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19 septembre 2022 1 19 /09 /septembre /2022 10:57
Crise politique : le miroir électoral

Les ceintures populaires des métropoles se sont portées un peu plus vers la gauche et les espaces extramétropolitains sont allés un peu plus vers l’extrême droite : les deux constats ne s’opposent pas l’un à l’autre ; ils sont deux faces de la même réalité.

 

Abstention, rapport des forces gauche/droite, vote des fonctionnaires, ancrage des idées d’extrême droite... Le résultat du cycle électoral 2022 continue de nourrir de vigoureux débats à gauche. Deux enquêtes récentes fournissent de nouveaux éléments de compréhension. Analyse de Roger Martelli.

Deux rapports viennent compléter les regards portés sur les élections de l’année. Le premier est paru cet été sur le site de Fondapol, la fondation de droite présidée par Dominique Reynié, sous le titre « Mutations politiques et majorité de gouvernement dans une France à droite[1] ». Le second est une note de recherche du politiste Luc Rouban, paru sur le site du Cevipof et portant sur « le vote des fonctionnaires à l’élection présidentielle de 2022[2] ». Les deux études s’appuient sur des données de l’institut de sondage OpinionWay, téléchargeables sur le site de Fondapol[3]. Nous en résumons ici les principales conclusions.

 

Sources : Regards.fr par Roger Martelli | mis à jour le 29/11/2022

- Abstention : vers l’infini et au-delà ?
La crise politique s’épaissit. L’abstention grandit, d’élection en élection. À la présidentielle, elle est passée de 15,3% en 1965 à 27,9% en 2022. Aux législatives, elle s’incruste au-delà du seuil des 50%. L’enquête OpinionWay nous en livre les ressorts, sociologiques et politiques.

 

(1) La colonne additionne le pourcentage des interviewés qui répondent : « Parce qu’aucun candidat ne correspond à mes idées », « C’est ma façon de protester contre le système politique actuel », « C’est la même politique qui est menée quel que soit le résultat » et « Mon vote ne sert à rien ».

 

L’abstention législative garde les caractéristiques sociologiques qui séparent les catégories les plus aisées (35% d’abstentions chez les revenus mensuels supérieurs à 3500 euros) et les chômeurs (75% d’abstentions). L’âge, les faibles revenus, les statuts jugés inférieurs et les formations courtes continuent de creuser la distance des individus avec le fait électoral. Mais le motif de la prise de distance reste ouvertement politique : la moitié des abstentionnistes invoquent l’absence d’intérêt pour une élection dont on estime volontiers qu’elle ne sert à rien.

 

La dimension protestataire du vote est renforcée par la distribution des résultats. Les partis dominants n’ont plus le vent en poupe. Le PS et l’UMP se partageaient 56% des suffrages présidentiels en 2012, 26% en 2017 et 6% à peine en 2022. Le total des suffrages obtenus par Macron, Pécresse et Hidalgo approche tout juste le quart des électeurs inscrits (en 2017 encore, les candidats supposés « gouvernementaux » en totalisaient 38,2%).

 

 

- Tout va bien pour le RN !
Si la coalition des députés composant la Nupes forme le second bloc derrière la majorité relative macronienne, c’est le Rassemblement national qui peut se présenter comme le premier groupe d’opposition. Le plus préoccupant est que ses réserves électorales semblent loin d’être négligeables : 55% seulement des électeurs de Marine Le Pen du mois d’avril sont allés aux urnes en juin et ils sont plus nombreux (58%) que ceux de Jean-Luc Mélenchon (40%) à expliquer que leur absence est un geste de protestation contre le système électoral.

 

Quelle que soit l’élection de référence, présidentielle ou législative, premier ou second tour, l’extrême droite est le courant politique qui a le plus progressé en cinq ans. Cette progression n’est pas seulement l’effet d’un choix par défaut : 39% des électeurs se disent « tout à fait » ou « plutôt d’accord » avec les idées du RN (le pourcentage est de 28% pour LFI). Du coup, près de la moitié des interrogés (47%) voient comme « une bonne chose » l’entrée en force de l’extrême droite à l’Assemblée.

 

Les élections suggèrent donc, tout à la fois, une poussée de l’extrême droite – y compris en dehors de ses zones de force devenues traditionnelles – et une droitisation de la droite. C’est là encore près de la moitié (47%) des électeurs LR qui se disent proches des idées du RN, au point que les électeurs de droite sont plus nombreux (39%) à souhaiter un accord de LR avec le RN qu’avec la Macronie (34%). Voilà qui n’a rien d’étonnant, si l’on tient compte de ce que, pour 59% d’entre eux, le RN est capable de gouverner et que, aux yeux de 52%, le parti lepéniste incarne même une société dans laquelle ils souhaiteraient vivre.

 

Du point de vue idéologique, on aurait tort de sous-estimer le poids persistant des enjeux migratoires. Il est vrai que la plupart des sondages suggèrent depuis quelques mois que l’immigration n’est plus dans le trio de tête des sujets qui « préoccupent » les Français (la palme revient en général au pouvoir d’achat, à l’insécurité et aux enjeux sanitaires).

 

Mais ce n’est pas parce que les mots de l’immigration n’affleurent pas sur le terrain qu’ils n’agissent pas, confortant la conviction classique selon laquelle le RN « dit tout haut ce que les Français pensent tout bas »… Quand OpinionWay propose par exemple à ses interlocuteurs l’item « La plupart des immigrés ne partagent pas les valeurs de notre pays et cela pose des problèmes de cohabitation », plus de 90% des proches de l’extrême droite répondent affirmativement. Mais 80% des électeurs de la droite classique en font de même et les deux tiers des « sans préférence partisane » et des abstentionnistes. Au total, ce n’est qu’une courte majorité de 53% qui repousse l’idée centrale de la grande menace migratoire.

 

 

- Fonctionnaires : une citadelle pour la gauche ?
Pour le Cevipof, Luc Rouban a scruté plus particulièrement le comportement des fonctionnaires.

Nous l’avons résumé ici en deux tableaux, le premier qui synthétise le vote salarié en fonction des statuts du public, le second qui mesure les grandes évolutions entre 2017 et 2022.

 

[cliquez sur le graphique pour l’agrandir]

 

Le premier tableau confirme, dans le monde du salariat, la tripartition observée dans l’ensemble des suffrages exprimés. La droite et l’extrême droite (37% et 34%) sont en tête chez les salariés du privé, où la gauche est au-dessous de sa moyenne nationale (28%). En revanche la gauche est en tête (37%) dans la fonction publique d’État où elle dépasse sensiblement sa moyenne nationale et où l’extrême droite est plus à la traîne (28%). Les situations sont plus équilibrées dans les entreprises publiques, la fonction publique territoriale et la fonction publique hospitalière.

 

Les zones de force de la gauche restent dans le monde enseignant (49%) et les catégories A de la fonction publique (43%), celles de la droite macronisée restent du côté des cadres du privé et celles de l’extrême droite chez les policiers et militaires[5]. Mais cette situation a évolué entre 2017 et 2022, parfois de façon sensible.

Entre les présidentielles de ces années-là, la gauche radicale s’est renforcée chez les employés du privé, les fonctionnaires d’État et les catégories A, tandis que la droite a reculé dans la fonction publique d’État et les catégories A. Ce recul a droite est d’abord celui de la droite classique : à l’exception du monde enseignant – éloigné par quelques années de « blanquerisme » militant – la Macronie résiste plutôt bien, notamment en milieu hospitalier.

 

  • Mais, une fois de plus, c’est le Rassemblement national qui tire les marrons du feu. Il progresse de plus de 10% chez les cadres du privé, les enseignants et les hospitaliers et il se consolide sensiblement du côté des entreprises publiques et de la territoriale. La perte de confiance dans l’institution publique et la confusion grandissante du privé et du public brouillent les perceptions et déplacent les rapports de force électoraux.
  • Le second tour amplifie encore le mouvement. Marine Le Pen gagne 9% entre 2017 et 2022 dans la fonction publique d’État, 7% dans la territoriale et jusqu’à 15% chez les hospitaliers. Elle progresse dans toutes les catégories de fonctionnaires : 7% chez les « A », 13% chez les « B » et 9% chez les « C » (où elle attire les votes de 46% d’entre eux, quasiment la moitié de la catégorie).
  • Ayant pris ses distances avec l’ultralibéralisme de la droite traditionnelle, le RN a installé l’extrême droite comme une concurrente de la gauche sur le terrain du « social ». S’arc-boutant sur la défense des agents publics les plus défavorisés, Marine Le Pen a permis que, par un étonnant paradoxe, la protestation contre la confusion du privé et du public tourne avant tout au bénéfice de l’extrême droite, sans que le macronisme soit pour autant irrémédiablement distancé.

 

 

- Le devoir de lucidité
Malgré le grand retour de la gauche au sein de l’hémicycle (la Nupes rate la victoire entre 0,13 et 0,25 % du total des voix[4]), le cycle électoral de l’année 2022 a tourné plutôt en faveur de l’extrême droite. L’image des « deux France » chère à Christophe Guilluy est certes trop simple pour être retenue. Mais la gauche aurait tort de sous-estimer une réalité globale marquée par une conjonction, qui n’est hélas pas propre à la France et qui juxtapose une translation vers la droite du champ politique et une division accentuée des catégories populaires.

 

La spectaculaire abstention de la consultation législative, notamment dans les catégories populaires, atténue l’image sociologique dessinée par le premier tour de la présidentielle d’avril. Mais elle ne contredit pas les tendances alors dégagées. Le tableau ci-dessous reprend les données de l’enquête OpinionWay, en triant les pourcentages de pénétration des votes Nupes et RN, de part et d’autre de leur moyenne nationale.

 

[cliquez sur le graphique pour l’agrandir]

 

  • Plus que le vote Mélenchon d’avril, le vote en faveur de la Nupes est assez homogène : elle obtient rarement moins de 20% et rarement plus de 33%. Mais le profil général de cet électorat est typé : les pourcentages les plus élevés concernent les catégories jeunes, notamment lycéennes et étudiantes, les « CSP + » et les professions intermédiaires, les formations au-delà du baccalauréat, les revenus moyens et les grandes villes avec en tête l’aire urbaine de Paris et l’Île-de-France.
  • De son côté, le profil du vote RN est plus éclaté mais reste dominé par les catégories les plus populaires et les moins pourvues en « capital » matériel et culturel, installé en dehors de l’espace métropolitain et francilien.

 

La crise voue chaque situation à l’instabilité et rien n’indique que l’extrême droite a gagné définitivement la bataille de l’hégémonie et engagé inexorablement le processus qui peut la conduire au pouvoir. Mais elle a pour l’instant marqué des points importants, sur les terrains où elle est attendue (la protection, l’identité, l’immigration) et sur ceux où on l’attendait beaucoup moins (le social, la peur de l’avenir, la colère devenue ressentiment).

 

La gauche va mieux, elle s’est renforcée sur son flanc gauche et elle s’est réunie entre mai et juin. Mais elle reste dans ses basses eaux, n’a que partiellement regagné des points dans les milieux populaires et elle se retrouve profondément déséquilibrée. Elle est plus que concurrencée par l’extrême droite sur le terrain de la colère et n’a pas encore convaincu que ses projets de société sont renouvelés, pertinents et réalisables. Le temps de l’entre-deux est celui des possibles : le problème est qu’il en est des progressifs et d’autres trop tangibles et régressifs. Promouvoir les uns et conjurer les autres n’est pas qu’une affaire de volonté : c’est avant tout une question de pensée – et donc de repensée – et un processus maîtrisé de pratique populaire partagée.

 

Celui qui combat peut perdre, mais celui qui ne combat pas a déjà perdu.  Bertolt Brecht

 

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- Retrouvez la conférence des #AMFIS2022 intitulée : « Vote RN et « assistanat » : que fait-on ?

Retrouvez la conférence des AMFIS 2022 intitulée : " Vote RN et " assistanat " : que fait-on ? ", avec : François Ruffin, député LFI-NUPES * Alma Dufour, députée LFI-NUPES * Charlotte Leduc, députée LFI-NUPES

 

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12 septembre 2022 1 12 /09 /septembre /2022 21:51
La faute politique de Fabien Roussel secrétaire national du PCF

« Gauche des allocs » : quand le Parti communiste entretient le mythe de la paresse des pauvres[2bis]

Fabien Roussel, candidat communiste ayant rassemblé 2% des bulletins au premier tour de l'élection présidentielle, a attaqué ce week-end “ la gauche des allocations ”, depuis la Fête de l'Humanité. Une faute politique... alors que les allocations sont un droit constitutionnel[2]

 

Fabien Roussel, secrétaire national du Parti Communiste Français, multiplie depuis quelques jours les déclarations provocatrices opposant une supposé « gauche qui doit le défendre le travail » à une « gauche des allocations et des minima sociaux ». M. Roussel est même allé jusqu’à affirmer : « Je veux mettre fin à un système qui nourrit le chômage par les allocations chômage et par le RSA ». Des propos d’une extrême gravité. Il me semble important de s’y arrêter ici.

 

Sources : Bastien Parisot | mis à jour le 20/10/2022

- Le chef de fil du Parti Communiste Français a quand même réussi une sacrée performance : se mettre l'intégralité de la gauche à dos en pleine Fête de l'Humanité.
La raison ? L'ancien candidat à la présidentielle a tancé “ la gauche des allocations ” ce week-end, affirmant lui préférer “ la gauche du travail ”[1]. Formule on ne peut plus surprenante pour un homme à la tête du parti d'Ambroise Croizat, membre du Parti Communiste en son temps et “père” de la Sécurité Sociale en France.

France insoumise, PS et EELV : chez les autres forces constituant la NUPES, la réaction a été unanime. Toutes se sont ainsi opposées aux déclarations de Roussel… qui a également du essuyer des critiques venant de ses rangs.

  • Il faut dire que cette déclaration semble plus sortie de la bouche d'un dirigeant de droite, voire d'extrême-droite[1bis], que de celle d'un communiste. 

 

 

- Sans repartir ici dans des explications techniques, rappelons que ces allocations visées par Roussel ont été pensées comme un “ revenu de remplacement ”
Ce revenu de remplacement vient subvenir aux besoins des Français lors d'une période de diminution ou de baisse de leurs revenus. Autrement dit : chaque mois, une partie de votre salaire est prélevée pour assurer ce revenu aux personnes en difficulté… et c'est précisément votre participation à ce système qui vous permet de profiter, en cas de besoin, de ce même revenu dit “ de remplacement ”. Bref, pour faire encore plus simple : ces allocations ne sont ni un cadeau de l'État, ni un acte de générosité, ni un privilège réservé à d'éventuels fainéants, mais une politique économique et sociale visant à assurer que toutes et tous puissent vivre dignement sur le territoire, peu importe leur situation, précaire ou non.

