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22 mars 2025 6 22 /03 /mars /2025 09:30
Mouvement social d’Ukraine : " Pour une Ukraine sans oligarques ni occupants " !

Des millions provenant des oligarques – pour le bien-être et la défense ! Pour une Ukraine sans oligarques ni occupants !

 

 

Les politiques prédatrices du nouveau président américain rendent impossible l’instauration d’une paix durable pour les Ukrainiens. Le refus de l’Ukraine de signer l’accord d’extraction minière, conçu pour servir les intérêts du capital américain, témoigne de sa détermination à éviter la dépendance coloniale. Cela ouvre la voie à l’exploration d’un modèle de relations plus équitables entre l’Ukraine et les États d’Europe, d’Asie et du reste du monde, sous le signe de la résistance à la domination impérialiste. Cependant, si la politique actuelle persiste, l’Ukraine risque une réduction imminente, voire un arrêt complet, de l’aide militaire des États-Unis.

 

 

Sources : Mouvement social d’Ukraine (Sotsialnyi Rukh)[0] |

- Cette aide n’a jamais été opportune ni suffisante. Cependant, son arrêt serait profondément ressenti.
Si l’État ukrainien est déterminé à maintenir l’effort militaire jusqu’à la libération de ses territoires ou la défaite décisive de l’agresseur, il doit adopter les méthodes appropriées. Selon nous, la défense de l’Ukraine pourrait être renforcée par une transition vers une politique de « socialisme de guerre », qui impliquerait la mobilisation de capitaux suffisants pour servir l’État par le biais de confiscations et l’abandon de la régulation économique fondée sur le marché. Une telle politique, combinée à une redistribution des richesses, réduirait le fardeau de la guerre qui pèse de manière disproportionnée sur les couches les plus pauvres de la société ukrainienne.

 

La communauté européenne a déjà réagi aux déclarations de Trump en augmentant ses budgets de défense et en augmentant son aide militaire à l’Ukraine. Il convient de noter que depuis l’invasion à grande échelle, le gouvernement a pris des mesures importantes pour renforcer ses propres capacités de défense, ancrer localement la production occidentale, relancer ses programmes de missiles et intensifier son programme de drones. Cependant, l’Ukraine dispose encore d’un potentiel substantiel pour mobiliser ses ressources internes.

 

 

- Le Mouvement social (Sotsialnyi Rukh) a longtemps souligné la nécessité de ces mesures, mais elles sont désormais essentielles pour la capacité de l’Ukraine à se défendre.

Le principal obstacle à une mobilisation efficace des ressources est la politique néolibérale, qui privilégie la propriété privée, encourage le profit et permet l’accumulation de richesses par des particuliers. Tant que les villes ukrainiennes resteront occupées et que l’agresseur russe conservera ses capacités offensives, tous les secteurs de l’économie doivent fonctionner de manière coordonnée, maximisant leur contribution à l’effort de défense.

 

La majeure partie des ressources financières devrait être concentrée entre les mains de l’État et investie dans le secteur de la défense, tandis que les capitaux privés devraient être soumis à une fiscalité progressive pour renflouer le budget de l’État. Le renforcement de la défense est indissociable d’investissements massifs dans le domaine social :

  • création d’emplois (notamment dans les secteurs d’infrastructures critiques) ;
  • amélioration du secteur des soins pour permettre à davantage de femmes d’intégrer le marché du travail, et amélioration de l’accès aux services sociaux tels que les soins de santé ;
  • l’hébergement temporaire et la réadaptation.

Ces mesures pourraient également contribuer à faire revenir des citoyens de l’étranger.

 

En outre, il est essentiel d’améliorer les garanties sociales pour les militaires, en particulier ceux qui défendent l’Ukraine depuis 2022.

 

 

- La singularité de la situation ukrainienne réside dans le fait que le démantèlement du capitalisme oligarchique est devenu plus que jamais possible dans un contexte de guerre totale et que cela est légitimé par la société.

 ⁇ ️ Premièrement, une part importante des services publics essentiels, déterminants pour la résilience de l’Ukraine, est déjà assurée par des entreprises publiques (chemins de fer, services postaux, santé, éducation, banques).

 ⁇ ️ Deuxièmement, de nombreuses entreprises (principalement celles liées aux oligarques russes) ont été nationalisées et la part du PIB redistribuée via le budget a augmenté.

 ⁇ ️ Troisièmement, les oligarques ukrainiens ont déjà perdu une partie de leur richesse et de leurs leviers de contrôle, se soumettant de plus en plus à l’influence du pouvoir d’État.

 

🔴 Il est donc urgent et nécessaire de mettre en œuvre :

  • Un audit des ressources naturelles et des terres permettra de déterminer leurs propriétaires et les avantages publics découlant de leur exploitation. La transparence dans le contrôle de la richesse nationale n’est pas nécessaire pour la commercialisation hâtive de ces ressources, mais pour comprendre les fondements sur lesquels repose la croissance de la prospérité générale. Cela motivera la population à lutter plus efficacement pour sa patrie et ses perspectives sociales.

 

  • Il faut établir un contrôle étatique sur les entreprises des secteurs stratégiques de l’économie et mettre en place une production de masse pour répondre aux besoins des populations en première ligne.
    • L’industrie doit œuvrer dans l’intérêt de la défense, et non pour suivre les fluctuations du marché.
    • Il faut restituer à l’État la propriété des infrastructures essentielles
    •  L’accès aux biens de première nécessité ne doit pas servir de pâture aux oligarques ni de moyen de détourner les aides de l’État vers les poches des monopoleurs.
    • Maintenir DTEK Société de carburant et de l’énergie du Donbass- NDT entre les mains de Rinat Akhmetov ou les entreprises énergétiques régionales entre les mains de Vadym Novynskyi est un acte injustifié de charité de l’État en faveur des oligarques.

 

  • Réexaminer les résultats de la privatisation spoliatrice. Les entreprises rachetées pour une bouchée de pain devraient être restituées à l’État, sinon la différence entre le prix d’achat et la valeur marchande réelle devrait être compensée. En premier lieu, les entreprises des secteurs minier, mécanique et chimique, essentielles à la défense, devraient être placées sous le contrôle de l’État. Il faut arrêter de ponctionner les subventions ; que les oligarques paient !

 

  • Dénoncer tout accord visant à éviter la double imposition avec Chypre, les Îles Vierges et d’autres juridictions offshore. La valeur ajoutée créée grâce aux ressources naturelles, aux infrastructures et à la main-d’œuvre ukrainiennes devrait être imposée ici, et uniquement ici.

 

  • Instaurer une fiscalité progressive et une taxe de luxe. La défense du pays repose sur l’héroïsme et les sacrifices des paysans, des ouvriers et des petites entreprises ukrainiens. Pour préserver le pays, les plus riches doivent sacrifier leur fortune, proportionnellement à l’influence qu’ils exerçaient avant la guerre - le taux d’imposition maximal devrait atteindre 90 % du revenu. Sans activisme fiscal, l’Ukraine tombera dans un piège d’endettement insurmontable (d’ici 2025, la dette extérieure pourrait approcher 100 % du PIB).

 

  • Instaurer le contrôle des travailleurs dans les entreprises comme outil efficace d’audit interne et forme de société auto-organisée. Depuis les premiers jours de la guerre jusqu’à aujourd’hui, le pays a été le théâtre de scandales de corruption liés à des détournements de fonds. Un contrôle permanent par les syndicats et les comités d’entreprise est essentiel pour une plus grande transparence des actions des dirigeants et pour prévenir la corruption. Il est possible de corrompre des individus, mais impossible de corrompre une collectivité entière. Accorder des pouvoirs de contrôle effectifs aux syndicats encouragera le développement d’un véritable mouvement ouvrier.

 

  • Abandonner la pratique antérieure de sous-financement de l’éducation et de la science. La haute technologie de la guerre moderne rend le rôle des ingénieurs et des ouvriers qualifiés tout aussi important que celui des soldats.
    • Seule l’inertie éducative de l’époque précédente, combinée à la culture technique répandue de la population ukrainienne, a rendu possibles la conception, la production et la maîtrise de nombreux outils techniques modernes qui nous confèrent un avantage sur le champ de bataille. Nous ne pouvons plus compter sur l’inertie des époques passées. Des investissements importants dans l’éducation et la science auraient été nécessaires hier. Sans développement du secteur social, l’Ukraine est confrontée à une émigration massive et à une crise démographique qui l’empêcheront de compenser les pertes humaines.

 

  • Monopole d’État sur les exportations. En 2024, les exportations de produits agricoles ont atteint le chiffre record de 24,5 milliards de dollars, alors que les profits continuent de profiter aux particuliers.

 

  • Révision des relations avec l’Europe concernant le sort des actifs russes. En se débarrassant des vestiges de l’influence oligarchique, l’Ukraine guérira de la corruption, ce qui permettra d’engager une discussion de fond sur le transfert des actifs russes gelés pour les besoins ukrainiens. Actuellement, environ 200 milliards de dollars sur les 300 milliards de dollars d’actifs d’origine russe sont détenus dans des pays européens.

 

  • Améliorer le prestige social du personnel militaire. La reconstitution du budget de l’État permettra de verser une juste compensation financière aux soldats blessés souhaitant reprendre du service. Il est essentiel de rétablir le maintien du salaire moyen des militaires mobilisés, ce qui garantira aux forces armées ukrainiennes le potentiel nécessaire en effectifs.

 

 

- La mise en œuvre de ces mesures est impossible sans une rupture entre les dirigeants du pays, les grandes entreprises et leurs vecteurs d’influence.

Si certaines de ces mesures sont mises en œuvre, elles renforceront la confiance du public envers le gouvernement. Les véritables garanties de la sécurité de l’Ukraine résident dans le renforcement des liens sociaux internes. D’un autre côté, les autres pays ne nous aideront pas tant que nous n’aurons pas démontré notre volonté de privilégier les intérêts de la défense plutôt que ceux du marché. Et, 34 ans après son indépendance, l’Ukraine devra apprendre à vivre sans oligarques et capitalistes. Alors que l’Ukraine dispose encore d’importantes ressources financières, industrielles et humaines, ne pas progresser vers leur socialisation serait une erreur majeure.

 

🔴 Le gouvernement ukrainien a désormais une occasion unique de démontrer concrètement ce qu’il est prêt à sacrifier : le pays ou les oligarques.

  • Si nous mettons fin au chaos néolibéral qui creuse le fossé entre riches et pauvres, nous unirons le peuple et deviendrons une force unificatrice d’envergure mondiale !
  • Si nous reconstruisons l’économie sur des principes sociaux, nous résisterons.

 

Des millions provenant des oligarques – pour le bien-être et la défense !

Pour une Ukraine sans oligarques ni occupants !

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11 mars 2025 2 11 /03 /mars /2025 13:53
Visite de Macron à l’usine de poudre pour munitions Eurenco, à Bergerac (Dordogne), le 11 avril 2024

Visite de Macron à l’usine de poudre pour munitions Eurenco, à Bergerac (Dordogne), le 11 avril 2024

Le président du MEDEF Patrick Martin prend l’exemple du Danemark : « Le Danemark a décidé de reporter à 70 ans l’âge de départ à la retraite pour que l’économie finance l’effort de guerre[0] »

La CPME propose de passer à la semaine de 36 heures pour financer l’effort de défense[0bis]

 

 

Pour financer le projet de réarmement européen, le pouvoir[1][1bis] et le camp néolibéral[0] convoquent l’économie de guerre. Mais derrière cette appellation, ils pensent à tout autre chose qu’à une mobilisation des moyens économiques pour la sécurité du pays : imposer par la ruse leur agenda d’austérité sociale.

 

 

Sources : Martine Orange | mis à jour le 14/03/2025

- L’expression est désormais dans tous les discours. Elle sature même l’espace public. Du matin au soir, responsables politiques, économistes, observateurs géopolitiques convoquent « l’économie de guerre » pour souligner la gravité du moment.

L’appellation est si claire qu’elle ne paraît appeler ni précision ni contestation. L’humiliation publique du président ukrainien, Volodymyr Zelensky, par Donald Trump et son vice-président, J. D. Vance[2], les doutes qui planent sur la solidité de l’alliance transatlantique alimentent un climat de peur et d’angoisse partout en Europe. Chaque État membre a compris l’urgence de se réarmer et d’affirmer la sécurité et l’indépendance du continent. Pourtant, dans aucun pays, en dehors de la France, on ne parle d’économie de guerre. Les autres États préfèrent évoquer des plans de réarmement, de renforcement de leurs capacités militaires, de sécurité.

 

🔴 Avec raison, selon un connaisseur du monde de la défense, irrité par le détournement des concepts, la « grandiloquence inutile » des débats en France : « Mais de quoi parle-t-on ? Nous ne sommes pas en guerre. Il ne s’agit pas de consacrer l’essentiel de nos ressources à la guerre comme en 1914 mais d’augmenter les dépenses militaires pour les porter à 3-3,5 % du PIB. Pendant toute la guerre froide jusqu’en 1994, la France a consacré 5 % de son PIB à sa défense. On ne parlait pas alors d’économie de guerre. »

 

 

- Une économie sous le contrôle de l’État
De nombreux travaux ont été menés par des historiens et des économistes sur les économies de guerre, un sujet malheureusement très fréquent dans l’histoire. Même s’il y a eu de nombreuses évolutions dans le temps, tous relèvent des caractéristiques précises dans les économies de guerre modernes.

 

🔴 Cela peut paraître une évidence, mais il faut quand même l’énoncer : une économie de guerre s’applique à un pays en guerre, comme en Ukraine actuellement. Le conflit entraîne des pénuries, des ruptures dans les approvisionnements (énergie, produits alimentaires, matières premières) qui amènent le pouvoir à mobiliser toutes ses ressources pour assurer sa défense et sa sécurité.

 

 

- L’économie de guerre, c’est la subordination de l’appareil productif et des importations à l’effort militaire.
Éric Dor, professeur d’économie à l’Ieseg School rappelle :

  • « La première grande mobilisation moderne, c’est la levée en masse au moment de la Révolution. Mais l’économie de guerre au sens actuel intervient avec l’industrialisation qui amène des guerres totales », explique Cédric Mas, historien militaire[3].
  • La guerre de 1914 est l’exemple le plus souvent cité : l’ensemble des moyens humains, économiques et financiers ont été alors mobilisés pour assurer la défense du pays. Alors qu’il n’existait pas d’impôt sur le revenu en France, l’épargne française fut requise pour payer l’effort de guerre, sous la direction de l’État.
  • Car à circonstances exceptionnelles, moyens et mesures exceptionnels. « La défense ne peut plus être faite en laissant le libre jeu au marché, à la concurrence », rappelle Cédric Mas. Les besoins militaires, les ruptures et les pénuries dans les approvisionnements amènent le pouvoir à prendre des mesures coercitives pour répondre aux demandes des armées et assurer la défense du pays et sa survie.
  • « Dans une économie en guerre, la production et la consommation se retrouvent organisées par l’État », résume Éric Monnet, directeur d’études à l’EHESS et professeur à l’École d’économie de Paris[4].
  • « L’économie de guerre, c’est la subordination de l’appareil productif et des importations à l’effort militaire », complète Éric Dor, professeur d’économie à l’Ieseg School. En un mot, tout est décidé et orienté par l’État. L’économie devient totalement administrée, sous la conduite d’entités centralisées.

 

🔴 Cette prise en main par l’État des moyens économiques se traduit souvent par des dispositions complémentaires drastiques comme la fin de la liberté de circulation des capitaux, le rationnement de certains produits, un contrôle des prix, voire une fixation autoritaire des prix. Ces mesures sont souvent accompagnées de taxations exceptionnelles contre les « profiteurs de guerre ».

 

🔴 La seule énumération de ces mesures ne laisse aucun doute sur le sujet : ce n’est pas à ce cadre réglementaire que se réfèrent les responsables politiques et certains économistes lorsqu’ils convoquent actuellement l’économie de guerre dans leurs propos. La plus petite disposition qui marquerait les prémices d’un retour à une économie administrée leur ferait pousser des cris d’orfraie.

 

 

- Dans les pas du rapport Draghi
Le plan de réarmement européen n’imagine d’ailleurs pas cela.

Il s’inscrit, sans le dire explicitement, dans la continuité du rapport Draghi[5]. Présenté à l’automne, celui-ci pointait la nécessité d’une reprise en main rapide des États membres, d’une relance des investissements productifs et dans la recherche, sous peine de disqualification européenne face à la Chine et aux États-Unis. Nombre de responsables européens avaient applaudi, déclarant que le rapport Draghi devait devenir la « feuille de route » de l’Union européenne (UE). Avant d’ajouter : « Mais il y a le veto allemand. »

Friedrich Merz président fédéral de la CDU, futur chancelier

 

🔴 Le revirement stratégique du futur chancelier allemand, Friedrich Merz, appelant son pays et l’Union à devenir indépendants des États-Unis et à assumer la défense du continent[6] a provoqué un électrochoc. Brusquement, nombre de verrous qui pesaient sur la zone euro ont sauté :

  • Les dépenses d’investissement militaires, comme le demandait la France depuis deux décennies, pourraient ne plus être comptabilisées dans les règles du traité de Maastricht.
  • L’utilisation de fonds européens pourrait être rendue possible.

 

🔴 Surtout, l’Allemagne se dit prête à abandonner sa politique économique restrictive et à lancer un vaste plan de relance d’investissements dans la défense et les infrastructures stratégiques. Un changement attendu depuis quinze ans, mais qui reste conditionné à l’adoption d’une réforme constitutionnelle brisant les règles d’airain sur le déficit budgétaire.

 

🔴 Saisissant ce moment unique, la Commission européenne pousse les feux. Même si les chiffres annoncés sont loin des efforts préconisés par le rapport Draghi, ils s’inscrivent dans cet esprit. Ils entérinent un effort massif d’investissement pour la défense et les infrastructures stratégiques. Le rapport prévoit aussi un recours massif à l’épargne privée européenne, censée poser les fondements d’une union de l’épargne et des capitaux. Un succédané de l’Union bancaire que Mario Draghi et les responsables européens appellent de leur vœu.

 

- Les leçons du plan Biden
« Tel qu’il est présenté à ce stade, il pourrait s’apparenter à un vaste plan de relance industriel européen à partir de la défense », analyse Éric Monnet. Alors que les économies européennes sont en stagnation depuis une décennie, que le continent est menacé de déclassement industriel, l’idée de saisir l’urgence du moment et d’utiliser les dépenses militaires considérées comme un puissant levier de recherche, d’innovation et de soutien industriel, pour assurer à la fois la sécurité du continent et remettre l’économie européenne sur les rails, fait sens.

 

🔴 Est-ce un des objectifs poursuivis par l’UE ?

Beaucoup de flou, d’incertitudes, d’ambiguïtés demeurent. Au point que certains redoutent que, passé les déclarations martiales, celles-ci n’aboutissent qu’« à des paroles verbales », et qu’une fois de plus l’Europe ne soit pas au rendez-vous. Car au-delà des annonces, un cadre précis doit être dressé. En matière de défense, c’est la commande publique qui donne normalement l’impulsion.

  • Mais qui décidera, l’UE, les États ou les industriels ?
  • L’Union européenne est-elle prête à mettre entre parenthèses son principe de « libre concurrence » pour donner une préférence européenne, voire nationale dans certains cas ?
  • En un mot, y aura-t-il une organisation, une planification pour mener ce projet de réarmement européen ?

 

Les réponses à ces questions sont essentielles pour la suite.

Car les leçons du vaste plan de réindustrialisation lancé par Joe Biden au travers de plusieurs programmes (Inflation reduction Act, Chips Act, Renewable energy and efficency Act) doivent être tirées[7]. Malgré les centaines de milliards de dollars apportés par le Trésor américain, les retombées ont été jugées insuffisantes par les Américains. L’échec relatif de ce plan a participé à la réélection de Donald Trump.

 

🔴 Pour l’économiste James Galbraith, la déception du plan Biden découle d’une faute originelle : le refus d’intervention étatique. À la différence du New Deal lancé par Roosevelt, Joe Biden a refusé d’engager le pouvoir étatique et les ressources publiques pour définir, arrêter, contrôler les productions et les techniques nécessaires, préférant s’en remettre aux entreprises privées pour faire ces arbitrages. Or celles-ci décident des productions, des technologies à mettre en œuvre en fonction de leurs intérêts, du profit et du pouvoir qu’elles peuvent en escompter, pas en fonction de l’intérêt général.

 

🔴 Le plan européen risque d’être confronté aux mêmes ambiguïtés, faute d’éclaircissements.

À cela s’ajoute une autre inconnue, de taille :

  • l’appareil industriel européen est-il en capacité de répondre aux besoins de défense européens ? 
  • Face à l’urgence invoquée, les milliards que l’UE entend demander à l’épargne privée européenne ne vont-ils pas se transformer en achats massifs d’équipements américains ou autres, avec de faibles retombées pour le continent ?

 

 

- L’agenda inchangé du néolibéralisme

Alors que l’Europe pourrait s’engager dans une transformation existentielle, on attendrait des échanges sérieux, des éclaircissements approfondis. Des débats ont commencé dans d’autres pays sur les buts et les modalités de ce projet. En France, rien de tel.

 

La nécessité d’augmenter les dépenses militaires que les gouvernements successifs ont négligées pendant plus de vingt ans ne fait pas débat. La question de savoir comment mobiliser de nouvelles ressources dans un contexte de délabrement budgétaire et d’endettement massif après huit années de macronisme mérite, elle, d’être analysée, discutée, arbitrée. Et ne peut se satisfaire de réponses simplistes.

 

🔴 Mais pour le pouvoir, tout se résume pour l’instant à un seul slogan : l’économie de guerre[1bis]. La peur et l’urgence étant censées éteindre toutes les réflexions.

Par ruse, ce qui est présenté comme un impératif de sécurité se transforme en une guerre sociale.

  • « Il est difficile de parler d’austérité, de réforme. Tout cela ne passe plus auprès de la population. Mais le logiciel néolibéral reste inchangé. Comme au moment du covid, ils mobilisent le champ lexical militaire pour faire passer des mesures qui ne passeraient pas autrement », relève Cédric Mas[3].
  • Au nom de la défense de la nation face à l’impérialisme russe, le camp néolibéral est reparti sans attendre en campagne. « Augmenter le temps de travail, restreindre l’accès à l’assurance-chômage, partir en retraite plus tard, simplifier radicalement la vie des entreprises, libérer l’innovation sont désormais des impératifs sécuritaires », s’est empressé d’écrire l’économiste Nicolas Bouzou[8], régulièrement rémunéré par les entreprises du CAC 40 pour publier des études « positives ».

 

🔴 Depuis, c’est le concours Lépine des propositions de réformes, plus brutales et régressives les unes que les autres.

  • Tout y passe : l’âge et le financement de la retraite[0][0bis][10], la énième réforme de l’assurance-chômage, le temps de travail, les services publics, l’environnement...
  • Le tout sur fond de déréglementation absolue, de suppression des normes, des
    règles, des lois qui brident l’énergie, qui entravent la liberté du capital.

C’est-à-dire l’inverse d’une économie de guerre.

 

▶️▶️  Synthèse : Par ruse, ce qui est présenté comme un impératif de sécurité face à la montée des tensions géopolitiques avec la Russie et aux incertitudes américaines se transforme en une guerre sociale. Ce qui pourrait devenir un plan de relance militaire et industriel européen se décline à nouveau sous forme d’austérité et de régression, pour le seul profit du capital.

 

 

- L’indispensable adhésion
Sans aucune prise de distance, Emmanuel Macron a repris cet agenda, le même qu’il décline depuis huit ans. Tout en appelant à la mobilisation et à l’unité, il a tenu à souligner d’emblée que les augmentations de dépenses militaires seraient faites « sans impôt », mais avec des « réformes », appelant tous les corps sociaux à lui donner des idées[9].

 

Cette obstination du chef de l’État à défendre « quoi qu’il en coûte » tous les préceptes néolibéraux, qui ont pourtant démontré leurs failles, voire leur faillite, depuis plus d’une décennie ne peut que surprendre. Surtout pour un responsable qui ne cesse de prôner le changement, la mobilité intellectuelle face aux événements du monde.

 

🔴 Comment peut-il croire que ces régressions sociales qu’il avance depuis huit ans et qui suscitent un rejet grandissant pourront brusquement être acceptées sous le motif de la sécurité ?

  • Comment penser faire l’unité quand il exonère par avance, au mépris des fondements de la République, les puissances d’argent de toute contribution à la sécurité et à la défense du pays ?
  • Plus prosaïquement, comment espérer mobiliser l’argent des Français quand dans le même temps le gouvernement nourrit une insécurité sociale à tous les niveaux, qui ne peut qu’alimenter la défiance ?

 

▶️▶️  Á retenir : « Dans toutes les économies de guerre, il y a un élément indispensable pour soutenir la mobilisation des ressources et la cohésion d’un pays : c’est l’adhésion de la population. Sinon, cela se transforme en révolte ou en rejet. C’est ce qui s’est passé en 1918 en Russie », rappelle Éric Monnet. En plantant d’emblée un cadre déséquilibré, renforçant des inégalités déjà galopantes, Emmanuel Macron risque de ne jamais trouver cette adhésion.

 

 

🔴🔴🔴🔴🔴🔴🔴🔴🔴🔴🔴🔴

 

 

-  Jean-Luc Mélenchon revient sur la notion d’économie de guerre et sur les conséquences politiques et économiques des conflits armés à l’échelle mondiale, le 8 mars 2024.

 

-  Jean-Luc Mélenchon est intervenu à l'occasion d'une conférence sur le moment politique, le 6 mars 2025.

Pour financer l'économie de guerre, les plus riches ne seront pas mis à contribution par l'impôt.
Mais pour ceux qui ont des actions dans l'industrie de l'armement, c'est la fête !
« On croit mourir pour la patrie, on meurt pour les industriels ! »

 

 

Notes :

[0Le président du MEDEF Patrick Martin prend l’exemple du Danemark : « Le Danemark a décidé de reporter à 70 ans l’âge de départ à la retraite pour que l’économie finance l’effort de guerre »

[0bisLa CPME (Confédération des petites et moyennes entreprises) propose de passer à la semaine de 36 heures pour financer l’effort de défense

[1Allocution d’Emmanuel Macron le 5 Mars 2025
" Face à la “menace russe”, le Président de la République a promis des " investissements supplémentaires" pour le budget de la défense. Macronisme oblige, le chef de l’Etat a précisé qu’il n’y aurait aucune augmentation d’impôts. Je le cite " Ce seront de nouveaux investissements qui exigent de mobiliser des financements privés, mais aussi des financements publics (...) Pour cela, il faudra des réformes, des choix, du courage "

[1bisEmmanuel Macron défendait déjà, à Bergerac en 2024, une économie de guerre qui « produit de la richesse »

[2] L'échange, sous l'œil des caméras, a pris la tournure d'une humiliation publique

[3Cédric Mas : Historien militaire et surtout citoyen

[4Éric Monnet est directeur d’études à l’EHESS et professeur à l’École d’Économie de Paris. Son travail de recherche porte sur l’histoire des politiques monétaires, du système monétaire international et des systèmes financiers en France et en Europe au XXe siècle.

[5Mario Draghi remet son rapport sur la compétitivité européenne à Ursula von der Leyen

[6Friedrich Merz : une Europe indépendante en matière de défense

[7Etats-Unis : les hoquets de la relance industrielle de Biden

[8] La clé de l’autonomie militaire de l’Europe ? Un programme de puissance économique 

[9] Dépenses militaires : Macron promet des «investissements supplémentaires» sans augmenter les impôts

[10Le président du COR suggère un report de l’âge de la retraite au-delà de 64 ans, invoquant la nécessité d’un effort de défense accru

 

Pour en savoir plus

- Économie de guerre : de quoi parle-t-on ?

- Ukraine/Russie : Macron prépare la France à l’économie de guerre et aux sacrifices sociaux

- Guerre en Ukraine : l’Europe de la défense contre le non-alignement ?

Face aux défis que soulèvent la menace russe et l’agressivité commerciale américaine, le ministre délégué à l’Europe, Benjamin Haddad (Renaissance), assume de dire aux Français qu’il faudra travailler plus. Assurance chômage, taux d’emploi, retraites par capitalisation… Il faut, selon lui, accélérer les réformes.

 

De l’économie de guerre à la guerre sociale !
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8 mars 2025 6 08 /03 /mars /2025 14:13
Balkans : tout le pouvoir aux « plénums » !

La machine ne peut se mettre en branle que si tout le monde participe. Nous n'en sommes pas là encore, mais à un moment donné, comme une tempête, la colère refoulée pendant des années éclatera et changera fondamentalement la manière de fonctionner de notre société, ou sera instaurée une démocratie directe et décentralisée.

 

 

Un vent de révolte souffle dans les Balkans, où les classes populaires s'organisent à travers des « plénums », une nouvelle forme de démocratie directe. Rappelant les conseils ouvriers historiques, ces assemblées sont aujourd'hui au cœur des luttes sociales. Certains y voient les « soviets du XXIe siècle ».

 

 

Sources : Lucas Grimaldi | mis à jour le 21/03/2025

- Dans l'indifférence quasi générale du reste du monde, un vent de révolte souffle dans les Balkans.

En effet, depuis quelques années déjà, les classes populaires s'organisent à travers des « plénums », une nouvelle forme de démocratie directe où toutes les décisions sont prises collectivement, de manière décentralisée et sans leadership d'un quelconque individu, parti, syndicat... Ces « plénum », qui rappellent des expériences historiques comme les conseils de travailleurs, sont actionnels le fer de lance des luttes populaires. Et si c'étaient finalement les « soviets du XXIe siècle » ?

 

Pour commencer un peu d'étymologie, le terme « plénum » vient du latin et signifie « plein » ou « assemblée complète ». Il désigne une réunion où tous les membres d'un groupe participant, sans distinction de rang ou de hiérarchie, un mot qui prend tout son sens dans nos exemples d'auto-organisation populaire. Il faut noter que le mot « plénum » était déjà couronnement utilisé, à notre époque, dans les pays dit « communistes » pour désigner les réunions plénières des partisans au pouvoir (ex. : les « plénum » du Comité central du Parti communiste en URSS ou en Chine). Ces assemblées étaient censées être des lieux de débat et de prise de décision, mais elles étaient évidemment contrôlées par la hiérarchie bureaucratique du parti, loin donc de ce que nous verrons par la suite. Le terme a probablement été choisi par les populations des Balkans car il évoque une réunion horizontale ou tout le monde peut s'exprimer, mais sans doute aussi partie qu'il est familier aux populations de l'ex-Yougoslavie, où il avait déjà une connotation de prise de décision collective.

 

🔴 Les organisateurs des plénums balkaniques se sont ainsi réapproprié un mot historique lié aux structures autoritaires du parti communiste pour faire un symbole aux antipodes : celui de la démocratie directe et de la révolte.

