelque 20 millions de personnes dans ce pays travaillent pour moins de 15 dollars de l’heure. Aujourd’hui, en Amérique, nous n’avons pas présenté de loi qui faciliterait l’adhésion des travailleurs aux syndicats. Nous ne parlons pas des régimes de retraite à prestations définies pour que nos personnes âgées puissent prendre leur retraite en toute sécurité. Nous ne parlons pas de la hausse du plafond de la sécurité sociale afin de prolonger sa solvabilité et d’augmenter les prestations. En fin de compte, si vous êtes un travailleur moyen, pensez-vous vraiment que le parti démocrate va se battre pour vous, qu’il va s’attaquer à des intérêts particuliers puissants et se battre pour vous ? Je pense que la réponse écrasante est non, et c’est ce qui doit changer ».

 

🔴 En fait donc Trump a bénéficié du décalage entre une bonne santé affichée de l’économie américaine et ce que vivait concrètement une grande partie des salarié.es des États-Unis. Comme l’explique Romaric Godin[1], « la croissance a changé de nature. Elle ne reflète plus aussi clairement le bien-être social […] l’accélération de la croissance a un coût social croissant ». Ainsi, la croissance économique s’est accompagnée d’une hausse importante des dépenses contraintes des ménages et des denrées alimentaires, alors même que le discours officiel de l’administration Biden était focalisé sur la maitrise de l’inflation. Pire même, la croissance économique a généré plus d’inégalités sociales rendant encore plus illusoire le « rêve américain » de promotion sociale et entretenant ainsi le cauchemar du déclassement. Dans cette situation, la désignation par Trump de boucs-émissaires a joué à plein.

 

 

- C’est là où la campagne menée par Harris a été catastrophique.
Non seulement elle n’a absolument pas tenu compte de cette situation, ni proposé de remèdes pour y faire face, mais elle a mené une campagne centrée sur la personnalité de Trump, pensant ainsi profiter d’un rejet de l’électorat. Si ce n’est sur la question de l’avortement, il est difficile de savoir ce qu’Harris a proposé pendant cette campagne. Elle est apparue, de fait, comme la candidate de la continuité, alors même qu’une majorité voulait un changement. Multipliant de plus les apparitions avec des vedettes de la chanson et des stars d’Hollywood, elle est apparue comme déconnectée des réalités sociales d’une partie même de son électorat. Enfin, son incapacité à prendre en compte la sensibilité de la communauté arabo-musulmane et son soutien sans fard à la politique israélienne lui a aliéné des votes dans un certain nombre d’États clefs, alors même qu’elle ne pouvait pas concurrencer Trump sur ce soutien et que la communauté juive était elle-même très divisée sur le sujet. Bref une campagne électorale tournée vers la droite, comme le montre les « signaux » envoyés notamment quand on l’a vue valoriser le port d’armes.

 

 

- Dans cette situation, Trump a réussi à dessiner une vision du futur pour les États-Unis
Une vision certes détestable, mais qui face au vide de la campagne d’Harris, a pu occuper l’espace de l’imaginaire collectif.

 

🔴 C'est là le troisième niveau de réflexion. Il faut revenir ici sur les transformations profondes qui se sont produites dans les sociétés occidentales ces dernières décennies.

  • Une révolution anthropologique est en cours qui remet en cause des centaines de siècles de rapports d’oppression et les représentations sociales correspondantes, que ce soit sur la place des femmes, de l’homosexualité ou des minorités discriminées et plus globalement sur la conception de la famille. Il serait naïf de croire qu’un tel processus puisse se faire sans résistance. En ce sens Trump représente probablement la forme la plus construite et la plus décomplexée de la contre-révolution dont l’objectif clairement assumé est celui d’un retour en arrière.
  • Il ne s’agit pas seulement d’une réaction conservatrice, le backlash, mais d’une volonté d’imposer un nouvel imaginaire social. Ce dernier fait certes la part belle aux masculinistes blancs mais est loin de s’y réduire au vu du résultat beaucoup moins important que prévu d’Harris chez les femmes et les minorités.
  • La victoire sans appel de Trump tient à la conjonction qu’il a réussi à opérer entre cet imaginaire dont on peut penser qu’il reste minoritaire aux États-Unis - comme le montrent les résultats d’un certain nombre de référendums sur l’avortement dans des États ayant voté Trump – avec l’angoisse du déclassement social d’une partie de l’électorat démocrate qui a ainsi basculé. Les caractéristiques individuelles du personnage étaient en symbiose avec le récit qu’il entendait imposer : homme fort, providentiel, volontariste capable de résoudre rapidement le problèmes.

 

 

- Quelles leçons peut-on en tirer pour la gauche en France ?
La première est que la précondition pour pouvoir gagner est d’affirmer clairement un programme de rupture, partant des besoins des classes populaires et se donnant les moyens politiques et économiques de les concrétiser. En ce sens, les tentatives à gauche des revenants du néolibéralisme, les Cazeneuve, Hollande, Delga, etc. qui, n’ayant rien appris ni rien oublié, rêvent de détruire le NFP et fantasment sur le retour à la domination d’une offre politique centriste, ne peuvent que mener à la catastrophe face à l’extrême droite. La débâcle d’Harris, après d’autres du même type, prouve une nouvelle fois que la gauche néolibérale est incapable de répondre aux défis du moment.

 

 

🔴 Cependant, cette précondition pour indispensable qu’elle soit, n’est pas suffisante.

Comme dans le cas de Trump, la force de l’extrême droite est de développer une vision du futur nourrissant un imaginaire social s’appuyant sur les angoisses diverses de l’électorat. Face au ressentiment qui nourrit l’extrême droite, le pire serait d’essayer de la battre sur son propre terrain en s’emparant de ses thèmes, croyant ainsi la cantonner alors que cela ne fait que la légitimer. Le laminage de la droite dite républicaine par le RN et l’épisode de la déchéance de nationalité par Hollande sont là en France pour nous le rappeler. Il faut au contraire être capable de porter l’espoir d’une société désirable en mettant en avant la recherche de l’égalité, l’exigence de la solidarité, la nécessité de la justice sociale et écologique, l’impératif de la démocratie.

 

 

🔴  Et de même que le profil de Trump correspond au projet politique qu’il porte, de même, la gauche doit adopter des comportements qui correspondent à son projet d’émancipation, la morale politique et le réalisme stratégique correspondant dans ce casLa question du programme effectif, c’est-à-dire le détail des mesures préconisées, pour importante qu’elle soit, n’est pas la plus décisive. Ce qui importe c’est comment les électrices et électeurs ressentent le projet dont le NFP est porteur. Ainsi, quand on propose un projet de rupture :

  • il faut rassurer et non pas inquiéter par des propos et des comportements brutaux, ce d’autant plus quand la société en question est angoissée quant à son avenir et que l’extrême droite essaie de se banaliser.
  • De plus, l’exigence démocratique ne peut être renvoyée à des jours meilleurs. Elle doit imprégner le rapport que les partis politiques entretiennent avec les classes populaires et avec leurs propres militant.es et adhérent.es.
  • Enfin une politique de gauche ne peut donner à voir simplement une concurrence entre les différentes forces politiques. Même s’il est naturel que chaque parti défende ses positions, la recherche permanente de l’hégémonie est un obstacle à la construction commune qui ne peut reposer que sur le respect de la diversité.
Partager cet article
Repost0
6 novembre 2024 3 06 /11 /novembre /2024 13:56
Victoire de Trump : Trump a fait du Trump, Harris a fait du Hollande !

Élection de Donald Trump : " seule une gauche radicale et populaire peut l’emporter contre l’extrême droite "[2] !

La leçon à en tirer pour la gauche française se tient là, en écho à la victoire du Nouveau Front Populaire aux dernières élections législatives : " on ne peut combattre l’extrême droite et la droite fascisante qu’avec un programme de gauche, avec des propositions de rupture, avec des alternatives qui changeront réellement et profondément la vie des gens "[3].

 

 

Les USA ne pouvaient pas choisir la gauche : il n’y en avait pas. Quand il n’y a plus de gauche, il n’y a pas de limite à droite. Quand il n’y a pas de bataille de programme, l’élection devient un casting. La victoire de Trump est la conséquence imparable de cette situation. Le monde va monter en tension. Prudence et détermination. La France peut ouvrir un autre chemin. Un contre modèle. Non alignement, droit international, justice sociale, planification écologique. Sinon quoi[1] ?

 

 

Sources : Bastien Lachaud | mis à jour le 28/11/2024

- La victoire de Donald Trump, c’est celle de la fusion aboutie entre le capitalisme le plus prédateur et l’extrême-droite la plus débridée[0].
Une classe dominante prête à tout pour maintenir sur pied un système à bout de souffle et continuer à s’enrichir, qui attise la haine et dupe le peuple à grand coup de vérités alternatives et de racisme décomplexé propagé à l’infini par les chaines d’informations et les réseaux sociaux. 

 


- C’est aussi et d’abord la défaite du camp démocrate, qui a renoncé depuis longtemps à incarner une alternative à ce modèle.
On ne peut pas gagner une élection sans projet de transformation et sans autre idée que celle de faire « barrage » pour mieux continuer comme avant. On ne peut pas vaincre le capitalisme, l’impérialisme, le racisme, le patriarcat, la régression sociale et écologique, en renonçant à contester leur discours, et en transigeant avec celui-ci. 

 


- Cette élection est lourde de conséquences.

  • Pour des millions de personnes aux Etats-Unis, immigrés, minorités, femmes, les plus pauvres qui subiront de plein fouet les politiques régressives du trumpisme.
  • Pour le monde, quand l’élection de Trump ouvre la voie à la poursuite du génocide à Gaza, à la montée des tensions au Proche-Orient et dans la zone Asie-Pacifique.
  • Pour la planète elle-même, avec l’arrivée au pouvoir d’une administration climatosceptique au cœur du système capitaliste. 

 


- Pour nous, Français, insoumis, l’heure est comme toujours au combat.
Aux côtés des victimes du trumpisme aux Etats-Unis, vers lesquelles se tournent nos pensées, nos cœurs, notre solidarité d’internationalistes. Dans le monde, où nous avons la tâche de faire entendre une voix non-alignée, attachée au multilatéralisme, au règlement pacifique des conflits, à l’effort commun de l’humanité face au changement climatique et aux défis planétaires auxquels elle fait face. En France même, où notre devoir est de nous battre, pour refuser le face-à-face stérile mortifère entre une extrême-droite et un extrême-centre qui partagent le même socle, et incarner une alternative démocratique, sociale, écologiste et humaniste, pour en finir avec leur monde failli et ouvrir un autre chemin.

 

 

- Si tu te dégonfles, tu te Trump
Jean-Luc Mélenchon est revenu sur le résultat des élections présidentielles aux États-Unis le 6 novembre 2024.

 

 

- Deux visions de députés France insoumise/Nouveau Front Populaire

 

Les leçons des élections étasuniennes sont édifiantes.

 

Ce n’est pas Trump qui a gagné. C’est Harris qui a perdu, alors qu’elle avait en face d’elle un candidat d’une telle médiocrité qu’il lui garantissait le succès. Sa défaite est d’autant plus impardonnable.

 

Notes :

[0Dossier Etats-Unis. « Trump et le trumpisme »

[1] Jean-Luc Mélenchon : Les USA ne pouvaient pas choisir la gauche : il n’y en avait pas.