 

Il s'agit donc, bien sûr, de l'une des conquêtes sociales les plus importantes dans notre pays. Notez que j'utilise volontairement le terme de “ conquête ”, et non d’“ acquis ”, tant les libéraux de tous poils ne cessent de détricoter, doucement mais sûrement, chacune de ces conquêtes lorsqu'ils sont au pouvoir.

 

Au contraire il faudra combattre ensemble, salariés, précaires et chômeurs la réforme de l’assurance chômage.
Stéphane Peu : Député de la 2ème circonscription de la Seine Saint Denis. Militant PCF

 

Rappelez-vous toujours que ce n'est pas le capital qui augmente la valeur de la richesse : c'est le travail, et rien d'autre.

 

 

- Et c'est précisément là que le bât blesse
En reprenant ainsi le verbe accusatoire et offensif contre “ les allocs ”, Roussel donne du crédit aux discours dénonçant “ l'assistanat ”. Il participe à l'index tendu contre “celles et ceux qui en profitent”, “ceux qui ne bossent pas et qui pompent nos salaires”, et autres foutaises populistes entendues ici et là et rabâchées inlassablement par la droite depuis toujours. Il brouille les pistes, jette un flou sur le sens de nos luttes (je parle de la gauche toute entière) dans l'Histoire. C'est une faute politique assez incroyable pour un dirigeant communiste. Et alors que l'extrême-droite semble plus forte que jamais sous la Vème République, il n'est vraiment pas nécessaire que des personnalités de gauche leur servent ainsi la soupe.

 

Mathilde Panot met Fabien Roussel en PLS en face sans langue de bois.

 

 

- En tout état de cause, il y a d'autres urgence à traiter

  • Rappelons que la “ fraude sociale ” estimée en France (c'est à dire la fraude aux cotisations sociales et aux prestations sociales de la CAF) ne représente qu'un dixième de la fraude fiscale : environ 10 milliards pour la première, contre 100 milliards pour la seconde. Comprenez : la fraude des pauvres nous coûte 10 fois moins cher que celle des riches, comme le montre si bien ce graph d'Alternatives éco.

 

La fraude fiscale écrase la fraude sociale
Graphique d'Alternatives Économiques

 

  • Rappelons aussi que la France insoumise et la NUPES se mobilisent pour diffuser une pétition visant à taxer les super-profits[3] des multinationales profitant de la crise économique pour s'enrichir. Rappelons que sur les 6 premiers mois de 2022, les bénéfices des grandes entreprises du CAC 40 s'élèvent à… 73 milliards d'euros.

 

Déjà plus de 100 000 signatures sur la pétition #TaxeSuperProfits !

 

Dommage que Fabien Roussel n'ait pas préféré porter ce sujet dans le débat public, plutôt que d'inventer une “ gauche des allocs ” à combattre.

 

 

- Je dois bien admettre ici avoir eu une pensée pour les militants communistes assistant à tout cela.
Car mis à part le cercle rapproché du candidat ayant bénéficié de 2% des votes au premier tour de l'élection présidentielle, il est difficile de penser que des militants de gauche ayant à cœur l'émancipation et la défense des classes populaires, puissent donner quelque crédit ou quelque intérêt à un tel discours. Si j'imagine aisément qu'il doit être difficile de voir son engagement réduit à de telles sorties médiatiques largement reprises par la droite, je n'ai aucune légitimité à dire ce que les militants communistes doivent faire. Je n'en ai d'ailleurs pas plus l'intention. Mais je sais qu'ils tiendront bientôt un congrès qui devrait leur permettre de clarifier leurs priorités politiques et l'orientation de leur parti.

 


- Éteindre l'incendie ?

Roussel a tenté, depuis, de justifier son discours. Il a notamment affirmé, fièrement, qu'il disait tout haut ce que les Français pensaient tout bas… virant ainsi dans le populisme le plus gras.

  • Certains initiés seront peut-être surpris de me lire taper sur le “ populisme ”.

C'est tout le problème de ce terme qui veut dire deux choses : lorsqu'il définit une stratégie politique visant à simplifier son discours à l'extrême pour être compris de tous, en assumant de reprendre des codes populaires, des formes connues de toutes et tous, et en dépassant les cadres et les méthodes traditionnelles des partis politiques pour être efficace dans son discours de masse, alors oui, le populisme est une stratégie politique qui peut se défendre et qui a d'ailleurs fait ses preuves. À l'inverse, lorsqu'il définit une méthode visant à reprendre tout argument entendu ici et là pour donner l'illusion de coller aux revendications populaires… dans ce cas, non merci. Cela ressemble d'ailleurs plus à une tentative de stratégie marketing qu'à une stratégie politique…

 

  • Revenons à Roussel.

Sur les réseaux sociaux, des comptes de soutien ont essayé d'éteindre l'incendie, depuis 48 heures, en affirmant que le patron du PCF avait simplement affirmé qu'il valait mieux travaillé qu'être au chômage. Affirmation on ne peut plus logique et que peu de monde contestera. Malin… mais pas tellement pertinent, puisque les propos de Roussel ont largement tourné et que la sphère militante a largement eu le temps de les lire. Non, le député communiste a bien ciblé “ les allocations ”, qu'il a opposé au “ travail ”. Foutaises... et le délire continue

 

Divergences au sein de la Nupes : "Il y a ceux qui défendent le droit à la paresse.

 

Bref. Je ne vais pas expliquer ici à l'équipe de Roussel comment gérer une crise. Nul doute qu'avec de telles sorties, c'est l'expérience qui leur permettra de bientôt savoir le faire.

 

  • Sur les réseaux sociaux, notons également un nombre impressionnant de comptes fachos ayant pris la défense de Fabien Roussel.

Sidérant, et bien souvent la boussole qu'on est en train de se tromper de combat. Roussel a raison ” aurait pu devenir leur leitmotiv, tant leur joie de voir ainsi un leader de gauche reprendre leurs mots habituels semblait les contenter. Sûrement aussi insistent-ils pour tenter de bordéliser les NUPES, espérant secrètement faire exploser le bloc populaire ayant confirmé sa force et son implantation lors des élections cette année ?

 

C'est peine perdue : sur les allocs, c'est Roussel contre tous. Enfin, contre toute la gauche, mais soutenu par la droite toute entière. Bref, pas de quoi faire sauter la baraque.

 

Voici les comptes les plus suivis par les personnes ayant liké ce tweet de  @Fabien_Roussel .
Voici les comptes les plus suivis par les personnes ayant liké le tweet de Fabien_Roussel .

 

 

- À quoi joue Roussel ?
Reste que tout cela résulte d'une volonté affichée depuis plusieurs semaines de faire de la surenchère et de multiplier les provocations vis à vis de la NUPES.
À quelle fin ? Pour servir quel objectif ?

Après s'être rendu coupable de l'élimination de la gauche au premier tour de l'élection présidentielle en avril dernier,...

 

 

quel est le sens de toutes ces sorties, petites phrases, qui plaisent plus à la droite, parfois extrême, qu'à la gauche ? Et jusqu'où passera-t-il l'outrance ?
Seul Roussel sait.

 

 

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  • Un travail et un salaire décent pour toutes et tous. 
  • Protection et aide pour celles et ceux qui en ont besoin. 
  • Les deux ne s'opposent pas. Ils sont inséparables. 

C'était le combat d'Ambroise Croizat au fondement même de la protection sociale.
Fabien Roussel devrait le relire

 

 

Un travail et un salaire décent pour toutes et tous.  Protection et aide pour celles et ceux qui en ont besoin.

 

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1 septembre 2022 4 01 /09 /septembre /2022 13:00
Refondation de la gauche : construire une « politique d’union populaire »

Jean-Luc Mélenchon : " Nous sommes le mouvement de la révolution citoyenne en France.[3] "

 

Le débat sur la transformation du mouvement qui a propulsé notre candidat à la présidentielle à près de 22% est lancé[0].

 

Construire une « politique d’union populaire » : c’est la tâche de la rentrée pour les militants de la Nupes.

 

Communiqué unitaire : Face à l’urgence sociale et écologique, construire une large convergence[1]

 

Quel avenir pour la NUPES. Lors de son discours de clôture des Amfis - l’université d’été de la France insoumise - Jean-Luc Mélenchon a appelé à la constitution partout d’ « assemblées populaires citoyennes » de la Nupes. Pour prédire l’avenir de l’alliance, c’est là qu’il faut regarder. Construire une « politique d’union populaire » : c’est la tâche de la rentrée pour les militants de la Nupes.

 

 

Sources : Razmig Keucheyan, sociologue, université Paris Cité - Cédric Durand, économiste, université de Genève | mis à jour le 26/09/2022 

- Le score de Jean-Luc Mélenchon aux présidentielles et celui de la France insoumise aux législatives sont des exceptions en Europe.
La social-démocratie gouverne en Allemagne, en Espagne, au Portugal, et dans les quatre pays scandinaves. Elle participe à une coalition en Belgique et jusqu’à récemment en Italie.

 

Le parti démocrate étatsunien n’appartient pas à la famille sociale-démocrate. Mais depuis la seconde moitié du 20e siècle, les politiques qu’il met en œuvre sont convergentes avec les siennes. La présidence Biden peut donc être ajoutée à la liste. Si on n’assiste pas aujourd’hui à un tsunami social-démocrate du type de celui qui a déferlé sur les pays occidentaux dans les années 1990, à l’époque de Blair, Schröder, Jospin et Clinton, cette famille politique est loin d’avoir disparu.

 

 

- Que le programme de la Nupes soit basé sur celui de la plus à gauche de ses composantes, la France insoumise, est donc un cas unique.
De fait, les partis de la gauche « radicale » européenne, Podemos, Syriza ou encore le Labour de Corbyn, sont en crise. Il en va de même de la gauche du parti démocrate, pour laquelle se pose désormais l’enjeu de la succession de Bernie Sanders.

 

On comprend mieux l’attitude conciliante d’Olivier Faure depuis les législatives : attentif à ce qui se passe au-delà de nos frontières, il sait sans doute que la tendance internationale joue en sa faveur. Plusieurs dignitaires socialistes, parmi lesquels Lionel Jospin, ont d’ailleurs fait savoir qu’à leurs yeux, l’hégémonie de la France insoumise sur la gauche était une parenthèse appelée à se refermer.

 


- Pourtant, une droitisation de la gauche serait catastrophique.
Le néolibéralisme est en crise. Or la social-démocratie n’a pas de logiciel de substitution à proposer. Et pour cause : elle ne s’est pas renouvelée intellectuellement au cours des dernières décennies, en France ou ailleurs. La France insoumise, elle, en a un : le « gouvernement par les besoins », qui permet de répondre conjointement à la crise économique et écologique, par une transformation en profondeur du capitalisme, et peut-être son dépassement.

 

 

- Comment conjurer ce risque ?
Le Programme commun a échoué, dit le philosophe Louis Althusser dans un texte de la fin des années 1970, parce qu’il a été conçu comme un contrat, un contrat entre appareils. Le PS et le PCF se considéraient comme « propriétaires » du contrat : quand il a cessé de correspondre à leurs intérêts, ils l’ont rompu.

  • À cette conception de l’alliance comme contrat, Althusser en oppose une autre : celle de l’alliance comme combat. Il faut alors « concevoir cette politique d’union comme politique de masse et de lutte : comme une politique d’union populaire, associant le contrat signé “au sommet” à une lutte unitaire à la base. »
  • Dans ce cas, l’alliance comme « contrat au sommet » s’enracine dans la société, au sein des classes populaires et moyennes en particulier, qu’elle politise et met en mouvement. Les appareils cessent alors d’être les seuls « propriétaires » de l’alliance. Des modalités novatrices d’interaction entre la base et le sommet se mettent en place, car la base se structure. Les pratiques politiques quotidiennes rapprochent les militants des composantes de l’alliance. Elle s’élargit par en bas.

 

 

- Lors des législatives, des assemblées de la Nupes ont fleuri dans de nombreux endroits.
Les militants des composantes ont convergé pour mener le combat électoral ensemble, comme comme dans les Pyrénées-Orientales. Lors de son discours de clôture des Amfis - l’université d’été de la France insoumise - Jean-Luc Mélenchon a appelé à la constitution partout d’ « assemblées populaires citoyennes » de la Nupes[2]. Pour prédire l’avenir de l’alliance, c’est là qu’il faut regarder.

 

 

- La Nupes marque une étape importante mais fragile dans le long cours de la refondation de la gauche.
Avec ces assemblées, l’auto-organisation politique de celles et ceux qui ont fait les mouvements sociaux de ces dernières années et portés les campagnes du printemps peut lui donner un caractère durable. Les partis enrichis par les dividendes électoraux du rassemblement doivent soutenir matériellement ce processus, à travers par exemple la mise à disposition de locaux et d’outils numériques d’éducation populaire pour les militants.


Si ces assemblées deviennent permanentes, elle se transformeront en véritable force politique, permettant de régénérer des appareils affaiblis. L’enjeu est aussi de préserver des revirements tactiques des uns ou des autres ce bien commun qu’est l’alliance. Une telle force politique sera enfin un point d’appui pour la mise en œuvre du programme de la Nupes en cas d’arrivée au pouvoir : elle obligera les dirigeants à tenir parole. 

 

 

- Construire une « politique d’union populaire » : c’est la tâche de la rentrée pour les militants de la Nupes.

  • Parfois, les exceptions sont des avant-gardes.
  • Paraissant d’abord isolées, elles préfigurent en fait un tournant à l’échelle internationale.
  • Qu’en sera-t-il du réagencement en cours de la gauche française ?
  • La réponse dépend de la capacité de convergence à la base des militants de la Nupes.

 

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- Le 28 août 2022, Jean-Luc Mélenchon clôturait les universités d’été de la France insoumise (AMFIS) lors d’un meeting de la NUPES à Châteauneuf-sur-Isère dans la Drôme.

A cette occasion,,il a notamment :

  • Il a accueilli favorablement la proposition du premier secrétaire socialiste Olivier Faure d’organiser un référendum d’initiative partagée sur ce sujet. Il a également appelé à l’organisation d’une grande marche mi-octobre réunissant les partis de la NUPES, les syndicats, les associations, contre la vie chère. Soulignant la crise politique dans laquelle était entré le pouvoir macroniste, il a fini en appelant chacune et chacun à l’action.
  • appelé à la constitution partout d’ « assemblées populaires citoyennes » de la Nupes

Notes :

[0Clémentine Autain : " LFI : franchir un cap pour gagner "

[1Communiqué unitaire signé par : L’Alternative, Attac France, la CGT, la Confédération Paysanne, Convergence Nationale, la Fondation Copernic, Europe Écologie les Verts, la FSU, Génération·s, la France Insoumise, MAN, le Nouveau Parti Anticapitaliste, OXFAM France, Solidaires, le Parti Communiste Français, le Parti Socialiste, l’UNEF.