 

 

- 2009 : Naissance dans les universités croates et extension

« Le savoir n'est pas une marchandise »

Pour voir apparaître, dans son sens moderne, les premières assemblées populaires communes « plénums », il fait remontoir à 2009 et se rendre en Croatie. Alors en pleine crise économique, et en réponse à la marchandisation de l'éducation ainsi qu'à l'introduction progressive de frais de scolarité dans les universités publiques, — conséquence du processus de Bologne visant à aligner le système universitaire croate croate sur les normes européennes —, les étudiants de l'Université de Zagreb ont débuté l'occupation de leur facultés[2][2bis]. Réclamant un enseignement gratuit, ils s'organisent en « plénums » ouverts à tous (le « plénum » de la faculté de philosophie était ouvert aux citoyens et pas seulement aux étudiants, contrairement à certains autres « plénum » qui naîtront en Croatie), prises à la majorité des votants, avec un droit égal de parole pour chaque participant, rejetant tout leader.

 

Parmi leurs autres revendications vont progressivité s'ajouter le rejet de la privatisation des universités, la fin des frais cachés, ainsi qu'une demande de transparence et de démocratisation du système universitaire. Cette grande vague d'occupations des universités perturbent les gouverneurs croates qui, dans un premier temps, reculent sur la privatisation et les frais d'inscription des universités. Ils auront cependant tout le vice d'attendre l'essoufflement du mouvement étudiant pour reprendre leurs mesures destructrices de plus belle. On peu dire que ce mouvement, resté essentiellement étudiant, avait peu de chances de renverser la table sans un élargissement de la révolte à d'autres pans de la société. Cependant, l'expérience des « plénums » était née, laissant un héritage important et influençant les futurs mouvements de luttes sociales dans les Balkans, avec par exemple leur manuel sur le thème « commentaire faire une assemblée générale », appelé The Occupation Cookbook[3], qui traversera les frontières et servira de source d'inspiration en Bosnie-Herzégovine lors de l'insurrection des « plénums » de 2014.

 

🔴 Évidemment, ces « plénums » présentent de nombres similitudes avec les assemblées générales observées notamment lors du mouvement Occupy Wall Street en 2011[4].

Ils s'inscrivent dans une dynamique plus de large d'organisations horizontales qui ont émergé à travers le monde depuis des décennies. Ce modèle, bien que réactivé récemment, troupe ses racines dans des pratiques anciennes d'auto-gouvernance collective.

 

🔴 Le terme « plénum » a également émergé en 2010 lors des occupations universitaires en Autriche et en Allemagne[5].

Bien qu'aucun lien direct avec le mouvement étudiant croate ne soit formellement établi, cette coïncidence reste intrigante. En revanche, lors des mobilisations études en Slovénie et en Serbie en 2011, qui verront naître de nouveaux « plénums », l'influence du mouvement croate est avérée. Le mouvement serbo-slovène est, pour sa part, assez similaire à ce qu'il s'est passé en Croatie, avec cependant un impact plus limité mais un point de départ similaire : des réformes néolibérales, notamment dans l'éducation, qui ont déclenché la colère des étudiants. Eux aussi ont réclamé une éducation gratuite et publique. Tous ces mouvements sont restés essentiels étudiants malgré leur radicalité et leur soif de démocratie directe, mais cela changera quelques années plus tard.

 

 

- 2014 : L'insurrection des plénums en Bosnie

« Manifestation lundi à Zenica »

Le 4 février 2014, en Bosnie, et plus précisément dans la ville ouvrière de Tuzla, dans le nord-ouest du pays, une révolte éclate[6]. Suite à des salaires impayés, les salariés d'usines privatisées se soulèvent et sont rapidement rejoints par les habitants, qui prennent fait et cause pour eux. Ensemble, ils convoquent une session plénière à l'échelle de toute la ville afin de formuler leurs exigences devant le Parlement du canton de Tuzla : le « plénum » était né ! Armés de toutes ces revendications, ils investissent le siège du gouvernement du canton, dénonçant pêche-mêle les privatisations massives en Bosnie-Herzégovine, la corruption et les divisions nationales.

 

🔴 S'ensuit une série de manifestations face à la surdité du pouvoir.

Le 7 février, une manifestation fait une vingtaine de blessés, des bâtiments gouvernementaux sont incendiés et de nombres arrestations ont lieu, marquant le débout d'une grande vague de protestations qui s'entendent à d'autres villes comme Sarajevo [7], Zenica, Mostar et Bihać en signe de solidarité. Très vite, le mouvement prend de l'ampleur, attirant des milliers de citoyens en colère contre les dirigeants. Paniqués devant la démonstration de force des masses, la plupart des ministres locaux finissent par démissionner, inquiets de voir les gouvernés reprendre les rêves de la vie politique. En effet, des centaines de citoyens et citoyennes se regroupent dans des « plénums », véritables expériences de démocratie directe, qui se propagent dans d'autres villes de Bosnie-Herzégovine, inspirées par l'expérience de Tuzla.

 

🔴 Les manifestations et les « plénums » perdurent pendant plusieurs semaines, et s'étalent.

Tandis que le vent de la colère gagne les rues en Croatie, au Monténégro, en Macédoine, etc., dans ce qu'on pourrait appeler un « printemps des Balkans », les manifestants bosniens rappellent déjà que « faim se dit pareil en bosnien, en croate ou en serbe ». Les manifestations et les « plénums » perturbent perdant plusieurs semaines, s'étalant à de nombreuses villes, notamment Sarajevo, Tuzla, Zenica, Mostar, Travnik, Brčko, Goražde, Konjic, Cazin, Donji Vakuf, Fojnica, Orašje et Bugojno. Des sessions régulières permettent aux habitants de débattre des enjeux politiques et de formuler des revendications à l'attention du gouvernement, telles que l'arrêt des privatisations, diverses mesures sociales ou encore la suppression des privilèges de la classe politique.

 

🔴 Dans le monde temps, le mode d'organisation des « plénums » se complexifie.

Le « plénum » de Tuzla met en place des groupes de travail spécialisés, chacun se concentrant sur un domaine spécifique, à l'image des ministères du canton de Tuzla. Parmi ces thématiques figurent l'éducation, la science, la culture et le sport, le développement économique, aménagement du territoire et protection de l'environnement, coordination avec les travailleurs, santé, justice et gouvernance, industrie, énergie et mines, sécurité intérieure, agriculture, gestion des ressources naturelles, commerce, tourisme, transports et communication, politiques sociales, finances, droits des vétérans de guerre et questions juridiques en : autant de thématiques prises en charge par les groupes de travail des « plénums ».

 

🔴 Par ailleurs, des tentatives ont été faites pour coordonner les différents « plénums » à un niveau plus large, dans le but d'élaborer des revendications communes dépassant l'échelle locale.

Des « plénums » conjoints ont notamment été organisés à Sarajevo, réunissant des délégations des différents « plénums » locaux. Comme le notait l'écrivain croate Igor Štiks : « Ce mouvement a expérimenté la démocratie directe... Les « plénums » des villes se sont retrouvés dans un “ plénum des plénums ”, qui fait penser aux “ assemblées des assemblées ” des gilets jaunes français. »

 

🔴 Malheureusement, comme les gilets jaunes, l’insurrection des « plénums » finit par s’essouffler récupéré par les activistes libéraux.

Pour le plus grand bonheur des classes dominantes qui, à travers leurs médias, n'avaient pas hésité à diaboliser ces événements, parlante de « troubles » et « d'incidents ». En vain, puisque le mouvement fut soutenu par 88 % de la population, d'après un sondage. Ce qui a réellement tué le mouvement, c'est surtout sa marginalisation par ces mêmes médias, la répression et le soutien actif de la communauté internationale aux gouverneurs. Mais au moins, cette fois, les « plénums » ont dépassé leur existence purement estudiantine.

 

- 2024 : La Serbie se soulève

14 morts dans l'effort d'une gare dans le nord de la Serbie

Aujourd'hui, les « plénums » font leur retour en Serbie, après un événement tragique. Le 1 er novembre 2024, un drame frappe la ville de Novi Sad, en Serbie. Aux alentours de 11 h 50, l'auvent en béton de la gare, récemment rénovée, s'effondre brutalement, entraînant la mort de 15 personnes et de nombres blessés[8]....

 

 ⁇ ️ Ce bâtiment, construit en 1964 en seulement 18 mois, était à l'origine un symbole de modernité pour l'ancienne Yougoslavie. Cependant, des décennies de négligence et de sous-financement l'avaient transformé en une structure délabrée, rendant nécessaire une rénovation en profondeur. 

 

 ⁇ ️ Les travaux de réhabilitation, lancés tardivement en 2021, avaient été confiés à un consortium d'entreprises chinoises, dans un contexte de rapprochement économique entre la Serbie et Pékin. La réouverture précipitée de la gare en mars 2022 avait tête célébrée en grande pompe par Aleksandar Vučić, président serbe, aux côtes de Viktor Orbán, son allié hongrois. Présentée comme un jalon vers une « Serbie moderne et progressiste », cette inauguration masquait en réalité de tombes irrégularités dans l'exécution des travaux. Des doutes circulaient déjà sur la solidarité des rénovations, préoccupation de notamementant la reconstruction de l'auvent, qui s'est finalment écroulé le 1er novembre, provoquant un choc national.

 

 

- Dans un premier temps, le gouvernement décrété des jours de deuil et des veillées sont organisées en hommage aux victimes.

Mais très vite, la douleur fait place à la colère, à commencer, en novembre 2024 par déclencher une bagarre dans le Parlement[9]. Cet accident provoque une vague d'indication à travers le pays. Rapidement, des manifestations massives éclatent, notamment parmi les étudiants, dénonçant la corruption et l'incompétence des gouvernements dans la gestion des infrastructures.

 

🔴 Initialement limités à Novi Sad, les protestations se propagent rapidement à Belgrade ainsi qu'à d'autres villes serbes, marquant un tournant dans la contestation sociale. Ces manifestations dénoncent la corruption, le clientélisme et l'impunité du pouvoir, tenu pour responsables du drame. Face à cette contestation grandissante, les autorités répondent par la répression : gaz lacrymogènes, arrestations massives et mêmes violences physiques contre les manifestants. Des cas de véhicules fonçant délibérément sur la foule sont signalés, attisant encore davantage la mobilisation[10]. En décembre, les manifestations prennent une tournure plus large : il ne s'agit plus seulement de l'effondrement d'un bâtiment, mais bien d'un ras-le-bol général face à un système politique gangrené par des années d'autoritarisme et de censure.

 

🔴 Le 24 janvier, les étudiants lancent un appel à la grève générale, qui trouve un écho favorable dans plus secteurs, notamment l'éducation, la santé, les transports et le divertissement. Face à l'intensification du mouvement, plusieurs hauts responsables politiques, dont le Premier ministre Miloš Vučević, sont contraints de démissionner[11]. Mais les contestataires jugent ces concessions insuffisantes et maintiennent la pression avec cinq revendications principales :

  • Publication de tous les documents liés à la rénovation de la gare, afin d'établir les responsabilités et de mettre au jour d'éventuels cas de corruption ;
  • Identification et poursuite des responsables des violences contre les manifestants, y compris les attaques survenues lors des veillées pacifiques ;
  • Abandon des charges contre les étudiants arrêtés durant les manifestations et suspension des poursuites en cours ;
  • Augmentation de 20 % du budget de l'enseignement supérieur afin de réduire les frais de scolarité et d'améliorer les conditions de vie et d'études des étudiants.

 

C'est dans ce contexte que nos « plénums » ont fait leur retour dès le débout du mouvement pour organiser les nombreuses occupations étudiants et les manifestations de masse. Similaires aux anciennes expériences plénières, ils n'ont pas de chefs, et toutes les décisions sont prises collectivement dans un exercice de démocratie directe, dont ils sont des défenseurs acharnés.

 

 ⁇ ️ « Certains ont essayé de jouer ce rôle en s'exprimant dans les médias trop souvent et sans autorisation du « plénum », mais nous y avons vite mis un terme. Chacun d'entre nous change tout le temps de rôle. Ainsi, les autorités ne peuvent pas nous manipulateur, nous corrompre ni nous attaquer personnellement. Ça démontre également notre unité et encourage les étudiants de divers horizons à se joindre au mouvement », explosif Nemanja. Sara, qui suit attentivement les événements depuis la France, ajoute : « L'organisation des manifestations est volontariat décentralisé. On s'est mis d'accord pour qu'il n'y ait pas d'organisateurs officiels. Nous suivons le mode d'organisation des initiatives étudiantes en Serbie, qui fonctionnent par « plénums » ou chacun peu s'exprimer. »

 

 ⁇ ️ Lara, qui parle sous pseudonyme pour sa sécurité mais aussi parce que « les individus n'ont pas à se distinguer du collectif », nous explique plus en détail le fonctionnement :

  • « Nous commençons les plénums par une minute de silence en hommage aux victimes.
  • Puis, nous votons l'ordre du jour. Il y a un modérateur et un greffier. Seuls les étudiants peuvent voter, le corps enseignant une juste le droit d'assister aux sessions. Le temps de parole est égal et, chez nous, il est limité à une minute. Les arguments doivent être clair.
  • On décide à la majorité...
  • Nous sommes organisés en plus groupes de travail : stratégie, communication externe avec les autres facultés, sécurité, médias ou encore organisation d'activités libres. » Un fonctionnement divisé en groupes de travail qui rappelle celui des « plénums » bosniaques.
  • À noter que Lara fait aussi partie d'un groupe en charge de la logistique, qui s'occupe de la nourriture, des sacs de couchage ainsi que des premiers soins pour la grande manifestation de ce 1 er mars à Niš.

 

Concernant la coordination des « plénums », d'après le Courrier des Balkans : Un rapport de chaque groupe est soumis au « plénum », puis au groupe de travail qui chapeaute toutes les facultés. La décision doit ensuite être soumise au Haut-Conseil des délégués de l'université, où chaque faculté désigne en plénum un délégué et deux témoins, qui présentent les décisions de leurs facultés. La décision adoptée par le Haut-Conseil revient alors au « plénum » de chaque faculté pour une confirmation finale.

 

🔴 Cette forme d'organisation décentralisée s'est désormais étendue à l'ensemble des universités bloquées du pays. Les étudiants ont même mis en place un système sophistiqué de comptage des voix, appelé « Piton », qui attribuent un coefficient moindre aux votes des universités privées. On en vient à se demander si les étudiants de Serbie ne sont pas actuellement l'avant-garde de la révolution en cours. En tout cas, ce qui se passe en Serbie est historique : à l'heure ou ces lignes sont écrites, la mobilisation ne s'essouffle pas, et ce, depuis désormais quatre mois. Les étudiants rallient à leur cause de nombreuses personnels, à travers de longues marches organisées jusque dans les régions rurales du pays, le tout dans un esprit de camaraderie où ils sont accueillis en héros par les habitants, qui leur distribuent nourriture et eau. À la nuit tombée, les étudiants sont même conviés à des repas par les habitants, qui leur offrent le couvert et parfois même le gîte.

 

 ⁇ ️ Comme l'explique si bien Nikola, qui a participé à la première marche de Belgrade à Novi Sad (80 km) le 1 er février, des milliers d'étudiants et de citoyens se sont réunis pour bloquer les trois principaux ponts de la ville pendante douze heures. Par ailleurs, il a entrepris une marche de 150 km entre Belgrade et Kragujevac, où une manifestation vaste a eu lieu le 15 février. Il prévoyait également de marcher de Bor à Niš le 1 er mars, où quatre sites stratégiques ont été bloqués sous la bannière de « L'Édit des étudiants ».

 

 ⁇ ️ « Nous élevons ainsi le niveau de conscience dans les petites villes et les milieux ruraux. Nous montrons qu'on est tous solidaires, et que malgré la fatigue, les entorses, les cloques, et parfois les pieds en sang, nous sommes déterminés. Le contact humain est crucial, tout comme les technologies modernes et les réseaux sociaux que nous utilisons massivement. Et la réponse des citoyens est tellement pleine d'émotion qu'on oublie qu'on a mal ! On ne s'attendait pas du tout à ce qu'autant de gens nous rejoignent. »

 

🔴 L'autre point fort, au-delà de leur détermination, est l'humour et l'autodérision des étudiants, qui pratiquent l'ironie, l'autoréflexion, jouent sur les mots et analysent la société serbe actuelle, une forme de régime autonome qui étouffe sa jeunesse, laquelle respire aujourd'hui grâce à ce vent de liberté qu'elle a elle même insufflé. De son côté, le président serbe affiche une façade inflexible et fait mine d'ignorer les manifestations. Pourtant, les signes ne trompent pas : il est bel et bien acculé par une jeunesse qui lui demande, ainsi qu'aux autres dirigeants, de rend des comptes. Selon les événements les plus récents, le mouvement est encore loin de s'essouffler et, en ce 1 er mars, suite au succès de la grande marche entre Bor et Niš, les étudiants ont lu leur « édit » à la foule rassemblée.

 

 ⁇ ️ Ce document affirme que « la Serbie est une nation de citoyens libres » et souligne que « les institutions du pays doivent être au service du peuple, garantissant confiance et transparence, plutôt que d'être instrumentalisées au profit d'intérêts individuels ». Il insiste sur l'importance de l'indépendance des universités et du système judiciaire, la liberté des médias, le respect des droits fondamentaux et la valorisation du savoir.

 

Alors que la nuit est tombée, le rassemblement se poursuit dans une atmosphère sereine. Sur scène, divers orateurs se succèdent, mettant en avant la libération de la parole rendue possible par cette mobilisation étudiant qui dure depuis quatre mois. De son côté, le président Vučić a une nouvelle fois tenté de minimiser l'ampleur du mouvement, en le comparant à une mobilisation plus importante ayant eu lieu à Kragujevac lors de la fête nationale, quinze jours auparavant. Quoi qu'il advienne des développements futurs de cette mobilisation, qui doit encore relever des défis en s'attendant à d'autres secteurs de la société et en se massifiant davantage, les étudiants jouent un rôle d'avant-garde, en attendant de passer le flambeau à l'ensemble des citoyens. Ces expériences de « plénums » s'annoncent déjà riches en enseignements.

 

 

- En conclusion : les « plénums » une nouvelle forme d'auto-organisation

On observe une forte ressemblance entre ces mouvements et les conseils de travailleurs du début du XXe siècle : les soviets ouvriers et paysans en Russie en 1905 et 1917, la tentative de République alsacienne des conseils en 1918, l'expérience des conseils de travailleurs de Turin en 1919, ou encore les conseils ouvriers lors de la révolution allemande de 1918-1919... Autant d'exemples qui feraient frémir tout vieux conseilliste qui se respecte.

 

 ⁇ ️ Malgré des différences, ces formes d'organisation semblent traverser l'histoire avec une certaine constance. Nous avons déjà évoqué les assemblées populaires en France durant les Gilets jaunes, le mouvement " Occupy Wall Street ", ou encore les expériences d'assemblées populaires en Syrie et au Chiapas. Des exemples qui résonnent mieux avec notre époque contemporaine que les conseils de travailleurs, dont le potentiel révolutionnaire parait aujourd'hui plus daté – même s'il reste à surveiller dans les pays où la main-d'œuvre ouvrière demeure forte.

 

 ⁇ ️ Concernant le sujet révolutionnaire, je ne dirais pas que la classe travailleuse n'existe plus ou qu'elle n'est plus déterminante. Mais on observe une multitude d'acteurs qui ne se limite pas à l'ouvrier fantasmé du XXe siècle, ancré dans l'imaginaire figé du marxisme le plus doctrinaire. Ces acteurs sont aujourd'hui déterminants, et dans le cas des « plénums », ce ne sont pas des ouvriers mais de simples étudiants – à l'exception des « plénums » de Bosnie en 2014. Et encore, même dans cet exemple, la lutte ne s'effectuait pas directement dans les usines, mais bien dans la rue et les espaces publics réappropriés par l'ensemble des citoyens.

 

🔴 C'est un phénomène qui doit interpeller et remettre en question certaines certitudesBien sûr, il ne s'agit pas de nier la lutte des classes, qui reste évidente sous bien des aspects dans les différences mobilisations des « plénums » : qu'il s'agisse des étudiants réclamant l'accès à l'éducation pour tous sans distinction de revenus, ou des travailleurs de Tuzla en Bosnie exigeant la fin des privatisations et le versement de leurs salaires, il est difficile de ne pas y voir une lutte de classes. Mais une lutte qui prend naissance en priorité dans les universités plutôt que dans les usines.

 

 ⁇ ️ Attention cependant : comme l'ont montré les « plénums », si les étudiants ne sont pas réjouis massivement par les autres secteurs de la société, leur transformation en un véritable mouvement émancipateur est vouée à l'échec. L'exemple de Mai 68 en France a déjà montré le rôle précurseur des étudiants : en étant à l'initiative des premières manifestations, des blocages et des actions concrètes, ils ont été suivis par le mouvement ouvrier, qui a répondu à l'appel. Finalement, c'est cette seule étincelle qui manque pour que les « plénums » d'origine étudiante – comme ceux actionnement en Serbie – puissent aller plus loin.

 

 ⁇ ️ La lutte des classes se combinent d'ailleurs habilement avec la lutte contre les hiérarchies et les leaders, comme nous l'avons vu dans les « plénums ». C'est un point trop souvent oublié, alors qu'il peut, à lui seul, faire dégénérer ou absorber toute aspiration populaire'. Sans leader ni récupération politique, il est beaucoup plus difficile pour les classes dominantes de négocier avec les révoltés et de proposer des compromis visant à freiner la lutte. On vous regarde, partis et syndicats.

 

 

- C'est en se débarrassant de toute forme de hiérarchie que le mouvement peut exploiter pleinement sa radicalité et porter des revendications bien au-delà des simples réformes, qui ne sont que des pansements sur une plaie ouverte.

Il s'agit ici de revendiquer le pouvoir pour les « plénums », qui ont largement prouvé que les citoyens pouvaient s'auto-gouverner sans avoir besoin de dirigeants capitalistes.

  • L'expérience bosnienne l'a démontré dans sa forme la plus avancée. Une autre différence fondamentale entre les « plénums » et les soviets réside dans leur nature inclusive. Contrairement aux soviets, composés essentiellement d'ouvriers, de paysans et de soldats organisés sur des bases professionnelles et locales (soviets d'usine, soviets de garnison militaire, etc.), les « plénums » sont généralement ouverts à l'ensemble de la population : étudiants, travailleurs, chômeurs, retraités...
  • Les « plénums » se montrent aussi extrêmement critiques envers toute hiérarchie, refusant les leaders, partis et syndicats, alors que les soviets ont, dans l'histoire, souvent été récupérés par des partis dit « communistes ».
  • Si l'on parle en termes de délégation de pouvoir, les différences sont également marquées. Dans les soviets, la délégation est générale plus institutionnalisée : des délégués élus prennent des décisions pour un collectif et peuvent, en théorie, être révoqués.
  • Dans les « plénums », s'il existe des représentants, ils ont plutôt un rôle de porte-paroles ou de coordinateurs tournant régulièrement. Les décisions restent largement prises par l'assemblée elle-même, qui garde la capacité de révoquer ses représentants à tout moment.
Périclès fait électeur le misthos

 

🔴 Cependant, malgré ces qualités, cette organisation doit aussi relever des défis. Les « plénums » ne sont parfois pas représentatifs de l'ensemble de la population.

 

 ⁇ ️ Par exemple, en Bosnie-Herzégovine :

  • Certains « plénums » ont rassemblé plusieurs milliers de personnes en assemblée. Mais dans une ville comme Sarajevo, qui compte plusieurs centaines de milliers d'habitants, cela reste une minorité.
  • Dans sa forme la plus avancée, les « plénums » étaient censés représenter à la fois la ville et le canton. Or, pour les habitants des zones rurales éloignées des centres urbains, se rendre à un « plénums » demande du temps et peut représenter un coût financier.

 

Ce problème existait déjà dans la démocratie directe athénienne de la Grèce antique (entre 454 et 450 av. JC.), et une solution avait alors été trouvée : les citoyens participant aux assemblées et aux institutions démocratiques recevaient une indemnité appelée misthos (« salaire »)[12]. Cela permettait aux citoyens pauvres et aux habitants éloignés de prendre part à la vie politique sans sacrifier leur temps de travail. Sans cela, seuls les plus aisés auraient pu assister aux débats et voter.

 

🔴 Bien sûr, il ne s'agit pas de calquer le modèle athénien, qui avait lui aussi ses défauts, mais des pistes existent pour surmonter ces obstacles.

Par exemple, la division en « plénums » de quartier ou de village pourrait pallier à cette difficulté. Et surtout, nous sommes au XXIe siècle :

  • il est tout à fait possible de développer la cyberdémocratie et d'apporter des solutions aux nombreux problèmes soulevés.
  • Internet a déjà démontré son importance dans l'organisation des protestations et des « plénums » jusqu'à présent. On peut coordonner des « plénums » à différents niveaux sans avoir recours aux méthodes du passé.

Grâce aux technologies actuelles, il n'est plus nécessaire de transmettre les décisions par l'intermédiaire de délégués ou de courriers, comme cela se faisait en Russie en 1917 ou en Catalogne en 1936. L'ère numérique permet aujourd'hui d'organiser des référendums en ligne pour faciliter la prise de décision collective. Après tout, si le vote électronique est déjà utilisé dans le cadre de la démocratie représentative bourgeoise et que des transactions financières sécurisées ont lieu quotidiennement, il n’y a aucune raison pour que des consultations démocratiques directes ne puissent pas être mises en place via Internet.

 

 ⁇ ️ Le véritable enjeu n'est pas tant la disponibilité des outils numériques que leur utilisation pour renforcer la démocratie. L'un des principaux obstacles reste la résistance des élites capitalistes, qui contrôlent la plupart des infrastructures technologiques et ont tout intérêt à préserver le système actuel. Une démocratie directe devra inévitablement s'opposer à ces intérêts particuliers, ce qui entraînera des tensions et des blocages de leur part, comme l'histoire l'a déjà montré.

 

C'est pourquoi les « plénums » doivent être encore plus offensifs envers les dirigeants et revendiquer le pouvoir. Si les soviets sont allés plus loin, c'est précisément grâce à leur mot d'ordre radical : « Tout le pouvoir aux soviets ! » Ils ont ainsi ouvertement revendiqué la prise du pouvoir en lieu et place de l'État bourgeois. '. Ce n'est pas encore le cas des « plénums » aujourd'hui, du moins pas massivement, puisqu'on a pu voir à l'entrée du ministère de la Culture serbe une grande bande banderole proclamant : « Tout le pouvoir aux plénums », qui a été rapidement retirée, malgré ça les « plénums » restent principalement des espaces de contestation et de revendication, sans ambition affichée de prise de pouvoir. Ils se contentent d'une liste d'exigences, comme l'avaient fait les premiers soviets avant de réaliser qu'ils n'avaient pas besoin d'être dirigés et pouvaient exercer le pouvoir eux-mêmes, sans intermédiaires.

 

🔴 Peut-être qu'un jour, les « plénums » se lèveront et brandiront à leur tour le mot d'ordre « Tout le pouvoir aux plénums ! », tout en veillant à écarter tout leader, bureaucrate ou parti d'avant-garde qui chercheraient à instrumentaliser leur lutte. Sur ce point, les « plénums » semblent déjà vigilants : leur rejet des formes traditionnelles de leadership et de toute tentative de récupération par des partis ou syndicats en témoigne.

 

 ⁇ ️ Les « plénums » des Balkans rappellent que la démocratie directe n'est pas une utopie lointaine, mais une possibilité bien réelle pour cellules et deux qui refusent de se laisser gouverner. À travers leurs pratiques horizontales, ils esquissent les contours d'un futur post-capitaliste qui ne se contenterait pas de répéter les modèles du passé, mais chercherait à inventer de nouvelles formes d'auto-organisation adaptées à notre époque.

 

 ⁇ ️ Que leur mot d'ordre soit proclamé ou non, l'esprit des soviets du XXIe siècle souffle déjà dans les assemblées des Balkans. Je pourrais conclure par un « Tout le pouvoir aux plénums ! », mais ce n'est pas à moi de dicter la voie aux luttes qui se mènent ardemment aujourd'hui....

 

-- Je préfère donner le mot de la fin à Nemanja, qui lutte actuellement en Serbie : « La machine ne peut se mettre en branle que si tout le monde participe. Nous n'en sommes pas là encore, mais à un moment donné, comme une tempête, la colère refoulée pendant des années éclatera et changera fondamentalement la manière de fonctionner de notre société, ou sera instaurée une démocratie directe et décentralisée. »

 

Notes :

[1Serbie : révolte étudiante et mécanique des plénums

[2Avril 2009 : grève étudiante en Croatie

[2bis] Universités : vers un nouveau Printemps croate ?

[3] Brochure de la Cette " Blokadna kuharica ili kako je izgledala blokada Filozofskog fakulteta "... [La cuisinière enfermée ou bien comment s'est déroulé le flocus de la Faculté de Philosophie] est sortie la tête année que les événements. Sur la troupe sur internet. Le texte est des « Étudiants de philosophie de la faculté de Zagreb » publié par le « Centre d'études anarchistes », dans la collection Francisco Ferrer, à 1.000 exemplaires

[4] Le mouvement « Occupy Wall Street » débute le 17 septembre 2011 alors qu'environ 1 000 personnes manifestant dans les environs de Wall Street, le quartier de la bourse à New York. Une partie des manifestants érigent des installations de fortune dans le parc Zuccotti, « occupant » l'endroit dans une sorte de sit-in.

[5Autriche : Universités occupées, 50.000 étudiants dans la rue et le gouvernement forcé à faire ses premières concessions

[6La révolte de février 2014 presd renaissance le 3 février, à Tuzla

[7] Révolte sociale : le siège de la présidence incendiée à Sarajevo

[8Serbie : quatorze morts dans l'effort d'un droit de gare, journée de deuil samedi

[9Serbie : le drame de la gare de Novi Sad déclenche une bagarre dans le Parlement

[10Tragédie de Novi Sad : l'usage injustifié de la force contre des politiques et des citoyens est inacceptable

[11Serbie : délégation du premier ministre après trois mois de contestation

[12Signifiant, en grec ancien, « gage » ou « paie », le misthos est une indemnité versée au citoyen compensant sa perte de salaire lorsqu'il consacrait une journée de son travail à la vie politique. Cette aide permettait surtout aux citoyens les plus pauvres de participant activement à la vie politique de leur cité.

 

Pour en savoir plus :

- Bosnie-Herzégovine : Tout le pouvoir aux Plénums ?

- 2014-2024 : la mémoire des plénums de Bosnie-Herzégovine et la gauche des Balkans

- La gauche, une idée neuve dans les Balkans : Une tentative de démocratie directe

- Mars 2025 " Le peuple s’auto-organise : des assemblées partout en Serbie "

 

Balkans : tout le pouvoir aux « plénums » !
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6 mars 2025 4 06 /03 /mars /2025 20:02
« America First » et le grand chambardement des relations internationales

Selon Trump et ses acolytes, l’Amérique a dépensé d’énormes sommes d’argent pour protéger ses alliés, en particulier les pays riches parmi eux. Il est temps pour ceux-ci de rembourser la dette. La vérité historique, cependant, est très différente de cette représentation simpliste des choses.