[2] Élection de Donald Trump : seule une gauche radicale et populaire peut l’emporter contre l’extrême droite

[3Plongée au cœur des élections américaines, jour de vote et nuit de résultats !

 

Pour en savoir plus :

- Manuel Bompard : Kamala Harris perd (47 % pour elle – en recul de 4 points par rapport à 2020, et 50 % pour Trump – en progression de 6 points) chez les électeurs qui gagnent moins de 50 000 dollars par an. Elle ne devance Donald Trump que chez les électeurs ayant un revenu supérieur à 100 000 dollars par an

- Élection de Donald Trump : Trump a fait du Trump, Harris a fait du Hollande !

Les bourses européennes dans le vert avec la victoire de Trump

L’extrême droite de Donald Trump et Marine Le Pen

Trump ou le triomphe logique de la guerre des races néolibérale

Trump : la masculinité toxique a gagné

- « It’s the economy, stupid ! » : le véritable sens de la victoire de Donald Trump

- Le trumpisme " pas si loin d’une version américaine du fascisme " (Michael Walzer : « Il sera très difficile pour les progressistes de gagner des élections à l’avenir »)

- L’élection de Trump et des Républicains à sa botte - Le monde change de base comme à l’avènement d’Hitler en 1933

 

Partager cet article
Repost0
14 octobre 2024 1 14 /10 /octobre /2024 10:39
Aymeric Caron : " Gaza depuis le 7 octobre " 2023
Aymeric Caron : " Gaza depuis le 7 octobre " 2023

Le film de montage d'Aymeric Caron, député France insoumise, diffusé à l'Assemblée nationale le 29 mai dernier (avant la dissolution)
« Ce film est écrasant, effroyable… Voilà ce qu’est vraiment la supposée “ guerre contre le Hamas ”.
Cette réalité terrible doit être montrée crûment. Il est bon que ce film puisse être vu.
On aimerait qu’il soit vu en Israël. » Rony Brauman (Médecin, essayiste, ex-président de Médecins Sans Frontières)

 

 

Réalisation : CINÉmutinsBitton |

- Le film vu par les Mutins de Pangée
Attention, si vous décidez d’appuyer sur le bouton de lecture, vous ne sortirez pas indemne de ce visionnage. Personne n’a envie de voir des images aussi effroyables, mais elles témoignent de ce qui se passe à Gaza depuis l’attaque du 7 octobre 2023.
 

🔴  Un cauchemar
« C’est un rêve ou une réalité ? » demande une petite fille abasourdie par ses blessures. C’est un cauchemar, sans aucun doute, et rien ne peut le justifier, ni les crimes du 7 octobre ni la détention des otages israéliens par le Hamas. Condamner tous les crimes du 7 octobre, d’avant et d’après, condamner l’antisémitisme et toutes les formes de racisme, c’est le sens commun. Il semble cependant qu’il faille le préciser. Toute personne normalement constituée souhaite que les otages survivants puissent un jour retrouver leurs familles et que s’arrête immédiatement le massacre à Gaza. Mais aller jusqu’au bout de la démarche, c’est voir les choses en face, voir ce qui se passe à Gaza depuis le 7 octobre, ce que fait l’armée israélienne, ce que ne montrent pas les chaînes de télévision.

 

🔴  Des journalistes documentent
Reporters Sans Frontières a dénoncé la mort d’une centaine de journalistes, tués à Gaza par l’armée israélienne entre le 7 octobre 2023 et début juin 2024, souvent délibérément ciblés, comme l’ont été des soignants et du personnel humanitaire, parmi les dizaines de milliers de gens bombardés ou visés par des snipers, mutilés, déplacés, affamés, harcelés, torturés, des familles entièrement décimées (dont au moins 40 % sont des enfants), dans leurs habitations, dans la rue, dans des écoles, dans des hôpitaux, dans des ambulances, dans des camps de réfugiés… Le bilan s’alourdit en permanence, il est mis à jour par les ONG. L’Unicef alertait dès le début : « La bande de Gaza est aujourd’hui l’endroit le plus dangereux au monde pour un enfant. » (voir site de l'Unicef[1]) 

 

Ce film de montage a été réalisé par le journaliste et député Aymeric Caron avec l’aide d’une équipe, qui a identifié, trié et daté ces images, contacté des journalistes sur place. Sans autres commentaires que les titres et légendes qui datent et donnent les sources des images envoyées depuis Gaza comme des bouteilles à la mer par des filmeurs et des filmeuses, journalistes qui continuent à travailler dans des conditions terribles alors qu’aucun de leurs collègues étrangers n’est autorisé à entrer dans cette zone de crime de 360 km2. Leurs images se percutent avec des prises de paroles israéliennes, officielles et dissidentes, ainsi que des vidéos postées sur les réseaux par des soldats israéliens.

 

Le film contient beaucoup d’images du journaliste palestinien Motaz Azaiza, aujourd’hui en exil, et qui vient de recevoir le prix Liberté à Caen, décerné par la région Normandie avec l’Institut international des droits de l’homme et de la paix (Le Monde, 17 juin 2024[2])

 

🔴  Une première séance à l’Assemblée nationale
Le député Aymeric Caron a d’abord organisé une séance à l’Assemblée nationale pour ses collègues de tous les groupes parlementaires, le 29 mai dernier[3]. Seulement 17 députés ont assisté à cette projection, quelques journalistes étaient présents. Aymeric Caron a alors précisé qu’il souhaitait mettre son film « à disposition de tous ceux qui veulent le voir ». Nous l’avons aussitôt contacté pour en parler. Nous nous sommes bien sûr demandé s’il fallait vous montrer ces images sur CinéMutins. Après réflexions, discussions, consultations, nous avons voulu vous laisser la libre décision de visionner ce film (ou pas), en libre accès, après vous avoir averti de la nature de ces images, le réalisateur ayant ajouté un carton au début du film.

 

🔴  Un film qu’on voudrait voir s’arrêter
Préalablement, il a fallu donc visionner le film et nous l’avons jugé terrible, insoutenable… mais nécessaire. Car, au-delà de tous les discours et de « la guerre des mots » qui montrent le visage assez délirant de l’environnement politico-médiatique dans lequel on baigne en France, ces images documentent les crimes de guerre perpétrés, dans une démocratie, par l’autoproclamée « armée la plus morale du monde ». Des crimes commis avec des armes fournies en grande partie par les États-Unis et l’Union européenne, l’Allemagne surtout et même la France comme l’ont révélé Disclose et Marsactu en mars 2024 (en savoir plus[4]).

Dès les premières minutes de visionnage, on voudrait que le film s’arrête, que ça cesse immédiatement… que cessent les crimes, que cesse le feu, que tout ça n’ait jamais existé.

 

🔴  Qui peut encore nier ou justifier ces crimes après avoir vu ces images ?

Nous ne trouvons pas les mots à opposer à la mauvaise foi où le poids d’une photo ne pèse plus bien lourd au milieu de la masse d’images qu’il faut digérer chaque jour, où les réalités sont niées avec aplomb, voire même, carrément justifiées ouvertement avec mépris, insultes et menaces, par des criminels de guerre et leurs complices, qui osent salir les morts qu’ils engendrent, mais aussi la mémoire des victimes de l’antisémitisme dans l’histoire, en usant de cette grave accusation à tous propos dans le but de faire taire toute contestation. Ces images témoignent pour que ça cesse, avant tout. Face à ceux qui continuent à soutenir ces crimes, face aux discours de haine, de vengeance et de déshumanisation, plutôt que de se laisser entrainer dans une forme de surenchère verbale, nous préférons opposer ce miroir sans tain. Bon courage.

 

 

- Présentation du film

 

 

👉 Pour accéder au film, cliquez ici  👇

 

Gaza. Depuis le 7 octobre Synopsis Le film de montage d'Aymeric Caron, diffusé à l'Assemblée nationale le 29 mai dernier

 

Partager cet article
Repost0
3 août 2024 6 03 /08 /août /2024 21:06
Quand les ultra-riches se préparent au pire :  un palace ?... Oui, mais sous terre !

Des milliardaires construisent des bunkers entièrement autonomes ou veulent coloniser Mars[2] : prévision de l’apocalypse climatique, sociale ou féodalisme ?

 

 

Lorsqu’on pense aux « survivalistes » – ces hommes et ces femmes qui se préparent à la fin du monde –, viennent principalement à l’esprit des images d’Américains paranoïaques ou de sécessionnistes adeptes des armes à feu et vivant déjà aux marges de la société.

Mais l’apparente déraison de ces « preppers » semble saisir depuis peu une tout autre catégorie de la population, celle des ultra-riches, issus de la Silicon Valley, de start-up new-yorkaises ou de hedge funds californiens.
Censés afficher leur confiance en l’avenir ( technologique ) de l’homme et un rapport raisonnable à notre futur, ils commencent en réalité à stocker vivres et munitions, à acheter des terrains reculés et à se faire construire des bunkers de luxe.

Ce qu’ils craignent est toutefois moins la fin du monde que la fin de leur monde : la grande revanche des « exclus » de la modernité américaine, les pauvres, les Noirs, les Latinos[1]

 

 

Source : Durand Eric |

- Depuis quelques années, les bunkers ultra-luxueux et entièrement autonomes sont en vogue chez les milliardaires.
Alors que certains pourraient y voir une prédiction d’un avenir apocalyptique, des analystes suggèrent plutôt une forme de féodalisme. Autrement dit, ils chercheraient à créer des écosystèmes autonomes dont ils contrôlent tous les aspects, et ce tout en étant en accord avec les communautés locales.

 

En décembre 2023, il a été rapporté que Mark Zuckerberg, PDG de Meta, a acheté des milliers d’hectares de terrain sur l’île de Kauai, à Hawaï[3]. Il serait en train d’y installer un immense complexe qu’il a baptisé " Ko’olaou Ranch ", et dont la construction coûterait plus de 260 millions de dollars. S’étendant sur 5 500 000 mètres carrés, l’immense domaine ultrasécurisé est entièrement entouré d’un mur de deux mètres de haut et surveillé en permanence par de nombreux agents de sécurité.

 

D’après les plans révélés par Wired[4], le domaine inclut plusieurs grandes villas reliées par des tunnels souterrains, au moins 11 cabanes de luxe perchées dans les arbres et reliées par des ponts suspendus et un terrain de foot. Un gigantesque bunker sous-terrain serait également en construction dans le ranch. Diverses installations sont dédiées au dessalement, à la purification et au stockage de l’eau. 

 

Zuckerberg a également révélé dans l’une de ses publications sur Instagram, qu’il y élevait son propre bétail en les nourrissant avec des noix de macadamia provenant des plantations du ranch. Étant donné que chaque vache consomme entre 2 et 5 tonnes de nourriture par an, cela représente des centaines d’hectares de plantation.

 

 

- D’autres milliardaires, dont Oprah Winfrey, Frank VanderSloot (PDG de Melaleuca) et Bill Gates ont également acheté de milliers d’hectares de terrain pour y construire de gigantesques propriétés à Hawaï et ailleurs sur le territoire américain.

D’autres, comme Peter Thiel (fondateur de PayPal), préfèrent investir à l’étranger, notamment en Nouvelle-Zélande.