[2] Appel de Jean-Luc Mélenchon à la constitution partout d’ « assemblées populaires citoyennes » de la Nupes

[3Jean-Luc Melenchon : " Nous sommes le mouvement de la révolution citoyenne en France. "

 

Pour en savoir plus :

Les insoumis du Jura : Appel pour la constitution d'un Front populaire politique et social

Pyrénées-Orientales - Des assemblées populaires de circonscription pour la Nupes

- TRIBUNE. Pour perpétuer la NUPES, il faut la faire vivre !

- Manuel Bompard : « La NUPES, une force d’alternative prête à gouverner demain »

- Chérir, pérenniser et élargir la NUPES pour permettre l’alternance !

- Comment la Nupes veut défier le pouvoir ?

Amfis 2012 : Génération Mélenchon, du Parti de Gauche à la Nouvelle Union Populaire avec : Adrien Quatennens, député LFI-NUPES.

- Clémentine Autain : Face à l’extrême droite, quelle stratégie populaire ?

Quelle stratégie pour la gauche ? Avec quelles implications concrètes ? Jean-Christophe Sellin et Hélène Le Cacheux, co-coordinateurs nationaux du Parti de Gauche, versent leur réflexion au débat.

- Les 3 blocs et l’avenir de l’Union populaire par Jean-Luc Mélenchon

 

Refondation de la gauche : construire une « politique d’union populaire »
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30 août 2022 2 30 /08 /août /2022 10:27
Ariane 6 lanceur fusée espace spatial

Ariane 6 lanceur fusée espace spatial

Jean-Luc Mélenchon : " ...la suite de l’aventure de l’humanité dans l’espace est en train de s’écrire. Il n’est pas question d’être naïfs et de tenir une position destinée à être dépassée par les évènements et les autres protagonistes. La France est une puissance et son devoir est de se déployer dans toutes les directions de l’épopée humaine. "[1]

 

Alors que l’espace suscite de nouveau l’intérêt des grandes puissances et de nouveaux acteurs privés, la France semble se reposer sur ses lauriers et abandonner son rôle de puissance spatiale. D’une part, Paris semble préférer déléguer cette activité au secteur privé, au lieu de piloter indirectement l’action de ce dernier, comme le fait la NASA. D’autre part, l’Allemagne ne cache plus ses ambitions et délaisse la coopération européenne, tout en essayant de récupérer les technologies françaises.

 

 

Sources : Le Vent se lève |

- La conquête spatiale fut l’un des grands enjeux de la Guerre froide

Dans cet affrontement entre Soviétiques et Américains, la politique d’indépendance du général De Gaulle s’est également traduite en termes de souveraineté spatiale[1bis]. Du programme Véronique au développement d’Ariane 6, la France reste un acteur majeur du spatial dans le monde. Ce rôle permet d’avoir une place importante en matière militaire, scientifique et industrielle. Ce, même face aux géants étasuniens, russes et, aujourd’hui, chinois. Pour ce faire, la France a pu compter sur l’expertise acquise par le Centre national d’études spatiales (CNES[2]) qui a fêté ses 60 ans en 2021. Ces compétences, fruit d’années d’investissements et d’ambitions publiques, ont fait le lit de l’excellence française en matière spatiale. Depuis lors, la France a tout naturellement pris le rôle de moteur européen dans les activités extra-atmosphériques. Toutefois, fer de lance de la souveraineté française, le secteur spatial ne cesse de voir sa position fragilisée par l’absence de vision et la naïveté de la France face à l’Allemagne dans l’UE.

 

 

 

- Une nouvelle zone de conflictualité ?
En 1958, une résolution de l’ONU faisait référence à l’usage « exclusivement pacifique » de l’espace extra-atmosphérique[3]. A l’époque, Russes et Américains s’étaient entendus pour faire retirer l’adverbe exclusivement dans le texte onusien. Bien qu’ancienne, la militarisation, c’est-à-dire l’usage à des fins militaires de l’espace, tend à s’accentuer ces dernières années. La facilité de l’accès à l’espace permet aux armées du monde entier d’envoyer des systèmes orbitaux d’observation et de télécommunication. En revanche, l’arsenalisation – l’usage d’actions militaires dans, depuis et vers l’espace – de la zone extra-atmosphérique paraît de plus en plus inéluctable. De nombreux Etats sont par exemple d’ores et déjà capables de détruire des satellites depuis le sol.

 

 

Pourtant le traité de l’espace de 1967[4], la référence en droit spatial, indique que nul ne peut s’approprier l’espace.
La zone extra-atmosphérique est donc ouverte à tous. De même, le traité stipule que les armes nucléaires ne peuvent y être déployées. Le texte reste néanmoins flou et sujet à interprétation dans sa rédaction. Il apparaît de moins en moins adapté aux nouvelles réalités conflictuelles, comme le note un récent rapport d’information parlementaire[5].

 

Donald Trump dévoile le drapeau de la «force de l'Espace» des Etats-unis
D. Trump dévoile le drapeau de la «force de l'Espace» des USA

En 2015, Barack Obama ouvre une première brèche avec le Space act[6], qui autorise l’exploitation des ressources dans l’espace et son appropriation par les citoyens étasuniens. Par la suite, Donald Trump suivra en créant une Space force[7] pour défendre les intérêts des Etats-Unis dans l’espace. Emmanuel Macron, dans la foulée de son homologue américain, a décidé de passer à une doctrine plus active en termes de protection des intérêts spatiaux de la France. Ceci afin de « répondre aux défis […] dans les nouvelles zones de confrontation que sont l’espace cyber ou l’espace exo-atmosphérique[8».

 


- SPACE X et les réalités du NEW SPACE
Si l’intérêt pour l’espace connaît un regain d’intérêt depuis environ une décennie, cela s’explique aussi par les mutations profondes de l’industrie spatiale suite à l’arrivée d’acteurs privés. Ainsi, plusieurs sociétés, dont celles de multimilliardaires, se sont engouffrées dans ce nouvel environnement technologique et sociétal, dénommé new space. Les emblèmes de cette nouvelle ère sont sans aucun doute Space X d’Elon Musk et Blue Origin de Jeff Bezos. Le phénomène a également gagné le Vieux continent. De nouvelles entités y ont émergé et viennent concurrencer les acteurs traditionnels du spatial, comme Airbus, Thales, Safran, etc. En outre, ce nouvel âge spatial s’appuie également sur un cycle d’innovation plus court dû à la miniaturisation des satellites et de leurs composants, d’une part, et la numérisation de la société, d’autre part. Cette numérisation à outrance a pour corollaire non seulement des infrastructures au sol, câbles sous marins et data centers, mais également des moyens de télécommunication en orbite, tels que les constellations de satellites actuellement déployées par Starlink (Elon Musk), OneWeb (Airbus) ou Kuyper (Jeff Bezos). L’émergence du tourisme spatial[9fait également partie des moteurs de ces mutations.

 

Derrière le phénomène au nom rêveur du new space se trouve une réalité bien connue, celle des start-ups. Il s’agit de l’afflux de capitaux privés, via du capital risque, sensibles à l’image positive que véhicule le spatial, ses innovations technologiques et la rentabilité présumée du secteur. Ce faisant, il s’est créé un effet d’entraînement global. A l’instar de la bulle Internet, au début des années 2000, le new space n’est d’ailleurs pas à l’abri d’une bulle financière, notamment alors que les taux d’intérêt sont en train de remonter.

 

Toutefois, si cet appel aux capitaux privés, notamment aux États-Unis, conduit certains commentateurs à évoquer une privatisation de l’espace, cette dernière mérite d’être questionnée.

  • Premièrement, ces financements viennent parfois en complément du public sur des programmes très onéreux.
  • Deuxièmement, les principaux clients de Space X restent le gouvernement américain lui-même à travers la NASA ou le Pentagone. Cela se traduit par de nombreux lancements institutionnels pour l’envoi de satellites, civils et militaires, ou l’approvisionnement de l’ISS (Station spatiale internationale) avec le Falcon 9.
  • Enfin, toutes les technologies développées par ces acteurs privés sont issues des recherches de la NASA, comme le rappelle notamment les travaux de l’économiste Mariana Mazzucato[10].

 

- Ainsi, et de manière contre intuitive, l’apport du new space dans l’écosystème spatial américain tient moins de l’innovation de rupture que de la facilité qu’ont ces entreprises à industrialiser les technologies de la NASA. En somme, entre le new space aux États-Unis et la NASA, la filiation est directe. Le rapport d’information parlementaire cité plus haut, révèle ainsi qu’historiquement la NASA a utilisé les acteurs du New space pour pallier l’échec de son programme de navette.

- Ainsi, les rares marchés exclusivement privés se trouvent dans le tourisme spatial et les méga-constellations en orbite basse. Ces deux activités, dont le modèle économique est très fragile[11], sont toutes deux très polluantes et néfastes aux activités scientifiques.

 

 

- Entre automutilation et illusion libérale : le New SPACE français
Face à cette nouvelle configuration, la France tente aujourd’hui de rattraper ce qu’elle considère comme un retard. Néanmoins, à la différence des Etats-Unis, le marché des lancements institutionnels européens n’est ni conséquent ni garanti. Quand le budget de la NASA s’élève à plus de 20 milliards, celui du CNES atteint à peine plus de 2 milliards et de 6 milliards pour l’ESA (European Space Agency)

 

La moitié de l'enveloppe financière devrait atterrir dans les poches des acteurs du NewSpace.

Dans le sillage des illusions sur la start-up nation, Bruno Le Maire a annoncé l’avènement d’un Space X français d’ici 2026[12]. Ce faisant, le Ministre de l’économie a oublié que le leader mondial des lancements commerciaux était français. En effet, avec Arianespace, qui gère la commercialisation et l’exploitation des systèmes de lancements depuis Kourou (les lanceurs Ariane et Vega), la France a un accès privilégié, et de qualité, à l’espace ! Pour soutenir les acteurs du new space, Emmanuel Macron a annoncé investir 1,5 milliard dans ce secteur dans le cadre du plan France 2030[13]. Dès lors, deux stratégies distinctes se dessinent de chaque côté de l’Atlantique : d’un côté une privatisation pilotée par la NASA, de l’autre un véritable laissé faire, sans planification

 

L’automutilation de l’Etat français et l’absence de vision à long terme, censée guider les politiques spatiales, se font ressentir au cœur même de l’excellence française. En effet, le Centre national d’études spatiales est touché de plein fouet par ces nouvelles orientations. C’est pourquoi, en avril dernier, les ingénieurs du CNES, de Paris à Kourou, dans un mouvement sans précédent depuis 60 ans, ont décidé de se mettre en grève pour protester contre les nouveaux contrats d’objectifs[14]. Ces derniers, aux dires des syndicats, privilégient les nouveaux acteurs privés au détriment de la recherche publique. Leur crainte est qu’à travers ces objectifs, le CNES ne devienne qu’une agence de financement. Dès lors, le regard stratégique sur le devenir des grands projets reviendrait aux seuls industriels

 

Arianespace : l'Etat signe la vente de ses parts à Airbus et Safran

Ces craintes sont fondées : ce retrait du CNES est déjà une réalité depuis 2015. Quand Manuel Valls avait décidé de vendre les parts de l’Etat (34%), à travers le CNES, dans la société Arianespace[15]. Cette société est pourtant hautement stratégique en termes d’efficience industrielle et de souveraineté d’accès à l’espace. Les parts ont été cédées à la co-entreprise (Ariane group), composée de Safran et d’Airbus. La cession a mis fin à la logique de partenariat public/privé qui avait prévalu en France et qui avait fait ses preuves. A sa place, une logique de gestion pilotée uniquement par les industriels, notamment celle du futur lanceur Ariane 6, est en train de s’affirmer.

 

 

 

- L’Allemagne se rêve en puissance spatiale

Outre une ambition politique aux abonnés absents, le spatial français doit faire face aux divergences politiques avec l’Allemagne. Ces divergences ne sont du reste pas nouvelles, elles existent d’ores et déjà pour l’industrie militaire. La naïveté française dans les grands projets industriels de l’UE permet aux entreprises allemandes de siphonner les technologies françaises. Du programme SCAF (avion de chasse de nouvelle génération) au transfert du moteur d’Ariane 6 de Vernon vers la Bavière, les exemples sont légion.


Face aux problèmes budgétaires de la France, l’Allemagne s’est en effet mise en tête de prendre le leadership européen dans le spatial. Le conseiller espace d’Angela Merkel à l’époque, Peter Hintze, relayé par La Tribune, le disait en ces termes : « l‘Allemagne occupe le deuxième rang européen en matière de spatial; se satisfaire du deuxième rang ne suffit pas, il faut considérer ce classement comme une source de motivation »[17].

 

Depuis, l’Allemagne a été à plusieurs reprises la plus grande contributrice du budget de l’ESA. L’objectif, à peine voilé, est de conforter sa base industrielle dans un esprit mercantile orienté vers la haute valeur ajoutée. Les spécialistes faisaient remarquer à l’époque l’absence de vision en termes d’indépendance dans le discours allemand, comme le confirme un document que s’est procuré La Tribune[18]. Ce dernier indique que le gouvernement allemand pense qu’ « un système de lancement compétitif européen au niveau mondial n’est pas un objectif prioritaire […] ». D’autant que la compétition est, selon elle, complètement biaisée : « la demande institutionnelle nettement plus importante aux États-Unis […] Un système européen ne pourrait survivre dans cet environnement qu’avec de lourdes subventions gouvernementales annuelles[18] ». L’Allemagne y fustige également le manque de concurrence face à Arianegroup.

 

Espace : OHB, cette PME allemande au coeur des tensions entre Paris et Berlin

Berlin, dans un esprit libéral, refuse donc la logique d’agence et de coopération européenne de l’ESA et aimerait lui substituer une logique d’acteurs industriels. A contrario, la tradition française, qui associe programmes civils et militaires, est de penser le spatial en termes de souveraineté d’accès. Ainsi, profitant de l’avènement du new space, Berlin a fait émerger de nouveaux acteurs tels que OHB ou encore ISAR Aerospace. Ces différents choix stratégiques de l’Allemagne posent des problèmes de cohérence à ses partenaires européens, notamment la France. Récemment, l’agence spatiale allemande (DLR) a choisi Space X pour l’envoi de son satellite d’observation de la terre. Ou, encore, le lobbying d’OHB[19] en faveur du lanceur américain pour l’envoi des derniers satellites du programme Galileo, le GPS européen. De fait, Berlin semble avoir abandonné toute idée de préférence européenne.