 

 

Sources : Gilbert Achcar écrivain et universitaire du Liban | mis à jour le 07/03/2025

- La logique de « l’Amérique d’abord », adoptée par le mouvement néofasciste américain connu sous le nom de MAGA[0], peut sembler rationnelle à ceux qui ne sont pas familiers avec l’histoire économique des relations internationales.

Selon Trump et ses acolytes, l’Amérique a dépensé d’énormes sommes d’argent pour protéger ses alliés, en particulier les pays riches parmi eux, c’est-à-dire l’Occident géopolitique (l’Europe et le Japon en particulier) et les États pétroliers arabes du Golfe. Il est temps pour ceux-ci de rembourser la dette : tous ces pays doivent payer la facture en augmentant leurs investissements et leurs achats aux États-Unis, en particulier leurs achats d’armes (c’est ce que Trump entend par sa pression constante sur les Européens pour qu’ils augmentent leurs dépenses militaires). Tout cela s’inscrit naturellement dans la logique mercantile qui va de pair avec le fanatisme nationaliste qui caractérise l’idéologie néofasciste (voir « L’ère du néofascisme et ses particularités », 05/02/2025[1]).

 

🔴 De ce point de vue, les dépenses militaires étatsuniennes – qui ont effectivement dépassé non seulement celles des alliés de l’Amérique, mais ont presque égalé à un moment donné les dépenses militaires de tous les autres pays du monde réunis – ont été un sacrifice majeur au profit des autres.

  • Selon la même logique, l’important déficit de la balance commerciale étatsunienne n’est que le résultat de l’exploitation de la bonne volonté américaine par d’autres pays.
  • C’est pourquoi Trump veut le réduire en imposant des droits de douane à tous les pays qui exportent vers les États-Unis plus qu’ils n’en importent.
  • Ce faisant, il cherche également à augmenter les revenus de l’État fédéral afin de compenser sa réduction de ces mêmes revenus par des réductions d’impôts au profit des riches et des grandes entreprises.

 

 

- La vérité historique, cependant, est très différente de cette représentation simpliste des choses.

La Nouvelle Guerre froide. : États-Unis, Russie et Chine, du Kosovo à l'Ukraine Broché – Grand livre, 4 janvier 2024 de Gilbert Achcar

▶️ Tout d’abord : les dépenses militaires étatsuniennes après la Seconde Guerre mondiale ont été, et restent, un facteur majeur dans la dynamique spécifique de l’économie capitaliste américaine, qui s’est appuyée depuis lors sur une « économie de guerre permanente » (ceci est expliqué en détail dans mon livre La Nouvelle Guerre froide : les États-Unis, la Russie et la Chine, du Kosovo à l’Ukraine, 2023[2]). Les dépenses militaires ont joué et continuent de jouer un rôle majeur dans la régulation du cours de l’économie étatsunienne et dans le financement de la recherche et du développement technologiques (ce dernier rôle a été important dans la révolution des technologies de l’information et de la communication, un domaine qui a ramené les États-Unis à la pole position technologique après le déclin relatif de leurs industries traditionnelles).

 

▶️ Deuxièmement : la protection militaire que les États-Unis ont fournie à leurs alliés en Europe et au Japon, ainsi qu’aux États arabes du Golfe, fait partie d’une relation de type féodal, dans laquelle ces pays ont accordé de grands privilèges économiques au suzerain américain, en plus de leur participation au réseau militaire sous son commandement exclusif.

  • La vérité contredit complètement la description que font Trump et ses acolytes des relations des États-Unis avec leurs alliés comme étant basées sur leur exploitation par ces derniers.
  • La réalité est exactement le contraire, car Washington a imposé à ses alliés, en particulier aux pays riches parmi eux, un type de relations économiques à travers lequel il les a exploités, notamment en imposant son dollar comme monnaie internationale, de sorte que ces pays ont financé directement et indirectement le double déficit de la balance commerciale américaine et du budget fédéral. Les dollars du déficit commercial étatsunien, ainsi que diverses ressources en dollars de divers pays, sont continuellement revenus dans l’économie américaine, certains d’entre eux finançant directement le Trésor étatsunien.

 

- Ainsi, les États-Unis ont vécu, et continuent de vivre, bien au-dessus de leurs propres moyens.

Un fait qui est évident dans l’ampleur de leur déficit commercial, qui a approché les mille milliards de dollars en 2022[3], et la taille de leur énorme dette, qui dépasse 29 mille milliards de dollars, soit l’équivalent de 125 % de leur PIB[4].

 

Les États-Unis sont l’incarnation ultime d’un débiteur important et puissant qui vit aux dépens de riches créanciers dans une relation de domination du premier sur les seconds, au lieu de l’inverse.

 

Même envers l’Ukraine, les 125 milliards de dollars[5] que les États-Unis ont donnés à ce pays jusqu’à présent (loin des chiffres fantaisistes de Trump, quand il affirme que son pays a dépensé 500 milliards de dollars[6] à cet égard) sont équivalents à ce que l’Union européenne a fourni à elle seule[7] (or, le PIB de l’UE est inférieur d’environ 30 % à celui des États-Unis), sans compter ce que la Grande-Bretagne, le Canada et d’autres alliés traditionnels des États-Unis ont apporté. En fait, ce que les États-Unis ont dépensé pour financer l’effort de guerre ukrainien a servi leur politique visant à affaiblir la Russie en tant que rival impérial.

  • Washington est le principal responsable de la création des conditions qui ont facilité la transformation néofasciste en Russie et ont conduit à son invasion de son voisin.
  • Les États-Unis ont délibérément attisé l’hostilité envers la Russie et la Chine après la guerre froide afin de consolider la subordination de l’Europe et du Japon à leur hégémonie.

 

▶️ Cependant, lorsque Trump et ses acolytes reconnaissent la responsabilité des administrations américaines précédentes dans la création de la situation qui a conduit à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, ils ne le font pas par amour de la paix comme ils le prétendent hypocritement (leur position sur la Palestine est la meilleure preuve de leur hypocrisie), mais plutôt dans le contexte de leur transition de la considération de la Russie comme un État impérialiste rival – une approche que Washington a poursuivie de manière croissante depuis les années 1990 malgré l’effondrement de l’Union soviétique et le retour de la Russie dans le giron du système capitaliste mondial – à la considération de Poutine comme leur partenaire en néofascisme, prêts à coopérer avec lui pour renforcer le courant d’extrême droite en Europe et dans le monde, en plus de bénéficier du grand marché et des grandes ressources naturelles de la Russie. Alors qu’ils voient dans les gouvernements libéraux de l’Europe un adversaire idéologique et un concurrent économique à la fois, ils voient en la Russie un allié idéologique qui ne peut pas rivaliser avec eux sur le plan économique.

 

 

- En revanche, la Chine, aux yeux de Trump et de ses acolytes, est le plus grand adversaire politique et concurrent économique et technologique.

Joe Biden a suivi la même politique, établissant une continuité entre le premier et le second mandat de Trump en ce qui concerne l’hostilité à l’égard de la Chine. Alors que l’équipe Trump peut espérer séparer Moscou de Pékin, tout comme la Chine s’est séparée de l’Union soviétique dans les années 1970 et s’est alliée aux États-Unis, Poutine ne prendra pas le risque de s’engager dans cette voie tant qu’il ne sera pas sûr de la permanence des néofascistes américains à la tête de leur pays.

 

La grande question est maintenant de savoir si l’axe libéral européen est prêt à prendre le chemin de l’émancipation de la tutelle étatsunienne, ce qui nécessite de mettre fin à son alignement derrière Washington dans l’hostilité envers la Chine et de consolider ses relations de coopération avec elle.

  • Cela exige également que les pays européens soient prêts à travailler dans le cadre du droit international et à contribuer au renforcement du rôle des Nations unies et des autres institutions internationales, deux choses que Pékin n’a cessé de réclamer.

 

 

- L’intérêt économique de l’Europe est clair à cet égard, bien sûr, en particulier l’intérêt de la plus grande économie européenne, l’économie allemande, qui entretient des relations étroites avec la Chine.

L’ironie est que la Chine s’associe maintenant aux Européens pour défendre la liberté du commerce mondial contre l’approche mercantile adoptée par Trump et ses acolytes, et pour défendre les politiques environnementales contre leur rejet, accompagné du déni du changement climatique, qui caractérise diverses variétés de néofascistes. Les positions acerbes exprimées par le nouveau Premier ministre allemand, Friedrich Merz, en critiquant Washington et en appelant à l’indépendance de l’Europe vis-à-vis des États-Unis[8], si elles aboutissent à une véritable tentative de suivre cette voie, pourraient se traduire dans l’attitude de l’Union européenne à l’égard de la Chine, d’autant plus que la position française penche dans la même direction.

 

🔴 Tout cela confirme la mort du système libéral atlantique et l’entrée du monde dans une phase houleuse de rebattage des cartes, dont nous ne sommes encore qu’au début. Les élections au Congrès américain de l’année prochaine joueront un rôle majeur pour promouvoir ou freiner ce processus, selon qu’elles conduisent à renforcer ou à affaiblir la domination néofasciste sur les institutions américaines. Pendant ce temps, le mouvement néofasciste américain a commencé à imiter ses homologues dans divers pays en sapant progressivement la démocratie électorale et en mettant la main sur les institutions de l’État américain dans le but de perpétuer son contrôle sur elles.

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2 juin 2024 7 02 /06 /juin /2024 22:02
Ruuben Kaalep, membre de Sinine Äratus, branche de Ekre, et Marine Le Pen, du Rassemblement national, 14/05/2019 en Estonie. (Capture d'écran Facebook)

Ruuben Kaalep, membre de Sinine Äratus, branche de Ekre, et Marine Le Pen, du Rassemblement national, 14/05/2019 en Estonie. (Capture d'écran Facebook)

Le RN côtoie beaucoup de représentants de partis ouvertement islamophobes, homophobes et transphobes

 

 

Au-delà de la rupture avec son partenaire allemand l’AfD, le Rassemblement national est toujours allié avec divers partis aux positions ouvertement racistes et homophobes. Jordan Bardella assume ces infréquentables, arguant ne pas chercher « des clones » au Parlement européen.

 

 

Source : Youmni Kezzouf |

-  En pleine campagne des européennes, le Rassemblement national (RN) a officiellement rompu avec l’AfD (Alternative für Deutschland – Alternative pour l’Allemagne).

Le parti français d’extrême droite (le RN), qui s’était contenté de prendre ses distances au moment des révélations de Correctiv sur son partenaire d’outre-Rhin[1], a décidé de couper les ponts[2] après les propos tenus par Maximilian Krah, tête de liste de l’AfD pour le scrutin du 9 juin. Ce dernier a récemment estimé que les SS nazis n’étaient « pas automatiquement des criminels ». Une rupture qui fait suite à des mois de tensions entre les deux alliés.
 

Mais au sein du groupe Identité et démocratie (ID) au Parlement européen, ou dans le cadre des discussions sur de futures coalitions, le RN côtoie beaucoup d’autres représentants de partis ouvertement islamophobes, homophobes et transphobes.

  • Questionné sur le sujet, Jordan Bardella s’était contenté de balayer la question : « Ça s’appelle l’Union européenne. La devise, c’est “ Unis dans la diversité ”. Je ne cherche pas des clones, je cherche des alliés au sein du Parlement européen », avait-il assumé.

 

 

-  Tour d’horizon de ses infréquentables partenaires européens.

🔴 Tomio Okamura, SPD (République tchèque)

Tomio Okamura
  • Président et fondateur du SPD tchèque (Liberté et démocratie directe), l’homme d’affaires d’origine japonaise Tomio Okamura[3] est allié au RN au sein du groupe ID. Ouvertement islamophobe, il expliquait en 2017 avoir pour projet d’interdire l’islam – qu’il compare au nazisme – et suggérait deux ans plus tôt à ses partisans d’aller « promener des porcs près des mosquées » pour faire fuir les musulmans du pays.

 

  • Dans son programme actuel, il propose encore le retour à la couronne tchèque, à l’autosuffisance alimentaire, l’arrêt de l’aide financière européenne à l’Ukraine et un référendum pour sortir de l’UE. Il affirme également que « les immigrants ne doivent pas avoir droit à l’asile ». Le 23 mai, Tomio Okamura accueillait à Prague ses alliés du groupe ID pour un meeting de campagne. Parmi eux, Fabrice Leggeri, troisième de la liste du RN pour les élections européennes.

 

🔴 George Simion, AUR (Roumanie)

George Simion
  • Le 2 décembre 2023, à Florence (Italie), Jordan Bardella monte sur la scène du premier grand meeting de campagne organisé par le groupe ID et son allié italien de la Lega (la Ligue) Matteo Salvini[5]. Un peu plus tôt, à la tribune, George Simion[4], représentant du parti roumain AUR (Alliance pour l’unité des Roumains), défendait à la même tribune sa vision toute particulière de la campagne, qu’il entendait alors mener contre « la gauche qui veut supprimer les nations et la famille naturelle ».

 

  • « Ce que nous voyons en Europe, c’est l’enfer. Nous avons des migrants, la désindustrialisation, le déclin du christianisme, l’interdiction d’utiliser les mots “père” et “mère”. C’est un vrai enfer », avait-il lancé ce jour-là. Militant de la réunification avec la Moldavie, antivax et anti-avortement, George Simion écrit, dès la première page du manifeste de son parti, que « l’homme est la création de Dieu » et revendique son attachement à « la famille traditionnelle », en répétant que « Dieu a créé l’homme/père et la femme/mère, différents par nature ».

 

🔴 Roberto Vannacci, Ligue (Italie)

Roberto Vannacci
  • Le général italien Roberto Vannacci[6] a été choisi par Matteo Salvini, le plus proche allié de Marine Le Pen au niveau européen, pour mener la liste de son parti pour les élections européennes en Italie centrale. Le militaire s’est fait connaître en 2023 avec la publication d’un ouvrage xénophobe et homophobe, qui est devenu un succès de librairie en Italie et lui a valu une suspension de l’armée, ainsi que de nombreuses plaintes pour incitation à la haine.

 

  • Dans ce premier ouvrage intitulé Il mondo al contrario (non traduit, « le monde à l’envers »), il écrit par exemple : « Chers homosexuels, vous n’êtes pas normaux, faites-vous une raison. » Et s’en prend à une volleyeuse italienne noire, en affirmant qu’il est « clair que ses caractéristiques physiques ne représentent pas l’italianité ». Depuis le début de la campagne, il a déjà affirmé que Mussolini était « un homme d’État » et que les Italiens avaient nécessairement « la peau blanche ».

 

🔴 Kostadin Kostadinov, Vazrazhdane (Bulgarie)

  • Également présent aux côtés de Jordan Bardella[5] lors du meeting de Florence, Kostadin Kostadinov est président du parti bulgare Vazrazhdane (« Renaissance » en français, mais sans lien avec le mouvement d’Emmanuel Macron). Ouvertement prorusse, anti-LGBT et anti-rom, il a annoncé au mois de février avoir rejoint le groupe ID, quelques semaines après avoir participé à Moscou à un forum « pour la liberté des nations » organisé par des ministres de Vladimir Poutine.

 

  • Depuis l’exclusion de l’AfD du groupe pour les propos de sa tête de liste, Kostadin Kostadinov a proposé aux Allemands de créer un nouveau groupe « véritablement conservateur et souverainiste ». En décembre 2023, à Florence, il avait défendu sa vision organiciste de la nation, déclarant que « la population de souche européenne vieillit, diminue et se fait remplacer par des personnes africaines et asiatiques ». « Nos peuples ont leur propre système immunitaire et veulent lutter pour leur sauvegarde », avait-il précisé. Il y a quelques années, il qualifiait les Roms de « parasites » et de « vermines non humaines ».

 

🔴 Martin Helme, EKRE (Estonie)

Martin Helme
  • Président du parti estonien EKRE (Parti populaire conservateur d’Estonie), résolument antirusse, Martin Helme revendiquait en 2013 vouloir « une Estonie blanche ». « Notre politique migratoire doit avoir une règle simple : si vous êtes noir, repartez ! », avait-il affirmé à la télévision. Nationaliste, défenseur comme Jordan Bardella de la thèse complotiste et raciste du « grand remplacement », il dénonce régulièrement « le transgenrisme » et les « migrations de masse qui ont causé la mort et la destruction des sociétés ».

 

  • En 2019, membre de la coalition au pouvoir, il avait fêté son entrée au gouvernement en faisant un signe utilisé par les suprémacistes blancs lors de la cérémonie d’intronisation au Parlement estonien. Au congrès de son parti en 2023, il prévenait que tant qu’il dirigerait EKRE, celui-ci « ne [soutiendrait] pas l’homorévolution, la révolution verte, la vaccination forcée ou les sacrifices rituels, physiques ou mentaux, des enfants pour le culte de la transsexualité ».


 

🔴 Harald Vilimsky, FPÖ (Autriche)

Harald Vilimsky
  • Chef de file du FPÖ (Parti libéral autrichien) pour les élections européennes, Harald Vilimsky s’est opposé à l’exclusion de l’AfD du groupe ID. Résolument islamophobe, il s’inquiète du nombre de mosquées en Autriche et promet « une immigration zéro en provenance des pays islamiques ».

 

  • Dans son programme, il réclame « un pacte de remigration » et la fin de l’asile pour les personnes venant de l’extérieur de l’Europe. Lié entre 2016 et 2021 par un accord de coopération avec le parti de Vladimir Poutine, le FPÖ s’oppose aux sanctions contre la Russie et appelle dans son programme à stopper les aides militaires et financières à l’Ukraine.

 

🔴 Tom Van Grieken, Vlaams Belang (Belgique)

Tom Van Grieken
  • Nationaliste flamand, Tom Van Grieken tente depuis plusieurs années d’incarner une version plus « dédiabolisée » de son parti d’extrême droite. Ancien responsable d’un groupe étudiant ultranationaliste, il dirige un mouvement qui a fait sienne la thèse du « grand remplacement[7] » et s’oppose violemment à toute forme d’immigration.

 

  • En 2018, les partisans de Guy D’haeseleer, élu du Belang et candidat à une élection locale à Ninove, avaient célébré sa victoire avec des saluts nazis[8]. Un an plus tôt, le même postait sur Facebook une image d’enfants noirs qui se baignaient agrémentée d’un commentaire indiquant qu’il avait commandé « une mousse au chocolat ».

 

Notes :

[1] Des personnalités politiques du parti AfD, des néonazis et de riches entrepreneurs se sont rencontrés dans un hôtel près de Potsdam en novembre. Ils n’ont planifié rien de moins que l’expulsion de millions de personnes d’Allemagne.

[2] Le RN annonce rompre avec son allié allemand de l’AfD

[3Okamura est le premier extrémiste à devenir un acteur aussi important au Parlement tchèque. Il est ouvertement raciste et xénophobe

[4] Roumanie : George Simion ou le kitsch fasciste

[5En Italie, Jordan Bardella défend sa vision identitaire de l’Europe, aux côtés de ses alliés transphobes et complotistes

[6Elections européennes 2024 : Le général Roberto Vannacci, « la prise de guerre » de la Ligue

[7D'hier à aujourd'hui : la thèse du « grand remplacement »

[8] La liste "Forza Ninove", emmenée par le député flamand apparenté au Vlaams Belang Guy D'Haeseleer, a recueilli près de 40 % des voix. Les images de leur victoire, avec un salut nazi, sont partagées sur les réseaux sociaux.

 

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19 mai 2024 7 19 /05 /mai /2024 23:21
Macron veut-il renouer avec le passé ? 17/12/1918 : L’armée française débarque en Ukraine pour combattre la Révolution russe et accaparer les richesses !

Au début du 20e siècle, le gouvernement français nourrit le projet d'intervenir en Ukraine et en Crimée pour secourir les forces anti-bolcheviques et mettre en échec la propagation de la tempête révolutionnaire

 

 

En décembre 1918, le pouvoir soviétique paraît aux abois.
Depuis six mois, le soulèvement de la Légion tchèque, manœuvré par les gouvernements français et britannique, a coupé la Sibérie et l’Oural de Moscou.
25 et 26 mai 1918, la Légion tchèque se soulève et sépare la Sibérie de l’URSS
[1].
Avec l’aide monumentale de la Grande-Bretagne, de la France, des Etats Unis, du Japon, du Canada... les armées de l’amiral Koltchak marchent de la Volga vers le Kremlin.
24 décembre 1918 L’armée blanche sibérienne de Koltchak prend Perm et marche vers Moscou
En fait, les grands pays capitalistes sont intervenus en Russie dès la révolution pour tenter de mettre sur pied des armées contre-révolutionnaires, à terme démanteler le pays pour le plus grand profit de leurs grandes entreprises.

 

 

Source : Midi Insoumis, Populaire et Citoyen par Jacques Serieys |

- La France joue un rôle central en 1917/1918/1919 dans la constitution d’une alliance capitaliste internationale contre la Révolution russe
Pourquoi la France joue-t-elle un tel rôle ?

 

🔴 La principale raison me paraît politique : des dirigeants nationalistes et impérialistes

Les dirigeants politiques (Clémenceau, Poincaré...) sortent de la Première Guerre mondiale en pleine euphorie. Ils vivent la France comme la nation militairement la plus forte de la planète d’où une responsabilité de puissance impérialiste principale. Ce comportement des dirigeants politiques est évidemment renforcé par le poids moral des principaux chefs militaires dans la population. Or, Foch comme Castelnau ou Franchet d’Espérey sont aussi profondément imbus de tradition nationaliste militariste conservatrice que les corps d’officiers autrichiens, russes, serbes et allemands dont le rôle a été si important dans le déclenchement de la guerre.


🔴 La France capitaliste a investi des sommes importantes en Russie

Avant et pendant la Première Guerre mondiale, le gouvernement français a mobilisé des moyens de propagande très importants pour pousser les citoyens à souscrire des emprunts d’État russes. Onze milliards et demi de francs-or ont ainsi été récoltés[3]. Trois banques françaises détiennent 30 % du capital des onze principales banques de la capitale tsariste. Plus du tiers des investissements industriels privés étrangers en Russie sont français en 1917.
C’est surtout le grand patronat, d’une part français, d’autre britannique, qui pousse à profiter de la situation instable née de la révolution pour s’accaparer des richesses naturelles du pays.


🔴 La préoccupation impérialiste permanente de Clémenceau

En décembre 1917, au moment où le gouvernement Clémenceau se heurte à de nombreuses difficultés militaires (la révolution d’Octobre a libéré de nombreuses divisions allemandes du Front de l’Est), sociales (grandes grèves de 1917, mutineries), politiques (les socialistes ont rompu l’Union sacrée[4][4bis], financières (lancement d’un nouvel emprunt d’Etat)... son principal souci, c’est en fait de contre-attaquer en Russie même, balayer les bolchéviks, répartir des zones d’influence économique avec les autres Etats capitalistes.
 

Le 23 décembre 1917, lendemain du début de la Conférence de Brest Litovsk, des représentants de la France et de la Grande-Bretagne se réunissent à Paris et con­cluent une convention pour le démembrement de la Russie en zones d’influence :

  • l’Angleterre se réserve les provinces baltes et le Caucase (surtout son pétrole) ;
  • la France choisit l’Ukraine de la Biélorussie à la Bessarabie et au Donetz (fer, charbon, bassin sidérurgique...) ainsi que les rives de la Mer Noire dont Odessa et la Crimée.


🔴 Des dirigeants militaires conservateurs, va-t-en guerre contre le communisme

Foch, général en chef des armées alliées en 1918, pèse lourd dans les décisions prises par la France sur la fin de la guerre et dans les années suivantes. Or, il voit le combat contre le communisme comme une guerre classique avec ses fronts bien délimités. En mars 1919, convoqué à une réunion de chefs d’état pour donner son avis sur la question, il déclare " Le péril bolchéviste s’étend vers le Sud et vers la Hongrie, il faut l’arrêter à Odessa et à Lemberg[5]." 

 

 

- Avant même la fin de la Première Guerre Mondiale, le gouvernement français de Clémenceau se préoccupe plus de combattre les aspirations des peuples et préparer une intervention militaire directe en URSS que de finir rapidement la guerre contre l’Allemagne

En juin 1918, le général Louis Franchet d’Espérey, excellent d’un point de vue militaire, prend le commandement des armées alliées d’Orient à Salonique. En septembre, il dispose de forces imposantes pour passer à l’offensive : 8 divisions françaises (comprenant 18% de Sénégalais et Maghrébins), 6 divisions Serbes, 4 britanniques, 9 grecques et une italienne. En un mois, il bouscule les lignes bulgares et allemandes, pénètre largement en Serbie, entre dans Belgrade, obtient la capitulation de la Bulgarie, fait prisonniers 90000 Bulgares ainsi que l’armée allemande de Von Steuben[6].

 

L’armistice signé à Salonique le 29 septembre 1918 pour tout le Front d’Orient, libère les armées de Franchet d’Espérey qui pourraient pénétrer en Europe centrale sur les arrières allemands. D’ailleurs, le Haut commandement allemand réfléchit alors à un armistice sur tous les fronts.

  • Mais le gouvernement français préfère utiliser ces troupes françaises pour aider à la construction d’un Etat roumain militarisé au service de la France, préparer la naissance de la Pologne et la Tchécoslovaquie sur les mêmes bases, surveiller les peuples hongrois et bulgares, soutenir les armées blanches en Russie.
  • Ainsi, en octobre 1918, le général Franchet d’Esperey, commandant l’armée française des Balkans, reçoit l’ordre de stopper sa marche vers l’Europe centrale, de rassembler les troupes en Roumanie pour intervenir en Russie « afin d’y poursuivre la lutte contre les puissances centrales, mais encore pour réaliser l’encerclement économique du bolchevisme et en provoquer la chute ».

 

 

- Dès la Première Guerre mondiale terminée, des troupes françaises d’Orient sont maintenues sous les drapeaux pour attaquer l’URSS

L’armistice du 11 novembre 1918 fait passer les troupes allemandes d’Ukraine sous commandement français pour affronter les rouges. Le gouvernement français est alors décidé à apporter le maximum de soutien au général Krasnov dans la zone du Don et au général Dénikine, commandant l’armée blanche du Sud.

  • Le 13 novembre 1918, une flotte alliée mouille devant Constantinople, prête à intervenir en URSS[7]. Elle comprend la deuxième escadre française, commandée par l’amiral Amet, et deux divisions de forces terrestres, avec le général Franchet d’Espérey.
  • Le 20 novembre 1918, des Russes blancs réunis à Jassy (en Roumanie, alliée de la France, où Berthelot et Franchet d’Espérey jouent un rôle très important) demandent officiellement à l’Entente (France, Grande Bretagne, Serbie...) l’envoi d’un corps expéditionnaire pour renverser les soviets[8].
  • Le lendemain, 21 novembre, Clémenceau brosse pour Franchet d’Espérey « un plan général pour l’isolement économique du bolchevisme en Russie en vue de provoquer sa chute ». Il s’agit d’occuper les ports et d’établir un « cordon sanitaire » : étouffer l’économie soviétique et isoler l’Europe de la contagion des idées révolutionnaires. L’importance donnée à l’occupation du Donbass montre bien que les objectifs économiques impérialistes priment[8].
  • Bientôt, la flotte "alliée" composée surtout de forces françaises débarque à Sébastopol (Crimée, 13 décembre) puis dans le port d’Odessa comme en pays conquis. En janvier 1919, viendront le tour des ports de Nikolaïeff et de Kherson.

Les unités françaises et alliées (Grecs, Polonais, Roumains...) opèrent conjointement avec les bandes séparatistes de Petlioura et de Gregoriev, avec les armées blanches de Krasnov dans la région du Don, de Denikine au Kouban.

  • Le 17 décembre 1918, le général français Borius débarque à Odessa avec la 156ème division. Trois compagnies de fusiliers marins aidées de "volontaires" russes et polonais prennent le contrôle du port ; 4000 Allemands gardent la gare et ses environs.
  • Le 25 décembre, la Crimée commence à être investie par des troupes françaises (débarquement du 175ème Régiment d’infanterie à Sébastopol).
  • Fin décembre et début janvier de nouveaux renforts français arrivent, par exemple le 8 janvier 1919, le 4ème Régiment de Chasseurs d’Afrique (unité d’élite qui a joué un rôle important dans l’offensive de septembre) et une compagnie de mitrailleuses.

Toutes ces troupes sont placées sous le commandement du général d’Anselme qui a commandé en 1918 le 1er Groupement de Divisions de l’Armée d’Orient.

  • Fin janvier 1919, l’armée française a la haute main des bouches du Danube aux bouches du Dniepr (Kherson) en passant par celles du Boug ( Nicolaïeff) et du Dniestr (Tiraspol).

 

🔴 Les capitaux français sont majoritaires dans la société contrôlant l’arsenal de Nicolaieff où se construisent des destroyers, des croiseurs légers, des remorqueurs, des sous-marins. Deux régiments grecs viennent compléter le dispositif français dans cette ville.

 

🔴 La France joue alors un rôle central dans l’accompagnement des armées blanches pour renverser l’URSS. D’Anselme maîtrise un puissant émetteur radio dans le Sud alors qu’en Sibérie ce sont également des Français qui manœuvrent la station d’Omsk, capitale de l’Etat fascisant de Koltchak. Des techniciens français sont attendus pour faire entrer les deux en relation.

 

 

- Comprendre le capitalisme des années 1900 à 1925 : un monde sans aucun sentiment

La principale caractéristique du grand patronat qui a poussé aux guerres coloniales puis à la Première Guerre mondiale, c’est l’absence totale de respect de la vie humaine.

  • Le travailleur colonial doit rapporter le maximum de profit jusqu’à sa mort.
    • Du Congo belge à l’assassinat de Lumumba le 17 janvier 1961, un grand pays détruit par le colonialisme[9] ;
    • Colonisation française du Niger et du Tchad par la colonne Voulet Chanoine Joalland : un massacre de masse, un crime contre l’humanité (sur la base des archives militaires)[10][10bis] ;
    • 11 août 1904 : le peuple herero de Namibie est écrasé par les troupes coloniales allemandes[11].

 

  • Le soldat doit accepter de se faire tuer pour sa nation (en fait, les profiteurs de son pays) avec courage, patriotisme et abnégation.
    • Ainsi, la majorité des militaires français de l’armée d’Orient sont des réservistes âgés de 30 à 50 ans. Mon grand-père, né en 1877, en a fait partie. Un nombre significatif de soldats de l’armée française d’Orient relève de la classe 1906 qui a fait son service puis a été rappelée pour toute la guerre.
    • Des équipages de la marine n’ont pas vu un port français depuis plusieurs années.
    • Les fantassins ont subi les pires conditions de vie et les pires boucheries. Et maintenant que la guerre contre l’Allemagne est terminée, voilà qu’on leur demande d’aller combattre en Russie.

 

  • Le civil russe suspecté de sympathie socialiste ou le soldat de l’armée rouge sont des fusillés en sursis
    • Les soldats français assistent à de fréquentes exécutions sommaires de bolcheviks présumés. A Kherson par exemple, un millier d’Ukrainiens soupçonnés d’attitude hostile aux armées blanches sont enfermés dans un hangar que l’artillerie française pilonne : le feu prend, aucun survivant. L’ordre fasciste règne dans les zones occupées par l’armée de Clémenceau et de Franchet d’Espérey.