Le point commun entre les projets de ces milliardaires est la présence de bunkers fortifiés ainsi que de systèmes d’approvisionnement leur permettant une autonomie quasi totale. Alors que ces infrastructures sont toujours plus en vogue dans la culture populaire, les raisons de leur construction ont tendance à motiver toutes sortes d’hypothèses. « Les gens ne se demandent pas seulement ‘pourquoi Mark Zuckerberg construit-il un bunker privé contre l’apocalypse à Hawaï ?’, mais aussi ‘que savent les [milliardaires] ? ’ et ‘que va-t-il se passer en 2024 qu’ils ne nous disent pas ? ’ », ont écrit dans un article de " The Conversation[5] " des experts de l’Université du Queensland.

 

  • D’après les plans de leurs constructions, ces grandes fortunes semblent en effet vouloir se préparer à une catastrophe mondiale.

Cependant, selon les experts, la réalité serait beaucoup plus subtile et ambitieuse : la construction d’écosystèmes entièrement autonomes au sein desquels les terres, l’agriculture, les infrastructures et le travail sont tous contrôlés et gérés par une seule personne. Cette vision aurait donc plus d’éléments en commun avec un seigneur féodal qu’avec un capitaliste moderne.

 

 

- Alors, pourquoi les millionnaires se préparent-ils à la fin du monde ?
Les super-riches savent que l’effondrement est pour bientôt !
Les milliardaires et millionnaires de la Silicon Valley, les fondateurs des fameuses start-ups en hypercroissance sont de plus en plus nombreux à l’avouer et à l’assumer.

  • Ils se préparent à un bouleversement majeur dans les prochaines années[6].
    • Achat d’îles isolées ; 
    • construction de bunkers ; 
    • villes ultras-sécurisées ; 
    • plans d’évacuation ; 
    • recrutement d’anciens militaires…

Quand on a les moyens, on ne compte pas !

 

 

- Qui sont vraiment ces riches qui se préparent à l’apocalypse ? 
Contrairement aux anciennes générations de dirigeants d’entreprise, ce sont des « Self-made man » (« qui s’est fait tout seul », en français). Ils ne doivent leur fortune qu’à leur grande " intelligence " et à leur " sens des affaires ". Ces ultra-riches, milliardaires ou « seulement » multi-millionnaires sont ceux qui ont créé le monde ultra connecté dans lequel nous vivons

  • Récupération massive des données personnelles ;
  • Reconnaissance faciale ;
  • Automatisation massive de la production et des services…

Ce sont eux qui sont en train de créer leur propre monde du futur.

 

 

- Pourquoi ceux qui créent le futur le redoutent-ils ?
Quand on crée un système, on connaît ses forces, mais aussi ses faiblesses.
Ils connaissent mieux que personne les dangers du monde ultra connecté et ultra dépendant à la technologie dans lequel nous vivons.
Ils savent qu’un simple bug informatique ou une coupure d’électricité généralisée peut causer des ravages dans les pays industrialisés.


🔴 La crainte d’un crash technologique

  • Il y a 50 ans, en cas de coupure d’électricité, il suffisait d’allumer des bougies pour que la vie reprenne son cours... Aujourd’hui, tout s’arrête :  les transports, les hôpitaux, l’approvisionnement alimentaire, la sécurité…
  • Dans les villes, où la population est ultra concentrée, les dégâts seront terribles.
    • Imagine un bug dans le système de paiement de ta banque ; 
    • Un scénario de fin du monde rarement pris comme exemple et qui ne semble pas critique ;
    • Si un bug majeur était détecté dans le système informatique des banques (elles utilisent quasiment toutes la même technologie), l’économie mondiale serait tout simplement paralysée ;
    • Plus personne n’aura confiance dans les données qui sont stockées sur les serveurs. 


🔴 La monnaie n’a plus aucune valeur, l’économie s’effondre

  • Si plus personne n’a confiance dans les données des banques.
  • Un billet de 500 € vaudra autant qu’un emballage de sandwich.

Voici la définition de la monnaie fiduciaire selon Wikipédia :
« La monnaie fiduciaire est la monnaie comprenant les pièces et les billets de banque, c’est un instrument financier dont la valeur nominale est supérieure à la valeur intrinsèque : la confiance (fiducia en latin) que lui accorde l’utilisateur comme valeur d’échange, moyen de paiement, et donc comme monnaie, repose sur un principe de garantie défendu par une institution centralisatrice. »

  • Conséquences ?
    • Impossible de retirer de l’argent en liquide de son compte bancaire ;
    • Impossible de payer avec une carte de crédit ;
    • Impossible de payer les salaires ;
    • Impossible pour les entreprises de payer leurs fournisseurs ;
    • Sans moyen de paiement informatique, l’économie s’effondre complètement.


🔴 La crainte de troubles sociaux

  • En plus des risques technologiques, il y a une autre peur latente dans l’esprit de ces super-riches... C’est celle des troubles sociaux de grande ampleur.
  • Ces troubles, ils en seront la cause, mais surtout, ils seront les premières victimes de cet inévitable effondrement
    • En effet, ce sont eux qui, en automatisant le travail, détruisent des millions d’emplois. Ces milliardaires ont mis en place les modèles économiques qui réduisent à la misère les classes sociales les plus vulnérables ;
    • Ce sont également eux qui, en coulisses, aident les États à mettre en place des outils de contrôle des masses
    • Récupération et analyse des données, vidéosurveillance avec reconnaissance faciale, manipulation de l’opinion…
    • Ça a longtemps été un fantasme, mais ces technologies sont aujourd’hui dans nos rues.

 

- Une tendance vers le féodalisme ?
Dans le système féodal de l’Europe médiévale, le roi possédait la quasi-totalité des biens, que ce soit les terres ou les habitations. Les droits de propriété des habitants dépendaient ainsi de leur relation avec ce roi. Les paysans vivaient et cultivaient généralement sur des terrains concédés par le roi à un seigneur local. Il arrivait même que les outils qu’ils utilisaient ne leur appartienne pas.

 

Selon les experts de l’Université de Queensland, ce que font les milliardaires comme Zuckerberg à Hawaï évoque ce féodalisme. Bien que l’homme d’affaires est soupçonné d’avoir joué de ses relations pour obtenir ses terres, la communauté locale a néanmoins accepté son installation et lui a confié la gestion de ses terres. « Il s’agit d’un modèle économique qui mène directement au féodalisme », ont écrit les chercheurs.

 

La stratégie d’installation de Zuckerberg est ainsi basée sur la coopération avec les locaux. Bien que les terres lui appartiennent désormais, son installation a offert des opportunités d’emploi et de développement économique pour les natifs. En outre, le PDG de Meta et sa femme incluent également des projets de conservation de la biodiversité indigène, ainsi que des fermes de curcuma et de gingembre bio. Dans cette vision, l’écosystème élaboré par Zuckerberg est entièrement autonome et chaque membre y apporte sa contribution (chacun y voyant un intérêt).

 

En revanche, l’installation de Thiel en Nouvelle-Zélande n’a pas aussi bien été acceptée par les locaux. Le fondateur de PayPal projetait notamment de construire un bâtiment souterrain sophistiqué ressemblant à un bunker et s’étendant sur plus de 73 700 mètres carrés, sur l’île d’Aotearoa. Le projet a été rejeté en raison de conflits d’intérêts avec le conseil local. Les autorités souhaitaient probablement protéger les intérêts des natifs ou autochtones qui, dans de nombreux pays (dont Hawaï), sont souvent exclus de leurs terres ancestrales pour des raisons économiques, telles que l’installation d’individus fortunés.

  • « Ce qui émerge parmi les milliardaires est plutôt la conviction que la survie ne dépend pas (seulement) du fait de se cacher dans un trou en béton armé creusé dans le sol, mais (aussi) du développement et du contrôle de son propre écosystème », indique le groupe d’analystes.

 

- Conclusion 

Sur le fond, ces milliardaires prévoyants ne sont pas dupes, ils sont conscients que la situation n’est pas viable sur le long terme.

Ils vivent dans la crainte que la population se révolte.

  • Contre le système actuel. 
  • Contre eux.

Prépare-toi !

 

 

- Quand les ultra-riches veulent échapper à la fin du monde dans laquelle ils nous mènent 

Quand les plus pauvres suffoqueront sous 40°C dans un épais nuage de pollution, où seront les ultra-riches ? A priori dans leurs bunkers. Ce marché est florissant à mesure que la crise climatique et autres tensions géopolitiques s’accélèrent.

Le patron de Facebook (Meta) est en première ligne : il est en train de construire secrètement un bunker sur l’île hawaïenne Kauai.

 

Partager cet article
Repost0
19 mai 2024 7 19 /05 /mai /2024 23:21
Macron veut-il renouer avec le passé ? 17/12/1918 : L’armée française débarque en Ukraine pour combattre la Révolution russe et accaparer les richesses !

Au début du 20e siècle, le gouvernement français nourrit le projet d'intervenir en Ukraine et en Crimée pour secourir les forces anti-bolcheviques et mettre en échec la propagation de la tempête révolutionnaire

 

 

En décembre 1918, le pouvoir soviétique paraît aux abois.
Depuis six mois, le soulèvement de la Légion tchèque, manœuvré par les gouvernements français et britannique, a coupé la Sibérie et l’Oural de Moscou.
25 et 26 mai 1918, la Légion tchèque se soulève et sépare la Sibérie de l’URSS
[1].
Avec l’aide monumentale de la Grande-Bretagne, de la France, des Etats Unis, du Japon, du Canada... les armées de l’amiral Koltchak marchent de la Volga vers le Kremlin.
24 décembre 1918 L’armée blanche sibérienne de Koltchak prend Perm et marche vers Moscou
En fait, les grands pays capitalistes sont intervenus en Russie dès la révolution pour tenter de mettre sur pied des armées contre-révolutionnaires, à terme démanteler le pays pour le plus grand profit de leurs grandes entreprises.

 

 

Source : Midi Insoumis, Populaire et Citoyen par Jacques Serieys |

- La France joue un rôle central en 1917/1918/1919 dans la constitution d’une alliance capitaliste internationale contre la Révolution russe
Pourquoi la France joue-t-elle un tel rôle ?

 

🔴 La principale raison me paraît politique : des dirigeants nationalistes et impérialistes

Les dirigeants politiques (Clémenceau, Poincaré...) sortent de la Première Guerre mondiale en pleine euphorie. Ils vivent la France comme la nation militairement la plus forte de la planète d’où une responsabilité de puissance impérialiste principale. Ce comportement des dirigeants politiques est évidemment renforcé par le poids moral des principaux chefs militaires dans la population. Or, Foch comme Castelnau ou Franchet d’Espérey sont aussi profondément imbus de tradition nationaliste militariste conservatrice que les corps d’officiers autrichiens, russes, serbes et allemands dont le rôle a été si important dans le déclenchement de la guerre.


🔴 La France capitaliste a investi des sommes importantes en Russie

Avant et pendant la Première Guerre mondiale, le gouvernement français a mobilisé des moyens de propagande très importants pour pousser les citoyens à souscrire des emprunts d’État russes. Onze milliards et demi de francs-or ont ainsi été récoltés[3]. Trois banques françaises détiennent 30 % du capital des onze principales banques de la capitale tsariste. Plus du tiers des investissements industriels privés étrangers en Russie sont français en 1917.
C’est surtout le grand patronat, d’une part français, d’autre britannique, qui pousse à profiter de la situation instable née de la révolution pour s’accaparer des richesses naturelles du pays.