 

Outre-Rhin, on pense l’avenir à travers les megaconstellations et les micro lanceurs réutilisables. Ils visent ainsi le marché, non institutionnel, des envois commerciaux. Cette stratégie permet à ces start-ups, soutenues par le gouvernement allemand, de s’autonomiser, en partie, du port spatial de Kourou. L’opération Launch Germany[20] s’inscrit dans cette logique. Elle a pour objectif de développer une zone de lancement pour micro-lanceurs en mer du nord. Pourtant le CNES, l’ESA et Ariangroup cherchent à redéployer l’ancien site de lancement de la fusée diamant en base pour micro-lanceurs. Il s’agit des programmes Thémis, Prometheus et Callisto.

 

Ces divergences se confirment dans cette période de transition entre les versions 5 et 6 d’Ariane. Cette dernière est censée être plus compétitive face à la concurrence de Space X. Néanmoins, conscient des défis de la fusée réutilisable, Paris indique que ce nouveau lanceur, qui n’intègre pas de modules réutilisables, est quasi obsolète. La volonté est donc d’embrayer très vite sur une nouvelle génération de lanceurs. Pour Berlin, qui a financé un des quatre milliards de conception d’Ariane 6, c’est évidemment trop tôt. Le retour sur investissement de la fusée Ariane 6 se fera certainement sur la durée, entre 10 à 15 ans. Or, repartir sur une nouvelle génération de lanceur entraînera d’énormes coûts de conception, jusqu’à 10 milliards d’euros selon les estimations. Ce sont les industriels d’Arianegroup et l’ESA, au travers de ses membres étatiques, qui porteront ce coût.

 

 

- Le port spatial de Kourou : un fleuron mis à mal
Si l’avenir de la coopération spatiale européenne reste incertain, qu’en est-il des bases de lancement ?

Pour l’heure, le port spatial de Kourou[21], en territoire français, offre au pays des Lumières un atout essentiel d’indépendance et de sécurité. Le déploiement des programmes de vols, notamment ceux à usage militaire, se fait sans contrainte d’exportation et de location d’un site étranger. L’indépendance qu’offre ce site lui confère donc un grande importance. Malheureusement, celui-ci est également confronté à une période difficile.

 

Le 25 décembre 2021, comme un cadeau offert à la communauté scientifique et au monde, s’envolait le télescope James Webb[22]. Le remplaçant du célèbre Hubble était attendu par les scientifiques du monde entier. Depuis, James Webb réjouit la communauté scientifique et même les particuliers par ses performances optiques. Ce joyau technologique a coûté 10 milliards de dollars à la NASA sur 20 ans. Le télescope est parti depuis Kourou, en Guyane, empaqueté dans la coiffe d’une Ariane 5. La précision du vol fut telle que le télescope a gagné en durée de vie en économisant son carburant[23].

 

Si, cet exploit technique et scientifique a été salué par la NASA, qui a reconnu l’extrême précision du lancement, il ne saurait cacher néanmoins les difficultés du sport spatial. Le développement d’Ariane 6 s’articule autour d’un leitmotiv : la réduction des coûts. Cela passe notamment par la réduction d’effectifs, surtout lorsque les budgets sont contraints et orientés vers des start-ups. Dans ce cadre, le gestionnaire du site, Arianegroup – actionnaire majoritaire d’Arianespace (76%) – se prépare depuis deux ans à des réductions d’effectifs. 600 licenciements répartis entre la France et l’Allemagne, sont évoqués[24]. Concernant le Centre spatial guyanais, une étude évoque une suppression de 300 postes[25]. Cette réduction d’effectifs fait craindre une perte de savoir-faire, notamment dans le domaine d’excellence de la France : la filière des lanceurs.

 

 

- Du côté des salariés de la base, c’est le flou concernant la suite de l’aventure spatiale.
« Les salariés sont anxieux face à la baisse de cadence et les solutions amenées pour y faire face. L’arrêt prématuré de Soyouz n’arrange pas les choses. Il y a une véritable lenteur des dirigeants à trouver et proposer des solutions. » nous rapporte Youri Antoinette, syndicaliste UTG-CGT sur la base. Pour ce dernier, le contrat passé avec Amazon[26] est une bonne nouvelle.


Il s’inquiète néanmoins de la gestion de cette période de transition. En effet, le lancement de la constellation Kuiper d’Amazon doit débuter en 2024 à bord d’Ariane 6. Il y a donc un trou de deux ans à combler. Cette transition devait se faire grâce au lanceur russe Soyouz, basé en Guyane depuis 2011. Cependant, la guerre en Ukraine a eu pour conséquence l’arrêt des coopérations entre l’ESA et Roscosmos. L’UE n’a par conséquent pas de lanceur de substitution. Dans l’intervalle, la production d’Ariane 5 est stoppée et le programme Ariane 6 a pris du retard. De plus, L’arrêt de Soyouz signe la disparition de 50 emplois équivalent temps plein sur la base.
 

  • La souveraineté spatiale de la France est donc mise à mal de toute part.
  • Son rôle moteur au sein de l’UE est remis en cause par l’Allemagne, dont les ambitions hégémoniques s’affirment de plus en plus.
  • Pendant ce temps, en dehors de l’UE les puissances spatiales poursuivent leur affrontement pour la primauté scientifique, industrielle et/ou commerciale.
  • Force est de constater, qu’à ce jour, la France, prise dans le dédale de ses contradictions et de l’UE, semble ne plus avoir les capacités de tisser le fil d’Ariane d’une nouvelle ambition spatiale.

 

Notes :

[1] À la conquête de l’espace

[1bis] La naissance de la politique spatiale française

[2] Le site du Centre national d'études spatiales CNES

[3] RESOLUTION DU 13 DECEMBER1958 SUR L'UTILISATION DE L'ESPACE EXTRA-ATMOSPHERIQUE A DES FINS PACIFIQUES (NATIONS UNIES) - 1348 - XIII (Création du Comité spécial des utilisatoins pacifiques de l'espace extra-atmosphérique)

[4] Traité de l'espace 1967

[5] RAPPORT D’INFORMATION PAR LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES

[6] Droit de l’espace : évolution, révolution ou déliquescence annoncée ?

[7] Trump crée un commandement militaire spatial pour sa future " Armée de l'Espace "

[8Armées : Macron annonce la création d’un commandement militaire de l’espace, et La France muscle sa stratégie spatiale avec un commandement dédié

[9] MILLIARDAIRES DANS L’ESPACE, DYSTOPIE SUR TERRE

[10L'État entrepreneurial

[11] OneWeb: de nombreuses interrogations autour du modèle économique

[12] Espace : Paris présente son plan pour concurrencer SpaceX

[13] Plan "France 2030" : Macron met sur la table 1,5 milliard d'euros pour le spatial

[14] Grève historique au CNES : " Des projets spatiaux s'arrêtent faute de financement "

[15] Arianespace : l'Etat signe la vente de ses parts à Airbus et Safran

[16] Du néant de la relation stratégique franco-allemande au divorce nécessaire

[17] Espace : la France rend les armes face à l'Allemagne

[18] Stratégie lanceurs : comment l'Allemagne s'oppose fortement à Bruxelles et à la France

[19] Espace : OHB, cette PME allemande au coeur des tensions entre Paris et Berlin

[20] Spatial européen : l'inquiétant séparatisme allemand

[20] Centre spatial guyanais

[22] Le télescope spatial James-Webb est arrivé à destination, à 1,5 million de kilomètres de la Terre

[23] Un lancement précis d'Ariane 5 devrait prolonger la durée de vie prévue de Webb

[24] Arianegroup annonce la suppression de 600 postes en France et en Allemagne

[25] Spatial : Le CSG va vers un plan social qui ne dit pas son nom

[26] ARIANESPACE SIGNE UN CONTRAT HISTORIQUE AVEC AMAZON POUR 18 ARIANE 6 AFIN DE DÉPLOYER LE PROJET DE CONSTELLATION KUIPER

 

Pour en savoir plus :

- Spatial : vers un déclassement de la France ?

Quand le capitalisme se rêve un destin cosmique ; le capital à l'assaut de l'espace

Spatial : l'Europe se contente du minimum syndical

- L'Otan va installer à Toulouse un centre de formation et01 d'expérimentations dédié à l'espace, ont indiqué vendredi le ministère des armées et le CNES

- L’Otan installe à Toulouse son QG de l’espace pour contrer les menaces sur ses satellites

- l'Union Populaire (France insoumise) Mélenchon 2022 : L’espace, notre horizon commun

L’espace, notre horizon commun

 

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22 août 2022 1 22 /08 /août /2022 11:21
Quand le RN fait « l'apologie de l’Algérie française et des crimes de la colonisation » et notamment de l'attentat du Petit Clamart
Quand le RN fait « l'apologie de l’Algérie française et des crimes de la colonisation » et notamment de l'attentat du Petit Clamart

En juin 2022, José Gonzalez député RN, doyen de l'Assemblée Nationale " ne sait pas dire si l'OAS a commis des crimes ou non ", fait l'apologie de l'Algérie française et des crimes de la colonisation... reçoit le soutien de Marine Le Pen[4]

 

et le 30 décembre 2022, il est nommé par le bureau de l’Assemblée nationale comme vice-président du groupe d’amitié France Algérie[9].

 

 

Attentat manqué contre le général De GAULLE, le 22 août 1962 au Petit Clamart perpétré par 2 commandos de l'OAS[2(cette organisation fera plus de 2300 morts[2]...) quasiment simultanément au passage de la DS présidentielle, faisant un blessé à bord de son automobile Panhard et des dégâts à la vitrine d'un magasin situé sur la ligne de tir du second commando.

Le général de Gaulle et son épouse en sortent miraculeusement indemnes[1].

Retour sur cet événement perpétrés par des ultras de l'Algérie française.... et de l'utilisation qui en est faite aujourd'hui, quand le RN (Rassemblement National) fait « l'apologie de l’Algérie française et des crimes de la colonisation » et notamment de l'attentat du Petit Clamart... ou baptise une place du nom de Pierre Sergent, l’un des principaux fondateurs et dirigeants de l’Organisation de l’armée secrète (OAS)... 

 

 

Sources : INA - Eric DURAND | mis à jour le 02/01/2023

- Nous sommes en août 1962
L’Algérie est indépendante depuis le 5 juillet. Depuis des années, ce nom cristallise les tensions entre Français favorables au maintien de ce vaste territoire sous souveraineté française et ceux qui réclament son indépendance. Pire, depuis le début de 1961, l’Organisation de l’Armée secrète[2] (OAS) pose des bombes en Algérie et en métropole pour signifier à l’Etat son refus de l'indépendance.

 

Le général de Gaulle, appelé au pouvoir en 1958 en raison de cette même crise algérienne, est vu comme le dernier espoir des partisans de l’Algérie française. Mais rapidement, dès 1959, il prend conscience de l’impossibilité du maintien de la politique coloniale. Pour vivre la destinée mondiale chère à ses yeux, la France doit se débarrasser de cette guerre d’un autre âge, ingagnable politiquement, et se recentrer sur une modernité européenne, qui se matérialisera en 1963 par la réconciliation avec l'Allemagne.

 


- Pour l’OAS, le général de Gaulle, surnommé par dérision « le guide », devient l’ennemi numéro 1
Le 8 septembre 1961, le convoi du président en route vers Colombey-les-Deux-Églises est victime d’un attentat à la bombe à Pont-sur-Seine, dans l’Aube. Le convoi est indemne et les auteurs de l’attentat, qui se réclament de l’OAS, sont arrêtés. Tous, à l’exception du « cerveau » qui reste non identifié.

 


- Une attaque sur la route de l'aéroport
C’est dans ce contexte de violence contre la personne du chef de l'Etat qu’a lieu l’attentat du Petit-Clamart, le 22 août 1962. Après celui du Pont-de-Seine[5], les services de sécurité de l’Elysée ont obtenu du président qu’il se rende en avion dans sa résidence champenoise de Colombey afin d'éviter la longue route en voiture. Pour ce faire, le cortège doit se rendre à l’aéroport de Villacoublay, situé dans les Yvelines.

 

En début de soirée, ce 22 août, à 19h45, la DS-19 présidentielle quitte l’Elysée en compagnie d’une voiture de sécurité et de deux motards. Sur la banquette arrière se sont assis de Gaulle et son épouse. Le véhicule est conduit par le chauffeur attitré du Palais, le gendarme Francis Marroux. A ses côtés prend place le général de Boissieu, gendre du président. 

 

A 20 h 20 le convoi approche du carrefour du Petit-Clamart. La route est dégagée, à l’exception d’une estafette jaune garée sur le bas-côté. Alors que la voiture arrive à sa hauteur, plusieurs armes automatiques se mettent à tirer. La DS est touchée à plusieurs endroits. Le chauffeur accélère mais une seconde voiture, une Citroën ID-19 bleue, la prend en chasse. Les occupants ouvrent le feu à plusieurs reprises avant de prendre la fuite.
Malgré le choc de l’attentat, le chauffeur parvient à Villacoublay. Le président et tous les passagers de l’escorte sont indemnes.

 


- Un commando de douze hommes
Une gigantesque chasse à l'homme est lancée le soir même. L’enquête aboutit au bout de seulement quinze jours, bénéficiant de hasards et d’étonnantes imprudences des conjurés. Les suspects sont interpellés et avec eux sont retrouvées leurs armes. Certains d'entre eux préparaient une nouvelle opération visant à nouveau le président. Qui sont-ils ?

 

Le commando se compose de douze hommes, Jean Bastien-Thiry en est l’énigmatique leader. Il s'agit d'un homme de 34 ans, brillant polytechnicien, lieutenant-colonel de l’armée française, fervent catholique et patriote, qui voit en de Gaulle un « tyran » abandonnant l’Algérie française. Son second, Alain de La Tocnaye, considère de Gaulle comme un « cryptocommuniste », tout comme les Hongrois Lazlo Varga, Lajos Marton et Gyula Sari. Le reste du commando est composé de métropolitains et de Pieds-noirs.

 

 

- Le dernier fusillé de l’Histoire
Après les premières arrestations des membres du commando, Bastien-Thiry est à son tour arrêté le 17 septembre 1962. Le procès débute au fort de Vincennes le 28 janvier 1963. Neuf accusés sur les douze qui constituaient le commando comparaissent devant la Cour militaire de justice.

 

Le 4 mars 1963, Bastien-Thiry est jugé coupable de la planification de l’attentat et condamné à mort. Il est fusillé le 11 mars 1963 au fort d’Ivry. Il restera dans l’Histoire comme le dernier condamné à mort fusillé en France. On estime aujourd'hui que l'ingénieur fut également responsable de l'attentat de Pont-sur-Seine.