 

  • De plus, les conditions de vie de l’armée française d’intervention en URSS sont catastrophiques
    • « Les services de l’arrière n’existent pas (...), le service postal est si mal assuré que les hommes restent plusieurs semaines sans aucune correspondance avec leurs familles (...), le service du ravitaillement est tel qu’en certains points des soldats français sont en partie vêtus d’uniformes hongrois (...) » (extraits du discours du député Kerguèzec revenant d’une mission d’enquête sur l’armée d’Orient).
    • Dans la marine, la discipline est insupportable, les brimades, corvées et mises aux fers incessantes.

 

 

- 6 février 1919 à Tiraspol éclate la première mutinerie française de la Mer Noire[12]

Char Renault & soldats français Odessa 1918 1919

Tiraspol est une ville sur la rive gauche du Dniestr, intégrée dans la Russie fin 19ème siècle, début 20ème au sein du " gouvernement de Kherson " (Sud de l’Ukraine).

  • En 1918, l’armée française fait rapidement de Tiraspol un point d’appui essentiel de son dispositif. Par exemple, les chars d’assaut Renault livrés aux troupes françaises d’Odessa le seront par des chalands venant de cette ville située près de l’embouchure du Dniestr sur la Mer noire.
  • Début février 1918, une petite unité russe favorable à la révolution arrive devant Tiraspol en descendant la rive du fleuve. Elle tire quelques coups de canon et met en batterie des mitrailleuses.

 

Le général Berthelot, présent en Roumanie où il a joué un rôle militaire très important de 1916 à 1918, décide d’envoyer des forces conséquentes pour ne pas prendre de risque : un train blindé, des chars d’assaut, des unités françaises de zouaves, des Tchèques, des Polonais... En fait, la défense de Tiraspol est essentiellement assurée par le 58ème Régiment français d’infanterie et les soldats de cette grosse unité n’ont guère envie de combattre les Russes. Il a suffi le 4 février, d’un petit mouvement de repli pour que des militaires des 6ème, puis 5ème et 7ème compagnies abandonnent leur poste.

 

Après une période de repos, de reprise en mains et d’arrivée de renforts, le colonel Lejay veut lancer l’attaque pour reprendre Tiraspol, en commençant par une préparation d’artillerie. Sont également présents, côté français une unité du 501ème Régiment d’Artillerie d’Assaut et un bataillon du Régiment de Marche d’Afrique... Mais les artilleurs concernés refusent de faire avancer leurs engins, encore plus de tirer.

 

Les officiers enferment ces artilleurs dans un petit périmètre afin d’éviter la contagion aux autres troupes. Arrivent alors les pioupious du 2ème bataillon qui prennent fait et cause pour les mutins ; leur commandant " réussit à rétablir une situation périlleuse " d’après le rapport.... Quelques heures plus tard, lorsque les officiers espèrent enfin relancer l’offensive, les mutins refusent à nouveau de marcher. L’autre bataillon les rejoint... Lorsque la dernière "unité fidèle" décide de rallier la sédition, l’enthousiasme est tel parmi les soldats que les officiers n’ont plus aucune autorité.

 

🔴 Les arguments des mutins sont exposés très clairement dans le rapport qui suivra " La guerre est finie. L’armistice est signé. Nous nous sommes battus pendant quatre ans. Nous ne sommes pas en guerre contre les bolcheviques... "

 

Clémenceau réclame une sévérité extrême contre les mutins. Par contre les généraux présents dont D’Anselme et Franchet d’Espérey préfèrent une certaine souplesse " à une répression aveugle dangereuse à court terme ".

 

En fait, le 9 février, le régiment est à nouveau en ordre de marche. " Les recherches faites n’ont permis de découvrir aucun meneur " note le colonel Lejay en conclusion.

 

- 9 mars 1919, L’armée française évacue Kherson puis Nicolaieff
Après les évènements de Tiraspol, les troupes françaises déployées sur les rives de la Mer noire essaient de " tenir " la vaste zone qui leur est attribuée. Les accrochages se multiplient avec les unités " rouges ".

 

Dans " 1919 : les illusions de la gloire" (Editeur Robert Laffont, 1979 [13]), Claude Paillat (pourtant loin d’être pro-bolchévique) développe l’analyse suivante à partir des documents d’époque " A l’évidence, la population, bon gré mal gré, faisait cause commune avec les révolutionnaires. Progressivement aussi, l’Armée rouge, en s’améliorant, faisait front. Son avance dans le Don et le Donetz remettait en cause les importants succès obtenus dans le Caucase par les Blancs. La propagande communiste parvenait à créer des failles chez les séparatistes ukrainiens, isolés, rongés par des "soviets d’ouvriers" et des "Comités de soldats". Notre situation, déjà précaire, s’effritait. Le risque de mutinerie augmente en effet dans les rangs des régiments Français ; des zouaves du 1er Régiment de Marche d’Afrique quittent leur unité et justifient leur attitude "Les officiers nous bourrent le crâne. On nous a trompés..."

 

  • Le 8 mars 1919, des détachements de l’armée rouge approchent de la ville de Kherson qui représente l’avant-garde française vers l’Est en direction des armées blanches.
  • Deux compagnies du 176e régiment d’infanterie s’opposent à un ordre d’attaque. " Aucun homme ne bougea... ; tous opposaient non seulement une force d’inertie que l’on sentait concertée d’avance mais encore un refus catégorique se traduisant par des murmures et des paroles d’indiscipline. " Face à un officier qui tente de les mener de façon rude les traitant de " lâches ", l’excitation monte, mais les soldats restent aussi fermes dans leur refus de combattre.
  • Le lendemain, 9 mars, l’armée française évacue le port et la ville de Kherson.
  • Bientôt, Nicolaieff est également abandonné malgré les capitaux français déjà investis.
  • Le 11 mars 1919, Franchet d’Espérey envoie un télégramme (7107/3) à Clémenceau président du Conseil " Nous n’avons plus comme adversaires actuels en Russie méridionale des bandes bolchéviques mais une armée bien commandée, encadrée, parfaitement disciplinée, rétablissant l’ordre à la place du désordre. Autour de nous, et, derrière nous, hostilité presque unanime de la population, dissolue et xénophobe, qui corrompt nos soldats et leur tire dans le dos dès que l’armée bolchevique apparaît. "
  • Le lendemain 12 mars, le général Berthelot envoie un télégramme à Clémenceau et Franchet d’Espérey de même teneur. 

 

Bateaux français Odessa 1919

 

- L’évacuation d’Odessa

Depuis le début de l’intervention militaire française en URSS, la ville d’Odessa a été mise en avant comme bastion mondial face au communisme.

 

Aussi, l’ordre qui règne dans cette grande ville occupée par l’armée de la république française relève bien plus de la dictature militaire fascisante que des du respect des droits de l’homme.

  • 1er mars 1919, Jeanne Labourbe, institutrice communiste, est fusillée à Odessa[14] ;
  • L’ordre français règne à Odessa :
    • L’armée française essaie de miser sur une répression dure pour terroriser la population, ainsi le bombardement du village autour de l’usine traitant les eaux pour Odessa ;
    • Ainsi, encore à Odessa, l’exécution de deux civils à la mitrailleuse puis la pendaison de leurs corps aux grilles de la gare.
  • Cela ne faisait que monter un peu plus la population contre les soldats.

 

🔴  Pourtant, le 14 mars, l’armée française décrète l’état de siège.

  • Qu’est-ce que cela signifie ?
    • Art 7. - Aussitôt l’état de siège déclaré, les pouvoirs dont l’autorité civile était revêtue pour le maintien de l’ordre et la police passent tout entiers à l’autorité militaire ;
    • Art. 9. - L’autorité militaire a le droit :
      • 1° - de faire des perquisitions, de jour et de nuit, dans le domicile des citoyens ;
      • 2° - d’éloigner les repris de justice et les individus qui n’ont pas leur domicile dans les lieux soumis à l’état de siège ;
      • 3° - d’ordonner la remise des armes et munitions, et de procéder à leur recherche et à leur enlèvement ;
      • 4° - d’interdire les publications et les réunions qu’elle juge de nature à exciter ou à entretenir le désordre.

 

🔴  La poursuite des mutineries parmi les militaires français
- Le 21 mars, la 1ère compagnie du 40ème Régiment d’infanterie se met en grève sur le tas et " dépose ses équipements ".

- Le même jour, la compagnie du 19ème Régiment d’Artillerie de Campagne fait de même. Devant la justice militaire, les mutins affirment n’avoir aucune couleur politique mais assument leur acte " On se moque des conseils de guerre. On nous sacrifie pour des milliards. La guerre n’est pas déclarée contre les bolcheviques. Je n’ai pas de fonds russes. En France, on s’amuse ; ici on se fait tuer..."

- Le 22 mars, le développement du mouvement d’humeur atteint une compagnie du 15ème Régiment du Génie. Un gradé cherche à user de son autorité pour mater les soldats. L’Internationale est alors reprise en chœur par ces troupes qui devaient servir de bastion face au communisme international.

 

🔴 Le 29 mars, Clémenceau se trouve obligé d’ordonner l’évacuation d’Odessa et le repli sur la "ligne du Dniestr"
Le retrait se fait dans des conditions surprenantes.

  • L’attitude mutine de plusieurs unités se maintient, par exemple pour plusieurs groupes du 19e régiment d’artillerie à Odessa le 5 avril.
  • Des sapeurs du 7e génie fraternisent et laissent aux bolcheviks du matériel avant de quitter la ville.

 

 

- 20 avril 1919 : Les mutins de la Mer Noire hissent le drapeau rouge sur les vaisseaux de guerre français (le France, le Jean Bart, La Justice)

Du 10 au 30 avril 1919, se déroulent les grandes mutineries de marins.

  • En Roumanie, à Galatz, le chef mécanicien André Marty projette de s’emparer du torpilleur Protêt, d’enfermer les officiers et de rallier les bolcheviks à Sébastopol. Le complot découvert, il est arrêté le 16 avril et sera condamné à vingt ans de travaux forcés.
  • Le 17 avril, sur le croiseur France, des protestations éclatent ; quatre matelots sont enfermés, mais, deux jours plus tard, l’équipage révolté les libère, élit des délégués, exige le retour à Toulon.
  • Le 20, le drapeau rouge est hissé sur le France, le Jean-Bart, La Justice au chant de L’Internationale. L’après-midi, des marins qui manifestent dans Sébastopol avec la population essuient le feu de soldats grecs. Le calme revient les jours suivants, les délégués, d’abord seuls obéis, voient leur rôle décroître. Mais le Jean-Bart ainsi que le France regagnent Toulon et Bizerte.
  • Une autre mutinerie a lieu le 25 sur le Waldeck-Rousseau devant Odessa. Un comité de marins décide la révolte, exige la délivrance de Marty et le retour en France. Dans les jours suivants, le bâtiment rentre en France ainsi d’ailleurs que tous les navires de la mer Noire. Mais l’effervescence continue en mai et en juin à Toulon, à Brest, à Bizerte, en Grèce (sur le Guichen avec Charles Tillon) et même à Vladivostok...

 

🔴 Cette crise, qui surprit le commandement, a plusieurs causes.

  • Des raisons matérielles : hiver pénible, courrier désorganisé, corvées incessantes dans les ports paralysés par les grèves des dockers russes.
  • Les équipages sont démoralisés par une guerre longue, et l’armistice, pour eux, c’est la démobilisation : « Nous ne sommes pas en guerre contre les Russes ; nous voulons rentrer en France », répètent-ils. Marty nous dit que les marins lisaient les journaux pacifistes comme La Vague et Le Journal du peuple ainsi que les discours des députés socialistes contre l’intervention.
  • Des tracts et journaux clandestins sont édités par les bolcheviks, en particulier par le groupe communiste français animé à Odessa par Jeanne Labourbe, qui sera fusillée le 1er mars 1919. Le ministre de la Marine affirme d’ailleurs, le 17 juin, aux députés que la cause des troubles est la propagande révolutionnaire.

 

Ces mutineries n’expliquent qu’en partie l’évacuation ; en fait, il n’y avait qu’une division à Odessa et les Alliés comptaient surtout sur les Blancs : ils furent très déçus par Denikine. Ces mouvements sont importants dans la mesure où ils s’intègrent dans une crise politique et sociale mondiale qui dépasse la simple histoire militaire.

 

Notes :

[1] 25 et 26 mai 1918, la Légion tchèque se soulève et sépare la Sibérie de l’URSS

[2] 24 décembre 1918 L’armée blanche sibérienne de Koltchak prend Perm et marche vers Moscou

[3] En 1914, la valeur globale des titres d'emprunt de l'Etat russe détenus par 1 500 000 porteurs français s'élevait à 11,5 milliards de francs-or.

[4] En septembre, le refus des socialistes de soutenir le gouvernement formé par Paul Painlevé met fin à l'Union sacrée.

[4bis] Fin de l'Union sacrée (1914)

[5Paul Mantoux, Délibérations du Conseil des Quatre, Tome 1, CNRS

[6] La grande guerre vécue, racontée, illustrée par les Combattants, en 2 tomes  Aristide Quillet, 1922

[7] Le 13 novembre 1918, une flotte alliée composée de 54 navires anglais, français et italiens, et d’un cuirassé grec, entre solennellement dans le Bosphore et jette l’ancre devant le palais de Dolmabahçe, où réside le sultan Mehmet VI. Débute dès lors l’occupation alliée de Constantinople (1918-1923.

[8] 20 novembre 1918, des Russes blancs réunis à Jassy demandent l’envoi d’un corps expéditionnaire pour renverser les soviets

[9Du Congo belge à l’assassinat de Lumumba

[10Colonisation française du Niger et du Tchad par la colonne Voulet Chanoine Joalland : un crime contre l’humanité

[10bisLa mission Voulet-Chanoine en 1899 : Cette expédition, parfois appelée « la colonne infernale », se signale par des actes d’une telle barbarie que l’opinion publique en métropole finit par s’en émouvoir…

[111904 Le génocide du peuple herero (Namibie)

[12] Les mutineries de la mer Noire sont une série de révoltes survenues dans les troupes terrestres et les bâtiments français de l’escadre de la mer Noire en 1919.

[13] 1919 : les illusions de la gloire – Claude PAILLAT

[141er mars 1919, Jeanne Labourbe, institutrice communiste, est fusillée à Odessa

 

Pour en savoir plus :

Guerre en Ukraine : Macron évoque à nouveau l’envoi de troupes « si les Russes percent les lignes de front »

 - Les mutineries de la mer Noire : 1919 et les origines du Parti communiste français

 

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19 mars 2024 2 19 /03 /mars /2024 22:15
Maintenant le peuple ! Alliance européenne de partis rouges verts au sein du PGE
Maintenant le peuple ! Alliance européenne de partis rouges verts au sein du PGE

Face à la montée de l’extrême-droite partout en Europe, il est temps d’organiser la résistance, et de construire un mouvement d’espoir[8] !

 

 

Tête de liste en France, Manon Aubry est impliquée dans l’animation d’une alliance européenne baptisée « Maintenant le peuple ![3] ». Celle-ci contourne le PGE, le parti européen historique de la gauche radicale, marqué par l’influence communiste. Mais la portée de cette coopération est encore très faible.

 

 

Sources : Fabien Escalona | mis à our le 19/09/2024

- Sur la scène politique française, l’identité de la liste[1][2de La France insoumise (LFI), menée par l’eurodéputée sortante Manon Aubry, est assez claire.

  • D’une part, sa composition est censée témoigner d’une « union populaire » à laquelle les autres partis de gauche se seraient refusés.
  • D’autre part, le message politique est centré autour de l’ambition d’apparaître comme le « camp de la paix » et d’œuvrer pour une rupture avec les dogmes austéritaire et libre-échangiste de l’Union européenne (UE).

 

🔴  En parallèle, sur la scène européenne, Manon Aubry fait campagne au nom d’une alliance largement inconnue du grand public : « Maintenant le peuple ![3] ».

L’originalité de ce regroupement est d’impliquer des formations importantes d’une famille politique, la gauche radicale, qui dispose déjà d’un parti européen depuis 2004. De la même façon que les sociaux-démocrates, les Verts ou encore les libéraux disposent du leur, le Parti de la gauche européenne (PGE) est censé rassembler les forces engagées pour une rupture avec le modèle socioéconomique dominant.

 

Depuis le 24 février dernier, le PGE dispose d’ailleurs d’un manifeste européen pour le scrutin du 9 juin, et d’un chef de file en la personne de Walter Baier, déjà élu président de l’europarti en décembre 2022. Dans le langage de l’UE, ce communiste autrichien est le Spitzenkandidat du PGE, c’est-à-dire celui qui serait envoyé à la présidence de la Commission européenne en cas – plus qu’improbable – de victoire.

 

C’est pourtant en dehors de ce cadre institutionnel que Manon Aubry et ses alliés ont adopté une déclaration commune à Paris, le 17 novembre 2023. Signée par les membres officiels de « Maintenant le peuple ! » – à savoir LFI, la Liste de l’unité (Danemark), Podemos (Espagne), l’Alliance de gauche (Finlande), le Bloc de gauche (Bloco, Portugal) et le Parti de gauche (Suède), elle vante « un projet de rupture » qui soit « la voix des travailleurs, de tous les laissés-pour-compte, et de ceux qui se battent pour notre planète ».

 

Un sommet élargi à d’autres partis a ensuite été organisé à Copenhague, le 16 février dernier. Une série d’engagements en est ressortie, de la taxation des superprofits à la fin des « règles budgétaires absurdes », en passant par un « commerce équitable ». Sur la quinzaine de formations présentes, une dizaine a signé le texte, dont les six membres officiels de « Maintenant la gauche ! », mais aussi des partis basque (EH Bildu), italien (Sinistra italiana), luxembourgeois (Déi Lénk) et même allemand (Die Linke).

 

🔴  « Nous voulons créer un cadre de coopération flexible, pour donner à voir une alternative franche au système actuel de cogestion de l’UE, explique Manon Aubry à Mediapart. Plus largement, notre objectif est de définir un modèle de gauche pour le XXIe siècle. Il s’agit de proposer une offre politique qui traite ensemble les questions sociales et climatiques, pour mieux acter un changement radical du modèle économique. »

 

L’eurodéputée nie toute idée de compétition avec le PGE, dont certains membres de « Maintenant la gauche ! » font pleinement partie, là où LFI n’y est qu’observatrice. Mais elle (Manon Aubry) compte bien attirer définitivement des formations susceptibles d’envoyer des élus au Parlement européen le 9 juin prochain, comme des partis régionaux espagnols, ou encore Razem en Pologne. L’initiative révèle en creux la faiblesse historique des tentatives de coopération entre partis de gauche radicale. Elle reste d’ailleurs elle-même très modeste, suscitant le scepticisme d’observateurs extérieurs.

 

 

- Un réseau partisan émancipé de la tradition communiste
Pour comprendre comment s’est développé « Maintenant le peuple ! », qui apparaît comme un objet mi-complémentaire, mi-concurrent du plus institutionnel PGE, il faut en retracer la genèse.

  • Tout commence à partir de 2015, à la suite de la capitulation du gouvernement mené par Syriza[4], le parti de gauche radicale grec, face à ses créditeurs européens. Entre janvier 2016 et mars 2017 se tiennent une demi-douzaine de « sommets du plan B[5] » pour rompre avec l’Europe austéritaire, dans lesquels sont discutées des hypothèses de désobéissance aux traités, voire de sortie de la zone euro.
  • La démarche ne va pas plus loin que ces rencontres éphémères. Mais elle est la matrice du lancement, en avril 2018 à Lisbonne, de « Maintenant le peuple ! ». Le chercheur Vladimir Bortun, auteur d’un ouvrage non traduit sur la décennie perdue par la gauche en matière de coopération transnationale, parle même d’un « plan B 2.0 ». Les fondateurs initiaux – LFI, les Espagnols de Podemos et les Portugais du Bloco –, sont rapidement rejoints par des partis nordiques, historiquement méfiants envers l’intégration européenne.

 

Ce n’est cependant pas véritablement la radicalité de la critique de l’UE qui constitue la colonne vertébrale pérenne de l’alliance. Depuis 2018, les notions de sortie de l’euro ou de désobéissance des traités ont en effet été édulcorées, voire se sont évaporées. À vrai dire, certains membres comme Podemos ne se les sont jamais véritablement appropriées. En revanche, ces partis correspondent à la composante la plus neuve de la gauche radicale, qui adhère à un libéralisme culturel prononcé et à la remise en cause du productivisme, en plus du combat contre le néolibéralisme.

 

« C’est une alliance qui rassemble des partis ouverts sur les questions écolos et féministes, convaincus d’une ligne discursive centrée sur la volonté populaire et la justice climatique, analyse le chercheur en science politique Vincent Dain. La création de “ Maintenant le peuple ! ” témoigne d’une volonté de LFI et de Podemos, à l’époque, de prendre davantage la main par rapport aux partis de tradition communiste, qui étaient forts dans les organisations existantes, comme le PGE. »

 

 

- Le PGE […] est une machine institutionnelle difficilement maniable et peu dynamique.
De fait, l’importance de se démarquer de l’identité et de l’influence communiste concernait les trois initiateurs de l’alliance. En Espagne et au Portugal, Podemos et le Bloco se sont construits en rivalité avec des partis communistes anciens. En France, entre fin 2015 et début 2018, Jean-Luc Mélenchon s’est émancipé du Front de gauche[6], dans lequel il cohabitait difficilement avec le Parti communiste (PCF).

 

« Les communistes ont traditionnellement un poids assez important dans le PGE, parce qu’ils en ont été les fondateurs, rappelle l’eurodéputé Emmanuel Maurel, élu sur la liste LFI aux européennes de 2019 et colistier du PCF pour le scrutin du mois de juin. Pierre Laurent en a longtemps été le président [de 2010 à 2016 – ndlr]. Or les communistes sont vécus par Mélenchon et d’autres comme une force empêchante. »


Entre les communistes et des cultures davantage « rouges-vertes », les points de divergence ne manquent pas, par exemple autour de la place à accorder au nucléaire et au gaz dans l’évolution de la consommation énergétique. Mais l’envie de s’émanciper du fonctionnement du PGE tient aussi à ce qu’il est une machine institutionnelle difficilement maniable et peu dynamique.

Certes, le PGE compte désormais près d’une trentaine de partis membres. Mais cela n’empêche pas que des organisations significatives manquent à l’appel, tandis que l’hétérogénéité existante se révèle déjà pesante en termes de coordination. Le processus interne de prise de décision, fondé sur le consensus, n’arrange rien en maximisant les risques de lenteur et de choix correspondant au plus petit dénominateur commun. Si bien qu’aujourd’hui encore, le PGE est un des partis transnationaux les plus faibles de l’UE.

 

 

- À la « gauche de la gauche » européenne, une coopération minimale
Une des traductions de cette faiblesse réside dans l’absence d’articulation entre le PGE et le Groupe de la Gauche au Parlement européen (ex-GUE/NGL), dont Manon Aubry est la coprésidente avec l’Allemand Martin Schirdewan. Ce groupe, au demeurant, est encore plus éclectique que le PGE, avec un grand écart entre d’un côté des élus communistes orthodoxes accrochés à une vulgate hors d’âge (comme les PC portugais ou tchèque), et de l’autre des élus plus proches de la famille écolo (comme celui du parti animaliste néerlandais).

 

🔴 « On a pu se réunir sur l’essentiel : la lutte contre le libre-échange et l’austérité », défend Manon Aubry, qui estime aussi que « sous ce mandat, notre identité politique a été plus forte car on a donné la voix sur des sujets majeurs en se distinguant du reste du Parlement européen ». De fait, les statistiques de vote indiquent que par rapport aux autres groupes de gauche, l’ex-GUE/NGL est le moins aligné sur l’ensemble de l’hémicycle (même si elle l’est tout de même davantage que les groupes d’extrême droite).

 

" En dépit de l’internationalisme que la gauche radicale professe, elle donne la priorité à l’arène politique nationale.Vladimir Bortun, politiste.

Les mêmes indiquent cependant aussi que sa cohésion interne est plus faible que celle des sociaux-démocrates, et surtout celle des Verts. « Il s’agit d’un groupe confédéral avec une liberté de vote totale des délégations, explique Emmanuel Maurel. L’hétérogénéité est la plus forte sur ce qui touche aux questions de sécurité et de défense, ou encore aux questions environnementales. » On pourrait y ajouter les conceptions de l’intégration européenne elle-même, puisque les votes du groupe s’avèrent les plus dispersés lorsqu’il s’agit de se prononcer sur l’élargissement de l’Union ou la révision des traités.

 

Outre ces divisions historiques sur le rapport à l’UE, le politiste Vladimir Bortun pointe d’autres facteurs qui entravent la coopération interne à la gauche radicale. Les partis qui en relèvent, souligne-t-il auprès de Mediapart, « tendent à manquer des ressources matérielles nécessaires pour une activité transnationale pérenne, dans la mesure où ils ont un faible accès aux ressources étatiques (par manque de succès électoral) ou à des riches donateurs (contrairement aux droites extrêmes) ».

  • « En dépit de l’internationalisme que la gauche radicale professe, ajoute-t-il, elle donne la priorité à l’arène politique nationale. Ce n’est pas seulement dû à son influence limitée à l’échelle européenne. C’est aussi le reflet d’une vision réformiste qui voit la politique avant tout en termes de gains dans les institutions, et pas assez en termes de construction d’un pouvoir populaire par en bas. »

 

 

- Atouts et limites de « Maintenant le peuple ! »
« Maintenant le peuple ! » est-elle en mesure de renverser cette difficulté structurelle ?

  • Son degré de cohésion idéologique et stratégique apparaît plus élevé qu’au sein de l’ex-GUE/NGL ou du PGE, ce qui devrait théoriquement faciliter l’activité commune.
  • Son identité semble également plus adaptée aux préoccupations des sociétés contemporaines et des jeunes générations, par rapport à des partis encore marqués par l’identité communiste du XXe siècle, parfois forts localement mais en déclin structurel global.

 

Force est de constater, cependant, qu’entre sa création et sa relance actuelle, l’activité de l’alliance a été famélique. Sur la page d’accueil de son site internet, aucune entrée n’apparaît entre l’annonce d’un « nouveau commencement » au lendemain des européennes de 2019 et la publication il y a quatre mois d’une déclaration politique. « Le  “plan B ” comme “ Maintenant le peuple ! ” sont restés des affaires très institutionnalisées », regrette Vladimir Bortun, qui parle d’un « projet plutôt élitiste » à ce stade.

 

L’alliance assiste en outre à la descente aux enfers d’un de ses membres fondateurs, Podemos[7]. « Le parti est testé autour de 2 % aux européennes, rappelle Vincent Dain, qui en est un des spécialistes. Le mode de scrutin généreux pourrait tout de même lui permettre d’envoyer Irene Montero au Parlement européen, ce qui lui garantirait une présence institutionnelle minimale. Mais la perte de vitesse et d’influence est vertigineuse. »

 

Le pari de Podemos consiste à faire le gros dos en attendant que la coalition Sumar, qui l’a supplanté à la gauche du spectre politique espagnol, perde sa crédibilité à force de coller à son allié de centre-gauche, le PSOE, qui dirige le gouvernement. Rien ne dit cependant qu’en pareil cas Podemos serait encore en mesure d’apparaître comme un débouché crédible. Et pendant ce temps, Sumar multiplie les rencontres avec les Verts européens, qui seraient ravis d’en accueillir les élus dans son groupe au Parlement européen.

 

Le déclin de Podemos symbolise la clôture d’un cycle qui fut marqué par les luttes anti-austérité, et qui fut largement gâché en termes de pratique internationaliste par les partis de gauche. Si les dogmes néolibéraux n’ont pas disparu de la conjoncture actuelle, celle-ci est enrichie – et complexifiée – par l’ascension des droites extrêmes et les conflits en Ukraine et au Proche-Orient. À ce stade, les textes adoptés par « Maintenant le peuple ! » sont encore trop évasifs pour se faire une idée de son apport sur ces terrains.

 

 

- Maintenant le peuple : déclaration commune pour les européennes !

« Nous pensons que l’Europe a besoin d’une gauche combative, qui ne compromet pas ses valeurs et se bat pour un projet de rupture. »

L'alliance Maintenant le Peuple qui réunit les leaders des partis gauche européens a adopté une déclaration commune pour préparer la bataille des européennes :  Manuel Bompard : La France Insoumise ; Mariana Mortàgua : Bloco de Esquerda ; Li Andersson : Vasemmistoliitto ; Nooshi Dadgostar :  Vänsterpartiet ; Ione Belama : Podemos ; Pelle Dragsted : Enhedslisten

 

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15 mars 2024 5 15 /03 /mars /2024 20:37
Ukraine : Face aux va-t'en-guerre, le vote humaniste, pacifiste et réaliste de La France Insoumise.

« Rien ne doit exclu[1] », a déclaré Emmanuel Macron le 26 février 2024, à propos de l’envoi de troupes de notre pays en Ukraine. Un dérapage ? Non, le chef de l’Etat a persisté et signé en déclarant quelques jours plus tard : « il n’y a aucune limite[2] » dans la guerre face à la Russie. 

Macron persiste et signe dans Le Parisien : " il faudra (peut-être) avoir des opérations sur le terrain, quelles qu'elles soient, pour contrer les forces russes (...). La force de la France, c'est que nous pouvons le faire[12] ".

« Nous ne voulons pas de la guerre sur le continent européen ! La République française doit travailler à construire la paix », avait réagi Jean-Luc Mélenchon à Paris[3].

 

 

Seuls les groupes de La France Insoumise et communiste ont voté contre l’accord d’assistance de sécurité entre la France et l’Ukraine signée par Macron et Zelinsky.

Le 12 mars 2024, l’Assemblée nationale a débattu de l’accord franco-ukrainien sur la sécurité, signé par Emmanuel Macron et Volodymyr Zelensky le 16 février dernier[4]. Celui-ci engage Paris et Kiev pour une durée de dix ans, comprenant notamment un renforcement de la coopération militaire. Il pose également deux objectifs politiques : l’entrée de l’Ukraine dans l’Union européenne et dans l’OTAN, ce à quoi les insoumis s’opposent. S’ensuivra un vote purement symbolique.

 

 

Sources : Eric Durand | mis à jour le 17/03/2024

-  Pour le détail pour chaque groupe

Les députés ont débattu mardi de la stratégie française d’aide à l’Ukraine et voté, de manière non contraignante, sur l’accord bilatéral de sécurité signé avec Kiev. Ils l’ont approuvé à 372 voix pour, et 99 voix contre. Au total, 101 députés se sont abstenus[5].