🔴 La préoccupation impérialiste permanente de Clémenceau

En décembre 1917, au moment où le gouvernement Clémenceau se heurte à de nombreuses difficultés militaires (la révolution d’Octobre a libéré de nombreuses divisions allemandes du Front de l’Est), sociales (grandes grèves de 1917, mutineries), politiques (les socialistes ont rompu l’Union sacrée[4][4bis], financières (lancement d’un nouvel emprunt d’Etat)... son principal souci, c’est en fait de contre-attaquer en Russie même, balayer les bolchéviks, répartir des zones d’influence économique avec les autres Etats capitalistes.
 

Le 23 décembre 1917, lendemain du début de la Conférence de Brest Litovsk, des représentants de la France et de la Grande-Bretagne se réunissent à Paris et con­cluent une convention pour le démembrement de la Russie en zones d’influence :

  • l’Angleterre se réserve les provinces baltes et le Caucase (surtout son pétrole) ;
  • la France choisit l’Ukraine de la Biélorussie à la Bessarabie et au Donetz (fer, charbon, bassin sidérurgique...) ainsi que les rives de la Mer Noire dont Odessa et la Crimée.


🔴 Des dirigeants militaires conservateurs, va-t-en guerre contre le communisme

Foch, général en chef des armées alliées en 1918, pèse lourd dans les décisions prises par la France sur la fin de la guerre et dans les années suivantes. Or, il voit le combat contre le communisme comme une guerre classique avec ses fronts bien délimités. En mars 1919, convoqué à une réunion de chefs d’état pour donner son avis sur la question, il déclare " Le péril bolchéviste s’étend vers le Sud et vers la Hongrie, il faut l’arrêter à Odessa et à Lemberg[5]." 

 

 

- Avant même la fin de la Première Guerre Mondiale, le gouvernement français de Clémenceau se préoccupe plus de combattre les aspirations des peuples et préparer une intervention militaire directe en URSS que de finir rapidement la guerre contre l’Allemagne

En juin 1918, le général Louis Franchet d’Espérey, excellent d’un point de vue militaire, prend le commandement des armées alliées d’Orient à Salonique. En septembre, il dispose de forces imposantes pour passer à l’offensive : 8 divisions françaises (comprenant 18% de Sénégalais et Maghrébins), 6 divisions Serbes, 4 britanniques, 9 grecques et une italienne. En un mois, il bouscule les lignes bulgares et allemandes, pénètre largement en Serbie, entre dans Belgrade, obtient la capitulation de la Bulgarie, fait prisonniers 90000 Bulgares ainsi que l’armée allemande de Von Steuben[6].

 

L’armistice signé à Salonique le 29 septembre 1918 pour tout le Front d’Orient, libère les armées de Franchet d’Espérey qui pourraient pénétrer en Europe centrale sur les arrières allemands. D’ailleurs, le Haut commandement allemand réfléchit alors à un armistice sur tous les fronts.

  • Mais le gouvernement français préfère utiliser ces troupes françaises pour aider à la construction d’un Etat roumain militarisé au service de la France, préparer la naissance de la Pologne et la Tchécoslovaquie sur les mêmes bases, surveiller les peuples hongrois et bulgares, soutenir les armées blanches en Russie.
  • Ainsi, en octobre 1918, le général Franchet d’Esperey, commandant l’armée française des Balkans, reçoit l’ordre de stopper sa marche vers l’Europe centrale, de rassembler les troupes en Roumanie pour intervenir en Russie « afin d’y poursuivre la lutte contre les puissances centrales, mais encore pour réaliser l’encerclement économique du bolchevisme et en provoquer la chute ».

 

 

- Dès la Première Guerre mondiale terminée, des troupes françaises d’Orient sont maintenues sous les drapeaux pour attaquer l’URSS

L’armistice du 11 novembre 1918 fait passer les troupes allemandes d’Ukraine sous commandement français pour affronter les rouges. Le gouvernement français est alors décidé à apporter le maximum de soutien au général Krasnov dans la zone du Don et au général Dénikine, commandant l’armée blanche du Sud.

  • Le 13 novembre 1918, une flotte alliée mouille devant Constantinople, prête à intervenir en URSS[7]. Elle comprend la deuxième escadre française, commandée par l’amiral Amet, et deux divisions de forces terrestres, avec le général Franchet d’Espérey.
  • Le 20 novembre 1918, des Russes blancs réunis à Jassy (en Roumanie, alliée de la France, où Berthelot et Franchet d’Espérey jouent un rôle très important) demandent officiellement à l’Entente (France, Grande Bretagne, Serbie...) l’envoi d’un corps expéditionnaire pour renverser les soviets[8].
  • Le lendemain, 21 novembre, Clémenceau brosse pour Franchet d’Espérey « un plan général pour l’isolement économique du bolchevisme en Russie en vue de provoquer sa chute ». Il s’agit d’occuper les ports et d’établir un « cordon sanitaire » : étouffer l’économie soviétique et isoler l’Europe de la contagion des idées révolutionnaires. L’importance donnée à l’occupation du Donbass montre bien que les objectifs économiques impérialistes priment[8].
  • Bientôt, la flotte "alliée" composée surtout de forces françaises débarque à Sébastopol (Crimée, 13 décembre) puis dans le port d’Odessa comme en pays conquis. En janvier 1919, viendront le tour des ports de Nikolaïeff et de Kherson.

Les unités françaises et alliées (Grecs, Polonais, Roumains...) opèrent conjointement avec les bandes séparatistes de Petlioura et de Gregoriev, avec les armées blanches de Krasnov dans la région du Don, de Denikine au Kouban.

  • Le 17 décembre 1918, le général français Borius débarque à Odessa avec la 156ème division. Trois compagnies de fusiliers marins aidées de "volontaires" russes et polonais prennent le contrôle du port ; 4000 Allemands gardent la gare et ses environs.
  • Le 25 décembre, la Crimée commence à être investie par des troupes françaises (débarquement du 175ème Régiment d’infanterie à Sébastopol).
  • Fin décembre et début janvier de nouveaux renforts français arrivent, par exemple le 8 janvier 1919, le 4ème Régiment de Chasseurs d’Afrique (unité d’élite qui a joué un rôle important dans l’offensive de septembre) et une compagnie de mitrailleuses.

Toutes ces troupes sont placées sous le commandement du général d’Anselme qui a commandé en 1918 le 1er Groupement de Divisions de l’Armée d’Orient.

  • Fin janvier 1919, l’armée française a la haute main des bouches du Danube aux bouches du Dniepr (Kherson) en passant par celles du Boug ( Nicolaïeff) et du Dniestr (Tiraspol).

 

🔴 Les capitaux français sont majoritaires dans la société contrôlant l’arsenal de Nicolaieff où se construisent des destroyers, des croiseurs légers, des remorqueurs, des sous-marins. Deux régiments grecs viennent compléter le dispositif français dans cette ville.

 

🔴 La France joue alors un rôle central dans l’accompagnement des armées blanches pour renverser l’URSS. D’Anselme maîtrise un puissant émetteur radio dans le Sud alors qu’en Sibérie ce sont également des Français qui manœuvrent la station d’Omsk, capitale de l’Etat fascisant de Koltchak. Des techniciens français sont attendus pour faire entrer les deux en relation.

 

 

- Comprendre le capitalisme des années 1900 à 1925 : un monde sans aucun sentiment

La principale caractéristique du grand patronat qui a poussé aux guerres coloniales puis à la Première Guerre mondiale, c’est l’absence totale de respect de la vie humaine.

  • Le travailleur colonial doit rapporter le maximum de profit jusqu’à sa mort.
    • Du Congo belge à l’assassinat de Lumumba le 17 janvier 1961, un grand pays détruit par le colonialisme[9] ;
    • Colonisation française du Niger et du Tchad par la colonne Voulet Chanoine Joalland : un massacre de masse, un crime contre l’humanité (sur la base des archives militaires)[10][10bis] ;
    • 11 août 1904 : le peuple herero de Namibie est écrasé par les troupes coloniales allemandes[11].

 

  • Le soldat doit accepter de se faire tuer pour sa nation (en fait, les profiteurs de son pays) avec courage, patriotisme et abnégation.
    • Ainsi, la majorité des militaires français de l’armée d’Orient sont des réservistes âgés de 30 à 50 ans. Mon grand-père, né en 1877, en a fait partie. Un nombre significatif de soldats de l’armée française d’Orient relève de la classe 1906 qui a fait son service puis a été rappelée pour toute la guerre.
    • Des équipages de la marine n’ont pas vu un port français depuis plusieurs années.
    • Les fantassins ont subi les pires conditions de vie et les pires boucheries. Et maintenant que la guerre contre l’Allemagne est terminée, voilà qu’on leur demande d’aller combattre en Russie.

 

  • Le civil russe suspecté de sympathie socialiste ou le soldat de l’armée rouge sont des fusillés en sursis
    • Les soldats français assistent à de fréquentes exécutions sommaires de bolcheviks présumés. A Kherson par exemple, un millier d’Ukrainiens soupçonnés d’attitude hostile aux armées blanches sont enfermés dans un hangar que l’artillerie française pilonne : le feu prend, aucun survivant. L’ordre fasciste règne dans les zones occupées par l’armée de Clémenceau et de Franchet d’Espérey.

 

  • De plus, les conditions de vie de l’armée française d’intervention en URSS sont catastrophiques
    • « Les services de l’arrière n’existent pas (...), le service postal est si mal assuré que les hommes restent plusieurs semaines sans aucune correspondance avec leurs familles (...), le service du ravitaillement est tel qu’en certains points des soldats français sont en partie vêtus d’uniformes hongrois (...) » (extraits du discours du député Kerguèzec revenant d’une mission d’enquête sur l’armée d’Orient).
    • Dans la marine, la discipline est insupportable, les brimades, corvées et mises aux fers incessantes.

 

 

- 6 février 1919 à Tiraspol éclate la première mutinerie française de la Mer Noire[12]

Char Renault & soldats français Odessa 1918 1919

Tiraspol est une ville sur la rive gauche du Dniestr, intégrée dans la Russie fin 19ème siècle, début 20ème au sein du " gouvernement de Kherson " (Sud de l’Ukraine).

  • En 1918, l’armée française fait rapidement de Tiraspol un point d’appui essentiel de son dispositif. Par exemple, les chars d’assaut Renault livrés aux troupes françaises d’Odessa le seront par des chalands venant de cette ville située près de l’embouchure du Dniestr sur la Mer noire.
  • Début février 1918, une petite unité russe favorable à la révolution arrive devant Tiraspol en descendant la rive du fleuve. Elle tire quelques coups de canon et met en batterie des mitrailleuses.

 

Le général Berthelot, présent en Roumanie où il a joué un rôle militaire très important de 1916 à 1918, décide d’envoyer des forces conséquentes pour ne pas prendre de risque : un train blindé, des chars d’assaut, des unités françaises de zouaves, des Tchèques, des Polonais... En fait, la défense de Tiraspol est essentiellement assurée par le 58ème Régiment français d’infanterie et les soldats de cette grosse unité n’ont guère envie de combattre les Russes. Il a suffi le 4 février, d’un petit mouvement de repli pour que des militaires des 6ème, puis 5ème et 7ème compagnies abandonnent leur poste.

 

Après une période de repos, de reprise en mains et d’arrivée de renforts, le colonel Lejay veut lancer l’attaque pour reprendre Tiraspol, en commençant par une préparation d’artillerie. Sont également présents, côté français une unité du 501ème Régiment d’Artillerie d’Assaut et un bataillon du Régiment de Marche d’Afrique... Mais les artilleurs concernés refusent de faire avancer leurs engins, encore plus de tirer.