 

Alain de la Tocnaye et Jacques Prévost, eux aussi condamnés à mort, seront graciés en 1968, ainsi que les tireurs condamnés à différentes peines de réclusion. Pendant le procès, l’avocat de Bastien-Thiry, Maître Jean-Louis Tixier-Vignancourt, évoquera pour sa défense la thèse de l’enlèvement plutôt que la volonté de tuer. Une thèse très largement contestée, notamment par l’un des conjurés, Lajos Marton. Sur le plateau de « Tout le monde en parle» en 2005, ce dernier expliquait que la thèse de l'enlèvement était une invention des avocats[3] », et que l'ordre avait bel et bien été donné d'assassiner le président de la République.

 

 

- 28 juin 2022, José Gonzalez[5bis], député du Rassemblement national nostalgique de la colonisation, met le feu à l'hémicycle...

Le 28 juin se tenait la séance inaugurale de la nouvelle Assemblée nationale française issue des urnes. Comme le veut le règlement, c’est le doyen de l’hémicycle qui a présidé la première séance avant que les députés ne procèdent à l’élection du président de l’Assemblée. Cette tâche a échu à José Gonzalez, un député RN de 79 ans.

  • Son discours inaugural, qui n’a pourtant duré que cinq minutes, n’est pas passé inaperçu. Plusieurs propos tenus par ce pied-noir né à Oran en 1943 sont inacceptables[6] :
    • À sa sortie de l’hémicycle, face aux micros et aux caméras, cet ancien retraité et contrôleur d’exploitation à l’aéroport de Marseille en a remis une couche. Interrogé plus en détail sur son rapport à l’Algérie, il a affirmé qu’il n’était « pas là pour juger si l’OAS a commis des crimes ou non », invoquant au passage « des crimes d’un côté comme de l’autre » ;
    • « Venez avec moi en Algérie dans le Djebel, je vais vous trouver beaucoup d’Algériens qui vont vous demander « quand est-ce que les Français reviennent ? » », a-t-il déclaré ;
    • Et d’ajouter : « J’ai applaudi de Gaulle en 1958 quand il a clamé “vive l’Algérie Française !” » J’ai compris après qu’il ne fallait plus applaudir. » ;
    • et il va plus loin encore : « En expliquant à nos jeunes issus d’Afrique du Nord qu’on a commis des crimes contre l’humanité contre leurs parents, comment voulez-vous qu’ils se comportent avec nous et nous respectent ? », a-t-il déploré.
       

 

- Ces phrases n’ont rien à faire au cœur d’une institution de la République.
Car derrière ces mots de José Gonzales, c’est un passé colonial, l’OAS et la torture, qui raisonnent. Certains ont voulu faire croire, et certains ont cyniquement cru, que l’héritage de Jean-Marie Le Pen n’était plus. Que le Rassemblement national avait changé. Preuve s’il en fallait, que quand le vernis craque, le RN est bien et restera toujours d’extrême-droite.

 

Par ces quelques mots, en guise de lancement d’une nouvelle période, José Gonzales nous rappelle l’histoire du Rassemblement national : un parti fondé en 1972 par des anciens de l’OAS, des gradés de la Waffen SS[7].

 

Nous débutons donc cette XVI législature par un hommage appuyé à l’Algérie française. Symbole de l’extrême droitisation des débats qui s’annonce pour les 5 ans à venir ?

 

Quand le RN fait « l'apologie de l’Algérie française et des crimes de la colonisation » et notamment de l'attentat du Petit Clamart

 

- Et ça continue...

Par une délibération du conseil municipal du 22 septembre 2022, la mairie RN de Perpignan (Pyrénées-Orientales), conduite par Louis Aliot, membre du RN, baptise une place du nom de Pierre Sergent, l’un des principaux fondateurs et dirigeants de l’Organisation de l’armée secrète (OAS)...

 

Comment s'en étonner, en 1982, François Mitterrand, n'a t-il pas ouvert la porte en faisant voter une quatrième loi d'amnistie[8], qui permet notamment aux généraux ayant organisé le putsch d'avril 1961 de toucher leur retraite d'officiers généraux et d'être réintégrés dans leurs décorations.

 

Le RN dans les pas de l’OAS

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Notes :

[1] Il y a 60 ans, de Gaulle réchappe à l'attentat du Petit-Clamart

[2] Organisation de l'armée secrète

[3] Lajos Marton à propos de l'attentat du Petit-Clamart

[4] Marine Le PEN défend le député RN José Gonzales après ses propos sur l'OAS

[5] Attentat de Pont-sur-Seine

[5bis] José Gonzalez

[6] Les propos de José Gonzalez député RN

[7] Les anciens SS ont reconstruit l'extrême droite française après 1945

[8En 1982, François Mitterrand fait voter une quatrième loi d'amnistie, qui permet notamment aux généraux ayant organisé le putsch d'avril 1961 de toucher leur retraite d'officiers généraux et d'être réintégrés dans leurs décorations.

[9] La macronie complice... de la nomination de la honte. José Gonzales député d’extrême-droite, nostalgique de l’Algérie française et défenseur de l’OAS, devient vice-président du groupe d’amitié France Algérie.... nommé par le bureau de l’Assemblee nationale !

 

Pour en savoir plus :

- Scandale : une vidéo du Monde dédiabolise le RN et la famille Le Pen

- Pourquoi le RN a honte de célébrer ses 50 ans ? Car il a été fondé par un Waffen SS

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10 août 2022 3 10 /08 /août /2022 21:13
Le dictionnaire des biens communs : un travail collectif remarquable

Ce dictionnaire rédigé par des économistes, des historiens et des juristes mutualisent une quantité importante de recherche sur la notion de commun et de bien commun. C’est un instrument de réflexion pour tous les citoyens et particulièrement pour les militants de la gauche populaire pour repenser la notion de propriété et construire de nouvelles organisations collectives dans les domaines de la production, de la consommation, du partage des compétences et des savoirs dans un contexte où l’écologie politique rest prégnante.

Par Marie Cornu est directrice de recherches au CNRS à l’Institut des Sciences sociales du Politique (ISP - ENS Paris Saclay, université Paris-Nanterre, CNRS).

 

 

Sources : Midi Insoumis, Populaire et Citoyen par Hervé Debonrivage

-Marie Cornu et Judith Rochfeld nous présente leur Dictionnaire des biens communs (PUF, 2017), co-écrit avec Fabienne Orsi.

Que sont les « communs », les « biens communs », les « patrimoines communs », les « choses communes » ?

Ces notions sont fortement mobilisées aujourd’hui dans nombre de disciplines des sciences sociales et actions de citoyens. Leur poussée traduit une évolution des pratiques sociales : sous la pression de la crise écologique et de la transformation numérique notamment, les biens seraient davantage mis en partage. Logiciel libre, encyclopédie et habitat participatif, vélos ou voitures en usage successif, entreprise qui serait le « bien commun » de toutes les parties prenantes : les notions des communs intéressent les domaines de la culture, de la protection de l’environnement, de l’urbanisme, de la santé, de l’innovation, du travail, etc.

 

La mobilisation est intense car elle autorise à penser le changement social sur la base d’un réinvestissement du collectif, des communautés, de l’usage et du partage. Elles permettent de proposer des réinterprétations des valeurs fondatrices des sociétés contemporaines tels le rôle de l’État, de la propriété et des formes d’expression de la démocratie. Elles appellent à la fois une réflexion théorique, un débat politique et se concrétisent dans des expériences citoyennes. Ce dictionnaire, à mi-chemin entre le vocabulaire et l’encyclopédie, se veut un outil de compréhension de l’ensemble de ces phénomènes.

 

- Par : Marie Cornu ; Fabienne Orsi ; Judith Rochfeld

Éditions : Puf

ISBN :  978-2-13-081768-0

 Numéro d'édition : 2

Nombre de pages : 1392

Format : 14.5 x 20 cm

Prix papier TTC : 5 €

 

- Nous présentons ici le dictionnaire des biens communs par une vidéo tournée en juin 2018.

 

 

- Une autre présentation de l’ouvrage plus courte 

 

Pour en savoir plus sur " les communs " :

Non à la privatisation des barrages hydroélectriques ! lundi 2 mai 2022 par Jacques Serieys

- La flamme du Commun jeudi 3 mars 2022 par Debonrivage

La lumière du bien commun mardi 22 février 2022 par Debonrivage

Le Commun : une notion complexe qui peut être ambiguë mardi 18 août 2020 par Debonrivage

Avec les communs, la pensée est de retour ! lundi 26 février 2018

Loi numérique : le domaine commun placé hors champ par le privativisme. lundi 13 novembre 2017 par Debonrivage

Rendre inaliénables les biens communs mardi 7 août 2018

« La renaissance des communs. Pour une société de coopération et de partage » de D. Bollier mardi 29 juillet 2014

Manifeste pour les biens communs dans l’union européenne dimanche 6 juillet 2014 par Debonrivage

Paris : droit à la ville capitaliste ou communs pour construire un droit à la ville écosocialiste. vendredi 15 mars 2019 par Danielle Simonnet, Coordinatrice du PG

Commun, Essai sur la révolution au XXIe siècle lundi 15 septembre 2014

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7 août 2022 7 07 /08 /août /2022 13:16
Jean-Luc Mélenchon : « Taïwan : je refuse la guerre froide avec la Chine... c’est au chinois (dont ceux de Taïwan) de régler la question entre eux… »
Jean-Luc Mélenchon : « Taïwan : je refuse la guerre froide avec la Chine... c’est au chinois (dont ceux de Taïwan) de régler la question entre eux… »
Jean-Luc Mélenchon : « Taïwan : je refuse la guerre froide avec la Chine... c’est au chinois (dont ceux de Taïwan) de régler la question entre eux… »
Jean-Luc Mélenchon : « Taïwan : je refuse la guerre froide avec la Chine... c’est au chinois (dont ceux de Taïwan) de régler la question entre eux… »

Taïwan : les macronistes bêlent en chœur avec les folliculaires atlantistes et d'autres les rejoignent pour se démarquer et exister

En 2024, la Chine est une cible pour le Parlement européen de l’extrême droite jusqu’au centre gauche Vert et PS, depuis des mois et même des années en étroite corrélation avec le point de vue des USA et de la mouvance atlantiste[7].

 

 

La scène internationale m’afflige autant que les misérables simagrées des macronistes avec leur diversion sur l’antisémitisme attribué à la LFI. Certes, il s’agit pour ces misérables de faire oublier leur forfaiture dans leur panique face à l’idée d’une taxation des profiteurs de crise. Mais autrement plus lourde de conséquences est la provocation des USA à Taïwan. Quel est le sens de la visite de Pelosi sur place[1] ?

Voilà ce qui a fait polémique y compris par une partie de la gauche, certains restant silencieux pour des raisons politiciennes, estimant que tout ce qui sert à démolir Jean-Luc Mélenchon étant bon pour leur propre existance !

Mais sur le fond du sujet...

 

Sources : Jean-Luc Mélenchon | mis à jour le 30/10/2024

- Une partie de mes lignes de clôture m’est imposée par les très étranges réactions qu’a suscité mon précédent post.
Les cris d’orfraie à propos de mes lignes publiées le 03/08/2022 ici[1], sur la visite de Nancy Pelosi à Taïwan m’ont bien espanté[1bis]. Certes les divers bulletins paroissiaux atlantistes en France ne m’ont pas surpris. Pavlov règne en maître sur eux. Un seul mot : « USA » et la meute se déchaîne. Aucun intérêt. La dépêche AFP qui prétend rendre compte de mon post ne mérite qu’un commentaire affligé: à quoi bon lire un résumé aussi calamiteux ? Mieux vaut lire mon texte directement en se rendant sur mon blog[1]. Ce n’est pas long. Il s’agit de 3500 signes.

  • Mais pourquoi si peu de gens informés, et cultivés n’interrompent pas un instant leurs vacances pour dire ce que tout le monde sait sur le sujet de Taïwan ?
  • Comment comprendre que le vacarme des uns ne reçoive pas le démenti étonné des autres ?
  • Quelle genre de peur règne sur le débat ?
  • Où est passé l’actif président des amitiés franco-chinoises monsieur Raffarin ?
  • Et les signataires de l’accord de coopération de l’UMP avec le Parti Communiste chinois ?
  • Et Fabien Roussel après son si récent voyage d’amitié en Chine[1ter] ?

La suffisance des premiers et la prudence effrayée des seconds me consternent.

 


- En réalité, pour ma part, je n’ai fait que répéter la doctrine constante de notre pays (la France rappelons-le) depuis 1965 à propos de la Chine.

Elle a été encore confirmée par Jean-Yves Le Drian alors ministre des Affaires Etrangères de Macron quand il a été interrogé sur le sujet. Il n’y a qu’une seule Chine[2]... position confirmée par Catherine Colonna ministre des Affaires étrangères le 4 août 2022 : « Les tensions entre la Chine et Taïwan connaissent un nouveau sursaut. Dans ce conflit, la France s'en tient à la " politique d'une seule Chine " »[2bis]..

  • Un de mes critiques se prononce différemment ?
  • Pourquoi ne le dit-il pas alors aussi clairement que je le fais de mon côté ?
  • Quelqu’un discute de quelle Chine on parle ?
  • Pourquoi ne pas le dire au lieu de tourner autour du pot ?

Car cela est également réglé par les accords internationaux acceptés par notre pays et les membres de l’ONU.


🔴  Il s’agit de la Chine, dont la capitale est Pékin et siège parmi les cinq membres permanents du conseil de sécurité de l’ONU aux côtés notamment de la France ;

🔴 La Chine qui a une ambassade à Paris (la capitale des Français).

  • Ceux qui trouvent à redire contre mon post savent-ils qu’aux Etats Unis mon point de vue est aussi exprimé par de nombreuses personnalités, et au plus haut niveau de l’administration Démocrate actuelle ?
Rencontre en Mao Zedong et Richard Nixon en février 1972.
  • Savent-ils qu’il en va de même dans les services de sécurité qui interviennent si largement dans la définition de la politique étrangère des USA ?
  • Et que disent-ils de l’accueil super froid reçu depuis sa provocation par madame Nancy Pelosi à Tokyo et Séoul[5] ?
  • Savent-ils que les USA sont engagés avec la Chine par trois communiqués communs très clairs avec le gouvernement communiste chinois[6] ?
  • Savent-ils que dès le premier (en 1972, répété en 1978 et 1982) les USA proclament qu’il n’y a qu’une seule Chine dont Taïwan fait partie[6] ?
  • Et que Chine et USA s’engagent à respecter la souveraineté et l’unité territoriale de l’autre ?

-  Que veulent ceux qui nient tout cela ?

  • Ils pensent que la Chine millénaire va s’incliner devant leurs gesticulations ?
  • Ils veulent pousser la Chine à devoir entrer en convergence plus étroite avec la Russie ?
  • Ils veulent pousser à la formation d’un bloc plus homogène entre les USA et l’Europe « quoi qu’il en coûte » en matière d’asservissement et de risque de guerre ?