  • Les 169 députés Renaissance ont voté pour ;
  • Les 88 élus RN se sont abstenus ;
  • Les 75 députés « insoumis » ont voté contre ;
  • Chez Les Républicains, 49 ont voté pour et 11 se sont abstenus. Deux n’ont pas pris part au vote ;
  • Au MoDem, 49 députés ont voté pour et il y a une abstention ;
  • Les 31 députés socialistes ont voté pour ;
  • Les 30 députés Horizons ont voté pour ;
  • Chez les écologistes, 20 élus ont voté pour et une a voté contre. Un député n’a pas pris part au vote ;
  • Chez les communistes, les 22 élus se sont opposés à l’accord ;
  • Dans le groupe LIOT, 20 d’entre eux ont voté pour et deux députés n’ont pas pris part au vote ;
  • Enfin chez les non-inscrits : David Habib, Jean-Charles Larsonneur, Hubert Julien-Laferrière et Emmanuelle Ménard ont voté pour, Nicolas Dupont-Aignan a voté contre et Véronique Besse s’est abstenue.

👉 voir aussi le site de l’Assemblée nationale avec les résultats nominatifs et par groupe[6]. 

 

🔴  Le 12 mars 2024, en application de l’article 50 – 1 de la constitution (et non de l’article 53), les 75 membres de France Insoumise et les 22 membres du groupe communiste ont voté contre le traité d’assistance de sécurité entre la France et l’Ukraine.

🔴  Ils constituent donc les 99 votes contre. Il y a eu 372 votes pour dont les votes du parti socialiste et les votes du parti écologiste. Les 88 députés du RN se sont abstenu. Il y a eu au total 101 abstentions.

 

 

-  Ukraine : le vote de La France Insoumise est parfaitement cohérent car contre l’escalade militaire de Macron, LFI prône la négociation pour la paix[3]

Conférence des frontières, garanties de sécurité mutuelle : ce que propose LFI pour mettre fin à la guerre

  • Dès le début du conflit, LFI s’est distinguée par la défense d’objectifs clairs et simples : cessez-le-feu, retraite des troupes russes, discussion sur la sécurité en Europe dans le cadre de l’OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe) où siègent les États-Unis et la Russie. Quelques heures après l’agression russe sur le sol ukrainien, le jeudi 24 février 2022, Jean-Luc Mélenchon dénonçait une invasion qui « change le cours de l’Histoire en Europe » et constitue un recul alors que le recours à la force n’était plus considéré comme un des moyens pour régler les conflits sur le vieux continent.

 

  • Comment mettre fin à une guerre et éviter l’escalade guerrière qui risquerait de provoquer un conflit nucléaire ? « Le cessez-le-feu est la première étape pour construire la paix en Ukraine » pour Jean-Luc Mélenchon et les insoumis, qui plaident pour « discuter des conditions concrètes dans lesquelles le conflit s’arrête ». C’est tout le sens de la proposition portée depuis le premier jour du conflit par le co-président de l’Institut La Boétie. Discuter de la paix en assurant des « garanties de sécurité mutuelle » aux belligérants, aux Ukrainiens comme aux Russes.

 

  • Un certain… Emmanuel Macron proposait la même chose le 3 décembre 2022. « C’est aussi de cela que nous avions discuté avec le président Biden, c’est l’architecture de sécurité dans laquelle nous voulons vivre demain, comment nous protégeons nos alliés et les États membres, en donnant des garanties pour sa propre sécurité à la Russie, le jour où elle reviendra autour de la table », avait déclaré le chef de l’État sur TF1[7]. Une idée qui n’aura pas fait long feu, comme en témoigne la rhétorique guerrière qui a supplanté l’idée d’une conférence pour la paix.

 

🔴 Deux ans après le début du conflit, cette rhétorique guerrière inonde les débats en France et suspecte de complicité ou de connivence avec le régime poutinien toute voix qui porte la négociation pour la paix. Or, ces deux années l’ont démontré de plus belle : l’issue n’est pas militaire mais bien diplomatique.

 

 

- Dans ce contexte, Emmanuel Macron et ses partisans avancent sur l’idée d’une adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne ou l’OTAN.

Les insoumis s’y opposent pour plusieurs raisons :

  • « Cela n’est pas possible sans harmonisation fiscale et sociale », a avancé le député LFI Arnaud Le Gall ce matin en conférence de presse. Le salaire minimum Ukrainien tourne autour de 200 euros.
  • Difficile alors d’entendre l’adhésion de l’Ukraine quand des millions de travailleurs en pâtiraient.
  • Quant à l’OTAN, l’adhésion de l’Ukraine irait dans le sens inverse de la garantie de sécurité pour les Russes. Des garanties de sécurité sont nécessaires pour les Ukrainiens comme pour les Russes.
  • « Les conditions d’un accord de paix sont sur la table », a expliqué Manuel Bompard, coordinateur national de LFI.
    • Le président ukrainien envisage la possibilité de référendums d’auto-détermination.
    • De leur côté, les Russes se disent favorables à un cessez-le-feu, pour reconstituer leur défense. Ce n’est pas souhaitable, mais cela ouvre une fenêtre afin que tout le monde puisse se mettre autour de la table.

 

Les bons esprits affirment que négocier avec Poutine reviendrait à une capitulation de l’Ukraine.

  • Une position va-t-en-guerre qui balaye d’un revers de la main le sens même de la diplomatie et de la quête d’un mode de résolution des conflits qui ne passerait pas par les tueries.
  • Ce n’est pas parce que quelqu’un a déclenché la guerre qu’on ne peut pas faire la paix. « Il faut sortir de cette idée que créer les conditions d’une négociation, c’est forcément céder à l’ensemble des exigences de Vladimir Poutine. Celui qui a envahi a violé le droit international, il ne s’agit pas de lui donner raison. Si vous voulez la paix, vous devez écouter ce que chacun a à dire. », a précisé Manuel Bompard.

 

De même, les esprits va-t-en-guerre oublient la démarche unique de LFI quant à l’accueil des opposants au régime poutinien en France[8], une démarche singulière que n’observe aucune autre formation politique à part celle de Jean-Luc Mélenchon. 

 

 

- La prolongation du conflit est particulièrement dommageable pour l’Ukraine... mais pas que !
Déjà 444 000 morts[10], et 486 milliards de dollars de destructions directes[9] dans lequel il faudra compter un affaiblissement considérable du potentiel industriel et agricole. Et à cela s’ajoute une énorme pollution des sols.

  • En revanche, les sanctions contre la fédération de Russie ont relancé la croissance économique de ce pays dans tous les domaines : agricole, commerciale et industrielle. Son taux de croissance du PIB est évalué à 3,6 % par la banque mondiale en 2023 contre 0,8 % pour la France.
  • Ce sont les pays européens qui, par effet boomerang, souffrent le plus des sanctions contre la Russie.
  • Les seuls bénéficiaires de la guerre sont les États-Unis d’Amérique du côté occidental.

 

La continuation de la guerre va être catastrophique pour l’Ukraine et va provoquer une récession de l’économie européenne.

 

🔴  La France aura dépensé depuis février 2022 pour près de 15 milliards d’euros pour l’Ukraine. Voici approximativement le décompte : traité d’assistance signé par Macron :

  • 3 milliards d’euros ;
  • + 8 milliards d’euros (sur les 50 milliards votés par le Parlement européen) ;
  • +3,8 milliards d’aides militaires en 2022 et 2023 soit 14,8 milliards ;
  • auxquels il faut ajouter environ 600 millions d’euros pour l’aide aux réfugiés. On dépasse ainsi un total de 15 milliards d’euros.

 

🔴  Pendant ce temps, on nous annonce un plan d’austérité de 10 milliards d’euros ;

  • et on nous a annoncé l’obligation d’augmenter l’âge de la retraite de deux ans en raison d’un déficit de 12 milliards pour les retraites.
  • Dans le même temps, le déficit de la balance commerciale de la France bat des records historique : 99,6 milliards d’euros en 2023, 164 milliards d’euros en 2022. Ce sont les deux plus gros déficits de la balance commerciale enregistrés depuis 1945.
  • Mais ce n’est pas tout : 2022, le déficit du budget de l’État en France s’est élevé à 126,8 milliards d’euros, soit 4,8 % du produit intérieur brut (PIB).
  • En 2023, le déficit a augmenté pour atteindre 173,3 milliards d’euros,

 

 

- Pour éviter des erreurs de jugement, comme celles des médias qui prédisaient voici un an l’effondrement de la Russie et de Vladimir Poutine, il est important d’analyser les rapports de force.

Voici seulement quelques éléments concernant la Russie :

  • Selon des documents divulgués des services de renseignement américains citent le FSB russe, les forces russes auraient subi 110 000 pertes au 28 février 2023[11].
  • La Russie a augmenté son budget militaire de 68 % en 2024 ce qui ne l’empêche pas d’augmenter dans de nombreux secteurs son potentiel industriel.
  • Et l’aménagement de son territoire dans sa partie orientale.. N’oublions pas que le territoire de la fédération de Russie couvre 11 fuseaux horaires
  • La Russie dispose de missiles hypersoniques dépassant de plus de 10 fois la vitesse du son les rendant ininterprétables.

 

🔴 Les dirigeants européens, les sociaux-démocrates et les écologistes aveuglés idéologiquement par une représentation fantasmatique de la Russie ont totalement sous-évalué les capacités économiques, financières, militaires et diplomatiques sur la scène internationale de la fédération de Russie. Ces gens souffrent d’un lourd défaut d’analyse rationnelle et historique de la réalité : je suis tout à fait d’accord sur ce point avec l’analyse de Jacques Baud et de Caroline Galactéros.

 

🔴 Oui, le vote de La France Insoumise n’est pas seulement pacifiste, humaniste, il est réaliste.

 

 

- Ukraine : La France doit être à la pointe de la paix !

« Dans l’épreuve internationale, la France doit être un agent de la solution et non une partie du problème. Ce débat est un simulacre, vous avez déjà signé l'accord de sécurité avec l’Ukraine ! En Ukraine, à Gaza, au Congo, la France doit être à la pointe du combat pour la paix ! Être un agent de la solution et non une partie du problème. » Arnaud Le Gall, dépuré France insoumise /Ñupes

 

 

Notes :

[1] Guerre en Ukraine : " Rien ne doit être exclu ", déclare Emmanuel Macron au sujet de l'envoi de troupes occidentales à l'avenir

[2] Guerre en Ukraine : Emmanuel Macron dit aux partis qu’il n’y a « aucune limite » au soutien à Kiev

[3Ukraine : contre l’escalade militaire de Macron, LFI prône la négociation pour la paix

[4] Que contient l’accord de sécurité signé entre la France et l’Ukraine et débattu au Parlement ?

[5Débat sur le soutien de la France à l’Ukraine : les députés approuvent l’accord bilatéral de sécurité

[6] Le site de l’Assemblée nationale avec les résultats nominatifs et par groupe

[7] Au terme de ma visite d’État aux États-Unis d’Amérique, je réponds aux questions de TF1

[8] À L'ASSEMBLÉE, DES DÉPUTÉS INSOUMIS ET MÉLENCHON ACCUEILLENT TROIS OPPOSANTS RUSSES À POUTINE

[9Ukraine : assiégée par l'armée russe, la ville ukrainienne d'Avdiïvka "risque" de tomber

[10] En février 2024, le ministère met à jour son bilan des pertes militaires ukrainiennes qui s'établit à 444 000 tués et blessés.

[11] Selon des documents divulgués des services de renseignement américains citent le FSB russe les forces russes ont subi 110 000 pertes au 28 février 2023.

[12Macron persiste et signe dans Le Parisien : " il faudra (peut-être) avoir des opérations sur le terrain, quelles qu'elles soient, pour contrer les forces russes (...). La force de la France, c'est que nous pouvons le faire ".

 

Pour en savoir plus :

- Révélation : Comment l’Occident a promis à l’URSS que l’OTAN ne s’étendrait pas à l’Est, par Roland Dumas, ex-ministre des affaires étrangères

Du Vatican à Pékin, la position de LFI pour la paix en Ukraine plébiscitée sur la scène internationale

- « Poutine n’en demandait pas tant » – Le député LFI Arnaud Le Gall recadre Macron et plaide pour la paix en Ukraine

 

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8 janvier 2024 1 08 /01 /janvier /2024 14:29
Enjeux migratoires en Europe et dans le monde

En Europe, les flux migratoires ne sont pas essentiellement irréguliers[18]...

L'immigration est toujours un exil forcé, une souffrance... Il faut aller à la cause des maux et les éradiquer.

 

 

Depuis les années 1990, l’Europe est devenue l’une des plus importantes régions d’immigration au monde, compte tenu de sa position géographique dans son face-à-face méditerranéen, de son histoire, de l’ouverture à l’Est, et de son image quant au respect des droits de l’Homme et à l’accueil des réfugiés. Mais sa politique migratoire est marquée par la montée des populismes et des démocraties illibérales, où la peur et le rejet de l’Autre migrant occupent une large place.

Migrations : comprendre et convaincre par Catherine WIHTOL DE WENDEN, directrice de recherches au cnrS (centre de recherches internationales-ceri, Sciences po)

 

 

Sources : Catherine WIHTOL DE WENDEN | mis à jour le 09/10/2024

- Les migrants internationaux sont, selon les Nations unies[1], 284 millions, soit plus du double qu’à la fin du XXe siècle, mais ils ne représentent qu’un peu plus de 3 % de la population mondiale.
Selon les Nations unies, un migrant international est quelqu’un qui est né dans un pays et s’est déplacé vers un autre pour une période d’au moins un an. Aujourd’hui les migrations se dirigeant vers le nord du monde (environ 140 millions, Sud-Nord et Nord-Nord) sont en train d’être dépassées par les migrations se situant au sud de la planète (Sud-Sud et Nord-Sud). Quelques chiffres viennent illustrer ce phénomène à la fois global par son ampleur (peu de régions au monde non concernées) et de plus en plus régionalisé (davantage de migrants venant de la même région que de migrants venus d’ailleurs). On compte 11,5 millions de migrants internationaux en Amérique latine, majoritairement sud-américains ; 26,5 millions en Afrique ; 50 millions aux Etats-Unis ; 85 millions en Asie et Océanie ; 45 millions en Europe et 13 millions en Russie.

 

 

- Facteurs structurels de la migration
Des facteurs structurels expliquent la permanence des migrations, quelles que soient les politiques menées pour les dissuader.

  • Tout d’abord l’entrée du monde dans la mobilité : depuis les années 1990, le monde est en mouvement, du fait de l’ouverture d’espaces autrefois clos par des frontières étanches (Chine, Cuba, Europe de l’Est) mais aussi au sud du monde, avec la généralisation de l’accès à un passeport. Il est devenu facile de sortir de chez soi, mais difficile d’entrer ailleurs en raison d’un système de visas très hiérarchisé selon le « risque migratoire » de tel ou tel pays d’origine[2]. Ce phénomène s’est inversé depuis la fin du XIXe siècle, période de la première grande migration de masse[3], où il était plus difficile de sortir de son pays que d’entrer ailleurs car les grands empires considéraient leur population comme une richesse démographique, fiscale, agricole et militaire et les empêchaient souvent de sortir.
  • Autres facteurs structurels : les grandes lignes de fracture du monde, avec des régions qui cumulent les indicateurs les plus bas du développement humain (espérance de vie à la naissance, taux de scolarisation, niveau de ressources en parts du PIB national), parfois peu éloignées des régions les plus riches[4]. Ce ne sont pas les plus pauvres qui migrent loin mais celles et ceux qui ont des réseaux de connaissances liés aux diasporas transnationales, qui sont câblés sur les nouvelles technologies… L’offre des passeurs pour ceux qui n’ont pas de visas s’est aussi multipliée, de même que les crises politiques, économiques et sanitaires, au Sud. Pour l’instant, les catastrophes environnementales induisent surtout des migrations internes et de voisinage.

 

Les plus grands moteurs de départ sont l’absence d’espoir, l’aspiration à changer de vie notamment chez les plus diplômés, la nécessité de fuir un pays en guerre, les discriminations à l’égard des femmes. De nouvelles figures des migrants internationaux apparaissent avec, par exemple, des touristes qui finissent par s’installer au soleil, chez les séniors ou des diplômés du Sud venant chercher des opportunités au Sud et au Nord.

 

Les profils de migrants ne se sont pas seulement diversifiés, ils sont devenus plus flous : les catégorisations des migrants se sont parfois effacées, entre le demandeur d’asile et celui qui cherche du travail notamment avec la suspension de l’immigration de travail salarié depuis le milieu des années 1970, en Europe. Hier, le réfugié était socialement très différent du travailleur, peu qualifié et rural. Aujourd’hui, ils sont de plus en plus proches du fait de l’urbanisation et des progrès de la scolarisation au sud du monde. Dans le même temps, dans un contexte de dissuasion, de répression et de militarisation, les frontières se sont fermées pour le plus grand nombre (les deux tiers de la population de la planète), avec une série d’instruments de contrôle qui tiennent souvent lieu de politique migratoire (accords de réadmission avec les pays du Sud, politiques d’externalisation des frontières, système Schengen, accords de Dublin sur l’asile, Système d’information Schengen-SIS fichant sans-papiers, déboutés du droit d’asile ou condamnés cherchant à pénétrer les frontières de l’Union européenne-UE)…

 

 

- Crises en série et lignes de fracture
Des crises se sont succédé : révolutions arabes de 2011, crise syrienne de 2015, Covid-19, crise ukrainienne de 2022. L’UE est face aux plus grands mouvements de réfugiés depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, même si la plupart de ces derniers ont trouvé l’hospitalité dans les pays les plus proches de chez eux : Iran et Pakistan pour les Afghans, Syrie pour les Irakiens, Turquie et Liban pour les Syriens, Pologne, Hongrie, Roumanie et Moldavie pour les Ukrainiens. Ces crises ont amené à leur tour des lignes de fracture en Europe : crise de l’hospitalité entre l’Est et l’Ouest, lors de la crise syrienne. L’Allemagne a alors été le principal pays d’accueil (plus d’un million de personnes entre 2015 et 2016), alors que les pays de Visegrad[5] ont refusé l’hospitalité à ces populations non désirées. Une crise s’est aussi amorcée avec le système européen de Dublin : le Sud reçoit l’essentiel des nouveaux arrivants (Italie, Grèce, Espagne, Malte), lesquels leur sont renvoyés par les autres pays européens s’ils ont traversé leurs frontières. Ce qui nourrit, dans les pays du Sud, un sentiment d’abandon par les autres pays européens.

 

Le Pacte européen pour l’immigration et l’asile de 2020, qui devrait être adopté au printemps 2024, a prévu, pour y remédier, une solidarité obligatoire de tous les pays. Ce Pacte conserve une dimension essentiellement sécuritaire, qui reprend les politiques antérieures de trente ans d’âge de renvoi, de dissuasion et de répression, alors même que ces politiques n’ont pas démontré d’effets sur la diminution des mouvements migratoires[6]. Un filtrage des demandes d’asile aux frontières extérieures de l’UE permettra en outre d’arrêter ceux qui viennent de pays « sûrs ». L’Europe est au carrefour de plusieurs espaces migratoires qui ont connu beaucoup de mutations au cours des vingt dernières années : l’espace euro-méditerranéen, la circulation migratoire Est-Ouest, et de plusieurs défis contradictoires comme, d’un côté, la crise du Covid, l’Ukraine, le risque environnemental, et, de l’autre, le vieillissement, les pénuries de main-d’œuvre, la crise de l’hospitalité sur fond de montée des populismes.

 

 

- L’Euroméditerranée en mouvement(s)
Les migrations entre l’Europe et la rive Sud de la Méditerranée[7] sont vécues comme un défi du fait de l’écart démographique entre les deux rives (âge médian en Europe de 41 ans, contre 25 au Maghreb et 19 en Afrique subsaharienne), des réfugiés, du terrorisme et des migrants à la recherche de travail. L’Europe cherche à fermer ses frontières, sans y parvenir. Pourtant, elle vieillit et manque de main-d’œuvre, très qualifiée, moyennement qualifiée et peu qualifiée dans les métiers dits en tension (restauration, tourisme, médecine, agriculture…).

 

La Méditerranée constitue l’un des plus importants espaces migratoires au monde, un espace migratoire régional constitué essentiellement de migrants de la rive Sud mais aussi, dans le passé, du sud de l’Europe[8]. Le monde euro-méditerranéen connaît aussi de nouvelles migrations, comme l’installation des séniors au soleil (Français au Maroc et en Tunisie, Anglais à Malte, Allemands en Espagne) ou l’exode des jeunes qualifiés vers le sud du monde (Maroc, Amérique du Sud). La migration étudiante est aussi une autre composante des migrations intra-méditerranéennes avec un exode des cerveaux du sud de l’Europe vers le Nord (Italiens, Espagnols, Portugais, Grecs)[9].

 

Les pays d’Europe du Sud, qui ont longtemps été des pays d’émigration, sont devenus des pays d’immigration au milieu des années 1980 et ont dû adopter à la hâte des politiques migratoires (régularisation des sans-papiers, contrôle des frontières externes, acquis communautaire). Ils ont reçu et continuent à recevoir des migrants arrivés par la mer tout en étant des pays touristiques, une cohabitation parfois difficile même pour ceux qui ont aussi besoin de main-d’œuvre. Malgré des configurations migratoires différentes, propres à l’histoire et à la géographie de chacun, ils sont devenus les garde-frontières de l’UE.

 

 

- Coronavirus et interdépendances
La fermeture des frontières nationales a été l’une des premières mesures adoptées par de nombreux pays européens pour limiter la propagation du coronavirus. D’autres pays ont ensuite emboîté le pas[10], révélant aux migrants du Nord que les frontières n’étaient plus ouvertes à tous et qu’ils devenaient indésirables au Sud. Le moment de leur réouverture s’est étalé dans le temps, d’abord progressivement, avec les frontières internes, notamment dans les pays de tourisme (Italie, Espagne, Portugal, Grèce).

L’Organisation mondiale des migrations (OIM) a observé une baisse importante du trafic en Méditerranée centrale, de la Libye à l’Italie ou vers la Grèce. L’Europe n’était plus attractive, du fait de la fermeture des frontières et des risques sanitaires – le continent étant particulièrement touché par la pandémie. L’épidémie a suspendu les arrivées de migrants en Europe et leur circulation entre pays membres. Le droit d’asile s’est arrêté, avec la fermeture des guichets.

 

Mais la crise a surtout révélé la dépendance des pays d’immigration à l’égard de leur main-d’œuvre immigrée. Ainsi l’Italie et le Portugal ont décidé de régulariser les sans-papiers travaillant dans les métiers des soins à la personne, compte tenu des besoins dans ce secteur. En Allemagne, la pénurie de travailleurs saisonniers agricoles s’est fait sentir, notamment pour les récoltes de printemps, habituellement effectuées par des Ukrainiens. En Espagne, les ramasseuses de fraises marocaines se sont heurtées au blocage des frontières, mettant en péril leurs familles au Maroc. En Italie, les saisonniers marocains n’ont pu revenir qu’au compte-gouttes comme au Royaume-Uni, où les Roumains sont revenus travailler dans les champs[11].

 

Le Covid-19 n’a pas sonné la fin des migrations mais il a accéléré les migrations internes de retour vers les régions d’origine[12]. Il a aussi montré l’interdépendance structurelle des pays riches à l’égard des pays pauvres.

 

 

- Les réponses face à la crise ukrainienne
La crise ukrainienne est venue allonger la liste des pays créant le plus de réfugiés (le plus grand nombre de départs dans le temps le plus bref), avec un accueil surtout en Pologne (pour près de la moitié d’entre eux), en Roumanie, Moldavie, en République tchèque et en Hongrie.

 

C’est une migration de voisinage entre pays ayant eu une proximité culturelle : l’ouest de l’Ukraine était une partie de la Pologne avant 1945, le Sud a appartenu à l’Autriche[13]. Même chose en République tchèque, en Roumanie et Moldavie.

 

L’accueil des Ukrainiens a tranché avec celui des Syriens, Irakiens, Afghans et autres Moyen-orientaux, en 2015. L’UE leur a appliqué la directive dite « protection temporaire » de 2001, créée pour les réfugiés de la crise dans l’ex-Yougoslavie, et jamais appliquée. Ce statut temporaire évite la durée de la procédure d’asile, permet de travailler immédiatement et de retourner dans son pays d’origine alors que c’est impossible pour les réfugiés classiques, sans risque de perdre leur statut. Enfin, la solidarité entre les pays européens et l’hospitalité se sont déployées avec le concours des pouvoirs publics. Comme en Allemagne en 2015, les pouvoirs publics français ont déployé des moyens hier considérés comme impossibles à satisfaire en mobilisant collectivités territoriales et citoyens volontaires pour l’hébergement, l’ouverture d’écoles et de cours de français, l’accès à des logements sociaux et à des soins immédiats[14].

 

  • On peut espérer que cet épisode fera jurisprudence dans la politique européenne de l’asile et incitera les pays européens à remettre à plat leur politique migratoire en ouvrant davantage de voies légales d’entrée.

 

 

- L’Europe et ses frontières : perspectives
La montée du populisme et des démocraties illibérales dans nombre de pays européens, y compris en Europe du Nord (Suède et Danemark), et la recherche des votes d’extrême droite pour gagner les élections conduisent à une surenchère sur la fermeture des frontières. Cela alimente des peurs, à court terme, peu fondées, comme l’« invasion » des déplacés environnementaux et le « déversement » des Africains en Europe ou le « grand remplacement[17] », alors que le vieillissement des Européens n’est pas pris en compte.

 

Les déplacés environnementaux ne sont pas une menace à court terme pour l’Europe. Ce sont, pour l’essentiel, des migrations internes et des migrations Sud-Sud. Leur nombre est évalué à une soixantaine de millions[15], mais les experts du climat (le Giec) considèrent qu’ils pourraient atteindre 150 à 200 millions à la fin du siècle. La plupart se déplacent dans leur propre pays : ce sont les plus pauvres, soucieux de garder des modes de vie liés au milieu naturel (agriculture, élevage, pêche). Une petite partie décide de franchir les frontières mais reste souvent à proximité de leur pays d’origine. Ils ne bénéficient pas du statut de réfugiés car ils ne sont pas considérés comme craignant ou ayant été victimes de persécutions, selon les termes de la convention de Genève, et les tentatives de définition d’un autre statut international (l’initiative Nansen de 2011) n’ont pas abouti.

 

Les causes de ces déplacements sont multiples :

  • Liées à des phénomènes naturels aussi vieux que le monde (éruptions volcaniques, cyclones, tornades) mais aussi à des phénomènes récents de sécheresse, de dégel, de montée des eaux, d’inondations, de coulées de boue et d’engloutissement d’îles par la mer. Les régions les plus touchées sont l’Asie pacifique pour 68 % des cas, l’Asie du Sud pour 14,8 %, l’Amérique latine (7,3 %). Beaucoup de ces pays n’ont pas les moyens de faire face aux catastrophes environnementales[16] et ce sont les plus pauvres qui seront les plus exposés, comme aux Etats-Unis, lors du cyclone Katrina frappant la Nouvelle-Orléans. Ce sont les pays du Sud, proches des pays concernés par les crises environnementales, qui seront les plus touchés par les migrants environnementaux.
  • Des conflits de valeurs divisent l’Europe et ses migrations : entre libéralisme économique et sécurité militarisée des frontières, entre éthique de la solidarité et de l’hospitalité et nationalismes, entre besoins de main-d’œuvre, vieillissement et utilisation de l’immigration à des fins électorales et populistes.

De nombreux défis concernant la cohésion sociale montrent que l’Europe tarde à adopter des mesures adaptées à une immigration de peuplement, à la différence de pays comme les Etats-Unis, le Canada, ou l’Australie, car elle peine à se considérer comme continent d’immigration : lutte contre les discriminations, introduction de la diversité dans la définition de la citoyenneté, dialogue avec l’islam, droit de vote local des non-Européens, démocratisation du droit à la mobilité avec des frontières plus ouvertes aux migrations de travail. C’est pourquoi, face à des politiques d’opinion s’appuyant sur les sondages, l’enjeu est de taille : il s’agit de convaincre.

 

🔴 Pour aller plus loin...

 

- Jean-Luc Mélenchon : " Il faut s’attaquer aux causes qui provoquent l’afflux de migrants "

Pour lutter contre l’immigration massive – qui d’ailleurs est principalement interne aux pays en voie de développement –, il faut s’attaquer aux causes des migrations : l’impossibilité de tout développement des pays de départ, en raison des dettes et des politiques d’ajustement structurel imposées par le Fonds monétaire international [FMI] ou la Banque mondiale, le pillage des ressources par les multinationales et le libre-échange...

Notes :

[1Rapport Undesa (Département des affaires économiques et sociales des Nations unies), 2022.

[2] Les Afghans n’ont accès qu’à vingt-cinq pays environ, voisins et pauvres, alors que les Japonais, Coréens du Sud, Européens et Américains du Nord ont le plus large accès au monde sans visa.

[3] On parle à l’époque d’une migration de cinquante-millions d’Européens.

[4] La Méditerranée est ainsi une ligne de fracture démographique, économique, politique, sociale et culturelle importante, malgré les nombreux liens transnationaux qui la traversent.

[5] Pologne, Hongrie, Slovaquie et République tchèque.

[6] Trois-cent-trente-mille entrées irrégulières en 2022, selon l’agence Frontex (agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes), soit 30 % de plus qu’en 2021, et un niveau égal à celui d’avant la pandémie.

[7] Voir Catherine wihtol de wenden, « Migrations méditerranéennes », in Pouvoirs n° 183, p. 87-98.

[8] Les Turcs constituent la plus importante diaspora transnationale en Europe, devant les Marocains, puis Portugais, Italiens, Espagnols, Algériens et Roumains, mais leur répartition varie beaucoup selon les pays d’accueil.

[9] Enrico Pugliese, Quelli che se ne vanno, Bologna, Il Mulino, 2018.

[10] Par exemple aux Etats-Unis, en Asie, au Maghreb, en Afrique sub-saharienne, en Australie et dans le Golfe.

[11] Pour mémoire, la concurrence avec les travailleurs de l’Est européen a été l’un des thèmes favoris du Brexit.

[12] Ce fut le cas pour les Ukrainiens quittant la Pologne, ainsi que les Vénézuéliens et les Afghans de retour chez eux.

[13] Ceci explique l’accueil de ces anciens Hongrois par le gouvernement de Viktor Orban, qui avait déjà généreusement accordé des passeports hongrois à certains d’entre eux.

[14] Cet accueil peut être comparé à celui des Vietnamiens à la fin des années 1970, lié à la volonté de montrer un Occident protégeant les victimes du communisme.

[15] Parmi eux, quarante-millions de migrations internes.

[16] C’est le cas du Bangladesh, classé au premier rang des pays vulnérables en 2014, du fait de la fonte des glaciers de l’Himalaya qui se déversent dans les deux grands fleuves de ce pays delta.

[17] D'hier à aujourd'hui : la thèse du « grand remplacement »

[18« En Europe, les flux migratoires ne sont pas essentiellement irréguliers » – Entretien avec Maxime Guimard

 

Pour en savoir plus :

Politique migratoire Macron/Le Pen : préférence nationale, un remède de charlatan

- Crise des réfugiés : s'attaquer aux causes des migrations

- Jean-Luc Mélenchon, son programme Afrique : « Nous combattrons le fléau de la prédation ultralibérale qui s’abat sur le continent »

- Les causes de l’immigration – Quand le libre-échange sème la misère

 

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20 décembre 2023 3 20 /12 /décembre /2023 11:57
Nouvel élargissement de l'Union Européenne : une folie économique et politique

L’antériorité de l’adhésion à l’OTAN sur l’adhésion à l’UE démontre que les pays candidats ne voient cette dernière que comme le pendant politico-économique de la première

L’hypothétique « convergence » risque de prendre encore des décennies, surtout en cas de nouvel élargissement

Tous les États membres devront payer davantage et recevoir moins...