 

Les officiers enferment ces artilleurs dans un petit périmètre afin d’éviter la contagion aux autres troupes. Arrivent alors les pioupious du 2ème bataillon qui prennent fait et cause pour les mutins ; leur commandant " réussit à rétablir une situation périlleuse " d’après le rapport.... Quelques heures plus tard, lorsque les officiers espèrent enfin relancer l’offensive, les mutins refusent à nouveau de marcher. L’autre bataillon les rejoint... Lorsque la dernière "unité fidèle" décide de rallier la sédition, l’enthousiasme est tel parmi les soldats que les officiers n’ont plus aucune autorité.

 

🔴 Les arguments des mutins sont exposés très clairement dans le rapport qui suivra " La guerre est finie. L’armistice est signé. Nous nous sommes battus pendant quatre ans. Nous ne sommes pas en guerre contre les bolcheviques... "

 

Clémenceau réclame une sévérité extrême contre les mutins. Par contre les généraux présents dont D’Anselme et Franchet d’Espérey préfèrent une certaine souplesse " à une répression aveugle dangereuse à court terme ".

 

En fait, le 9 février, le régiment est à nouveau en ordre de marche. " Les recherches faites n’ont permis de découvrir aucun meneur " note le colonel Lejay en conclusion.

 

- 9 mars 1919, L’armée française évacue Kherson puis Nicolaieff
Après les évènements de Tiraspol, les troupes françaises déployées sur les rives de la Mer noire essaient de " tenir " la vaste zone qui leur est attribuée. Les accrochages se multiplient avec les unités " rouges ".

 

Dans " 1919 : les illusions de la gloire" (Editeur Robert Laffont, 1979 [13]), Claude Paillat (pourtant loin d’être pro-bolchévique) développe l’analyse suivante à partir des documents d’époque " A l’évidence, la population, bon gré mal gré, faisait cause commune avec les révolutionnaires. Progressivement aussi, l’Armée rouge, en s’améliorant, faisait front. Son avance dans le Don et le Donetz remettait en cause les importants succès obtenus dans le Caucase par les Blancs. La propagande communiste parvenait à créer des failles chez les séparatistes ukrainiens, isolés, rongés par des "soviets d’ouvriers" et des "Comités de soldats". Notre situation, déjà précaire, s’effritait. Le risque de mutinerie augmente en effet dans les rangs des régiments Français ; des zouaves du 1er Régiment de Marche d’Afrique quittent leur unité et justifient leur attitude "Les officiers nous bourrent le crâne. On nous a trompés..."

 

  • Le 8 mars 1919, des détachements de l’armée rouge approchent de la ville de Kherson qui représente l’avant-garde française vers l’Est en direction des armées blanches.
  • Deux compagnies du 176e régiment d’infanterie s’opposent à un ordre d’attaque. " Aucun homme ne bougea... ; tous opposaient non seulement une force d’inertie que l’on sentait concertée d’avance mais encore un refus catégorique se traduisant par des murmures et des paroles d’indiscipline. " Face à un officier qui tente de les mener de façon rude les traitant de " lâches ", l’excitation monte, mais les soldats restent aussi fermes dans leur refus de combattre.
  • Le lendemain, 9 mars, l’armée française évacue le port et la ville de Kherson.
  • Bientôt, Nicolaieff est également abandonné malgré les capitaux français déjà investis.
  • Le 11 mars 1919, Franchet d’Espérey envoie un télégramme (7107/3) à Clémenceau président du Conseil " Nous n’avons plus comme adversaires actuels en Russie méridionale des bandes bolchéviques mais une armée bien commandée, encadrée, parfaitement disciplinée, rétablissant l’ordre à la place du désordre. Autour de nous, et, derrière nous, hostilité presque unanime de la population, dissolue et xénophobe, qui corrompt nos soldats et leur tire dans le dos dès que l’armée bolchevique apparaît. "
  • Le lendemain 12 mars, le général Berthelot envoie un télégramme à Clémenceau et Franchet d’Espérey de même teneur. 

 

Bateaux français Odessa 1919

 

- L’évacuation d’Odessa

Depuis le début de l’intervention militaire française en URSS, la ville d’Odessa a été mise en avant comme bastion mondial face au communisme.

 

Aussi, l’ordre qui règne dans cette grande ville occupée par l’armée de la république française relève bien plus de la dictature militaire fascisante que des du respect des droits de l’homme.

  • 1er mars 1919, Jeanne Labourbe, institutrice communiste, est fusillée à Odessa[14] ;
  • L’ordre français règne à Odessa :
    • L’armée française essaie de miser sur une répression dure pour terroriser la population, ainsi le bombardement du village autour de l’usine traitant les eaux pour Odessa ;
    • Ainsi, encore à Odessa, l’exécution de deux civils à la mitrailleuse puis la pendaison de leurs corps aux grilles de la gare.
  • Cela ne faisait que monter un peu plus la population contre les soldats.

 

🔴  Pourtant, le 14 mars, l’armée française décrète l’état de siège.

  • Qu’est-ce que cela signifie ?
    • Art 7. - Aussitôt l’état de siège déclaré, les pouvoirs dont l’autorité civile était revêtue pour le maintien de l’ordre et la police passent tout entiers à l’autorité militaire ;
    • Art. 9. - L’autorité militaire a le droit :
      • 1° - de faire des perquisitions, de jour et de nuit, dans le domicile des citoyens ;
      • 2° - d’éloigner les repris de justice et les individus qui n’ont pas leur domicile dans les lieux soumis à l’état de siège ;
      • 3° - d’ordonner la remise des armes et munitions, et de procéder à leur recherche et à leur enlèvement ;
      • 4° - d’interdire les publications et les réunions qu’elle juge de nature à exciter ou à entretenir le désordre.

 

🔴  La poursuite des mutineries parmi les militaires français
- Le 21 mars, la 1ère compagnie du 40ème Régiment d’infanterie se met en grève sur le tas et " dépose ses équipements ".

- Le même jour, la compagnie du 19ème Régiment d’Artillerie de Campagne fait de même. Devant la justice militaire, les mutins affirment n’avoir aucune couleur politique mais assument leur acte " On se moque des conseils de guerre. On nous sacrifie pour des milliards. La guerre n’est pas déclarée contre les bolcheviques. Je n’ai pas de fonds russes. En France, on s’amuse ; ici on se fait tuer..."

- Le 22 mars, le développement du mouvement d’humeur atteint une compagnie du 15ème Régiment du Génie. Un gradé cherche à user de son autorité pour mater les soldats. L’Internationale est alors reprise en chœur par ces troupes qui devaient servir de bastion face au communisme international.

 

🔴 Le 29 mars, Clémenceau se trouve obligé d’ordonner l’évacuation d’Odessa et le repli sur la "ligne du Dniestr"
Le retrait se fait dans des conditions surprenantes.

  • L’attitude mutine de plusieurs unités se maintient, par exemple pour plusieurs groupes du 19e régiment d’artillerie à Odessa le 5 avril.
  • Des sapeurs du 7e génie fraternisent et laissent aux bolcheviks du matériel avant de quitter la ville.

 

 

- 20 avril 1919 : Les mutins de la Mer Noire hissent le drapeau rouge sur les vaisseaux de guerre français (le France, le Jean Bart, La Justice)

Du 10 au 30 avril 1919, se déroulent les grandes mutineries de marins.

  • En Roumanie, à Galatz, le chef mécanicien André Marty projette de s’emparer du torpilleur Protêt, d’enfermer les officiers et de rallier les bolcheviks à Sébastopol. Le complot découvert, il est arrêté le 16 avril et sera condamné à vingt ans de travaux forcés.
  • Le 17 avril, sur le croiseur France, des protestations éclatent ; quatre matelots sont enfermés, mais, deux jours plus tard, l’équipage révolté les libère, élit des délégués, exige le retour à Toulon.
  • Le 20, le drapeau rouge est hissé sur le France, le Jean-Bart, La Justice au chant de L’Internationale. L’après-midi, des marins qui manifestent dans Sébastopol avec la population essuient le feu de soldats grecs. Le calme revient les jours suivants, les délégués, d’abord seuls obéis, voient leur rôle décroître. Mais le Jean-Bart ainsi que le France regagnent Toulon et Bizerte.
  • Une autre mutinerie a lieu le 25 sur le Waldeck-Rousseau devant Odessa. Un comité de marins décide la révolte, exige la délivrance de Marty et le retour en France. Dans les jours suivants, le bâtiment rentre en France ainsi d’ailleurs que tous les navires de la mer Noire. Mais l’effervescence continue en mai et en juin à Toulon, à Brest, à Bizerte, en Grèce (sur le Guichen avec Charles Tillon) et même à Vladivostok...

 

🔴 Cette crise, qui surprit le commandement, a plusieurs causes.

  • Des raisons matérielles : hiver pénible, courrier désorganisé, corvées incessantes dans les ports paralysés par les grèves des dockers russes.
  • Les équipages sont démoralisés par une guerre longue, et l’armistice, pour eux, c’est la démobilisation : « Nous ne sommes pas en guerre contre les Russes ; nous voulons rentrer en France », répètent-ils. Marty nous dit que les marins lisaient les journaux pacifistes comme La Vague et Le Journal du peuple ainsi que les discours des députés socialistes contre l’intervention.
  • Des tracts et journaux clandestins sont édités par les bolcheviks, en particulier par le groupe communiste français animé à Odessa par Jeanne Labourbe, qui sera fusillée le 1er mars 1919. Le ministre de la Marine affirme d’ailleurs, le 17 juin, aux députés que la cause des troubles est la propagande révolutionnaire.

 

Ces mutineries n’expliquent qu’en partie l’évacuation ; en fait, il n’y avait qu’une division à Odessa et les Alliés comptaient surtout sur les Blancs : ils furent très déçus par Denikine. Ces mouvements sont importants dans la mesure où ils s’intègrent dans une crise politique et sociale mondiale qui dépasse la simple histoire militaire.

 

Notes :

[1] 25 et 26 mai 1918, la Légion tchèque se soulève et sépare la Sibérie de l’URSS

[2] 24 décembre 1918 L’armée blanche sibérienne de Koltchak prend Perm et marche vers Moscou

[3] En 1914, la valeur globale des titres d'emprunt de l'Etat russe détenus par 1 500 000 porteurs français s'élevait à 11,5 milliards de francs-or.

[4] En septembre, le refus des socialistes de soutenir le gouvernement formé par Paul Painlevé met fin à l'Union sacrée.

[4bis] Fin de l'Union sacrée (1914)

[5Paul Mantoux, Délibérations du Conseil des Quatre, Tome 1, CNRS

[6] La grande guerre vécue, racontée, illustrée par les Combattants, en 2 tomes  Aristide Quillet, 1922

[7] Le 13 novembre 1918, une flotte alliée composée de 54 navires anglais, français et italiens, et d’un cuirassé grec, entre solennellement dans le Bosphore et jette l’ancre devant le palais de Dolmabahçe, où réside le sultan Mehmet VI. Débute dès lors l’occupation alliée de Constantinople (1918-1923.