Car ce sont là les thèses sur la table. Pour l’instant, nul ne les a tranchées encore. Ni aux Etats-Unis ni en Chine. Mais la formation des nouveaux grands blocs géopolitiques est l’enjeu de notre temps.

 

 

- La France de Macron a renoncé à jouer un rôle dans cette partie mondiale.
Faut-il s’y résigner ? Les macronistes bêlent donc en chœur avec les folliculaires atlantistes. Sans vergogne !

  • Se souviennent-ils de la façon dont la France a été traitée par les Australiens sur ordre des USA dans l’affaire des sous-marins[3] ?
  • Et comment elle a été expulsée de l’alliance militaire anglo-saxonne pour le Pacifique[4] ?
  • Ils veulent mendier une caresse de leur maître qui les traite si grossièrement ?
  • Les va-t-en-guerre des salles de rédaction et des groupuscules de la macronie savent-ils quels risques leurs sottises feraient prendre au monde si quelqu’un les prenait au sérieux ?
  • Les grenouilles qui se prennent pour des bœufs ne seraient pas seules à éclater si leurs bêtises faisaient la loi. 

Les va-t-en-guerre des salles de rédaction et des groupuscules de la macronie savent-ils quels risques leurs sottises feraient prendre au monde si quelqu’un les prenait au sérieux ?

 

 

- C’est pourquoi le non-alignement est une thèse centrale pour les Français dans cette époque de transition.
En face quelle proposition ? Il n’y en a pas.

Et qu’on ne vienne pas me dire que mon propos revient à approuver tout ce que fait le gouvernement chinois. Non seulement je ne crois pas que ce soit sa demande pour vivre en paix avec les autres nations, mais je veux aussi rappeler ce que j’en ai dit dans le post incriminé[1]. Voici : « Quels que soient l’ampleur et le niveau des critiques qui peuvent être adressées au gouvernement chinois, nous devons refuser de cautionner la guerre à la Chine pour satisfaire les vues des USA sur Taïwan ».

 

Ce qui veut dire faire front aussi avec ceux qui aux USA sont aussi de cet avis. Nous ne devons pas vouloir d’un nouveau front de guerre ni de rien qui nous détourne de la politique altermondialiste dont l’espèce humaine a besoin pour faire face aux conséquences du changement climatique.

 

 

- Intervention de Jean-Luc Mélenchon à l'Assemblée nationale le 29 novembre 2021 contre la proposition de résolution en faveur de l’association de Taïwan aux travaux des organisations internationales et des forums de coopération multilatérale.

Le député insoumis a fait valoir le fait que depuis la décision du général de Gaulle de reconnaître la Chine en 1964, aux yeux de la France, Taïwan est une province chinoise et qu'il n'y a qu'une seule Chine dont la capitale est Pékin.

 

Il a dénoncé la logique de guerre froide que les États-Unis essaient de mettre en place contre la Chine en prenant Taïwan pour prétexte. Il a expliqué que la position de la France devait être de favoriser la paix, en traitant la Chine avec respect et en évitant toute logique de tensions et d'affrontements. Il a, enfin, dénoncé les mesures ultra-restrictives de libertés mises en œuvre par Taïwan prétendument pour lutter contre la pandémie

Notes :

[1Taïwan est un sujet tendu depuis la libération de la Chine. Mais, pour les Français depuis 1965 et le général de Gaulle, il n’y a qu’une seule Chine.

[1bis] espanté

[1ter] " PAS CHOQUÉ " PAR LES PROPOS DE MÉLENCHON SUR TAÏWAN, FABIEN ROUSSEL JUGE LA VISITE DE PELOSI " INAPPROPRIÉE "

[2] Déclaration de M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères, en réponse à une question sur Taïwan, à l'Assemblée nationale le 8 juin 2021.

[2bis] Position confirmée par Catherine Colonna ministre des Affaires étrangères : « Les tensions entre la Chine et Taïwan connaissent un nouveau sursaut. Dans ce conflit, la France s'en tient à la " politique d'une seule Chine " ».

[3] Sous-marins : l’Australie rompt le « contrat du siècle » avec la France, crise diplomatique entre Paris et Washington

[4] Les trois leçons de l’alliance entre l’Australie, les Etats-Unis et le Royaume-Uni

[5] Nancy Pelosi fraîchement reçue à Tokyo et Séoul, embarrassés par les conséquences de sa visite à Taïwan

[6] LES TROIS COMMUNIQUÉS CONJOINTS SINO-AMÉRICAINS

[7] La Chine est une cible pour le Parlement européen de l’extrême droite jusqu’au centre gauche Vert et PS, depuis des mois et même des années en étroite corrélation avec le point de vue des USA et de la mouvance atlantiste.

 

Pour en savoir plus :

- Statut de Taïwan
- Taïwan : Ce qui aurait dû faire débat dans la note de Mélenchon.

- Taïwan : la visite de Nancy Pelosi loin de faire l'unanimité aux États-Unis

- Entretien avec Arnaud le Gall, député NUPES-France insoumise membre de la Commission des Affaires étrangères, en charge notamment du volet international de l’Avenir en commun.

Jean-Luc Mélenchon : « Taïwan : je refuse la guerre froide avec la Chine... c’est au chinois (dont ceux de Taïwan) de régler la question entre eux… »
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5 août 2022 5 05 /08 /août /2022 13:35
Une proposition légitime de résolution du PCF assimilant Israël à " un régime d'apartheid " crée de hystérie au sein de la majorité gouvernementale LREM/RN/LR
Une proposition légitime de résolution du PCF assimilant Israël à " un régime d'apartheid " crée de hystérie au sein de la majorité gouvernementale LREM/RN/LR

Apartheid Israélien, il y a urgence à mettre fin au bal des Hypocrites... et en tout état de cause, « Critiquer l’exécutif israélien, ce n’est pas être antisémite »

 

Pour faire la clarté : L’apartheid est un terme afrikaans qui signifie « séparation » et désigne la politique dite " de développement séparé " instaurée par le Parti national afrikaner (NP) en 1948, dans une Union sud-africaine encore sous domination britannique[0].

A juste titre, la proposition de résolution du groupe parlementaire PCF #Nupes[1" condamne l'institutionnalisation par Israël d'un régime d'apartheid à l'encontre du peuple palestinien[0bis] " et veut faire reconnaître le boycott des produits israéliens par l'Assemblée nationale, avec le soutien de 38 députés PCF, PS et un écologiste et LFI de l'intergroupe #Nupes cosignateurs.

 

Les Palestiniens priés d’emprunter des bus différents des colons
Voilà qui justifie la résolution contre le régime d'apartheid israélien

 

Sources : Durand Eric  mis à jour le 11/08/2022

- Tout d'abord, pour expliquer l'agitation parlementaire, retour sur un concept non négociable " Non, antisionisme et antisémitisme ne sont pas synonymes "... et pourtant remis en cause par la macronie

Tout part des propos de Manuel Valls (1er Ministre de François Hollande)[1bis], selon qui l’antisionisme est « tout simplement le synonyme de l’antisémitisme et de la haine d’Israël ». Prononcée le 7 mars 2016 lors du dernier dîner annuel du Crif (Conseil représentatif des juifs de France)[2], organisme principalement consacré à la défense des gouvernements israéliens successifs auprès des autorités françaises,, cette accusation vise à faire peser un soupçon indistinct d’infamie sur les mouvements de solidarité avec les Palestiniens. et a été contestée, notamment par Pascal Boniface, Fondateur et directeur de l’Institut de recherches internationales et stratégiques (Iris)[2bis]

  • Et ils ne lâchent rien en la matière. Le 12 Novembre 2019 a été présenté à l’Assemblée nationale une résolution LREM visant à assimiler la critique du sionisme à un acte antisémite[3].
    • En réaction, 125 universitaires juifs lancent un appel à l’Assemblée Nationale : " Ne soutenez pas la proposition de résolution assimilant l’antisionisme à l’antisémitisme et approuvant la définition de l’IHRA "[4].
    • Le 3 décembre 2019, L'assemblée nationale adoptait la définition de l'antisémitisme de l'IHRA appelée « RÉSOLUTION MAILLARD (député LREM) [4bis] » (texte résolution n° 2403[5])... et dont le contenu fait débat. (Pour la Ligue des Droits de l'Homme, il s'agit d'UN TEXTE AMBIGU ET TRÈS CONTROVERSÉ[6]).
    • Précision : La résolution de l’Assemblée Nationale est un acte par lequel l’Assemblée émet un avis sur une question déterminée. Cette résolution est de faite, non contraignante mais constitue une restriction à la liberté d’expression, cela peut s’assimiler à un délit d’opinion[6].
    • Et aujourd'hui, dénoncer et combattre le régime d'apartheid israéliens ferait de nous des antisémites... nous ne céderons pas !

 

 

- C'est dans ce cadre que lors de la présentation de la résolution du PCF[1], le 2 août les masques sont définitivement tombés

En l'absence de majorité, dans un contexte socio-économique hyper tendu, ce 2 août, le gouvernement a abattu sa dernière carte face à l'opposition de gauche en la vouant aux gémonies de l'antisémitisme.

 

Ce fut d'abord le très sioniste soutien du gouvernement Netanyahou, M Habib[10] qui sonna la charge. Ses insultes auraient pu en " toucher une sans faire bouger l'autre ", tant l'homme est connu pour ces outrances pro israéliennes et islamophobes. Cependant, le garde des sceaux, qui au lendemain des législatives fut l'un des tous premiers à tendre la main à l'extrême droite, reprend à son compte les accusations. Puis Éric Dupond-Moretti qui a mis de l'huile sur le feu. Enfin ce fut au tour de Madame Borne, première ministre sans portefeuille ni pouvoir de tenter avec ses gros sabots de scinder l'opposition de gauche en déclarant que bien sûr PCF EELV et PS étaient dans le champ républicain tout en excluant LFI.

 

Dans cette ambiance particulièrement pesante où l'accusation d'antisémitisme est portée contre les députés et les partis de la NUPES, ce sont toutes les composantes de gauche que l’on veut délégitimer en les accusant d’antisémitisme. 

 

C'est ainsi que le député communiste Jean-Paul Lecoq, premier signataire de la résolution sur Israël[1] déposée par plusieurs élus de la Nupes, a vivement protesté. Et à l'initiative des députés de la France insoumise, la quasi-totalité des élus de gauche ont quitté l'hémicycle.

 

 

- Et c'est dans ce contexte que l'Union Juive Française pour la Paix dénonce : " l'Apartheid, le bal des Hypocrites[9] "
Selon elle (extrait), l’institutionnalisation de l’apartheid par Israël ne fait plus aucun doute pour les juristes internationaux, qu’ils opèrent dans les institutions officielles ou dans les grandes ONG...

  • Non, le crime d’apartheid ne se juge pas par l’identité de forme avec le régime imposé par le pouvoir blanc en Afrique du Sud[0], maintenant honni par tous quand il bénéficiait jusqu’à sa chute du soutien de bien des discoureurs d’aujourd’hui (notamment le soutien permanent d’Israël, soit dit en passant).
  • Oui par le refus du droit au retour des réfugiés, par les discriminations institutionnelles entre Juifs et Palestiniens en Israël même comme dans les territoires occupés, par le blocus de Gaza, Israël coche de nombreuses cases de l’énumération des caractéristiques d’un régime d’apartheid dans les différentes conventions internationales sur le crime d’apartheid.

 

Et le crime d’apartheid ne résume pas à lui seul tous les crimes de guerre et crimes contre l’humanité que commet Israël.

 

Nous avons déjà dénoncé la campagne de calomnies qui s’est immédiatement développée dès la publication de ce projet de résolution[1] : les défenseurs inconditionnels du sionisme, sans le moindre argument pour critiquer l’argumentation du projet de résolution, ont aussitôt brandi hors de toute décence l’argument de l’antisémitisme, dès lors que les fondements de la création d’Israël sont interrogés. Cette campagne d’une droite sioniste décomplexée (la LICRA, le CRIF, Goldnadel, Prasquier, Aurore Bergé, Sylvain Maillard, Meyer Habib[10]…) bénéficie du silence des autorités de l’État, occupées à recevoir avec les honneurs le commanditaire de l’assassinat du journaliste Jamal Khashoggi, avant que cet après-midi même le Garde des Sceaux crée le buzz en relançant l’accusation inepte d’antisémitisme contre « l’extrême gauche ». Cette campagne se déroule au moment où précisément Israël est dans un temps fort de colonisation, notamment à Jérusalem Est, et dans un temps fort de discriminations légales visant à favoriser les expulsions et les départs des Palestiniens.

 

Cependant, nous devons dire un mot des critiques adressées au projet de résolution par ceux qui se veulent progressistes, mais veulent encore aujourd’hui protéger l’État d’Israël des accusations portées par le projet, en cherchant à tout prix et contre toute évidence à ne voir dans les crimes commis que le résultat des politiques des gouvernements de droite....

 

On voit le Centre Medem, faisant fi de ses origines antisionistes du Bund, dénoncer de même ce projet. Lui aussi fait semblant de croire que seul le régime sud-africain mérite le terme d’apartheid. Et il ose même reprocher au projet d’ignorer « (…) délibérément la participation active des citoyens arabes aux instances de la démocratie israélienne », faisant probablement référence au parti de la droite islamiste arabe un temps associé en roue de secours aux projets réactionnaires du gouvernement Bennett !

 

  • Non, la destruction des Juifs d’Europe n’autorise pas Israël à se parer de cette Histoire pour justifier d’être hors-la-loi commune. L’égalité des droits est un combat qui vaut pour toutes et tous. Il vaut pour ici comme pour là-bas. Nous le poursuivrons sans relâche.
Une proposition légitime de résolution du PCF assimilant Israël à " un régime d'apartheid " crée de hystérie au sein de la majorité gouvernementale LREM/RN/LR

Notes :

 [0L’apartheid est un terme afrikaans qui signifie « séparation » et désigne la politique dite " de développement séparé " instaurée par le Parti national afrikaner (NP) en 1948, dans une Union sud-africaine encore sous domination britannique

[0bisLes Palestiniens priés d’emprunter des bus différents des colons

[1Proposition de résolution de M. Jean-Paul Lecoq condamnant l'institutionnalisation par Israël d'un régime d'apartheid à l'encontre du peuple palestinien

[1bisManuel Valls

[2Dîner du Crif: pour Valls, «l'antisionisme est synonyme de l'antisémitisme»

[2bis] Fondateur et directeur de l’Institut de recherches internationales et stratégiques (Iris), Pascal Boniface publie un ouvrage pour répondre à ses détracteurs, parmi lesquels l’ancien premier ministre Manuel Valls, qui l’estampillent « antisémite » 

[3] PROPOSITION DE RÉSOLUTION visant à lutter contre l’antisémitisme

[4Sionisme et ainsi de suite… par Jean-Luc Mélenchon

[4bis] Le 28 mai 2019, le député Sylvain Maillard avait participé à une conférence aux côtés de Yossi Dagan, un leader militant des colons, qui préside une autorité de l’État Israélien en charge des colonies en Cisjordanie occupée.