 

 

La guerre en Ukraine a relancé le processus d’élargissement de l’UE vers l’Est et les Balkans à un rythme effréné. Motivée par des raisons géopolitiques, à savoir endiguer la puissance russe sur le continent européen, cette expansion soulève pourtant d’immenses questions économiques et politiques. En intégrant en son sein des États pauvres, l’Union européenne encouragerait en effet une nouvelle vague de délocalisations et de dumping social et soumettrait les agriculteurs du continent à une terrible concurrence. En outre, le seul moyen d’éviter des blocages politiques d’une Europe à 34 ou 35 serait de renforcer le fédéralisme, en rognant encore davantage les pouvoirs de décision des États-membres. Un scénario délétère poussé par les élites européennes en dehors de tout mandat démocratique.

 

 

🔴 Pour lire la suite cliquez sur l'image 👇

 

 

NOUVEL ÉLARGISSEMENT DE L’UE : UNE FOLIE ÉCONOMIQUE ET POLITIQUE

 

Pour en savoir plus :

- Pour Manuel Bompard, député LFI, l’adhésion de l'Ukraine à l'Union Européenne serait une folie !

- Peter Mertens : « La guerre économique prépare la guerre militaire »

 

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8 mai 2023 1 08 /05 /mai /2023 10:43
Un exemple de l’enseignement de l’ignorance : quelle est la nation qui a le plus contribué à la défaite de l’Allemagne en 1945 ?

La propagande massive n’a pas cessé avec la fin de la seconde guerre mondiale. Nous y sommes confrontés tous les jours en écoutant la plupart des médias mainstream. (Économique, politique, géostratégique etc…)... membres du gouvernement y compris[0] !

 

 

Bernays l’avait bien décrit en expliquant pourquoi il était aisé de manipuler les plus instruits[1]
Le changement de société passe par une réappropriation de l’information, car on a beau être intelligent, si on ne raisonne pas sur des informations justes, on raisonne faux... La preuve ci-dessous.

Billet en hommage aux livres de Jean-Claude Michéa (son fameux L’enseignement de l’ignorance[2]) et de Jean-Paul Brighelli (La fabrique du crétin[3])… Voici une très intéressante étude de l’Ifop (Institut français d’opinion publique), qui est le plus ancien du pays, créé en 1938. Il a donc réalisé des sondages forts intéressants

 

 

Sources : Les Crises | mis à jour le 23/08/2024

- L'opinion sur les accords de Munich
« À la suite de la signature des accords de Munich le 29 septembre 1938[3bis] par la France, la Grande- Bretagne, l’Italie et l’Allemagne, Jean Stoetzel réalise le tout premier sondage politique : 57 % des personnes interrogées déclarent approuver ces accords tandis que 37 % les jugent néfastes[4].

 

1er octobre 1938, les accords de Munich

Les autres questions posées dans cette enquête apportent des éléments de compréhension sur l’état d’esprit d’un peuple pris entre deux tensions qui s’avèreront contradictoires. D’un côté, figure la crainte d’un nouvel embrasement mondial, vingt ans seulement après la fin de la Grande Guerre, qui explique cette recherche du compromis avec l’Allemagne nazie et pour finir le « lâche soulagement » après Munich. Pour 73 % des personnes interrogées, une nouvelle guerre mondiale entraînerait la destruction de la civilisation.

 

De l’autre côté, le sondage de l’Ifop montre que le renoncement de Munich s’accompagne désormais de fortes résolutions pour l’avenir. A la question « pensez-vous que la France et l’Angleterre doivent désormais résister à toute nouvelle exigence de Hitler, 70 % des Français répondent oui, 17 % manifestent leur opposition. Cette adhésion à l’idée que Munich doit être une sorte de « der des der » face à la politique d’expansion du Führer est majoritaire dans tous les segments de la population, à l’exception des professions libérales ainsi que des commerçants et des industriels interrogés rejetant à plus des deux tiers l’idée qu’il faut résister à toute nouvelle exigence allemande. […]

 

Pour autant, même après l’invasion allemande de la Bohème-Moravie, les Français, tout en prenant la mesure des menaces extérieures, refusent dans leur majorité de croire à la guerre. Seuls 37 % des personnes interrogées par l’Ifop en mai 1939 estiment que le pays sera inévitablement entraîné dans une guerre en 1939 ou en 1940 (63 % ne le pensent pas ou se disent sans opinion). Ce n’est qu’en juillet 1939 soit moins de 40 jours avant l’invasion de la Pologne par l’armée allemande et la déclaration de guerre de la France et de la Grande-Bretagne à l’Allemagne que l’on assiste à un basculement relatif de l’opinion : 45 % des interviewés (contre 34 %) pronostiquent une guerre dès 1939.

 

76 % considèrent que « si l’Allemagne tente de s’emparer de la ville libre de Dantzig par la force, nous devrons l’en empêcher au besoin par la force ». L’opinion était désormais prête à mourir pour Dantzig. »

 

 

- Qui a le plus aidé à battre l’Allemagne ?
Un sondage mené par l’Ifop en mai 1945, sur l’ensemble du territoire français désormais libéré (et confirmant un sondage de septembre 1944 auprès des Parisiens), a montré que les interviewés apparaissent bien conscients du rapport de force et du rôle des alliés dans la guerre, et ce malgré la censure et la difficulté sous l’occupation à accéder à une information fiable.

 

Ainsi, une très nette majorité (57 %) considèrent que l’URSS est la nation qui a le plus contribué à la défaite allemande alors que les États-Unis et l’Angleterre, pourtant libérateurs du territoire national, ne recueillent respectivement que 20 % et 12 %. (N.B. Il ne s’agit évidement pas ici de minorer l’importance de l’effort accompli par les USA, tant industriel qu’humain)

 

Mais ce qui est proprement sidérant est que cette vision de l’opinion publique s’est inversée de manière très spectaculaire avec le temps, comme l’ont montré deux sondages réalisés en 1994, en 2004 et en mai 2015[5] :

 

La nation qui a le plus contribué à la défaite de l’Allemagne

 

La nation qui a le plus contribué à la défaite de l’Allemagne

 

 

- C’est tout de même formidable
En 1945, les Français qui ont vécu sous la censure ont bien compris qui a vraiment battu l’Allemagne, mais 70 ans plus tard, c’est une Histoire totalement différente qui est dans nos esprits !

Le sondeur britannique ICM a réalisé le même sondage en 2015 dans plusieurs pays d’Europe. Voici le résultat :

 

L’enseignement de l’ignorance : Quelle est la nation qui a le plus contribué à la défaite de l’Allemagne en 1945 ?

 

  • Cela interpelle quant à la notion d’Histoire…

« Les vainqueurs sont ceux qui écrivent l’Histoire. C’est celle-là qui est rédigée dans nos livres d’école, pas la vraie Histoire telle qu’elle s’est déroulée, mais une Histoire qui caresse le camp des gagnants. L’Histoire a cessé, depuis longtemps d’être la somme des humanités aujourd’hui elle n’appartient qu’à une poignée d’individus. » [Maxime Chattam, Les arcanes du chaos[6]]

 

  • Et mieux encore, le sondage de 2004 fournit des informations surprenantes quand on regarde en détail (c’est identique en 2015) :

 

L’enseignement de l’ignorance : Quelle est la nation qui a le plus contribué à la défaite de l’Allemagne en 1945 ?

 

On retrouve pour une fois les les Cadres et les Ouvriers dans la même catégorie – ceux qui ont fait le plus et le moins d’études !

On note aussi, étonnement, que l’orientation politique n’a pas une si grande influence…

    « La manipulation des élites est encore plus facile que celle des masses. » [Jean Yanne]

 

  • En effet, quelques rappels sur les 80 millions de morts de la seconde guerre mondiale :

 

L’enseignement de l’ignorance : Quelle est la nation qui a le plus contribué à la défaite de l’Allemagne en 1945 ?

 

Soulignons que les 25 millions de Soviétiques morts se répartissent principalement par nationalité en :

. Russie : 14 millions (13 % de la population de 1940) – 7 M de soldats, 7 M de civils ;

. Ukraine : 7 millions (16 %) – 1,7 M de soldats, 5,3 M de civils (NB. Il s’agit surtout des civils Ukrainiens du Centre et de l’Est, hors Galicie – sauf pour les Juifs) ;

. Biélorussie : 2,3 millions (25 %) – 0,6 M de soldats, 1,7 M de civils.

 

  • Les pertes militaires en Europe durant la deuxième guerre mondiale :

 

L’enseignement de l’ignorance : Quelle est la nation qui a le plus contribué à la défaite de l’Allemagne en 1945 ?

 

  • Et en Asie :

 

L’enseignement de l’ignorance : Quelle est la nation qui a le plus contribué à la défaite de l’Allemagne en 1945 ?

 

  • Et le total des morts militaires par pays :

 

L’enseignement de l’ignorance : Quelle est la nation qui a le plus contribué à la défaite de l’Allemagne en 1945 ?

 

  • Ainsi :

 

L’enseignement de l’ignorance : Quelle est la nation qui a le plus contribué à la défaite de l’Allemagne en 1945 ?

 

 

Ceci est cohérent avec la répartition des divisons de l’armée allemande :
___Front Est _Front Ouest _Autres
. 1942: 179(79%) | 38(17%) | 9(4%)
. 1943: 187(73%) | 50(20%) | 19(7%)
. 1944: 165(60%) | 86(31%) | 23(9%)

 

  • P.S. L’étude complète de l’IFOP :

https://www.les-crises.fr/wp-content/uploads/2014/06/liberation-19441.jpg

https://www.les-crises.fr/wp-content/uploads/2014/06/liberation-19441.jpg

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27 novembre 2022 7 27 /11 /novembre /2022 17:51
Marine Le Pen (France) - Jimmie Åkesson (Suède) - Giorgia Meloni (Italie) - Eric Zemmour (France) - Viktor Orbán (Hongrie) - Mateusz Morawiecki (Pologne)

Marine Le Pen (France) - Jimmie Åkesson (Suède) - Giorgia Meloni (Italie) - Eric Zemmour (France) - Viktor Orbán (Hongrie) - Mateusz Morawiecki (Pologne)

80 ans après, l’ombre de l’extrême droite s’étend sur l’Europe[10 !

 

Allons-nous continuer longtemps à fermer les yeux sur la montée du fascisme européen ? Italie, Hongrie, Pologne... Ensemble pour un front antifasciste[9!

 

 

Ces derniers mois la montée de l’extrême droite a fait la “une” des pages politiques des journaux européens à la suite de la victoire de coalitions droite/extrême droite lors des dernières élections législatives en Suède comme en Italie.

En Suède, pays exemplaire pour la social-démocratie qui a dominé la vie politique du pays pendant près d’un siècle, la droite et l’extrême droite ont gagné les élections du 11 septembre 2022, le parti des “ Démocrates de Suède ” devenant le 2e parti du pays après les sociaux-démocrates avec 20% des voix. Ce parti a été fondé en 1988 par des néo-nazis, il a légèrement modéré ses positions tout en restant marqué par ce passé et sa ligne actuelle est avant tout anti-immigration.

En Italie, la coalition formée par un parti de droite et deux partis d’extrême droite a gagné les élections du 25 septembre 2022, et c’est Giorgia Meloni[0], la dirigeante des “ Frères d’Italie ”, un parti néo-faciste, qui devient Premier Ministre du pays.

 

 

Sources : Europe Solidaire Sans Frontières par Christophe Aguiton | Mis à jour le 17/09/2024

-  Ces dernières victoires électorales ne sont pas des phénomènes isolés.

En Pologne comme en Hongrie, des partis populistes d’extrême droite sont au pouvoir depuis des années et dans les autres pays européens l’extrême droite progresse. Par exemple Vox, en Espagne, avait obtenu 15% des voix lors des législatives de 2019 et les sondages les donnent en nette progression, et en France Marine Le Pen, la candidate du Rassemblement National a obtenu 23% des vois au 1er tour de l’élection présidentielle d’avril 2022 et 31% au 2nd tour[1].

 

Pour en rester au constat, la croissance de l’extrême droite en se limite pas à l’Europe. Dans d’autres régions du monde on voit surgir des dirigeants qui, comme Jair Bolsonaro au Brésil ou Donald Trump aux Etats-Unis, ressemblent beaucoup aux dirigeants d’extrême droite en Europe.

 

 

-  Des mouvements différents de ceux du 20e siècle
Quand on pense au fascisme italien ou au nazisme allemand des années 1920 et 1930, on comprend qu’il s’agit de partis qui construisent des milices violentes, rejettent la démocratie, s’attaquent avant tout au mouvement ouvrier et s’appuient sur une bourgeoisie qui veut rétablir l’ordre dans un continent marqué par des vagues révolutionnaires.

 

Les mouvements d’extrême droite européens actuels sont très loin du fascisme et du nazisme de l’entre-deux guerre, mais ils sont aussi différents de l’extrême droite qui s’est reconstruite après la 2e guerre mondiale. Des nostalgiques du fascisme ont reconstruit des partis, le MSI en Italie, le NPD en Allemagne ou le Front National en France[2], aujourd'hui RN, qui avaient tous les mêmes caractéristiques. Ils s’opposaient à l’immigration, mais ils étaient tout autant hostiles au communisme, aux syndicats et au mouvement ouvrier en général et étaient réactionnaires sur tout une série de sujets, les droits des femmes, l’homosexualité, etc.

 

Les partis d’extrême droite contemporains ont des positions différentes sur beaucoup de questions mais sont d’accord sur deux d’entre elles :

  • une obsession sur l’immigration, souvent liée à une haine de l’islam ;
  • et une défense de la nation contre les élites et les institutions qu’elles incarnent, en particulier l’Union Européenne.

 

Sur le reste, tout les séparent.

  • Certains partis sont conservateurs sur le plan des mœurs, antiféministes, anti-homosexuels et anti-avortement, en Pologne, Hongrie ou en Espagne... alors que d’autres, en France ou au Pays-Bas par exemple, s’appuieront sur les droits des femmes ou des homosexuels pour mieux s’attaquer à l’islam.
  • Certains soutiennent la Russie de Poutine, Orban en Hongrie ou Matteo Salvini en Italie, alors que d’autres sont pro-ukrainiens, comme le PiS polonais ou Giorgia Meloni en Italie.
  • Le changement climatique les a aussi séparé, certains d’entre eux niant ses causes humaines, tout comme les campagnes vaccinales contre la Covid-19.
  • La question des droits sociaux les divise également, en France Marine Le Pen, du RN, les défend et réclame verbalement le retour de la retraite à 60 ans (N.D.L.R. : mais dans les faits Marine Le Pen est contre la retraite à 60 ans et la hausse du SMIC[3][4])... alors que Eric Zemmour défend les entreprises et le néolibéralisme.

 

 

-  A la source de l’essor de l’extrême droite, la mondialisation néolibérale...

Depuis plusieurs décennies le monde est entré dans une phase de mondialisation néolibérale, ce qui a entraîné de nombreuses transformations dont certaines sont à la base de l’essor de l’extrême droite[5].

 

Trois d’entre elles sont particulièrement importantes.

  • La première est la croissance des inégalités et les transformations du travail.

Les pays européens, si l’on se réfère à l’indice Gini qui calcule le niveau d’inégalité pays par pays, sont parmi les plus égalitaires. Mais la mondialisation a permis une concentration des richesses toujours plus importante vers un tout petit nombre d’individus, et les élites sont perçues comme un monde à part, déconnecté de la vie quotidienne de la grande majorité de la population. Le néolibéralisme et la mondialisation ont entraîné une transformation profonde du travail, de nombreux emplois industriels ont disparu à cause des délocalisations, et pour ceux qui restent, tout comme ceux du secteur tertiaire, la précarité a progressé et les collectifs de travailleurs se sont fragmentés. Le résultat de ces évolutions, combiné à l’existence d’un filet de sécurité protégeant les plus pauvres, ont entraîné un tassement vers le bas de la pyramide des revenus et un sentiment de déclassement pour la classe ouvrière et les couches moyennes.

 

  • La seconde est l’affaiblissement des capacités des Etats et des institutions traditionnelles face à la puissance des marchés

Une évolution que l’on retrouve dans la plupart des régions du monde mais qui est particulièrement marquée en Europe où l’existence de l’Union Européenne éloigne encore plus les citoyens des lieux de décisions.

 

Dans les décennies qui ont suivi la seconde guerre mondiale, le commerce mondial était très limité, les principaux Etats, en Europe, avaient la possibilité de développer tel ou tel secteur d’activité et la vie politique s’organisait dans un bipartisme droite/gauche. Aujourd’hui les partis de droite ou de gauche dite “ de gouvernement ”, comme les chrétiens-démocrates et les sociaux-démocrates ont des politiques comparables (N.D.L.R. : en France on l'a vu avec l'évolution du PS à partir de 1983 et sa finalité sous Hollande[6]) et ils perdent, des deux côtés, leurs électeurs traditionnels et l’on assiste, dans toute l’Europe à une fragmentation de la scène politique et à une percée de l’extrême droite qui, dans de nombreux pays, dépassent en voix les partis de droite traditionnels, (N.D.L.R. et en France la gauche traditionnelle comme en témoigne les résultats des élections présidentielles 2022 : Jadot : 4,63% ; Roussel : 2,28% ; Hidalgo : 1,75% ; Poutou : 0,77% ; Arthaud : 0,56%[6bis]).

 

  • La troisième transformation est la conséquence d’une « métropolisation » qui est une des conséquence de la mondialisation.

Il s’agit de l’adaptation des grandes villes aux besoins de l’économie néolibérale, à l’intensification des flux commerciaux et financiers et de la mise en relation des économies à l’échelle mondiale. Face à l’affaiblissement du rôle économique des Etats émerge un réseau hiérarchisé de métropoles qui dessine un archipel dominant l’économie mondiale. Mais la métropolisation a pour corollaire le déclin des territoires ruraux et des villes moyennes, très nombreuses en Europe, qui voient disparaître les services publics et la vie de leurs centres villes.

 

 

-  L’enjeu des classes populaires et des territoires ruraux
La percée de l’extrême droite ne peut se comprendre qu’en croisant les trois transformations que nous venons de rappeler. L’extrême droite perce chez les classes populaires et dans les territoires ruraux et les petites villes à cause d’un sentiment – qui est souvent une réalité factuelle – de déclassement et d’abandon face à un Etat qui ne les protège pas et est au service des élites. Toutes les études montrent l’importance des classes populaires dans l’électorat d’extrême droite.

 

Deux exemples :

  • les Démocrates de Suède a obtenu un score de 8% chez ceux qui ont fait des études supérieures et 25% chez ceux qui ont un plus faible niveau d’éducation ;
  • et, en France, le Rassemblement National a recueilli les voix de près de la moitiés des ouvriers mais seulement 15% des cadres[1].

 

La césure entre les métropoles et le reste des territoires est elle aussi frappante. En France presque toutes les grandes villes sont dirigées par la gauche et l’extrême droite y fait des scores très faibles alors que ce parti fait des scores importants dans les petites villes et les territoires ruraux. Une réalité que l’on observe dans de nombreux pays où les métropoles sont souvent plus à gauche que le reste du pays.

 

Ces réalités obligent les forces de gauche et les mouvements sociaux à une discussion stratégique. La gauche de gouvernement, qu’elle soit démocrate aux Etats-Unis, social-démocrate ou écologiste en Europe, a privilégié les questions “ sociétales ”, les droits des femmes, des communautés LGBTQ, l’antiracisme plutôt que les questions sociales qu’elle était prêt, dans la dernière période, à sacrifier aux noms des nécessités de l’économie dans une phase de mondialisation. Face à cette situation, une partie de la gauche explique qu’il faut relativiser les questions sociétales, en particulier sur l’immigration, pour se concentrer sur les questions sociales et tenter, par cette orientation, de regagner les classes populaires qui se sont tournées vers l’extrême droite.

 

Mais une nouvelle génération de mouvements politiques et de mouvements sociaux, en Europe comme dans le reste du monde, veut défendre l’ensemble de ces exigences, les questions sociales bien évidemment, mais aussi la justice climatique et environnementale, les droits des immigrés, des femmes et des minorités LGTB et l’antiracisme (N.D.L.R. : En France, c'est le cas de la France insoumise[7] et de la #Nupes[8]) !

 

Notes :

[0] Qui est Giorgia Meloni, la néofasciste qui s’apprête à gouverner l’Italie

[1Crise politique : le miroir électoral

[2] Les anciens SS ont reconstruit l'extrême droite française après 1945

[3] Marine Le Pen est contre la retraite à 60 ans et la hausse du SMIC

[4] Pouvoir d'achat : alliés, LREM, LR et le RN votent contre l'augmentation du SMIC à 1 500€ proposé par la #Nupes

[5] Le néo-libéralisme est le berceau de l’extrême droite

[6Mais pourquoi Olivier Faure du PS a t-il peur, en 2022, d'une baisse du FN/RN ?

[6bis] Présidentielles 2022 : ne cédons pas à la déception... la lutte continue !

[7] France insoumise

[8] La Nupes : Nouvelle Union populaire écologique et sociale

[9] Allons-nous continuer longtemps à fermer les yeux sur la montée du fascisme européen ? Italie, Hongrie, Pologne…

[1080 ans après, l’ombre de l’extrême droite s’étend sur l’Europe !

 

Pour en savoir plus :

- ÉTAT DES LIEUX DE L'EXTRÊME DROITE EN EUROPE

Le vote d’ouvriers et d’employés pour des candidats d’extrême droite : une problématique à ne pas esquiver

Jean-Luc Melenchon : Le moment brun doit être repoussé par l’action

- Suisse : la droite et l’extrême droite suppriment le salaire minimum

- Italie : le projet de Meloni, une restauration réactionnaire et libérale

- Diaboliser Mélenchon, dédiaboliser Le Pen : le jeu terriblement dangereux de Macron

Que fait l'extrême droite lorsqu'elle est au pouvoir ? La chasse aux précaires. Elle supprime les revenus minimums, comme c'est le cas en Italie

- Juin 2023 : Confirmation de l'alliance droite/extrême-droite en Finlande pour former un gouvernement xénophobe et anti écologie.

LE RETOUR DE L’EXTRÊME-DROITE ALLEMANDE

- Martine Billard : " France : Tentation fasciste ? "

- « Remigration » : l'effroyable projet de l’extrême droite allemande de déporter 2 millions de personnes

- L’extrême droite allemande (AfD) veut déporter 2 millions de personnes, Le Pen et Bardella lui fait un « accueil chaleureux »

Analyse et alternatives - Un changement de période historique 

 

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17 mars 2022 4 17 /03 /mars /2022 09:45
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky, et le président russe, Vladimir Poutine

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky, et le président russe, Vladimir Poutine

La guerre en Ukraine : un objet historique multifacette

 

Dans un contexte où il est difficile de distinguer propagande de guerre et information impartiale, il nous a semblé utile de proposer ici quelques documents permettant d’élargir et d’approfondir notre champ de vision concernant le conflit militaire russo–ukrainien. Pour lire la suite cliquer ICI

 

 

Pour en savoir plus :

- 2015 : La crise russo-ukrainienne accouchera-t-elle d’un nouvel ordre européen ?

- « L’OTAN ne s’étendra pas d’un pouce vers l’est » par Philippe Descamps 

- On l’oublie un peu, mais la crise en Ukraine a surgi aussi sur fond d’enjeux économico-stratégiques mettant en cause le grand projet de M. Vladimir Poutine : l’Union économique eurasiatique (UEE), qui doit prendre effet en janvier 2015. 

- L’INVASION DE L’UKRAINE RENFORCE LA FRACTION MILITARISTE DES ÉLITES AMÉRICAINES

- Jean-Luc Mélenchon : " Pendant la guerre, le monde change sous les radars "

- NATIONALISME EN UKRAINE : MYTHE ET RÉALITÉ

- Ukraine, d’une oligarchie à l’autre

- Eric Toussaint docteur en sciences politiques des universités de Liège et de Paris VIII, porte-parole du CADTM international et membre du Conseil scientifique d’ATTAC France : Pourquoi annuler la dette de l’Ukraine ?

- UKRAINE : LES ÉTATS-UNIS COMPTENT FAIRE LA GUERRE « JUSQU’AU DERNIER UKRAINIEN »

- " Nous marchons vers la guerre comme des somnambules ", pour Henri Guaino

- La remilitarisation de l’Europe sous le regard fatigué de la gauche

- Le problème du nazisme en Ukraine

- NOUVEL ÉLARGISSEMENT DE L’UE : UNE FOLIE ÉCONOMIQUE ET POLITIQUE

- Ce que pensent les classes populaires ukrainiennes de la guerre

 

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2 mars 2022 3 02 /03 /mars /2022 11:58
Guerre en Ukraine : Jean-Luc Mélenchon " pro-Poutine " ? Remettons les pendules à l'heure !

La Russie a lancé son opération militaire en Ukraine  : Jean-Luc Mélenchon a prévenu pendant 10 ans[3bis] !

 

et Anne Hidalgo, Yannick Jadot, sont en campagne et s'agitent !
Un adversaire unique pour exister, qui à leurs yeux serait pro-Poutine
[1][2][2bis]... Jean-Luc Mélenchon !
Dans le même temps, les perroquets médiatiques répètent eux aussi en boucle la même chanson pour le salir !
Or, depuis des années (ci-dessous je remonte à 2012), Jean-Luc Mélenchon critique et s'oppose au poutinisme.
Ça suffit ! Mélenchon président défendra l'intérêt de la France, l'intérêt général humain, la paix !
Quand Jaurès refusait la guerre, on le traitait d’« agent du parti allemand
[3»... quand Jean-Luc Mélenchon défend une France non-alignée au service de la paix, les apprentis de la géopolitique pour les nuls, à la peine dans leur campagne électorale, le traitent de " pro-Poutine "...
L’acharnement de ceux qui utilisent la guerre pour taper sur Jean-Luc Mélenchon ne trompe pas les Français.
Si Poutine est évidemment responsable de la situation, une majorité de Français pense que l’OTAN aussi
[4]...
Le candidat de l'#UnionPopulaire, Jean-Luc Mélenchon est considéré comme le candidat le plus à la hauteur des événements.

 

 

Sources : Durand Eric | mis à jour le 09/03/2025

- Quand en 2014, Jean-Luc Mélenchon annonçait qu'il y aurait la guerre en Ukraine

 

- Quand le 17 mai 2018, Jean-Luc Mélenchon alertait sur le risque de guerre en Europe

Il soulignait que la paix est un objectif et une construction politique. Il rappelait l’importance de l’indépendance de la France pour pouvoir être utile au service de la paix. Il appelait à ne pas mettre le doigt dans l’engrenage qui pourrait conduire à une guerre entre l’OTAN et la Russie.

 

Une vidéo utile à revisionner aujourd'hui alors que la guerre de Poutine en Ukraine a montré la fragilité de la paix en Europe et la difficulté à y revenir une fois l'attaque lancée.

 

  • et plus globalement... Poutine, Russie, Ukraine : ce que dit Mélenchon depuis 10 ans (cliquez sur l'image 👇)

 

Mélenchon : 10 ans d'alerte sur la Russie et l'Ukraine !

 

 

- Alors Jean-Luc Mélenchon ami, aficionado de Poutine ?

 

 

 

- Et maintenant que c'est la guerre, le 24 février, invité de l'émission spéciale de France 2 sur la situation en Ukraine Jean-Luc Mélenchon a fait une proposition simple pour sortir du conflit par le haut

4 ième jour de combat en Ukraine[6]  Plus de trois jours après le début de l’offensive lancée par Vladimir Poutine en Ukraine, des milliers de personnes fuient leur pays. D’autres ont décidé de prendre les armes ou même de faire face aux chars russes à mains nues.

 

En France, Jean-Luc Mélenchon (candidat aux élections présidentielles 2022) a expliqué que s'il était président de la République, il ferait la proposition d'un cessez-le-feu en Ukraine, d'un retrait des troupes russes et de l'engagement d'une discussion sur la neutralité de l'Ukraine

 

Cette proposition a été reprise ce vendredi 25 février par les proches du président de la République ukrainienne, monsieur Zelensky[7]. L'un de ses conseillers se dit notamment prêt à engager des discussions avec Poutine sur la neutralité de l'Ukraine. Côté russe aussi, ces discussions sont souhaitées, même si pour l'heure les conditions posées à l'Ukraine pour une discussion équivalent à une reddition pure et simple. 

 

On le voit : sur ce sujet encore, Jean-Luc Mélenchon propose une solution de règlement du conflit par le haut. En 2022, il faudra choisir un président de la République qui a été capable de prévoir les dangers qui pesaient sur la paix, et a proposé des solutions diplomatiques pour éviter le passage à un conflit armé comme on en connaît aujourd'hui.  

 

 

- Ukraine : Jean-Luc Mélenchon et Hubert Vedrine font la même proposition pour cesser la guerre

 

- 22 février 2022 : Les Russes doivent quitter l'Ukraine

Le jeudi 24 février 2022, Jean-Luc Mélenchon réagissait à l'invasion russe en Ukraine.

  • Il a dénoncé un évènement qui « change le cours de l’Histoire en Europe », et constitue un recul alors que le recours à la force n’était plus considéré comme un des moyens de régler les conflits en sur le vieux continent. Il a appelé à ne pas mollir dans le soutien à l’Ukraine.
  • Il a répété sa position : le non-alignement de la France. Il a expliqué qu'un pays non-aligné pouvait être un acteur de paix, sans que cela signifie la neutralité de la France. 
  • Il a appelé à un retrait des Russes de l'Ukraine, à un cessez-le-feu et à la tenue d'une discussion sur la sécurité en Europe dans le cadre de l'OSCE. Il a aussi dit que les sanctions contre la Russie pouvaient avoir du sens mais qu'elles seraient sans doute inutiles compte tenu de leur inefficacité dans le passé, notamment après la crise en Crimée.
  • Il a expliqué qu'il fallait accepter d'entrer dans le vif du sujet : discuter des garanties pour la sécurité de la Russie et des Européens, même si cela avait pour préalable le retrait russe de l'Ukraine. 
  • Il a dit que le peuple français devait décider des orientations géopolitiques du pays dans l'élection présidentielle. Il a rappelé le choix qu'il propose : une France non-alignée menant une politique altermondialiste au service de la paix.

 

 

- Discours de Jean-Luc Mélenchon sur la guerre en Ukraine prononcé le 1er mars 2022 à l'Assemblée nationale

Face à la volonté de l'Ukraine d'entrer dans l'OTAN et le non positionnement de l'occident pour dire NON, Poutine a fait le choix de la guerre... pour Jean-Luc Mélenchon, le seul but qui doit nous guider, c’est la paix.

 

Jean-Luc Mélenchon a rappelé qu’il n’y a pas d’alternative.... c’est la guerre totale ou la diplomatie. Par conséquent, le choix est vite fait, la France doit prendre une initiative diplomatique radicale : " Il faut rendre la diplomatie plus profitable que la guerre.