[8] 20 novembre 1918, des Russes blancs réunis à Jassy demandent l’envoi d’un corps expéditionnaire pour renverser les soviets

[9Du Congo belge à l’assassinat de Lumumba

[10Colonisation française du Niger et du Tchad par la colonne Voulet Chanoine Joalland : un crime contre l’humanité

[10bisLa mission Voulet-Chanoine en 1899 : Cette expédition, parfois appelée « la colonne infernale », se signale par des actes d’une telle barbarie que l’opinion publique en métropole finit par s’en émouvoir…

[111904 Le génocide du peuple herero (Namibie)

[12] Les mutineries de la mer Noire sont une série de révoltes survenues dans les troupes terrestres et les bâtiments français de l’escadre de la mer Noire en 1919.

[13] 1919 : les illusions de la gloire – Claude PAILLAT

[141er mars 1919, Jeanne Labourbe, institutrice communiste, est fusillée à Odessa

 

Pour en savoir plus :

Guerre en Ukraine : Macron évoque à nouveau l’envoi de troupes « si les Russes percent les lignes de front »

 - Les mutineries de la mer Noire : 1919 et les origines du Parti communiste français

 

Partager cet article
Repost0
17 mai 2024 5 17 /05 /mai /2024 12:51
Nouvelle-Calédonie : le dramatique retour du refoulé colonial
Nouvelle-Calédonie : le dramatique retour du refoulé colonial

Les Nations Unies considèrent la Nouvelle-Calédonie comme un « territoire non autonome », c'est-à-dire un territoire dont la population ne s'administre pas encore complètement elle-même[1].

La Nouvelle Calédonie s’embrase, le Gouvernement s’en moque, il est responsable du chaos[9]

 

Pour sauver le processus de décolonisation débuté il y a près de quarante ans, l’exécutif doit comprendre que la réforme du corps électoral sur laquelle il s’est fracassé est une question de survie pour les Kanaks, liée à leur minoration démographique, au cœur de la domination française depuis le XIXe siècle.

 

Sources : Carine Fouteau | mis à jour le 21/05/2024

- Manque d’écoute et de considération, passage en force législatif, envoi du GIGN et du Raid, couvre-feu, état d’urgence…
Alors que cinq personnes ont été tuées (trois Kanaks et deux gendarmes) et de nombreuses autres blessées dans les affrontements survenus à Nouméa et ses environs au cours des derniers jours, l’exécutif est aspiré par la spirale de violence qu’il n’a pas su désamorcer, voire qu’il a contribué à réveiller.

 

Les tirs à balles réelles, sur fond d’incendies, de barrages routiers et de pillages, font ressurgir le spectre de la guerre civile entre indépendantistes et loyalistes dont le point culminant a été atteint en mai 1988 avec la mort de dix-neuf Kanaks et de deux militaires lors de l’assaut de la grotte d’Ouvéa. Déjà, l’enjeu du corps électoral était au cœur de ce que l’on a hypocritement appelé les « événements ».

 

En raison de sa désinvolture et de son impréparation, tant l’histoire semble se répéter, l’exécutif fait prendre à la France le risque de réduire en cendres près de quarante ans d’un patient processus de décolonisation, qui avait permis jusque-là, dans un savant apprentissage des forces en présence, de maintenir la paix civile en Nouvelle-Calédonie et dont certains, y compris parmi les officiels, ont longtemps espéré qu’il symbolise la première décolonisation « réussie », c’est-à-dire sans violences, de notre pays.

 

Aujourd’hui, le fil des échanges et de l’équilibre sur lequel s’est construit le destin commun en Nouvelle-Calédonie semble cassé, malgré les appels au calme qui se font entendre de toutes parts, côté loyaliste et côté indépendantiste.

 

Emmanuel Macron en porte la responsabilité, au regard des fautes accumulées par l’exécutif.

  • Plutôt que d’entendre les alertes des indépendantistes lancées depuis des mois sur les conséquences d’un élargissement du corps électoral susceptible de marginaliser les Kanak·es dans la répartition des sièges dans les provinces, l’exécutif a choisi de les mépriser.
  • Plutôt que de persister dans la nécessité d’un dialogue, tout complexe soit-il, il a choisi de passer en force son projet à l’Assemblée nationale (NDLR : adopté avec la complicité du RN[2]).
  • Plutôt que de saisir la gravité du moment en tirant les leçons des expériences passées, le président refuse de faire une pause sur le fond de la réforme contestée, recourt à l’état d’urgence – inscrit dans la loi en 1955 pour faire face aux « événements » d’une autre ex-colonie, l’Algérie – et envoie les troupes.

 

- Des blessures ravivées
Après avoir alimenté le chaos, il promet une réponse « implacable » à l’embrasement des rues. Pour faire bonne figure face à la brutalité de sa stratégie, il « invite » désormais les délégations calédoniennes à venir discuter à Paris, tout en prévenant qu’il maintiendrait la réunion du congrès à Versailles « avant la fin juin » pour entériner la révision constitutionnelle si aucun accord n’était trouvé d’ici là. Des négociations avec un ultimatum… pas sûr que les intéressés apprécient.

 

Le ministre de l’intérieur le dit à sa manière, encore moins policée : « La République ne tremblera pas. Oui au dialogue comme l’a dit le premier ministre, autant qu’il faudra, où il le faudra, avec qui il faudra, mais jamais la République ne doit trembler devant les kalachnikovs », a affirmé Gérald Darmanin, après avoir salué la mémoire du gendarme décédé sans un mot pour les autres victimes.

 

Compte tenu de son implication dans le processus décolonial, l’État français devrait pourtant le savoir : on ne met pas fin impunément à un héritage de conquête, d’asservissement et de ressentiment sans rompre avec les méthodes brutales et expéditives qui ont façonné le passé.

 

Loin de l’apaisement escompté, le chef de l’État ravive douloureusement les blessures d’une histoire de domination jamais complètement refermée, malgré les accords de Matignon de 1988[3], consécutifs à la tragédie d’Ouvéa, puis les accords de Nouméa de 1998, dont le préambule a, pour la première fois, officiellement reconnu le fait colonial de la République française : " Lorsque la France prend possession de la Grande Terre, que James Cook avait dénommée « Nouvelle-Calédonie », le 24 septembre 1853, elle s'approprie un territoire selon les conditions du droit international alors reconnu par les nations d'Europe et d'Amérique, elle n'établit pas des relations de droit avec la population autochtone. Les traités passés, au cours de l'année 1854 et les années suivantes, avec les autorités coutumières, ne constituent pas des accords équilibrés mais, de fait, des actes unilatéraux. "[4].

 

Ces accords ont manifesté la volonté partagée de « tourner la page de la violence et du mépris pour écrire ensemble des pages de paix, de solidarité et de prospérité », comme l’État avait obtenu de l’inscrire dans le marbre. Il semble, au regard de la situation actuelle, que l’exécutif ait oublié de lire la page jusqu’au bout, avant de la tourner. Car même si le « non » aux référendums d’autodétermination l’a emporté trois fois, le processus de décolonisation, contrairement à ce qu’il aimerait croire, n’est pas achevé pour autant. Selon ce qui a été dit et écrit, un accord global sur l’avenir institutionnel de cet archipel du Pacifique, toujours considéré par l’ONU comme un territoire non autonome à décoloniser[1], doit encore être conclu.

 

On ne se débarrasse pas ainsi d’un substrat colonial qui imprègne encore le présent du pays, sans l’avoir regardé en face. Sur une terre où les habitant·es et les institutions ont su faire preuve d’intelligence collective et d’accommodements raisonnables, la gestion managériale et policière, sans passé ni futur, de ce dossier brûlant est vouée non seulement à l’échec, mais aussi au drame.

 

🔴 « Le temps viendra où le désir de dominer, de dicter sa loi, de bâtir son empire, la fierté d’être le plus fort, l’orgueil de détenir la vérité, seront considérés comme un des signes les plus sûrs de la barbarie à l’œuvre dans l’histoire des humanités » : ces lignes des écrivains Édouard Glissant et Patrick Chamoiseau (ici et là) devraient résonner aux oreilles d’Emmanuel Macron. Écrites en 2007, elles ne faisaient pas référence à la situation calédonienne, mais répondaient au sinistre « débat » sur l’« identité nationale », dont on mesure, rétrospectivement, à quel point il a réactivé de vieilles matrices racistes.

 

 

- Les fautes du président

Comment en est-on arrivé à ce qui pourrait se transformer en point de non-retour ? Depuis l’Hexagone, Nouméa a paru s’embraser en un rien de temps, alors que les débats parlementaires touchaient à leur fin.

  • Mais la colère couvait depuis bien plus longtemps.
  • La faute originelle du chef de l’État remonte à 2021 quand l’exécutif a exigé le maintien du troisième référendum sur l’indépendance, pourtant boycotté par les indépendantistes.
  • En dépossédant les premiers concernés de l’expression de leur voix, le scrutin perdait de facto toute légitimité.

 

La confiance perdue, les relations avec les principales composantes du Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS) se sont considérablement tendues, jusqu’à entraver la reprise des discussions sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie.

 

En 2022, les indépendantistes ont perçu comme un manque évident d’impartialité de l’État la nomination au gouvernement de Sonia Backès, fer de lance de la droite loyaliste. Ces derniers temps, leur courroux a fini par se fixer sur la personne de Gérald Darmanin, qui a repris le dossier en main, en rupture avec la tradition de le confier à Matignon, et dont les manœuvres politiciennes cadrent mal avec la recherche du consensus et le crédit à la parole donnée au centre de la culture politique en Nouvelle-Calédonie.

 

L’étincelle finale est ainsi venue du projet de réforme porté par le ministre de l’intérieur. Depuis la révision constitutionnelle de 2007, découlant de l’accord de Nouméa, seules les personnes inscrites sur les listes électorales avant la date de l’accord pouvaient voter aux élections provinciales – une dérogation à la loi française visant à atténuer le poids des nouveaux venus et à permettre aux Kanak·es de continuer d’influer sur le cours des décisions les concernant.

 

Au mépris de cet engagement, Gérald Darmanin, désireux de tourner la fameuse page de l’Histoire, a jugé que ce principe n’était « plus conforme aux principes de la démocratie »[5]. Après avoir boycotté le troisième référendum en raison du non-respect de la période de deuil kanak post-Covid, les indépendantistes ont instantanément vu le dégel du corps électoral comme une mise en minorité supplémentaire, les Kanak·es ne représentant plus que 41 % de la population selon le dernier recensement.

 

 

- Une question de survie
La question est existentielle pour eux : faute de majorité démographique, leur destin politique leur échappe, eux qui soutiennent ultra-majoritairement le chemin de l’indépendance, face aux héritiers des colons blancs, et aux Calédonien·nes d’origine européenne en général, faisant le choix inverse. Et ils ont de quoi se méfier des intentions de l’État tant la France, dès qu’elle s’est installée en Océanie, en a fait un enjeu stratégique au service de sa politique de colonisation et de remplacement.

  • Dès la prise de possession de l’île en 1853 sur ordre de Napoléon III, les spoliations foncières, les déplacements et le travail forcé de la population autochtone ont eu pour effet de la réduire numériquement. Au recensement de 1921, il ne restait plus que 27 100 Kanak·es, soit environ 80 % de moins qu’en 1774.
  • Dans les années 1950, après la fin de l’indigénat en 1946, alors que les mouvements de décolonisation s’intensifiaient partout dans le monde, la France, à contre-courant, a amplifié sa stratégie de peuplement en Nouvelle-Calédonie. Après avoir déporté des bagnards, des communards et des Algériens dans la deuxième moitié du XIXe siècle, elle a, dans la foulée de la Seconde Guerre mondiale, considéré l’immigration comme une nécessité pour maintenir sa présence dans cette partie du globe.
  • Puis, au cours des années 1970, avec le boom du nickel, cette vague de « migrants économiques », principalement venus des îles Wallis et Futuna, a fait basculer le peuple kanak dans la minorité numérique.