[5Analyse du scrutin public n° 2338 sur la proposition de résolution visant à lutter contre l’antisémitisme

[6] DÉCRYPTAGE DE LA RÉSOLUTION DITE « RÉSOLUTION MAILLARD »

[9] Apartheid, le bal des Hypocrites

[10] Un député français (UDI) “porte-parole” de Benyamin Netanyahou à l’Assemblée nationale

 

Pour en savoir plus :

- Non, antisionisme et antisémitisme ne sont pas synonymes

- Antisémitisme : en finir avec le poison de la rumeur par Manuel Bompard

- Dans un contexte particulièrement pesant où l'accusation d'antisémitisme est portée contre les députés et les partis de la NUPES, des communistes ont décidé de répondre à une tribune de Michel Onfray ciblant le PCF parue le 31 juillet dans le JDD.

- Corbyn n’est pas antisémite. Son vrai péché est de se battre contre l’injustice dans le monde, dont sa version israélienne.

- L’Afrique du Sud demande qu’Israël soit déclaré "État d’apartheid"

- Contre vents et marées, la résistance palestinienne, debout !

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4 août 2022 4 04 /08 /août /2022 08:31
Antisémitisme : en finir avec le poison de la rumeur par Manuel Bompard

« Chaque accusation publique sera poursuivie devant les tribunaux. Car il est temps que cesse cette infamie. »

 

Ce mardi 2 août, dans l’hémicycle de l’Assemblée Nationale, le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti et la Première ministre Elisabeth Borne se sont déshonorés. En donnant un caractère officiel au procès abject en antisémitisme mené à l’encontre de la France insoumise, ils ont, non seulement, insulté une partie de la représentation nationale mais ont rendu, par la même, un bien mauvais service à la lutte contre l’antisémitisme.

 

Sources : par Manuel Bompard (Député France insoumise #Nupes de Marseille)|

- Eric Dupond-Moretti parle de Jérémy Corbyn, l’ancien chef du Parti travailliste britannique.
Il faut rappeler que si celui-ci a été suspendu de son parti le 29 octobre 2020 à la suite de la publication d’un rapport sur l’antisémitisme, il a été réintégré par l’instance dirigeante du parti le 17 novembre 2020[1].  Il ne lui était d’ailleurs pas reproché des propos ou des actes antisémites, mais de ne pas avoir agi suffisamment contre l’antisémitisme. De plus, nous n’avons pas de lien particulier avec lui. Profiter de sa présence en France pour transformer nos parlementaires en antisémites est donc d’une malhonnêteté crasse. C’est l’histoire de l’homme qui a vu l’homme qui a vu l’ours.

 

Pire encore, alors que cette résolution est à l’initiative de nos camarades communistes, Elisabeth Borne l’utilise pour flageller les insoumis tout en absolvant les autres groupes de la NUPES. Car en réalité, elle n’a rien à faire de la véracité des attaques qu’elle profère. Elle poursuit seulement un objectif politique : détacher la France insoumise des autres composantes de la NUPES pour empêcher toute possibilité d’alternative à gauche. Mais cette tentative est vaine, comme l’a démonté notre réaction commune face aux propos des ministres au sein de l’hémicycle.

 

 

- Ces interventions ne s’appuient donc sur aucun élément sérieux.
Elles ne visent qu’à propager le poison de la rumeur pour disqualifier l’opposition principale à Emmanuel Macron et à sa politique. Car une fois ces polémiques absurdes écartées, il ne reste plus que les faits. Ils sont simples et méritent d’être énoncés clairement.

  • Aucun militant, dirigeant ou élu de la France insoumise n’a jamais tenu de propos ou commis d’actes antisémites. 
  • Aucune poursuite pour antisémitisme n’a jamais été engagé contre une personne appartenant à la France insoumise. 
  • Les procédures judiciaires engagées par Jean-Luc Mélenchon contre ceux qui l’avaient accusé d’antisémitisme se sont traduites par des condamnations pour diffamation. 

 

 

- Le débat politique, même conflictuel, mérite mieux que ces tentatives de disqualification.
Elles posent d’ailleurs un problème de cohérence.
Car s’il y a des antisémites sur les bancs de l’Assemblée Nationale, il faut les traduire devant les tribunaux. Et si nous sommes, nous, députés de la France insoumise, des antisémites, alors il n’est pas compréhensible que trois ministres du gouvernement d’Emmanuel Macron viennent débattre (sans complaisance) avec nous lors de nos prochaines universités d’été. Dupond-Moretti et Borne doivent donc s’excuser.

 

Car nous n’avons pas l’intention de courber l’échine.

  • Chacune de ces attaques donnera lieu, de notre part, à une réaction claire et immédiate, comme nous l’avons fait ce mardi en quittant l’hémicycle.
  • Et chaque accusation publique sera poursuivie devant les tribunaux.

Car il est temps que cesse cette infamie.

 

Notes :
[1] Corbyn n’est pas antisémite. Son vrai péché est de se battre contre l’injustice dans le monde, dont sa version israélienne.

 

Pour en savoir plus

- Le gouvernement d'un président qui a reçu à l’Élysée, par Emmanuel Macron en personne, Elie Hatem, défenseur de l’antisémite Charles Maurras

- Le gouvernement d'un président qui a rendu hommage à Pétain accuse un parti de gauche d'antisémitisme.

 - Jean-Luc Mélenchon : Corbyn : la synthèse mène au désastre

Antisémitisme : la faute majuscule de la Macronie

- Un député français (UDI) “porte-parole” de Benyamin Netanyahou à l’Assemblée nationale

- L’antisémitisme tourne toujours à droite

 

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2 août 2022 2 02 /08 /août /2022 22:57
Pouvoir d'achat : alliés, LREM, LR et le RN votent contre l'augmentation du SMIC à 1 500€ proposé par la #Nupes
Pouvoir d'achat : alliés, LREM, LR et le RN votent contre l'augmentation du SMIC à 1 500€ proposé par la #Nupes
Pouvoir d'achat : alliés, LREM, LR et le RN votent contre l'augmentation du SMIC à 1 500€ proposé par la #Nupes
Pouvoir d'achat : alliés, LREM, LR et le RN votent contre l'augmentation du SMIC à 1 500€ proposé par la #Nupes

Mesures Macron d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat : « On aura vu le vrai visage du RN »...

Résultat « Ceux qui ne sont rien » auront des miettes[1] !

...la loi « pouvoir d’achat » n’augmente pas le pouvoir d’achat mais entérine sa baisse[1bis] !

 

Demandée par la #Nupes[2] (LFI, EELV, le PCF et le PS), la hausse du SMIC à hauteur de 1 500 € nets n'a pas été adoptée par les députés. 257 parlementaires, dont Marine Le Pen ou Aurore Bergé, ont en effet voté contre. (257 parlementaires ont voté contre, 121 pour et 4 se sont abstenus, selon le site de l'Assemblée[3])
«  Main dans la main RN et macronistes refusent l'augmentation du SMIC. La pire droite d'Europe », a lancé sur Twitter Jean-Luc Mélenchon, l'ancien candidat insoumis à la présidentielle[4].

«  On aura vu le vrai visage du RN qui vote contre les intérêts des plus pauvres. On aura vu le vrai visage de LREM qui s’allie avec le RN pour protéger les intérêts des plus riches », commente quant à lui le jeune député LFI Louis Boyard[5].

 

Sources : l'insoumission | mis à jour le 17/10/2022

- SMIC. « Nous voterons l’essentiel des mesures que vous proposez », avait, la veille du vote, déclaré Marine Le Pen dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale, en s’adressant au gouvernement[6].

Quel autre exemple que celui-ci pour illustrer l’alliance LREM & RN qui a été observé pendant plusieurs semaines à l’Assemblée ?

  • Après que les députés macronistes aient votés pour faire élire deux députés d’extrême-droite du RN à la vice-présidence de l’Assemblée[7] ;
  • après que les députés du RN aient refusé de voter la motion de censure du gouvernement[8]...
  • nouvelle épisode de l’alliance capital-fasciste : le 20 juillet 2022 l’alliance LREM & RN a voté d'une seule voix contre l’augmentation du SMIC à 1500€ net proposée par la gauche (amendement #Nupes[9]), et lors du vote global de l'article 4 du projet de loi (qui ne prévoit pas le SMIC à 1 500€), vote POUR[10].

 

 

- Défendus par le parti présidentiel et par son allié objectif, le Rassemblement national, les intérêts du capital sont bien gardés.

L’examen du texte « paquet pouvoir d’achat » à l’Assemblée nationale, a laissé éclater au grand jour ce que l’insoumission martèle depuis des mois : Marine Le Pen et le Rassemblement national, derrière la communication, portent un programme économique de saignée des classes populaires[11] : Refus d’augmenter les salaires, mais également de bloquer les prix, de dégeler le point d’indice des fonctionnaires, recul sur les retraites, arnaque sur l’ISF, remboursement de la dette, maintien de la flat-tax, austérité dans les services publics… Marine Le Pen défend, main dans la main avec Emmanuel Macron, les intérêts du capital contre le travail.

 

 

- Macron et Le Pen, main dans la main contre l’augmentation du SMIC
Un accord de fond qui ne date pas d’hier. Pendant la campagne présidentielle, Marine Le Pen s’était positionnée contre l’augmentation du SMIC, comme Emmanuel Macron. Candidate du peuple et du pouvoir d’achat ? Que nenni. À la place, la responsable du Rassemblement national (RN) proposait de supprimer des cotisations sociales pour augmenter le salaire net[12]. C’est-à-dire prendre dans notre poche gauche pour mettre quelques euros dans notre poche droite.

 

  • Quoi de plus normal pour Marine Le Pen de VOTER POUR[13] le « paquet pouvoir d’achat » proposé par le gouvernement, ce projet de loi qui donne toujours plus au capital qu’au travail, validant le non blocage des prix, la non hausse du SMIC, des pensions de retraites au delà de l'inflation, la revalorisation des minimas sociaux au dessus du seuil de pauvreté, le non gel des loyers... ?

 

 

 

- Par ce geste, le RN acte son rapprochement idéologique avec le macronisme.

Ses députés approuvent la distribution de miettes et de chèques, portée par les députés LREM. Le parti d’extrême-droite montre aux yeux du monde qu’il n’a jamais lutté pour la hausse des salaires :

  • Que le RN ne compte pas changer de position à ce sujet ;
  • Que le RN est bien un allié tacite de Macron, un allié des intérêts du capital, contre les intérêts des travailleurs.

 

 

- Le député France Insoumise, Adrien Quatennens a dénoncé avec vigueur l’hypocrisie du RN.

« Le partage de la valeur, ce ne sont pas des primes. Ce sont des augmentations de salaires et offrir les conditions d’une vie digne aux travailleurs, de vivre de leur travail. Ce que précisément, vous aussi, en bonne alliée de la macronie, vous refusez. […] Vos électeurs vous voient. Vous vous couchez contre la logique macroniste qui vise à verser des primes aléatoires et des chèques ! », s’est-il exclamé dans l’hémicycle[14].

 

 

- « Nous voterons l’essentiel des mesures que vous proposez » : pour quelles miettes le RN a-t-il voté ?
Un article a été publié ici même 👉 [15] par les insoumis pour décortiquer le « paquet pouvoir d’achat » du gouvernement.

 

🟥 Que contient-il ? Miettes, chèques et mesurettes.

Voilà, ce alors que les Français sont pris à la gorge par l’inflation et qu’ils ont un besoin urgent d’augmentation de leurs salaires, ce que le RN a avalisé : 

  • Une revalorisation du point d’indice des fonctionnaires (+3,5%), présentée comme historique, mais inférieure à l’inflation. Cela revient à une perte sèche de pouvoir d’achat de 2,25% sur l’année pour les fonctionnaires ;
  • Aucun effort demandé aux 3,5% d’ultra-riches qui possèdent la moitié des logements du pays, alors que les Français vont pâtir de l’inflation des loyers, qui est leur premier poste de dépenses ;
  • Pas d’augmentation du SMIC ;
  • Pas de blocage des prix de l’essence et des biens de première nécessité ;
  • Aucune taxation des milliardaires qui se sont gavés pendant la crise sanitaire ;
  • Des primes pour les entreprises qui le voudront bien, des miettes payées par… le contribuable.

 

👉 En définitive, un paquet pouvoir d’achat d’où est absent le mot « salaires ».

  • Voilà ce que le RN a soutenu, main dans la main avec la macronie et les Républicains.
  • Une lune de miel pour soutenir le capital plutôt que le travail.
  • L’alliance capital-fasciste se confirme chaque jour un peu plus.

 

 

- Et pourtant...

Malgré la propagande macroniste, les français ont compris que la loi sur le pouvoir d'achat était surtout une manière de protéger les superprofits.

Pas convaincus par la loi pouvoir d’achat, les Français voulaient taxer les superprofits - EXCLUSIF

 

- Pour en savoir plus...

Macron et Le Pen contre les hausses de salaire ! | Débats à l'Assemblée

 

Notes

[1] « Ceux qui ne sont rien » auront des miettes

[1bis] LES SALARIÉS PERDENT DU POUVOIR D'ACHAT: LES HAUSSES DE RÉMUNÉRATION NE COMPENSENT PAS L'INFLATION

[2] Nupes

[3] 257 parlementaires ont voté contre, 121 pour et 4 se sont abstenus, selon le site de l'Assemblée

[4] Main dans la main RN et macronistes refusent l'augmentation du SMIC. La pire droite d'Europe. #DirectAN

[5On aura vu le vrai visage du RN qui vote contre les intérêts des plus pauvres.

[6] Loi pouvoir d’achat : « Nous voterons l’essentiel des mesures que vous proposez», annonce Marine Le Pen

[7] En récoltant respectivement 290 et 284 voix, les députés d’extrême droite ont été élus dès le premier tour grâce à des votes de la majorité et de la droite, dans un scrutin à bulletin secret.

[8Marine Le Pen refuse de voter la motion de censure du gouvernement déposée par LFI, l’alliance RN & LREM se confirme

Quels sont les députés qui ont voté la motion de censure présentée par la Nupes à l’Assemblée ?