 

  • Jean-Luc Mélenchon appelle à la " proclamation de la neutralité de l'Ukraine ", à laquelle le président #Zelensky s'est dit " officiellement prêt ".

 

- Mais au fait, qui sont les amis à Poutine ?

Il existe des photos des candidats et politiciens qui accusent de Jean-Luc Mélenchon de soutenir Poutine ou de lui faire des courbettes.

En revanche, on n’en a aucune de ou il figure...  par contre, en mai 2018, Jean-Luc Mélenchon a rencontré Sergueï Oudaltsov, leader du Front de gauche de #Russie, emprisonné durant 4 ans et demi à la suite des manifestations de 2012 pour des élections honnêtes.

 

À #Moscou, rencontre avec Sergueï Oudaltsov, leader du Front de gauche de #Russie, emprisonné durant 4 ans et demi à la suite des manifestations de 2012 pour des élections honnêtes

 

  • les amis à Poutine... c'est eux !

 

Guerre en Ukraine : Jean-Luc Mélenchon " pro-Poutine " ? Remettons les pendules à l'heure !
Guerre en Ukraine : Jean-Luc Mélenchon " pro-Poutine " ? Remettons les pendules à l'heure !
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Notes :

[1] Anne Hidalgo : "Jean-Luc Mélenchon est devenu l'allié et le soutien de Vladimir Poutine" 

[2] Delphine Batho, porte-parole de la campagne de Yannick Jadot : " JEAN-LUC MÉLENCHON, JAMAIS EN RETARD D'UNE COMPLAISANCE VIS-À-VIS DE POUTINE "

[2bis] Présidentielle : comment Hidalgo et Jadot utilisent la crise ukrainienne pour attaquer Mélenchon

[3] Jaures agent du parti allemand 

[3bisUkraine : Mélenchon a prévenu pendant 10 ans !

[4] Si Poutine est évidemment responsable de la situation, une majorité de Français pense que l’OTAN aussi...

[5] Jean-Luc Mélenchon est considéré comme le candidat le plus à la hauteur des événements.

[6Crise ukrainienne : la Russie lance une opération militaire, l’Ukraine craint « une grande guerre en Europe »

[7Guerre en Ukraine : la présidence ukrainienne déclare avoir accepté des pourparlers avec la Russie à la frontière avec la Biélorussie

 

Pour en savoir plus :

- Jean-Luc Mélenchon : ce qu'il a vraiment dit sur la Russie, Poutine et la Syrie

- Les Européens hors jeu : Ukraine, pourquoi la crise

- Cœur de l'Europe : Les dirigeants des grandes puissances jouent avec le feu

- Jean-Luc Mélenchon : " Ukraine/Russie : l’UE n’a décidément rien compris "

- En octobre 2013, dans un texte écrit en commun, Noël Mamère et Jean-Luc Mélenchon appelaient à la libération des écologistes emprisonnés en Russie.

- Crise autour de l’Ukraine : l’alignement condamne à la figuration

- « J’ai toujours dit que si on menaçait la Russie, elle passerait les frontières », déclare Mélenchon

- Mélenchon : 10 ans d'alerte sur la Russie et l'Ukraine

Jean-Luc Mélenchon : La comédie ukrainienne

- Jean-Luc mélenchon " Macron : La comédie de Moscou "

- Guerre russe en Ukraine : depuis bientôt 10 ans, Jean-Luc Mélenchon lance l’alerte

- Dés 2017 Jean-Luc Mélenchon mettait en garde, et face au danger de guerre en Europe appelait à sortir de l'OTAN

- Jean-Luc Mélenchon " Je condamne la guerre de la Russie en Ukraine "

- Communiqué de Jean-Luc Mélenchon suite au déclenchement de la guerre russe en Ukraine.

- Crise en Ukraine : Mélenchon accuse l'OTAN d'attiser les tensions

- Ukraine : Mélenchon a prévenu pendant 10 ans

- Attaque de la Russie en Ukraine – Communiqué de Jean-Luc Mélenchon

- Guerre russe en Ukraine : La France Insoumise renouvelle sa demande de débat à l’Assemblée nationale

- Jean-Luc Mélenchon : Ukraine - Cessez-le-feu, retrait russe : ce que la France doit proposer

- L'OTAN accroît les tensions en Europe, avec le Général Vincent Desportes 

Ukraine : Mélenchon défend la paix à l’Assemblée et marche dans les pas de Jaurès

- Ukraine : Mélenchon propose la neutralité de Kiev

- 2 Mars, Jean-Luc Mélenchon sur l'Ukraine : face à la menace nucléaire, l’urgence c’est la paix

- Ukraine nucléaire – Communiqué de Jean-Luc Mélenchon

- Jean-Luc Mélenchon le 2 mars 2022 " Ukraine : je veux construire le camp de la paix contre les va-t-en guerre "

- Jean-Luc Mélenchon : " Pendant la guerre, le monde change sous les radars "

- Jean-Luc Mélenchon se désole de l’opacité autour des questions miliaires et de l’absence d’un dialogue sur les décisions prises par l’exécutif. Et demande un débat hebdomadaire au Parlement sur la crise.

- Jean-Luc Mélenchon : La Guerre d’Ukraine doit finir

- Tribune cosignée par Jean-Luc Mélenchon. Guerre en Ukraine : « Nous appelons à redoubler d’efforts diplomatiques pour établir un cessez-le-feu »

« À cette heure, si elle aboutit sur un accord avec la Russie, la manœuvre entreprise par Trump à propos de l’Ukraine sera un coup terrible pour l’Europe. »

- 1 mars 2025 : Tourner la page, c’est passer à la paix générale immédiate pour qu’un autre futur soit possible.

- 2 mars 2025 : UKRAINE. Je renoue déjà avec les joies de la télévision française et de ses chaînes en continu. 

- Jean-Luc Mélenchn : Si tu veux la paix, organise-la !

 

Guerre en Ukraine : Jean-Luc Mélenchon " pro-Poutine " ? Remettons les pendules à l'heure !
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30 janvier 2022 7 30 /01 /janvier /2022 15:18
Cœur de l'Europe : Les dirigeants des grandes puissances jouent avec le feu

Révélation : Comment l’Occident a promis à l’URSS que l’OTAN ne s’étendrait pas à l’Est, par Roland Dumas, ex-ministre des affaires étrangères[0bis]

 

Les bruits de bottes aux portes de l’Europe affolent les chancelleries occidentales.
Deux interprétations s’opposent. Pour les uns, Moscou fait monter les enchères afin d’obtenir des concessions de la part de Washington et des Européens. D’autres au contraire estiment que le Kremlin veut pouvoir prétexter d’une fin de non-recevoir pour justifier un passage à l’acte en Ukraine. Dans tous les cas, la question se pose du moment choisi par Moscou pour engager ce rapport de forces. Pourquoi jouer ce jeu risqué, et pourquoi maintenant ?

Des éléments de réponse dans l'article ci dessous, (article traduit en anglais à partir de l’original arabe de Gilbert Achar publié dans Al-Quds al-Arabi, 25 janvier 2022 [traduction de l’anglais par la rédaction de A l’Encontre])

 

Sources : Alencontre par Gilbert Achcar | mis à jour le 25/05/2022

- Il n’est pas exagéré de dire que ce qui se passe actuellement au cœur du continent européen est le moment le plus dangereux de l’histoire contemporaine et le plus proche d’une troisième guerre mondiale depuis la crise des missiles soviétiques à Cuba en 1962[1].

Il est vrai que, jusqu’à présent, ni Moscou ni Washington n’ont fait allusion à l’utilisation d’armes nucléaires, même s’il ne fait aucun doute que les deux pays ont mis leurs arsenaux nucléaires en état d’alerte face aux circonstances actuelles. Il est également vrai que le degré d’alerte militaire aux Etats-Unis n’a pas encore atteint celui qu’il avait atteint en 1962. Mais le déploiement militaire russe aux frontières de l’Ukraine dépasse les niveaux de concentration de troupes à une frontière européenne observés aux moments les plus chauds de la «guerre froide», tandis que l’escalade verbale occidentale contre la Russie a atteint un stade dangereux accompagné de gesticulations et de préparatifs militaires qui créent une possibilité réelle de conflagration.

 

 

- Les dirigeants des grandes puissances jouent avec le feu.

Macron joue l'apaisement... à sa façon

Vladimir Poutine peut penser qu’il ne fait que déplacer la reine et la tour sur le grand échiquier afin de forcer l’adversaire à retirer ses pièces. Joe Biden peut croire qu’il s’agit d’une bonne occasion pour lui de redorer son image nationale et internationale, très ternie depuis son échec embarrassant dans l’organisation du retrait des forces étatsuniennes d’Afghanistan. Et Boris Johnson peut croire que les rodomontades prétentieuses de son gouvernement sont un moyen bon marché de détourner l’attention de ses problèmes politiques intérieurs. Il n’en reste pas moins que, dans de telles circonstances, les événements acquièrent rapidement leur propre dynamique au son des tambours – une dynamique qui dépasse le contrôle de tous les acteurs, pris individuellement, et risque de déclencher une explosion qu’aucun d’entre eux n’avait initialement souhaitée.

 

 

- En Europe, la tension actuelle entre la Russie et les pays occidentaux a atteint un degré jamais vu sur le continent depuis la Seconde Guerre mondiale.

Les premiers épisodes de guerre qui s’y sont déroulés depuis lors, les guerres des Balkans dans les années 1990, n’ont jamais atteint le niveau de tension prolongée et d’alerte entre les grandes puissances elles-mêmes auquel nous assistons aujourd’hui. Si une guerre devait éclater en raison de la tension présente – même si elle ne faisait initialement que sévir sur le sol ukrainien – la situation centrale et la taille même de l’Ukraine suffisent à faire du danger de propagation de l’incendie à d’autres pays européens limitrophes de la Russie, ainsi qu’au Caucase et à l’Asie centrale, un péril grave et imminent.

 

 

- La cause principale de ce qui se passe aujourd’hui est liée à une série de développements

La première et principale responsabilité incombe au plus puissant qui en a eu l’initiative – c’est-à-dire, bien sûr, les Etats-Unis. Depuis que l’Union soviétique est entrée dans la phase terminale de son agonie sous Mikhaïl Gorbatchev, et plus encore sous le premier président de la Russie post-soviétique, Boris Eltsine, Washington s’est comporté envers la Russie comme un vainqueur impitoyable envers un vaincu qu’il cherche à empêcher de pouvoir jamais se redresser.

Cela s’est traduit par l’expansion de l’OTAN, dominée par les Etats-Unis, en y intégrant des pays qui appartenaient auparavant au Pacte de Varsovie dominé par l’URSS[2], au lieu de dissoudre l’Alliance occidentale parallèlement à son homologue orientale le 1er juillet 1991[3], amenant l'ambassadeur russe auprès de l'UE a dénoncer plusieurs vagues d'élargissement de l'OTAN vers l'Est[0] (VOIR AUSSI : Comment l’Occident a promis à l’URSS que l’OTAN ne s’étendrait pas à l’Est[2bis], par Roland Dumas, ex-ministre des affaires étrangères[0bis]), auquel il convient d'ajouter le non respect des accords de MinskI[1bis] et MinskII[1ter].

L'OTAN de sa création à l'intégration du Monténégro

 

Cela s’est également traduit par le fait que l’Occident a dicté une politique économique de « thérapie de choc » à l’économie bureaucratique de la Russie, provoquant une crise socio-économique et un effondrement d’énormes proportions.

 

 

- Ce sont ces prémisses qui ont le plus naturellement conduit au résultat

Prémisses contre lequel l’un des conseillers les plus éminents de Gorbatchev – un ancien membre du Soviet suprême et du Comité central du Parti communiste de l’Union soviétique –, Georgi Arbatov[4], avait mis en garde il y a trente ans, lorsqu’il avait prédit que les politiques occidentales à l’égard de la Russie conduiraient à « une nouvelle guerre froide[5] » et à l’émergence d’un régime autoritaire à Moscou, renouant avec la vieille tradition impériale de la Russie. C’est ce qui s’est produit avec l’arrivée au pouvoir de Poutine qui représente les intérêts des deux blocs les plus importants de l’économie capitaliste russe (dans laquelle se mêlent capitalisme d’Etat et intérêts privés) : le complexe militaro-industriel – qui emploie un cinquième de la main-d’œuvre industrielle russe, en plus des effectifs des forces armées – et le secteur pétrolier et gazier.

 

 

- Le résultat est que la Russie de Poutine pratique une politique d’expansion militaire qui va bien au-delà de ce qui prévalait à l’époque de l’Union soviétique.

A l’époque, Moscou n’a déployé de forces de combat en dehors de la sphère qui était tombée sous son contrôle à la fin de la Seconde Guerre mondiale que lors de l’invasion de l’Afghanistan à la fin de 1979, invasion qui a précipité l’agonie de l’URSS. Quant à la Russie de Poutine, après avoir retrouvé une vitalité économique, depuis le début du siècle, grâce à l’augmentation du prix des combustibles, elle est intervenue militairement hors de ses frontières à une fréquence comparable à celle des interventions militaires étatsuniennes avant la défaite au Vietnam, et entre la première guerre des Etats-Unis contre l’Irak en 1991 et la sortie peu glorieuse des forces étatsuniennes de ce pays, vingt ans plus tard. Les interventions et les invasions de la Russie ne se limitent plus à son « étranger proche », c’est-à-dire les pays adjacents à la Russie, qui étaient dominés par Moscou à travers l’URSS ou le Pacte de Varsovie. La Russie post-soviétique est intervenue militairement dans le Caucase, notamment en Géorgie[6], en Ukraine (Guerre du Donbass[7]) et plus récemment au Kazakhstan[8]. Mais elle mène également, depuis 2015, une guerre en Syrie[9] et intervient sous un déguisement qui ne trompe personne en Libye[10] et plus récemment en Afrique subsaharienne[11].

 

Ainsi, entre le regain de belligérance russe et la poursuite de l’arrogance des Etats-Unis, le monde se trouve au bord d’une catastrophe qui pourrait grandement accélérer l’anéantissement de l’humanité, vers lequel notre planète se dirige par le biais de la dégradation de l’environnement et du réchauffement climatique.

  • Nous ne pouvons qu’espérer que la raison l’emportera et que les grandes puissances parviendront à un accord répondant aux préoccupations de sécurité de la Russie et recréant les conditions d’une « coexistence pacifique » renouvelée qui réduirait la chaleur de la nouvelle guerre froide et l’empêcherait de se transformer en une guerre chaude qui serait une catastrophe énorme pour toute l’humanité.

 

-----------------------------------

 

🔴 Note personnelle à méditer...

 

1 - L'OTAN AU SERVICE DU MARCHÉ DE L'INDUSTRIE D'ARMEMENT ?

- L'OTAN un outil politico militaire au service du marché ?

Depuis la dissolution de l’Union soviétique en 1991, l’OTAN s’est transformée, à l’initiative des Etats -Unis, d’une organisation de sécurité défensive en une organisation expansionniste et militaire agressive. 

Aujourd'hui, l'objectif de l'OTAN, c'est t-il pas aussi de maintenir les tensions avec la Russie, l'extrême Orient avec la Chine pour justifier l'investissement public dans l'armement, alimenter le PIB, la croissance, l'industrie de l'armement, la finance ?

  • Selon l'institut international de recherche sur la paix de Stockholm, le total des dépenses militaires mondiales s'élève à 1 981 milliards de dollars en 2020, soit une augmentation de 2,6 % en termes réels par rapport à 2019, selon de nouvelles données publiées par le Stockholm International[12] ;
  • Armement.2020, année record pour les dépenses militaires dans le monde[13]

 

- Les Etats-Unis resteront pour longtemps encore le premier budget militaire du monde
L’administration américaine représente 36 % de l’effort militaire mondial, selon le rapport annuel de l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm[14].

Au total, les dépenses militaires de l'alliance atlantique OTAN, représentent 70% des dépenses au monde[15], une large partie étant assurée par les Etats-Unis (70% en 2018[16]).

 

 

Répartition des dépenses militaires par pays en 2018 INFOGRAPHIE LE MONDE

 

Classement des 10 plus importants budgets militaires en 2018 INFOGRAPHIE LE MONDE

 

2 - L'ENJEU DU GAZ EN EUROPE... L'AUTRE DESSOUS DES CARTES EN UKRAINE ? 

- Les Etats-Unis veulent faire blocus contre le gaz russe pour nous vendre leur gaz de schiste liquéfié ainsi une celui de leurs amis Qataris.

L’Europe est plus que jamais le terrain de jeu de la guerre énergétique entre les Etats-Unis et la Russie. L’intrusion des américains sur le marché européen du gaz est récente, grâce à leur révolution du gaz de schiste. Les russes, eux, ont toujours été l’un des premiers fournisseurs de gaz des pays européens avec le Qatar ou l’Algérie, notamment pour la France[17].

 

Mais ce sont surtout les importations en provenance des Etats-Unis qui ont explosé. Elles ont presque triplé, passant de 2,7 millions de tonnes sur l’année 2018 à 7,6 millions sur les neuf premiers mois de 2019. Une poussée due au gigantesque essor du gaz de schiste américain depuis sept ans. "L’essentiel du gaz que les américains exportent est du gaz de schiste", explique un spécialiste du secteur. En France aussi, cette tendance est la même : les importations de gaz américains ont presque quadruplé depuis le début de l’année! Même si elles partaient de très bas[17]…

 

 

- En définitive, la crise Ukrainienne constitue des enjeux inavoués mais majeurs pour les États-Unis

Bien que situé à plus de 8000 km du théâtre d’opération ukrainien[6], les États-Unis sont loin de se désintéresser du conflit qui s’y déroule. Et pour cause : la question ukrainienne intéresse les Américains à au moins trois titres : Géopolitiques, commerciaux, énergétiques[18].

  • Géopolitiques, l’enjeu est ici clair : la crise ukrainienne fournit aux États-Unis une occasion rêvée de proroger la partition de l’Europe engagée dès 1944, à l’aube de la victoire alliée sur les forces de l’Axe.

 

  • Commerciaux : Ici c’est la question de la libéralisation des échanges avec l’UE qui est en jeu. Comme au temps de la guerre froide, l’arme commerciale vient en effet doubler l’arme économique tout en visant à parvenir au même but. Couper la Russie de l’Europe occidentale tout en renforçant la dépendance de cette dernière à l’égard des États-Unis.

 

  • Énergétiques via l’augmentation des capacités d’exportation : c’est un autre aspect caché – et de ce fait souvent méconnu – de la crise ukrai­nienne. Celle-ci pourrait en effet à terme permettre à l’industrie américaine d’aug­menter sensiblement ses capacités d’exportation de gaz naturel.

 

3 - L'Ukraine, c'est aussi :

Pourquoi l'Ukraine compte-t-elle économiquement pour le " marché " et donc l'occident et ce indépendamment des questions géopolitiques et de domination militaire dans une stratégie de nassage de la Russie... ?

  • Pour le savoir, regarder comment la nation indépendante, souveraine et démocratique de l'Ukraine se classe :

🥇1ère réserve européenne de minerais d'uranium ;
🥈2e réserve européenne de minerais de titane - 10e réserve mondiale ;
🥈2e réserve mondiale de minerais de manganèse (2,3 milliards de tonnes, soit 12% des réserves mondiales) ;
🥈2e réserve mondiale de minerais de fer (30 milliards de tonnes) ;
🥈2e réserve européenne de minerais de mercure ;
🥉3e réserve européenne de gaz de schiste (22 milliards de mètres cubes) - 13e réserve mondiale
📌 4e place mondiale en valeur totale des ressources naturelles
📌 7e réserve mondiale de charbon (33,9 milliards de tonnes)
❗️🇺🇦 L'Ukraine est un pays agricole - elle peut répondre aux besoins alimentaires de 600 millions de personnes :
🥇La plus grande superficie de terres arables d'Europe ;
🥉3e plus grande superficie de terre noire (tchornozem) dans le monde (25% du volume mondial) ;
🥇1er exportateur mondial de tournesol et d'huile de tournesol ;
🥈2e producteur mondial d'orge - 4ème exportateur mondial ;
🥉3e producteur mondial de maïs - 4e exportateur mondial ;
- 4e producteur mondial de pommes de terre ;
- 5e producteur mondial de seigle ;
- 5e place mondiale en production apicole - miel, cire, gelée royale, pollen, propolis, venin d'abeille (75 000 tonnes) ;
- 8e exportateur mondial de blé ;
- 9e producteur mondial d'œufs de poule ;
- 16e exportateur mondial de fromages
🇺🇦 L'Ukraine est un pays industrialisé :
🥇 1er producteur européen d'ammoniaque; 
🥈 2е plus grand réseau de gazoducs d'Europe et 4e mondial (142,5 milliards de mètres cubes de capacité de débit de gaz dans l'UE) ;
🥉 3e plus grand parc nucléaire européen - 8e mondial ;
🥉 3e plus long réseau ferroviaire d'Europe - 11e mondial (21 700 km) ;
🥉 3e producteur mondial de localisateurs et d'équipements de localisation (après les États-Unis et la France) ;
🥉 3e exportateur mondial de fer ;
💥 4e exportateur mondial de turbines pour centrales nucléaires ;
💥 4e fabricant mondial de lance-roquettes ;
💥 4e exportateur mondial d'argile ;
💥 4e exportateur mondial de titane ;
💥 8ème exportateur mondial de minerais et concentrés métallurgiques ;
💥 9e exportateur mondial dans l'industrie de l'armement ;
💥 10e producteur mondial d'acier (32,4 millions de tonnes).

 

En conclusion, l’UE est l’un des principaux partenaires commerciaux de l’Ukraine, ce qui signifie qu’il existe plusieurs possibilités d’importer et d’exporter de l’UE vers l’Ukraine, et inversement[20]. 

 

- Les révélations de Roland Dumas : comment l’Occident a promis à l’URSS que l’OTAN ne s’étendrait pas à l’Est
Comme nous l'avons expliqué plus haut, la crise actuelle trouve son origine dans l’extension permanente de l’OTAN depuis la disparition de l’URSS. Et ci-dessous, Roland Dumas dévoile, confirme ce qui a été dit et promis à l’URSS en 1990, en échange de la réunification de l’Allemagne.

 

- L'OTAN accroît les tensions en Europe, avec le Général Vincent Desportes

Général Vincent Desportes, professeur de stratégie à Sciences Po et à HEC : Ukraine : 5ème jour de guerre

 

 

Notes

[0] L'ambassadeur russe auprès de l'UE dénonce plusieurs vagues d'élargissement de l'OTAN vers l'Est

[0bisComment l’Occident a promis à l’URSS que l’OTAN ne s’étendrait pas à l’Est, par Roland Dumas, ex-ministre des affaires étrangères

[1] La crise des missiles de Cuba est une suite d'événements survenus du 14 octobre au 28 octobre 1962

[1bis] Protocole de MinskI

[1terProtocole de MinskII du 11 février 2015

[2] Pourquoi l'OTAN continue à s'élargir vers l'est

[2bis] Des documents récemment déclassifiés révèlent que des dirigeants occidentaux - et non des moindres, comme le président américain George H.W. Bush et le secrétaire général de l'Otan de l'époque Manfred Wörner - avaient assuré au président soviétique Mikhaïl Gorbatchev, que l'Alliance atlantique ne s'élargirait pas à l'est au delà de l'Allemagne de l'Est après la réunification allemande d'octobre 1990.

[3] Dissolution du pacte de Varsovie le 1er juillet 1991

[4] Georgy Arbatov

[5] «Eurasia Letter : A New Cold War», Georgi Aabatov, in Foreign Policy. No.95, Summer 1994 (pp. 90-103)

[6] Géorgie-Ossétie-Russie. Une guerre à toutes les échelles

[7] Guerre du Donbass

[8] Intervention russe au Kazakhstan : le Kremlin défend un partenaire clé

[9] Intervention militaire de la Russie en Syrie

[10] En Libye, ces mercenaires russes “ qui n’existent pas ”

[11] Sociétés militaires privées russes en Afrique subsaharienne

[12] Nouvelles données publiées aujourd'hui par le Stockholm International

[13] Armement.2020, année record pour les dépenses militaires dans le monde

[14] Les Etats-Unis resteront pour longtemps encore le premier budget militaire du monde

[15] Au total, les dépenses militaires de l'alliance atlantique OTAN, représentent 70% des dépenses au monde

[16]  Les dépenses militaires des Etats-Unis ont représenté en 2018 près de 70% des dépenses militaires totales de l'Otan. 

[17] LE GAZ DE SCHISTE AMÉRICAIN INONDE L’EUROPE

[18Russie-Ukraine Les enjeux gaziers du conflit

[19Roland Dumas a été notamment ministre des Relations extérieures de 1984 à 1986 et des Affaires étrangères de 1988 à 1993. Il a ensuite présidé le Conseil constitutionnel de 1995 à 2000.

[20L’UE est l’un des principaux partenaires commerciaux de l’Ukraine, ce qui signifie qu’il existe plusieurs possibilités d’importer et d’exporter de l’UE vers l’Ukraine, et inversement. 

 

Pour en savoir plus :

- 2015 : La crise russo-ukrainienne accouchera-t-elle d’un nouvel ordre européen ?

- Fascisme de masse en Ukraine. Attention !

- Les européens s’étaient effectivement engagés à ce que l’OTAN ne s’étende pas vers l’est. Cet article contient les liens vers les sources de ces informations

- Ukraine et néo-nazis

- 9 avril 2015 : L’Ukraine se réclame de la tradition nazie

- L'Otan rejette l'exigence russe de renoncer à l'adhésion de Kiev

- Les ressources énergétiques et naturelles sont au coeur des conflits internationaux

Les Américains n’ont pas de partenaires. Ils n’ont que des vassaux. Sans sortie de l’OTAN, toute armée européenne ne sert qu’en supplétif de l’armée USA et au service de sa guerre froide.

- Loin de jouer l’apaisement et la voie diplomatique, les États-Unis répondent aux menaces russes par une stratégie d’escalade.

- Quels sont les objectifs de Vladimir Poutine  ?

- La Russie envahit, mais il n’y a pas de bons gars dans la guerre en Ukraine

- Reconstituer le puzzle de la guerre en Ukraine : c’est possible, mais cela demande du temps.

Quand en 2014, Jean-Luc Mélenchon annonçait qu'il y aurait la guerre en Ukraine

- « L’OTAN ne s’étendra pas d’un pouce vers l’est » par Philippe Descamps 

- On l’oublie un peu, mais la crise en Ukraine a surgi aussi sur fond d’enjeux économico-stratégiques mettant en cause le grand projet de M. Vladimir Poutine : l’Union économique eurasiatique (UEE), qui doit prendre effet en janvier 2015. 

- Jean-Luc Mélenchon : " Pendant la guerre, le monde change sous les radars "

- UKRAINE : LES ÉTATS-UNIS COMPTENT FAIRE LA GUERRE « JUSQU’AU DERNIER UKRAINIEN »

Entre 2015 et 2020, malgré l'embargo de l'UE, la France a fourni 152 millions d’euros de matériels pour des chars, des avions de chasse et des hélicoptères de combat aux Russes, révèle « Disclose ».

- " Nous marchons vers la guerre comme des somnambules ", pour Henri Guaino

- La remilitarisation de l’Europe sous le regard fatigué de la gauche

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19 janvier 2022 3 19 /01 /janvier /2022 09:42
Mélenchon 2022... l'insoumission à l'Europe : " Je ne nous laisserai pas dépouiller... je ne cèderai pas "

Jean-Luc Mélenchon :

. « Nous désobéirons à toutes les dispositions des traités qui sont contradictoires à notre programme »...

. « Les conditions sont mûres pour un grand changement en Europe »... « j'appliquerai mon programme quoi qu’il arrive[1] »

 

Qui croit encore sincèrement aux grandes promesses d’une Europe sociale, écologique et démocratique qui nous sont chantées à chaque élection présidentielle ?

Bien peu. Vingt ans de casse des services publics et des droits des travailleurs, de pollution massive, de mise en concurrence sauvage et de privatisation à tout va n’ont fait qu’opposer les institutions européennes aux peuples du continent.

L’histoire réelle de l’Union européenne est celle d’une profonde déception et, depuis 2005, d’une usurpation. En effet, si depuis l‘Europe des six, cette union originelle a changé de nature politique, de géographie, de sens géopolitique, à de nombreuses reprises, un seuil a été franchi dans l’histoire récente. Depuis le « non » au référendum en 2005 par deux des peuples fondateurs, transformé en France en « oui » par un congrès parlementaire de forfaiture, l’Union européenne telle que nous la connaissons aujourd’hui est une construction illégitime face à la souveraineté du peuple français.

L’élection présidentielle de 2022 nous impose d’aborder sérieusement notre relation à l’Union européenne et notre stratégie.

 

Sources : l'Insoumission | mis à jour le 30/01/2022

- Désobéir à l’Union Européenne : l’opt-out comme moyen de pression
Il est clair qu’une bonne partie du programme l’Avenir en Commun n’est pas applicable dans le cadre des traités européens. Mais Jean-Luc Mélenchon est très clair de ce point de vue-là : « La ligne rouge absolue, c’est l’application dans tous les cas de notre programme. Nous utiliserons donc la clause « opt-out » quand les traités sont contraires aux engagements du programme. » C’est-à-dire que la France ne se pliera pas aux exigences de Bruxelles de Berlin et pourra bloquer de nombreuses décisions grâce à son droit de vote.

  • Dans le cadre de cette stratégie, il ne s’agira cependant pas de sortir de l’euro, et donc d’aller vers un « chaos économique et politique ».

 

 

- L’Europe : facteur de division à gauche ?
Il est évident que les positions de l’Union Populaire (NDLR et donc de l'Avenir en commun[2]) et des autres candidatures à gauche ne sont pas conciliables. Pour le moment. Puisque leurs promesses sont incompatibles avec les traités européens, Jean-Luc Mélenchon pense qu’il « peut les convaincre« , surtout qu’il propose à la fois « une politique et le moyen de la mettre en oeuvre ».

 

 

- Du respect des droits de l’homme et de l’État de droit dans l’Union Européenne

Sans réserve, Jean-Luc Mélenchon condamne le non-respect de l’Etat de droit par la Hongrie ou la Pologne[3], « car leurs mesures car elles sont contraires à l’identité française sur les droits de l’homme » . Sur la question de l’immigration, Jean-Luc Mélenchon met en cause directement la responsabilité de l’Union Européenne : « L’UE est directement responsable de l’appauvrissement des gens qui émigrent ». Les migrants doivent faire l’objet d’une répartition équitable entre les pays, pour éviter que certains pays aient en assumer toute la charge, l’insupportable réglementent Dublin. Certains pays doivent assumer leurs responsabilités, comme le Royaume-Uni dont la France n’a « pas à être le garde-frontière ».