 

La circulaire du premier ministre Pierre Messmer du 19 juillet 1972 est des plus explicite : « La présence française en Calédonie ne peut être menacée, sauf guerre mondiale, que par une revendication nationaliste des populations autochtones, appuyées par quelques alliés éventuels dans d’autres communautés ethniques venant du Pacifique. À court et moyen terme, l’immigration massive de citoyens français métropolitains ou originaires des départements d’outre-mer devrait permettre d’éviter ce danger, en maintenant ou en améliorant le rapport numérique des communautés. À long terme, la revendication nationaliste autochtone ne sera évitée que si les communautés non originaires du Pacifique représentent une masse démographique majoritaire.[6] » Voilà, tout est dit.

 

Dans le même temps, les revendications kanakes deviennent si fortes que l’État ne peut plus les ignorer. Les indépendantistes estiment qu’outre les Kanak·es, celles et ceux qu’ils appellent les « victimes de l’Histoire », c’est-à-dire les personnes forcées par l’administration coloniale de venir s’installer dans l’archipel, devraient être autorisé·es à s’exprimer sur l’avenir du pays. Les bases d’une négociation en vue de l’autodétermination sont jetées en 1983 lors d’une table ronde organisée à Nainville-les-Roches, en Essonne.

 

🔴 Dès lors, la question du corps électoral est posée. Elle ne cessera de l’être, notamment en 1988, mais aussi lors du premier référendum d’autodétermination en 2018… jusqu’à aujourd’hui.

 

 

- Nouvelle-Calédonie : le gouvernement est responsable du chaos 

Suivez en intégralité le passage de Mathilde Panot, députée LFI le 17 mai au micro d’Apolline de Malherbe... le gouvernement doit faire un geste fort pour l’apaisement en retirant son texte[8] !

 

 

🔴 Jacques Chastaing :

 

« Ce  ne sont pas les organisations indépendantistes kanaks qui sont  " mafieuses " comme le prétend Darmanin, ce sont les quelques familles de  colons qui avec dix groupes familiaux contrôlent 80% de l'économie de la  Nouvelle-Calédonie.[7] »

Nouvelle-Calédonie : le dramatique retour du refoulé colonial
Partager cet article
Repost0
12 mai 2024 7 12 /05 /mai /2024 17:31
Juifs rescapés de la shoah, opposants à l’ultranationalisme d’Israël

Faut-il traiter d’antisémites et condamner ces huit rescapés des camps d’extermination pour leurs comparaisons entre les politiques sionistes et celles des Nazis ? Chris Knight, anthropologiste et militant britannique pose la question, en publiant les citations ci-dessous.

 

 

Source : DESOBEISSANCE CIVILE | mis à jour le 23/10/2024

-  Marika Sherwood, survivante du ghetto de Budapest.

Marika Sherwood

« (...) Peu de temps après (en 1956), j’ai appris que les Israéliens rassemblaient les Palestiniens dans des camps de concentration. Je ne pouvais pas y croire. Les Israéliens n’étaient-ils pas des Juifs ? Ne venions-nous/ne venaient-ils pas de survivre au plus grand pogrom de notre histoire ? Les camps de concentration – souvent appelés par euphémisme, « colonies de peuplement » - n’étaient-ils pas la principale caractéristique de ce pogrom ? Comment ces Juifs israéliens pouvaient-ils opprimer d’autres gens ? Dans mon imagination de romantique, les Juifs d’Israël étaient des socialistes, des gens qui discernaient le bien du mal. C’était manifestement inacceptable. J’avais l’impression qu’on m’avait laissé tomber, comme si on m’avait volé une partie de ce que je pensais être mon héritage. …

 

Il me faut dire au gouvernement israélien qui prétend parler au nom de tous les Juifs, qu’il ne parle pas en mon nom. Je ne garderai pas le silence face à la tentative d’annihilation des Palestiniens, la vente d’armes aux régimes répressifs partout dans le monde et la tentative d’étouffer la critique d’Israël dans les médias au niveau mondial, quand on voit ce gouvernement remuer le couteau dans la plaie - traduisons ‘ culpabilité ’ - afin d’obtenir des concessions économiques de la part des pays occidentaux. Naturellement, la position géopolitique d’Israël a une incidence grandissante en ce moment. J’empêche Israël de confondre les termes « antisémite » et « antisioniste » : On ne peut pas laisser passer ça."

 

🔴 Dr. Marika Sherwood, ‘ How I became an anti-Israel Jew ’ (Voilà comment je suis devenue une Juive anti-Israël), Middle East Monitor, 7/3/18[0]... Je ne suis pas antisémite, mais je suis antisioniste[1]

 

 

-  Israël Shahak, survivant du ghetto de Varsovie et du camp de concentration de Bergen-Belsen.

Israël Shahak

« Pour survivre, Isra­­­ël doit renoncer au désir de domination. Il deviendra alors un bien meilleur pays pour les Juifs eux-mêmes. En Israël, beaucoup comparent aisément le pays avec l’Allemagne. Non seulement l’Allemagne d’Hitler et des Nazis, mais aussi l’ancien Empire germanique voulait dominer l’Europe. Ce qui s’est passé au Japon, après l’attaque contre la Chine, c’est qu’ils voulaient dominer une vaste zone de l’Asie. Lorsque l’Allemagne et le Japon renoncèrent à leur souhait de domination, ils devinrent des sociétés bien plus sympathiques pour les Japonais et les Allemands eux-mêmes. "

 

🔴 Dr. Israel Shahak, Middle East Policy Journal, été 1989, no.29[2]... " Le racisme de l'état d'Israël " aux éditions Guy Authier[3]

 

 

- Hajo Meyer, était un survivant d’Auschwitz.

« Ça me fait mal d’observer les parallèles entre mes expériences dans l’Allemagne d’avant 1939 et celles que souffrent les Palestiniens de nos jours. Je ne peux pas m’empêcher d’entendre les échos nazis de « sang et sol », dans la rhétorique des colons fondamentalistes, qui revendiquent le droit sacré à toutes les terres de la Judée-Samarie biblique.

 

Les divers aspects de punition collective infligée au peuple Palestinien – ghettoïsation forcée derrière un « mur de sécurité », destruction de maisons au bulldozer, déprédation de champs, bombardement d’écoles, de mosquées et d’édifices gouvernementaux, blocus économique qui prive les gens d’eau, de nourriture, de médicaments, d’éducation et de nécessités de base pour survivre dans la dignité – tout ceci me pousse à me rappeler les privations et les humiliations dont j’ai fait l’expérience dans ma jeunesse. Toutes ces oppressions qui durent depuis un siècle, signifient des souffrances inimaginables pour les Palestiniens. »

 

🔴 Dr. Hajo Meyer, ‘ An Ethical Tradition Betrayed ’, Huffington Post, 27/1/10[4].

 

 

-  Gabor Mate, survivant du Ghetto de Budapest.

« Jeune homme élevé à Budapest, enfant qui avait survécu au génocide nazi, j’ai été hanté pendant des années par une question qui résonnait dans ma tête avec une telle force que, parfois, elle tournait : ‘ Comment cela fut-il possible ? Comment le monde permit-il de telles horreurs ? ’ Question naïve d’un enfant. Maintenant, j’en sais plus : La réalité est là. Que ce soit au Vietnam, au Rwanda ou en Syrie, l’humanité demeure les bras croisés, complice, inconsciente ou impuissante, comme toujours. À Gaza en ce moment, on trouve le moyen de justifier le bombardement des hôpitaux, l’extermination de familles en train de manger, le meurtre de jeunes qui jouent au foot sur une plage… On ne peut pas comprendre Gaza hors contexte, c’est à dire le nettoyage ethnique continu, le plus long de tous, du siècle dernier et du présent, la tentative continue de détruire la nation palestinienne. Les Palestiniens utilisent des tunnels ? Mes héros de même : les combattants mal équipés du Ghetto de Varsovie. Contrairement à Israël, les Palestiniens n’ont ni hélicoptères Apache, ni drones télécommandés, avions de combat chargés de bombes, artillerie laser : Avec leur défiance inefficace, ils lancent des roquettes primitives qui provoquent de la terreur pour des civils innocents israéliens, mais rarement des blessures. Vu l’énorme inégalité de forces, il n’existe aucun parallèle de culpabilité. …

 

Qu’allons-nous donc faire, nous, gens ordinaires ? Je prie qu’on écoute notre cœur. Le mien me dit que ‘ plus jamais ça ’ n’est pas une expression exclusive : Le meurtre de mes grands-parents à Auschwitz ne justifie pas la dépossession incessante des Palestiniens. La justice, la vérité, la paix, ce n’est pas l’apanage d’une seule tribu. Le ‘ droit d’Israël à se défendre ’ - indiscutable en principe – ne justifie pas l’extermination de masse. »

 

🔴 Dr. Gabor Mate, ‘ Beautiful Dream of Israel has become a Nightmare ’ (Le Beau Rêve d’Israël s’est transformé en Cauchemar), Toronto Star, 22/7/14[5].

 

 

-  Marek Edelman, était un survivant du Ghetto de Varsovie et un des chefs du soulèvement du Ghetto.

« Pendant la guerre, nous, on n’aurait jamais pensé que les Sionistes restaient volontairement passifs quant à la destruction des Juifs, afin de mieux justifier la fondation de l’état d’Israël… Mais de nos jours, même les historiens reconnus s’expriment à haute voix sur la façon dont certains Sionistes installés en Palestine exploitaient politiquement l’Holocauste ! … Le premier chef du gouvernement israélien, Ben Gourion estimait que, plus ça irait mal pour les Juifs d’Europe, plus ça irait mieux pour Israël. Il a mis ce projet en œuvre… Ben Gourion s’est lavé les mains de la Diaspora… Dès la conférence du parti Mapai en décembre 1942, il a déclaré que la tragédie des Juifs d’Europe ne les concernait pas - lui et ses associés – directement. C’étaient les paroles d’un chef qui était d’accord pour sacrifier la vie de millions de Juifs pour élaborer un état juif. Je ne dis pas qu’il aurait pu sauver des milliers d’êtres humains, mais il aurait pu combattre pour ces milliers de gens. Il s’en est abstenu. J’ignore si c’était voulu. »

 

🔴 Dr Marek Edelman, 2016. Being On the Right Side : Everyone in the Ghetto Was a Hero (Du Bon Côté : Dans le Ghetto, Ils étaient tous des Héros), pages 223, 448[6].

 

 

-  Zeev Sternell, survivant du ghetto de Przemysl, en Pologne.

Zeev Sternhell

« La gauche n’est plus capable de maîtriser l’ultra-nationalisme qui s’est développé ici, en Israël – le genre dont la branche européenne a contribué à éliminer presque tous les Juifs européens. Les entretiens que Ravit Hecht du Haaretz a effectués avec les politiques de la droite israélienne, Smotrich et Zohar, (les 3 décembre 2016 et 28 octobre 2017) devraient être distribués dans tous les médias, en Israël et partout dans le monde juif. On voit en eux non seulement un fascisme israélien grandissant, mais aussi un racisme qui ressemble au Nazisme dans son enfance.

 

Comme toute idéologie, la théorie raciale nazie s’est développée au cours des années. Au début, elle a uniquement privé les Juifs de leurs droits civils et humains. Il est possible que, sans la Seconde Guerre Mondiale, le ‘ problème juif ’ se fût terminé simplement avec l’expulsion ‘ volontaire ’ des Juifs des terres du Reich. Après tout, la plupart des Juifs d’Autriche et d’Allemagne ont pu partir à temps. Il est possible que ce soit un avenir à prévoir pour les Palestiniens. » :

 

🔴 Prof. Zeev Sternhell, ‘ Opinion in Israel, Growing Fascism and a Racism Akin to Early Nazism ’, Haaretz, 19/1/18[7].

 

 

-  Primo Levi était un survivant d’Auschwitz.

« En ce qui concerne le Premier Ministre Menachem Begin, ‘ Fasciste ’ est une définition pour moi acceptable. À mon avis, même Begin serait d’accord. C’était l’élève de Jabotinsky, qui représentait l’aile droite du Sionisme et qui se disait fasciste. C’était l’un des interlocuteurs de Mussolini. Assurément, Begin était son élève. Voilà toute l’histoire de Begin…. L’Holocauste est la défense préférée de Begin : Je n’y attribue aucune validité. »

 

🔴 Primo Levi, The Voice of Memory : Primo Levi Interviews (La voix de la Mémoire : Entretiens avec Primo Levi), 1961-1987, pp. 285-286. La citation date de 1982[8].

 

 

-  Rudolf Vrba, survivant de Majdanek et d’Auschwitz

Babelio Rudolf Vrba

Il s’est évadé d’Auschwitz en 1944[9], pour prévenir les Juifs hongrois au sujet du programme nazi d’extermination. Malheureusement, certains chefs sionistes pensaient différemment.

 

« Le mouvement sioniste européen a joué un rôle très important dans l’extermination de masse des Juifs. Je crois vraiment que, sans la coopération des Sionistes, ça aurait été une tâche bien plus difficile…. Les Sionistes disaient que nous ne sommes pas tchécoslovaques, ni allemands ni français : Nous sommes juifs et nous devons, en tant que juifs, retourner dans notre pays, en Israël ou Palestine, et fonder notre état. …

  • S’ensuivit la Loi de Nuremberg, loi divulguée par un État dit civilisé – l’Allemagne nazie – qui affirmait que les Juifs ne faisaient pas partie de l’Europe, mais de la Palestine… Donc, ensemble, le Nazisme et le Sionisme partageaient la même chose : Ils proclamaient tous les deux que les Juifs n’appartiennent pas à l’Europe, mais à la Palestine. …
  • Donc, naturellement, les Allemands ont dit aux Sionistes : ‘ Vous voyez, les Juifs ne nous font peut-être pas confiance, mais ils vous croiront ’, car ils ont compris qu’on leur avait, en fait, dit la vérité : que vous faites partie de la Palestine, que vous êtes ici des étrangers ’. … C’est comme cela qu’une clique sioniste, a formé les conseils juifs (appelés ‘ Judenräte ’) pour " gérer les affaires juives ", soutenue par l’argent d’hommes d’affaires juifs importants, prêts à tolérer la discrimination contre l’ensemble de la population juive qui n’était ni riche, ni sioniste – qui tout simplement, ne faisait pas partie de la clique. …

 

Par conséquent, :

  • je ne me fiais pas à eux, malgré le fait que les Nazis leur avaient donné des droits, suite aux lois de Nuremberg. Je les jugeais fascistes, tout simplement, dès le début, créatures méprisables qui s’associent aux fascistes et qui en bénéficient, ne subissant pas la discrimination infligée aux autres. …
  • Je n’avais pas plus confiance dans les Nazis que dans les conseils juifs sionistes. Assurément, je me suis rendu compte que les Sionistes et les Nazis sont mes ennemis à part égale : Tous les deux, ils veulent me faire partir avec 25 kilos de bagages, vers un endroit inconnu, et laisser ma mère chez elle, sans défense. …

 

Les jeunes, piliers de la résistance, ont toujours entre 16 et 30 ans. Chaque soldat sait qu’ils sont les meilleurs éléments pour le combat. … J’étais sidéré par le fait que les Sionistes qui se disaient protecteurs des Juifs, avaient décidé en premier lieu, de laisser partir un groupe de résistants potentiels qui, en dernier lieu, pourraient protéger les familles, en employant la force, si nécessaire.… « Je suis juif. Toutefois – plutôt à cause de cela – j’accuse certains chefs juifs d’une des actions les plus horribles de la guerre. »

 

Ce petit groupe de collaborateurs savait ce qui se passait dans les chambres à gaz d’Hitler et ont sauvé leur propre vie en achetant leur silence. Parmi eux, se trouvait le Docteur Rudolf Kastner, à la tête du conseil qui parlait au nom de tous les Juifs hongrois…

 

Prisonnier numéro 44070 à Auschwitz – numéro resté sur mon bras – j’ai calculé minutieusement les statistiques des exterminations … J’ai emporté ces affreuses statistiques lors de mon évasion en 1944, et j’ai pu prévenir les chefs sionistes hongrois trois semaines à l’avance qu’Eichmann avait l’intention d’envoyer un million de leurs Juifs dans ses chambres à gaz. … Kastner est allé dire à Eichmann : ‘ Je connais vos projets. Sauvez des Juifs que je pourrais choisir, et je me tairai. ’ Non seulement Eichmann a accepté, mais il a déguisé Kastner en S.S. et l’a emmené à Belsen pour chercher certains de ses amis. Et ce marchandage ne s’en est pas arrêté là.

 

Kastner a payé Eichmann plusieurs milliers de dollars. Avec cette petite fortune, Eichmann a pu acheter sa liberté lors de la défaite de l’Allemagne, et s’installer en Argentine… »

  • « Pourquoi le Docteur Kastner a-t-il trahi les siens, alors qu’il aurait pu en sauver beaucoup en les prévenant, en leur donnant l’occasion de se battre, d’organiser un deuxième ‘Soulèvement de Varsovie’ – ce que craignait Eichmann ? …
  • Était-il donc possible que l’humeur défaitiste du Docteur Kastner ait été renforcée par le souvenir des paroles prononcées par le Docteur Chaim Weizmann, premier président d’Israël, lorsqu’il a parlé à un congrès sioniste à Londres en 1937 ?

 

Voici très précisément le discours de Chaim Weizmann : " J’ai dit à la Commission royale britannique que les espoirs des six millions de Juifs d’Europe visaient l’émigration. On m’a demandé : ‘ Pouvez-vous emmener six millions de Juifs en Palestine ? ’ J’ai répondu que non. Les vieux disparaitront. Les autres subiront ou non leur destin. Ils ne sont que poussière, économique et morale, dans un monde cruel … seule une partie survivra … Ils devaient l’accepter. … S’ils voient les choses et souffrent, ils trouveront leur voie - Beacharit Hayamim [‘Lorsque viendra le Messie, tous les morts ressusciteront’] – quand viendra le temps … Je souhaite que soit préservée notre unité nationale, car c’est tout ce que nous possédons. "

  • ‘ Seule une branche survivra …’. Kastner, comme Hitler, croyait-il en une race supérieure, une nation juive formée d’élites, pour les élites, par les élites ?
  • Était-ce sa façon d’interpréter le sombre discours du Docteur Chaim Weizmann ?
  • Dans l’affirmative, qui allait choisir la branche ?
  • Qui allait décider quels grains constitueraient le tas de poussière économique, dont le destin serait d’attendre la venue du Messie ? …

Ma famille, je suppose, était la poussière qui allait être balayée jusque dans les fours par les Nazis qui utilisaient les chefs juifs comme balais … »

 

🔴 "Oral history interview with Rudolf Vrba’ , World at War TV Series (Un Monde en Guerre, série télévisée), de 1972. Première partie. Passages de 32/45 minutes).

🔴  Dr. Rudolf Vrba, Daily Herald, février 1961 (tiré du livre de Ben Hecht, Perfidy - publié en 1962 - p. 231).

🔴 Dr. Rudolf Vrba, I Escaped from Auschwitz (Je me suis évadé d’Auschwitz) [2002], pp. 281-2.

🔴 Les opinions de Rudolf Vrba étaient toujours sujets à controverse, mais même les journaux sionistes tels que le ‘Jewish News’, (15/12/16) et le ‘Jerusalem Post’, (16/2/17) ont, ces dernières années, publié de sérieuses critiques du rôle de Kastner dans l’Holocauste. Pour en savoir plus sur toute cette controverse, voir : Tony Greenstein, Weekly Worker, (1/6/17) et Ruth Linn, ‘Rudolf Vrba and the Auschwitz Reports : Conflicting Historical Interpretations’ (2011) .

 

" L’un des aspects les plus inquiétants de la définition de l’Holocauste par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste, c’est la suggestion que, si l’on compare la politique israélienne actuelle à celle des Nazis, c’est forcément de l’antisémitisme. Il est vrai que de telles comparaisons sont parfois grossières et sans fondement historique, mais dans la plupart des cas, il semble exagéré de l’attribuer à de l’antisémitisme, même si on n’est pas toujours d’accord avec la conclusion", conclut Chris Knight. (Dulwich et West Norwood CLP : circonscription électorale du Parti travailliste)

Notes :

[0] Marika Sherwood : Comment je suis devenu un juif anti-Israël

[1] Marika Sherwood : Je ne suis pas antisémite, mais je suis antisioniste

[2Entretien avec Israel Shahak dirigé par Anne Joyce (du Middle East Policy Council Journal : Midle East Policy, été 1989, numéro 29)

[3Le racisme de l'état d'Israël du Dr. Israël Shahak aux éditions Guy Authier

[4] Hajo Meyer "Je suis peiné par les parallèles que j’observe entre mes expériences en Allemagne avant 1939 et celles subies par les Palestiniens aujourd’hui. Je ne peux m'empêcher d'entendre des échos du mythe nazi du « sang et de la terre » dans la rhétorique du fondamentalisme des colons."

[5Dr. Gabor Mate, BEAU RÊVE D'ISRAËL EST DEVENU UN CAUCHEMAR

[6] Marek Edelman, Marek Edelman. Être du bon côté. Livre de poche – 1er juillet 2016

[7] Zeev Sternell, En Israël, un fascisme croissant et un racisme semblable au nazisme primitif

[8Primo Levi, La voix de la Mémoire : Entretiens avec Primo Levi

[9Rudolf Vrba, né sous le nom de Walter Rosenberg, (11 septembre 1924 à Topoľčany, Slovaquie - 27 mars 2006 à Vancouver, Canada), est un des seuls Juifs à s'être évadé du camp d'Auschwitz. Interné dans le camp de concentration en juin 1942, il est témoin de l'extermination en masse des Juifs à Auzchwitz-Birkenau

 

Pour en savoir plus :

- Un descendant de survivants de la Shoah prône la paix à Gaza

- L'Holocauste comme prétexte de l'annexion

- Avant la 2e Guerre mondiale, le père de Netanyahu, Benzion Netanyahu, a été le secrétaire du fasciste Vladimir Jobotinsky, ayant reçu le soutien politique et financier de Mussolini. Et, il s'est rapproché d'Abba Ahiméir, proposant de fonder le sionisme sur le " modèle fasciste ".

 

Partager cet article
Repost0