 

 

- Défense européenne et rapports avec la Russie
Jean-Luc Mélenchon a pu rappeler dans cette interview l’un de ses mesures-clés : la sortie de l’OTAN, d’autant que, « l’Europe de la défense, [elle], ne peut pas exister ». « La France, qui dispose de la dissuasion nucléaire[4] », doit rester une grande puissance indépendante, non-alignée et altermondialiste. Elle doit « produire son propre armement sans dépendre des importations américaines« . Le candidat de l’Union populaire a pu rappeler que la politique n’était pas dans notre intérêt, et qu’il ne fallait pas s’étonner des troupes russes massées à la frontière de l’Ukraine, dans cette ambiance de nouvelle guerre froide. C’est empreint de cette vision qu’il fait la proposition d’un référendum sous l’égide de l’ONU sur la question de la Crimée.

 

 

- Globalement, nous proposons donc une autre voie : respecter scrupuleusement la souveraineté populaire en Europe et imposer en toute circonstance un principe de non-régression écologique et sociale.

Appliquer le programme quoi qu'il en coûte
A consulter, l'Avenir en commun : notre stratégie en Europe

Notre objectif est simple : le mieux-disant en matière de progrès écologique et social : notre engagement est clair : appliquer notre programme, d’un bout à l’autre.

 

Pour cela, notre stratégie européenne repose sur l’analyse lucide des obstacles posés par les règles européennes à l’application de notre programme et propose une méthode pour lever ces blocages. Elle implique à la fois la construction d’un rapport de force et des mesures unilatérales de désobéissance.

 

L’histoire entière de l’Union européenne est faite de ces rapports de force et coopérations à géométrie variable : il est temps de s’en servir nous aussi pour se donner les moyens de mettre en œuvre notre programme. Faute de quoi, ce serait se condamner aux mensonges électoraux et aux trahisons des précédents gouvernements.

 

Nos adversaires l’ont bien compris et ont toujours su trouver des failles pour obtenir ce qu’ils voulaient : le peuple français a également les moyens de faire respecter sa volonté, en s’appuyant sur le mandat populaire qui aurait été donné à l’ambition que nous proposons avec notre programme l’Avenir en commun.

 

👉 A votre disposition : téléchargement de " Notre stratégie pour l'Europe👇

 

- Le mardi 18 janvier 2022, Jean-Luc Mélenchon tenait une conférence de presse sur les questions européennes.

Un discours net précis instructif et sans concession... ou vous sera notamment expliqué le pourquoi de l'évolution depuis le concept de " Plan A[5]... Plan B[6] " dont il " garde la trame ".

Entretien paru dans Le Monde
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17 janvier 2021 7 17 /01 /janvier /2021 14:21
Crédit photo : afp.com/PHILIPPE HUGUEN

Crédit photo : afp.com/PHILIPPE HUGUEN

Jean Luc Mélenchon : Notre choix n’est ni le chaos, ni le Frexit de principe, ni la soumission aux traités actuels, ni la fumeuse attente résignée d’une renégociation générale. C’est l’application des décisions du vote populaire et donc l’opt-out pour tout ce qui lui fait obstacle... "[1bis]

 

Non, le Brexit n’est pas né uniquement de la colère du peuple contre les élites, mais d’une stratégie d’un pan de la finance, emmené par les hedge funds, désireux de quitter l’UE pour dérégulariser davantage. C’est la thèse d’un essai sombre, qui annonce l’avènement d’un « libertarianisme autoritaire ».

 

Sources : Midi Insoumis, Populaire et Citoyen | mis à jour le 15/05/2024

- Le feuilleton du Brexit s’est souvent apparenté à une pièce de théâtre shakespearienne, avec coups de bluff, trahisons en série et jusqu’à l’assassinat d’une députée

Mais l’essai que viennent de publier deux sociologues français, Marlène Benquet et Théo Bourgeron[1] Quand la City de Londres faisait campagne pour le Brexit ", braque les projecteurs sur un personnage qui ne semblait être, jusqu’à présent, qu’un second couteau du drame en cours : ces hedge funds, fonds de capital-investissement et de trading à haute fréquence, qui prospèrent « aux marges les moins régulées du secteur financier ».

 

En choisissant de s’intéresser, non pas aux ressorts psychologiques des électeurs du Brexit, ou à leurs conditions socioéconomiques, mais aux « intérêts patronaux » de ceux qui l’ont provoqué, La Finance autoritaire (Raisons d’agir) déplace la focale. Elle se penche sur les intérêts économiques des classes dominantes, et ceux, en particulier, de la City de Londres, moins monolithique qu’elle n’est souvent décrite. « Le Brexit est la répercussion d’une opposition économique, devenue conflit institutionnel et politique, entre deux fractions du patronat financier », écrivent Benquet, chargée de recherche au CNRS, et Bourgeron, post-doctorant à Dublin.

 

 

- Ces deux universitaires vont plus loin

Ils font du Brexit « le premier exemple significatif du basculement d’un pays du néolibéralisme vers le libertarianisme autoritaire », une dynamique également à l’œuvre, selon eux, dans les États-Unis de Trump ou au Brésil de Bolsonaro. Le Brexit a souvent été narré comme « l’histoire d’un mauvais calcul stratégique », le résultat d’un aventurier opportuniste nommé David Cameron, désireux d’asphyxier le UKIP de Nigel Farage sur sa droite. Mais ce récit manquerait peut-être l’essentiel : la bataille à laquelle se sont livrés, au cours de l’année 2016, deux pans de la finance, l’une « historique » (banques, assurances, etc.), l’autre, alternative, autour des fonds spéculatifs.

 

La principale différence entre ces deux acteurs de la City, pour reprendre la terminologie marxiste maniée par les deux auteurs, est liée à leur « mode d’accumulation » :

  • les premiers s’enrichissent avant tout sur les marchés boursiers ;
  • les seconds interviennent sur des marchés de gré à gré, c’est-à-dire non organisés.

Benquet et Bourgeron opposent une « première financiarisation » à une « seconde financiarisation », encore moins régulée. Les deux forces se trouvent désormais « en concurrence pour la négociation d’un régime politique d’accumulation institutionnalisant leur droit à accumuler ».

 

 

- L’une des pièces maîtresses de leur raisonnement est un travail de compilation inédit

A partir des chiffres publiés par la Commission électorale du Royaume-Uni, ils ont analysé l’origine des 349 lignes de dons accordés par 313 donateurs distincts aux plateformes en faveur du maintien (remain) ou du divorce (leave) – soit 33 millions de livres (37 millions d’euros environ) dépensées en cinq mois.

 

Alors que les médias ont souvent écrit que la City tremblait devant la perspective d’un Brexit, ils observent que 57 % des recettes de la campagne en faveur du " leave " (partir) proviennent du secteur financier, contre 36 % pour celle du " remain " (rester). En affinant les recherches, ils découvrent que les " hedge funds " (fonds spéculatifs) ont consacré près de 90 % de leurs ressources au leave.

 

👉 Au total, la campagne du leave est financée à 94 % par des acteurs de ce qu’ils nomment « la seconde financiarisation ».

 

La presse britannique a déjà souligné, ces dernières années, le rôle discret joué dans la campagne par certains gestionnaires de hedge funds, Arron Banks, mécène du Ukip et cofondateur de la plateforme Leave.EU, étant sans doute le plus connu (Mediapart avait publié son portrait ici). Des journalistes, à l’instar de Peter Geoghegan (Democracy for sale, 2020), ont publié des essais ultradocumentés sur l’opacité des financements de la campagne du leave (Mediapart en a parlé en 2019).

 

..............................................

 

- Quels enseignements en tirer ? Regardons ce qu'en dit la France insoumise (extrait)[2]

Partant du constat que le Brexit est une sortie néolibérale de l’Union européenne, et donc la pire envisageable, les citoyens et citoyennes que nous sommes doivent tirer les leçons de cet épisode :

  • 1- La Commission européenne confirme qu’elle ne sait, ne peut, ni ne veut négocier. Elle est soumise à des impératifs idéologiques si puissants qu’elle ne sait faire preuve d’aucune souplesse. On peut sans risque affirmer que ce qui lui importe essentiellement dans cette négociation Brexit c’est d’imposer un accord qui se voudrait punitif pour ne pas donner l’exemple à ceux des autres peuples qui pourraient être taraudés par l’idée de la quitter ;
  • 2- Le Brexit est une sortie néolibérale de l’Union européenne, et donc la pire envisageable. Cela confirme que sortir de l’UE pour sortir de l’UE n’est pas un programme. Car dans cette affaire, une seule certitude demeure : avant comme après, les Britanniques subiront la même politique néolibérale, au moins aussi féroce, voire pire. L’important consiste bien pour nous à se fixer des objectifs politiques et sociaux de justice sociale, environnementale et fiscale, et de les appliquer. Dès lors que, ces objectifs étant fixés, l’UE est un obstacle, il faut la combattre comme telle ;
  • 3- Instaurer un rapport de forces est la condition nécessaire au changement. L’UE est obstacle au changement, il faut instaurer avec elle un rapport de forces et ne pas imaginer que la négociation soit réellement possible avec l’UE telle qu’elle est.

 

- Jean-Luc Melenchon : Vous tuez l'idée européenne
On ne tuera jamais si bien et si efficacement l’idée européenne qu’en la traitant comme on est en train de le faire... 

 

  • Les propositions de la France insoumise :

« L’Avenir en commun, en Europe aussi ! » : Ce document programmatique pour les élections européennes est proposé par l’espace du programme de La France insoumise, coordonné par Charlotte Girard et Boris Bilia[3].

« L’Avenir en commun, sortir des traités européens » : Plan A : Proposer une refondation démocratique, et appliquer un « plan B » en cas d’échec des négociations[4]

 

Notes :

[1] Quand la City de Londres faisait campagne pour le Brexit

[1bisJean Luc Mélenchon

[2France insoumise : Brexit ou le jeu de dupes 

[3] « L’Avenir en commun, en Europe aussi ! »

« L’Avenir en commun, en Europe aussi ! » téléchargeable

[4] « L’Avenir en commun, Sortir des traités européens »

 

Pour en savoir plus :

- Ce que contient l'accord post-Brexit entre l'UE et le Royaume-Uni

- Les eurodéputés de La France insoumise pointent les impasses actuelles de la construction européenne. Ils s'opposent au dumping social et écologique et à l'évasion fiscale.

- Brexit, pas touche au marché unique

- Accord de Brexit: les paradis fiscaux ont de beaux jours devant eux ! (Fabien Roussel - PCF)

- Manon Aubry, députée européenne France insoumise : " Avec l'accord Brexit, le Royaume-Uni pourra tranquillement  inonder gratuitement le marché Drapeau de l'Union européenne sans en respecter toutes les normes sociales, fiscales & environnementales. La porte ouverte au dumping ! "

- C'est la faute à l'Europe, c'est la faute à l'Europe..... STOP !

- Brexit : Bruxelles prête à de la créativité, pas à une atteinte au marché unique !

- Europe : Le Pen et le FN/RN rejoignent la niche. Jusqu’au bout

- Brexit : 40% des camions qui reviennent du Royaume-Uni sont... vides, n'ayant bien souvent pas de marchandises à ramener

- Younous Omarjee, député européen France insoumise, tenait une conférence de presse sur la Réserve d'ajustement au Brexit, aux côtés de Pascal Arimont, son rapporteur (Cet instrument devrait tempérer les effets socioéconomiques du retrait britannique dans les régions impactées)

La cause du Brexit est parfaitement claire : le peuple est stupide et les élites devraient le dissoudre

- Brexit : deux tiers des Britanniques favorables à un référendum pour rejoindre à nouveau l’Union Européenne

« IL NE SUFFIT PAS DE SORTIR DE L’EURO POUR REDEVENIR SOUVERAIN »

- POURQUOI ASSOCIER LE BREXIT À L’EXTRÊME-DROITE EST TROP SIMPLISTE

 

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16 janvier 2021 6 16 /01 /janvier /2021 15:14
Vert foncé : États ayant signé et ratifié ; Vert clair : États ayant signé, mais pas ratifié

Vert foncé : États ayant signé et ratifié ; Vert clair : États ayant signé, mais pas ratifié

Le rôle du traité Ciel ouvert comme instrument de renforcement de la confiance et de la sécurité a été miné par l'administration Trump !

Que fera Joe Biden, qui annonce la production de nouveaux décrets revenant sur des décisions prises par Trump ?... C'est notre sécurité globale qui est en cause !

 

Sources : Midi Insoumis, Populaire et Citoyen | modifié le 057/08/2022

- Les Etats-Unis de Trump se retirent officiellement du traité de désarmement sur les armés nucléaires de portée intermédiaire
Le 2 août 2019[1], les Etats-Unis sortaient officiellement du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (INF), ouvrant de ce fait la voie à une nouvelle course aux armements.

 

Après six mois d’attente, la procédure de retrait de l’accord, lancée par Donald Trump en février 2019, est arrivé à son terme et débouchera donc sur la fin du traité bilatéral ratifié par les États-Unis en 1993.

 

Les Etats-Unis, s’ils ont assuré ne pas vouloir déployer de nouveaux missiles nucléaires en Europe, n’ont formulé aucune promesse quant au potentiel déploiement d’armes conventionnelles. Enfin, l’avenir du traité START[3] de réduction des arsenaux nucléaires stratégiques, qui arrive à échéance en février 2021, est également en question.

 

 

- Qu’est-ce que le Traité "" Ciel ouvert " dont les Etats Unis trumpistes se sont retirés en 2020 ?
C'est en 1989, que le président George Bush relançait l'idée d'un Traité « Ciel ouvert[2] ». Le Traité “ Ciel ouvert ” (« Open Skies » en anglais) est avant tout un traité militaire, basé sur la confiance.

 

Après des négociations entre les membres de l'OTAN et du Pacte de Varsovie (dissous en 1991), les discussions englobent au fil des années de plus en plus de pays, il est signé à Helsinki le 24 mars 1992. La Russie le signait en 2001, ce qui permettait l'entrée en vigueur du traité, ratifié par 35 pays, au 1er janvier 2002 , et compte actuellement trente-quatre États (depuis le retrait des USA). Il permet aux signataires des accords de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe de survoler leurs territoires respectifs pour vérifier leurs mouvements militaires et les mesures de limitation des armements des uns et des autres.

 

 

- Les Etats-Unis se retirent officiellement du traité « Ciel ouvert » (23 novembre 2020)
Annoncé depuis le 21 mai 2020 par le président américain Donald Trump, le retrait des Etats-Unis du traité « Ciel ouvert », est devenu effectif et officiel le 22 novembre 2020.

 

Du fait de cette décision, les Etats-Unis ne pourront plus effectuer de vols d’observations non armés au-dessus du territoire russe ou de celui des autres pays signataires du traité « Ciel ouvert ». Ils ne pourront pas non plus, en théorie, bénéficier des renseignements transmis en vertu de l’accord. Cependant, il est possible que les Etats-Unis demandent des photographies aériennes de la Russie prises par d’autres membres de l’OTAN, tout en interdisant les vols russes équivalents au-dessus des installations militaires américaines.

 

Le chef de la diplomatie allemande a ensuite souligné qu’il regrettait la décision prise par l’administration Trump, estimant que le traité « Ciel ouvert » contribuait au renforcement de la confiance et à la promotion de la sécurité dans tout l’hémisphère nord « de Vladivostok à Vancouver[3bis]».

 

Moscou, en outre, voit d’un mauvais œil ce retrait américain : « Le retrait des Etats-Unis de ce traité signifie non seulement un coup porté aux fondements de la sécurité européenne mais aussi aux instruments de la sécurité militaire existants et aux intérêts essentiels de sécurité des alliés mêmes des Etats-Unis[4] », avait estimé fin mai 2020 le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Alexandre Grouchko. « Ce n’est pas un traité bilatéral, mais multilatéral. Et une décision si brusque affectera les intérêts de tous les participants sans exception [4]», avait-il également regretté.

 

 

- La Russie annonce son retrait du traité Ciel ouvert en réaction au départ de Washington
Dans un communiqué de presse publié le 15 janvier 2021, le ministère russe des Affaires étrangères a annoncé entamer son retrait du traité " Ciel ouvert " que les Etats-Unis avaient quitté fin novembre[5]. Ce texte permet de vérifier la réalité des limitations des armements des pays signataires.

 

Déplorant les « dommages » causés à « l’équilibre » de ce texte par le retrait américain, Moscou déplore en outre que ses « propositions concrètes correspondant aux dispositions fondamentales du traité », visant à « maintenir sa viabilité dans les nouvelles conditions », n’aient pas « reçu le soutien des alliés américains ».

 

Notes :

[1] Les États-Unis sortent du traité de désarmement INF conclu avec la Russie en 1987

[2] Traité Ciel ouvert

[3] Traités Start de réduction des armes stratégiques

[3bis] La sécurité européenne devient l’affaire de l’UE seulement

[4Retrait américain du traité "Ciel ouvert": un "coup" à la sécurité européenne, affirme Moscou

[5] Pourquoi la Russie se retire du traité " Ciel ouvert "

 

Pour en savoir plus :

- Communiqué des ministères des Affaires étrangères suite à l’annonce du gouvernement des États-Unis de son intention de se retirer du Traité ciel ouvert (22 mai 2020)

- La remilitarisation de l’Europe sous le regard fatigué de la gauche

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27 octobre 2020 2 27 /10 /octobre /2020 18:56
C'est la faute à l'Europe, c'est la faute à l'Europe..... STOP !
C'est la faute à l'Europe, c'est la faute à l'Europe..... STOP !
C'est la faute à l'Europe, c'est la faute à l'Europe..... STOP !
C'est la faute à l'Europe, c'est la faute à l'Europe..... STOP !
C'est la faute à l'Europe, c'est la faute à l'Europe..... STOP !
C'est la faute à l'Europe, c'est la faute à l'Europe..... STOP !
C'est la faute à l'Europe, c'est la faute à l'Europe..... STOP !
C'est la faute à l'Europe, c'est la faute à l'Europe..... STOP !

L'Europe a bon dos !...

- Il y a nécessité de remettre les choses dans l'ordre, ce n'est pas l'Europe qui fixe la politique européenne,... mais les gouvernements des États qui la compose !

- Si les pays qui compose l'Europe étaient antilibéraux... l'Europe mènerait une politique antilibérale !

et en tout état de cause, « Il ne suffit pas de sortir de l'Europe pour devenir souverain ![17] »

 

L'Europe au quotidien, c'est dans les territoires qu'elle se vit : agriculture, aménagement du territoire, pêche, cohésion sociale, services publics, etc....
Donc " Tout le monde parle de l'Europe ! Mais c'est sur la manière de faire cette Europe que l'on ne s'entend plus ! ". Jean Gabin dans " Le Président " (1961)
Et si, en fait, l'Europe n'avait pour rôle que :
- de faire adopter des mesures que les États membres ne peuvent pas faire passer ;
- de servir d'alibi à ces États pour leur permettre de dire :... " C'est pas nous, c'est Bruxelles " !

Et si la désobéissance aux traités et directives européennes était conçue et popularisée comme un outil capable d’accélérer l’émergence d’une communauté politique, un embryon de peuple européen ?


Sources : Eric Durand | mis à jour le 15/05/2024

-C'est la commission européenne qui en fait dirige l'Europe
Rappel sur son rôle :

  • Instituée par le traité de Rome de 1957, la Commission européenne est l'une des principales institutions de l'Union européenne, avec le Conseil de l'Union européenne, le Parlement européen et le Conseil européen. Elle est la seule institution en mesure de proposer de nouveaux textes législatifs. Ceux-ci sont, dans la plupart des cas, soumis au Parlement européen et au Conseil de l'Union européenne puis appliqués dans les Etats membres[1] ;
  • Elle constitue surtout l'organe "exécutif " de l'Union européenne. Une fois les actes législatifs adoptés, la Commission européenne veille à leur application, sous le contrôle de la Cour de justice de l'UE (CJUE). De surcroît, elle gère les politiques de l'UE et alloue les financements européens : elle fixe les priorités budgétaires de l'UE, établit les budgets annuels (qui doivent être approuvés par le Parlement et le Conseil), et contrôle la façon dont les fonds sont utilisés. Enfin, à l'exception de la politique étrangère et de sécurité commune, elle assure la représentation extérieure de l'UE[1].

 

Composition :

  • Elle est composée d'un commissaire européen par État membre, soit 27 commissaires[2] ;
  • Ceux-ci sont proposés par les chefs d'État ou de gouvernement des États membres réunis au sein du Conseil européen, et approuvés par le Parlement européen[2] ;

 

-La commission, la politique qu'elle mène, sont la traduction de la situation politique de chaque pays (de la gauche à l'extrême droite)

Question : qui imaginerai qu'un pays propose à Bruxelles un commissaire qui ne soit pas en adéquation avec l'orientation politique de ce pays ?

  • Quand les pays sont politiquement, socialistes (sociaux démocrates), à droite ou à l'extrême droite, ils désignent un commissaire pour porter une politique libérale, ultralibérale.... et l'Europe mène une politique libérale ou ultralibérale ;
  • Si les pays étaient à gauche, ils désigneraient un commissaire pour porter une politique de gauche.... et l'Europe mènerait une politique.... de gauche (on ne va pas débattre de la notion de " gauche ") !

 

-La politique menée par l'Europe est donc celle que les pays membre de l'Europe demandent aux commissaires qu'ils ont désignés... de mener
Ainsi, à votre avis, quelle politique les commissaires désignés par la France (voir liste ci dessous) ont-ils eu pour mandat de mener : une politique de gauche ? Evidemment que non !.... et il en est de même dans chaque pays !

 

Robert Marjolin SFIO Raymond Barre UDF
Jean-François Deniau UDF Claude Cheysson PS
François-Xavier Ortoli Parti gaulliste Edgard Pisani PS
Jacques Delors PS Christiane Scrivener Parti républicain
Édith Cresson PS Yves-Thibault de Silguy Parti gaulliste
Michel Barnier UMP Pascal Lamy PS
Jacques Barrot UMP Pierre Moscovici PS
Thierry Breton Grand patron et homme de droite    

 

 

Derniers points :

  • Les traités adoptés par Bruxelles doivent être ratifiées par les parlement de chaque pays[3]..... ce qui est fait quasi systématiquement en France ;
  • Les règlements et les décisions deviennent automatiquement contraignants dans toute l’UE à la date de leur entrée en vigueur. Les directives doivent être transposées par les pays de l’UE dans leur législation nationale[5] ;
  • Inscrite depuis un demi-siècle dans la jurisprudence, le principe de « primauté » du droit européen signifie que le droit de l'Union prévaut sur les droits nationaux des États membres. Il bénéficie à toutes les normes de droit européen disposant d'une force obligatoire et s'exerce à l'égard de toutes les normes nationales[4].

 

-Aujourd'hui.... quitter l'Europe (Frexit) pour changer de politique en France ?

D'une manière récurrente, cette demande revient sur les réseaux sociaux, or :

  • affirmer que c'est l'Europe qui dirige la France est.... FAUX, car Bruxelles mène la politique que les pays membres lui demande de mettre en oeuvre (via le parlement et la commission) !
  • Et quand Bruxelles mène une politique de droite (néolibérale), et qu'en France nous avons un gouvernement néolibéral, le « capitalisme populaire [7] » prôné par Emmanuel Macron, affirmer qu'il conviendrait de quitter l'Europe via un Frexit pour mettre en oeuvre une autre politique est.... ARCHI FAUX !

 

-Alors qu'elle issue ?

Pour mener une autre politique, il faut d'abord œuvrer à ce que le peuple prenne le pouvoir en France, comme en Bolivie[8], au Chili[9].

 

C'est tout le sens de la stratégie politique mise en oeuvre par la France insoumise, pour, au travers de la " Fédération populaire[10] " rassembler sur les causes communes autour de l'avenir en commun[11].

 

Et une fois le pouvoir pris, la Constituante[12] lancée  pour changer de fond en comble la Constitution, abolir la monarchie présidentielle et restaurer le pouvoir de l'initiative populaire (La 6e République commencera et ce sera une refondation de la France elle-même), la question de l'Europe sera posée !

 

 

-  Pas de frexit, mais au pire, une sortie des traités comme le propose la France insoumise

En effet, lorsqu'il y aura un gouvernement France insoumise, trois issues seront devant nous[13] dans les discussions avec nos partenaires européens. Toutes d'ailleurs reviennent à une sortie des traités.

  • Première possibilité : nous proposons un nouveau traité. La négociation se passe bien, et le nouvel accord est adopté ;
  • Autre possibilité : c'est non, ou plutôt c'est nein, et nous employons une option de retrait, c'est ce qu'a fait pendant longtemps le Royaume-Uni, qui consiste à se mettre d'accord avec nos partenaires pour ne pas appliquer certaines règles ;
  • Enfin, si c'est encore nein, il ne nous resterait plus que la désobéissance unilatérale concernant les traités

 

🔴 FONDAMENTAL : Beaucoup de gens ignorent que désobéir aux traités européens, c’est légal[14].

  • En droit, l’Union européenne n’est ni un super-État, ni un État fédéral. C’est une organisation internationale. Autrement dit, contrairement par exemple aux États-Unis d’Amérique, elle n’a pas de souveraineté. Il n’existe que la souveraineté des États membres, dont la France, qui consentent, uniquement parce qu’ils ont souverainement signé des traités, à en appliquer les règles ;
  • Par conséquent la France a parfaitement le droit, en exerçant sa souveraineté, de décider qu’elle n’applique plus telle ou telle disposition des traités. Cela s’appelle « l’option de retrait[15] ». Elle peut le faire de façon négociée : par exemple, le Danemark a négocié avec les autres pays de l’Union qu’il ne participerait pas à l'Euro (l'accord d'Édimbourg), alors que Schengen est prévu par les traités. La France peut aussi le faire unilatéralement : par exemple, la Suède a voté « non » par référendum sur l’adhésion à l’euro et depuis, elle n’utilise pas cette monnaie alors que cette dernière est prévue par les traités.

 

Il faut donc arrêter les réactions hystériques quand la France insoumise parle de désobéir aux traités européens : c’est légal, ça s’appelle « l’option de retrait ». Quant à savoir avec quels autres pays membres la France lancerait une grande « option de retrait », tout dépend quels gouvernements seront en place en Europe quand les insoumis auront pris le pouvoir par les urnes.

 

🔴 EN DÉFINITIVE...

 la désobéissance aux traités et directives européennes peut aussi être conçue et popularisée comme un outil capable d’accélérer l’émergence d’une communauté politique, un embryon de peuple européen[16].

 

 

-Concrètement que veut mettre en oeuvre la France insoumise...

  • Plan A. Proposer une refondation démocratique, sociale et écologique des traités européens par la renégociation (c'est la sortie concertée des traités européens par l'abandon des règles existantes pour tous les pays qui le souhaitent et la négociation d'autres règles.)

 

C'est la faute à l'Europe, c'est la faute à l'Europe..... STOP !
  • ​​​Plan B. en cas d'échec des négociations (c'est la sortie des traités européens unilatérale par la France pour proposer d'autres coopérations. L'UE, on la change ou on la quitte. Le mandat de négociation de ces plans sera soumis au préalable à l'Assemblée nationale. La validation de ce processus passera nécessairement par une décision du peuple français par référendum).
C'est la faute à l'Europe, c'est la faute à l'Europe..... STOP !

 

-  Il faut sortir des traités européens (Jean-Luc Melenchon)

Intervention de Jean-Luc Mélenchon à l'Assemblée nationale le 20 février 2018 dans le cadre du débat sur l'élection des représentants au Parlement européen. Il a dénoncé la construction d'une Europe dans laquelle les peuples n'ont pas la capacité de s'exprimer puisque le Parlement européen n'a aucun pouvoir.

 

Il a expliqué que l'Union européenne ne permettait pas la solidarité entre les peuples puisqu'elle refuse l'harmonisation sociale et fiscale et donc la fraternité, à l'heure où l'extrême droite progresse à l'Est de l'Europe et est désormais donnée comme la deuxième force politique en Allemagne. Face à cette impasse, Jean-Luc Mélenchon a appelé à sortir des traités européens actuels et à « refonder l'Europe de la cave au grenier ».

 

Précision :

Je n'ai volontairement pas parlé du rôle du parlement européen qui s'inscrit dans la même logique. Car même si parfois il est est amené à adopter des décisions dont nous ne pouvons que nous satisfaire ( ex : la reconnaissance de l’esclavage comme crime contre l’humanité !), globalement sa composition politique allant des conservateurs aux libéraux leur donne 546 sièges sur 751[6].

 

Notes :

[1Rôle de la Commission européenne

[2] la Commission européenne compte actuellement un commissaire par Etat membre

[3] les résolutions prises par Bruxelles doivent être ratifiées par les parlement de chaque pays

[4] Primauté du droit de l'Union européenne

[5] Appliquer la législation européenne

[6] Evolution des rapports de force au Parlement européen

[7] Qu'est-ce que le «capitalisme populaire» prôné par Emmanuel Macron ?

[8Le 18 octobre, le candidat du Mouvement vers le socialisme (MAS), Luis Arce, a été élu président de l’Etat plurinational de Bolivie dès le premier tour

[9] Fin de l’ère Pinochet et début de la Constituante, une nouvelle page de l’histoire du Chili s’ouvre aujourd’hui !

[10] De la nécessité de la fédération populaire

[11] L'Avenir en commun : Le programme de la France insoumise

[12] L'Avenir en commun : La constituante

[13] PAS DE FREXIT MAIS UNE SORTIE DES TRAITÉS: LA FRANCE INSOUMISE EXPLIQUE SON DISCOURS SUR L'EUROPE

[14] Beaucoup de gens ignorent ceci : désobéir aux traités européens, c’est légal

[15] Le Danemark a un opt-out (« option de retrait ») pour l’euro

[16] « Rompre avec le néolibéralisme en désobéissant aux traités européens »

[17« IL NE SUFFIT PAS DE SORTIR DE L’EURO POUR REDEVENIR SOUVERAIN »

 

Pour en savoir plus :
-
Pour Jacques Généreux : "Le seul moyen de faire bouger l’Europe, dit-il, c’est de violer les traités » 

- « L’Avenir en commun, en Europe aussi ! » (document programmatique de la France insoumise pour les élections européennes)

- Jean-Luc Mélenchon : « Je suis un indépendantiste français »

- Suite au refus de ratification du CETA par Chypre, l'accord entre l'Union européenne et le Canada ne ne devrait plus être appliqué

- La Pologne et la Hongrie bloquent le plan de relance européen

- Jean-Luc Mélenchon : Qui s’en fout de l’Europe ? Les eurolâtres !

- POURQUOI ASSOCIER LE BREXIT À L’EXTRÊME-DROITE EST TROP SIMPLISTE

 

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  • Pour une Révolution citoyenne par les urnes
  • Retraité SNCF, engagé politiquement depuis l'âge de 15 ans, militant du PCF de 1971 à 2008, adhérent au Parti de Gauche et à la France Insoumise depuis leur création, ex secrétaire de syndicat, d'Union locale et conseiller Prud'homme CGT  de 1978 à 2022.
  • Retraité SNCF, engagé politiquement depuis l'âge de 15 ans, militant du PCF de 1971 à 2008, adhérent au Parti de Gauche et à la France Insoumise depuis leur création, ex secrétaire de syndicat, d'Union locale et conseiller Prud'homme CGT de 1978 à 2022.

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