[9Scrutin public sur l'amendement n° 844 qui veut porter le SMIC à 1 500€

[10] vote global de l'article 4 du projet de loi (qui ne prévoit pas le SMIC à 1 500€

[11] Le programme économique de Marine Le Pen : une saignée pour les classes populaires

[12] Dans une tribune aux « Echos », Marine Le Pen, propose que pour toute hausse de salaire de 10 % accordée à l'ensemble des salariés gagnant jusqu'à trois fois le SMIC, les entreprises soient exonérées de cotisations patronales sur cette augmentation, et ce pour les cinq années suivant 2022

[13] 21 juillet 2022 : l'Assemblée adopte en première lecture l'ensemble du projet de loi n° 19 portant " mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat "

[14] Macron et Le Pen contre les hausses de salaire ! | Débats à l'Assemblée - Adrien Quatennens

[15] Paquet « pouvoir d’achat » : des miettes mais surtout, surtout, pas d’augmentation des salaires

 

 

Pour en savoir plus :

- « “La prime Macron” creuse volontairement le déficit de la Sécurité sociale »

Pas convaincus par la loi pouvoir d’achat, les Français voulaient taxer les superprofits - EXCLUSIF

- Super-profits : le RN remercie le patron de CMA CGM, l’homme qui a pris 30 milliards en 1 an

Le RN vote contre le rétablissement de l’ISF, l’extrême-droite amie des riches

Pouvoir d'achat : alliés, LREM, LR et le RN votent contre l'augmentation du SMIC à 1 500€ proposé par la #Nupes
Pouvoir d'achat : alliés, LREM, LR et le RN votent contre l'augmentation du SMIC à 1 500€ proposé par la #Nupes
Pouvoir d'achat : alliés, LREM, LR et le RN votent contre l'augmentation du SMIC à 1 500€ proposé par la #Nupes
Pouvoir d'achat : alliés, LREM, LR et le RN votent contre l'augmentation du SMIC à 1 500€ proposé par la #Nupes
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2 août 2022 2 02 /08 /août /2022 19:57
Antisémitisme : la faute majuscule de la Macronie
Antisémitisme : la faute majuscule de la Macronie
Antisémitisme : la faute majuscule de la Macronie
  • « Exempter le RN de tout antisémitisme quand on connaît son histoire pour en accuser LFI ? ! Mais quand le gouvernement a-t-il perdu le sens de la République ?[1] »
  • Antisémitisme, l’arme fatale[1bis] ?

 

En taxant les députés NUPES et singulièrement LFI d'antisémitisme en plein hémicycle, le gouvernement et les députés Renaissance, banalisent le crime et parachèvent la respectabilité présumée du RN.

 

Sources :  Rodolphe P. | mis à jour le 27/12/2023

- Il ne leur reste que cela.
En l'absence de majorité, dans un contexte socio-économique hyper tendu, ce 2 août, le gouvernement a abattu sa dernière carte face à l'opposition de gauche en la vouant aux gémonies de l'antisémitisme.

 

Ce fut d'abord le très sioniste soutien du gouvernement Netanyahou, M Habib qui sonna la charge. Ses insultes auraient pu en " toucher une sans faire bouger l'autre ", tant l'homme est connu pour ces outrances pro israéliennes et islamophobes. Cependant, le garde des sceaux, qui au lendemain des législatives fut l'un des tous premiers à tendre la main à l'extrême droite, reprend à son compte les accusations. Enfin ce fut au tour de Madame Borne, première ministre sans portefeuille ni pouvoir de tenter avec ses gros sabots de scinder l'opposition de gauche en déclarant que bien sûr PCF EELV et PS étaient dans le champ républicain tout en excluant LFI.

 

Madame la première ministre, sans doute oublieuse de la quasi réhabilitation de Pétain, puis de Maurras par son patron entre 2018 et aujourd'hui, trouvait ce qu'elle pensait être une issue[2][3][3bis].

 

 

- L'accusation d'antisémitisme, jusqu'ici, faisait figure d'arme atomique à l'encontre de l'accusé.
Or, l'utiliser en ce lieu (l'Assemblée Nationale) et ainsi a deux effets délétères :

  • D'abord, elle banalise la gravité de l'accusation. Si, en effet, 75 députés étaient effectivement antisémites, ces derniers devraient être interdits d'assemblée, traduits devant la justice et condamnés. Or bien sûr rien de tel dans le cas présent. Conclusion, l'antisémitisme peut être brandi en plein parlement, par les plus hauts personnages de l'État sans que cela soit suivi du moindre effet réel hormis d'agiter les plateaux et les réseaux sociaux pour 24 heures. L'antisémitisme devient donc une accusation banale, courante, un effet de manche pour quiconque dispose d'une tribune.

 

  • Le second but de l'opération mediatico politique est purement politicien : il consiste à accoler Gauche (radicale) à antisémitisme dans une sorte de délire révisionniste officiel afin de mieux disculper les vrais antisémites historique, le courant antisémite ultra majoritaire à savoir l'extrême droite. C'est ainsi que le délirant Onfray, en retraçant la généalogie de l'antisémitisme, évite soigneusement d'évoquer le nazisme...et même les antidreyfusards pour fustiger l'antisionisme. Tenter ainsi de bouter hors de la République le camp qui célèbre l'homme qui en a forgé la devise, Robespierre, ( et qui se battit pour la citoyenneté pour les juifs !), pourrait être ridicule mais...

 

- C'est le troisième acte de la tragédie qui se joue en fait.

Après l'élection grotesque d'un Président détesté grâce à un électorat taxé aujourd'hui d'être antisémite, le deuxième acte fut celui de la trahison, par l'alliance manifeste de la minorité parlementaire avec les représentants fascistes du RN[4].

  • Le troisième acte est celui où le noeud gordien se resserre sur les acteurs. En abattant un mois après les élections la carte offensive la plus disqualifiante pour l'opposition, la Macronie est déjà à nu. Une fois l'effet retombé, que lui restera t il ? Rien si ce n'est la gestion des pots cassés. La Macronie n'a plus rien en stock, ni contre LFI, ni surtout contre le RN.

 

 

- La rentrée sera très compliquée à gérer

Les antifascistes macroniens à l'action


En effet, la rentrée sera très compliquée à gérer et le quatrième acte sera celui de la dissolution, celui où les protagonistes en se débattant dans tous les sens se condamnent définitivement. Le dernier acte sera le triomphe de l'extrême droite aux prochaines législatives qui aura pu nouer des alliance de Reconquête à LR, et qui sera en position de force si par miracle elle n'est pas majoritaire.

 

 

Les macronistes se sont donc définitivement engagé•es dans la voie de la collaboration active avec l’extrême droite.

  • Macron aura donc sa cohabitation avec Le Pen.
  • Les deux seront d'accord pour restreindre le droit d'expression de la gauche jugée extrémiste, puis la radicale, puis la modérée. On y va tout droit.
  • Les Français regardent ailleurs.
Antisémitisme : la faute majuscule de la Macronie
Antisémitisme : la faute majuscule de la Macronie
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1 août 2022 1 01 /08 /août /2022 10:00
Explication de vote LFI-NUPES sur la loi “ pouvoir d’achat ”

Le 22 juillet au matin, à 6h après une nuit de débats, la loi intitulée « Mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat » a été adoptée en première lecture. Le groupe LFI-NUPES a voté contre[1]. Hendrick Davi, député LFI-NUPES revient ici sur les raisons de ce vote.

 

Sources : par Hendrick Davi, député LFI-NUPES | mis à jour le 08/08/2022

-  La situation sociale est grave.

L’INSEE a révélé que sur un an les prix avaient augmenté de 5,8% en juin 2022[2]. Sur la même période, selon le Magazine « Que Choisir », la hausse atteint 24% pour l’essence, 28% pour le gaz et 7% pour l’alimentaire. Pour le seul premier trimestre 2022, les loyers ont augmenté de 2,48%[3]. Ces hausses frappent encore plus les ménages modestes, qui allouent près de 50% de leurs revenus au loyer. Ces hausses conduisent à de nombreuses luttes sur les salaires en France (SNCF, Transavia, Golden Tulip) et en Europe (poste britannique).

 

Mais la situation récente a aussi été marquée par deux canicules exceptionnelles qui ont conduit à des mégas feux détruisant près de 20 000 hectares de forêts dans les Landes. Comment ne pas voir les conséquences désastreuses du changement climatique et l’urgence de sortir des énergies fossiles ?

 

 

- Or cette loi, mal rédigée, faite de bric et de broc, ne répond en rien aux enjeux de la période et le gouvernement a refusé la plupart des amendements qui auraient pu en améliorer le contenu.

D’une part :

  • la loi ne compense pas la perte de la valeur de nos revenus avec l’inflation ;
  • d’autre part elle aggrave les émissions de gaz à effet de serre avec l’importation de gaz de schiste américains et la relance d’une centrale à charbon.

 

Entrons dans les détails.

  • L’article 1 prévoit l’augmentation du plafond de la prime dite Macron.

Cette prime défiscalisée peut être versée par les entreprises aux salariés. Cette mesure pose plusieurs problèmes :

  • D’abord, elle ne bénéficiera pas à tous les salariés, mais seulement ceux qui sont dans des entreprises qui ont les moyens et la volonté de la verser. En 2021, seulement 4 millions de personnes l’ont touchée sur 25 millions de salariés (soit 16%)[4] et le montant moyen versé était de 506 euros en moyenne[4], bien en deçà du plafond de 1000€ ;
  • Rien n’indique que l’augmentation du plafond changera dans les mêmes proportions l’augmentation des versements ;
  • Mais surtout des primes versées annuellement et sans aucune garantie ne constituent pas une solution pour des millions de citoyens pour payer chaque mois l’essence et l’alimentation ou pour avoir une garantie pour un bailleur.
  • Pire, les entreprises qui ont des marges importantes pourront verser cette prime défiscalisée en lieu et place d’une augmentation de salaires ;
  • C’est donc possiblement un frein à de vraies augmentations de salaires. Or comme ces primes sont défiscalisées, c’est un manque à gagner de cotisations pour la sécurité sociale, ce qui risque de peser notamment sur le système de  retraites.

 

  • Dans la même veine, le gouvernement a décidé avec l’article 2 de faciliter l’intéressement.

L’intéressement dépend des profits de l’entreprise et il est prioritairement versé sur des plans d’épargne salariale défiscalisés. C’est encore un moyen d’éviter les hausses de salaires en proposant des alternatives défiscalisées et irrégulières. Actuellement, les exonérations de cotisations sur les diverses formes d’intéressement coûtent 1,7 Md€ par an. C’est donc une mauvaise solution pour le pouvoir d’achat, comme pour notre modèle social.

 

  • Le reste des articles présente quelques avancées même si elles sont souvent largement insuffisantes.
    • L’article 4 vise à limiter le nombre de branches professionnelles pour lesquelles les minima sont en dessous du SMIC, par exemple en fusionnant les branches.

Selon nous, il aurait été préférable de conditionner des aides publiques au fait d’avoir des minima de branche au-dessus du SMIC. Nous avons proposé de porter le SMIC à 1500€ net. Sans succès, car le bloc de droite LR, RN et LREM a voté contre !

  • L’article 5 prévoit une revalorisation anticipée de 4 % à partir de juillet des droits et prestations sociales indexés sur l’inflation.

Mais cette revalorisation est insuffisante vue l’inflation.

  • L’article 6 prévoit la revalorisation anticipée des APL à hauteur de 3,5 % et le plafonnement de l’indice de référence des loyers à 3,5 % jusqu’au deuxième trimestre 2023.

C’est notoirement insuffisant. Par exemple, pour un loyer de 600 euros et des APL de 200 euros, l’augmentation de 3,5 % des deux se traduit par un maigre gain de 7 euros d’APL et 21 euros de loyer supplémentaire, soit 168 euros de perte annuelle.

Nous avons proposé le gel des loyers. Sans succès, car le bloc de droite LR, RN et LREM a voté contre[4bis] !

  • L’article 7 oblige les vendeurs en ligne à garantir au consommateur un “ accès facile, direct et permanent à une fonctionnalité dédiée ” à la résiliation du contrat conclu et à lui indiquer clairement la date de la fin du contrat lorsque le consommateur décide de résilier le contrat.

LREM s’est opposé à l’extension de cette obligation à plus de secteurs.

  • L’article 8 concerne la même garantie pour les assurances.

 

Pour tous ces articles, le débat a été entre d’un côté ceux qui proposaient des primes (LREM, LR, et RN) et de l’autre ceux (la NUPES dans sa diversité) qui exigeaient la hausse générale des salaires, leur indexation sur l’inflation étant la seule mesure permettant de garantir en réalité la valeur de nos salaires et donc de notre travail.

 

 

- L’inflation...

L’inflation actuelle n’est pas causée par la seule guerre en Ukraine ou par une augmentation des salaires, elle est causée aussi (et surtout) par l’explosion des dividendes des entreprises, qui alimentent la spéculation dans de nombreux secteurs et des blocages dans les chaînes d’approvisionnement mondiales suite au COVID. C’est le chaos capitaliste qui génère actuellement l’inflation et sûrement pas nos salaires. Choisir la hausse des salaires plutôt que des primes défiscalisées ou de l’intéressement, c’est contraindre les entreprises à réajuster la répartition de la valeur ajoutée entre les salaires et les dividendes. Rappelons que les entreprises du CAC 40 ont versé 80 milliards d’euros en dividendes à leurs actionnaires en 2021[5], soit l’équivalent de 3200€ par salarié français…

 

 

- Mais ce texte en plus d’être largement insuffisant pour contrer la paupérisation des salariés, présente des dispositions nocives pour l’environnement et le climat.

Afin de sécuriser l’approvisionnement énergétique,...

  • l’article 13 prévoit que le ministre chargé de l’énergie puisse obliger l’opérateur d’un terminal méthanier flottant à le maintenir en exploitation pour la durée fixée par ce ministre ;
  • l’article 14 la construction d’un terminal flottant d’importation de gaz naturel liquéfié (gaz de schiste américain) au Havre ;
  • L’article 15 permet aux exploitants de centrales à charbon de recourir “ en cas de reprise temporaire d’activité ” à des CDD et des contrats de mission pour leurs recrutements, notamment en faisant revenir les salariés en cours de reclassement suite à la fermeture initiale ;

Par dérogation au droit du travail, la durée des CDD ainsi conclus peut atteindre 36 mois au lieu de 18.

  • Enfin, l’article 19 prévoit la validation du décret du 11 mars 2022 qui oblige EDF à vendre plus d’énergie à prix cassé à ses concurrents, pour l’année 2022 et ce “ à titre exceptionnel ”.

 

Bref, comme le gouvernement a été incapable d’organiser la transition énergétique, il est obligé de relancer l’exploitation et l’usage d’énergies fossiles, à cause des risques liés à la crise en Ukraine. Le principal problème de cette approche, c’est qu’à aucun moment le gouvernement ne planifie la sortie des énergies fossiles de façon conséquente en développant les transports en commun, la rénovation des logements et le développement des énergies renouvelables. Pire, le dernier article menace la survie de notre opérateur historique EDF en le contraignant à revendre à perte de l’électricité à ses concurrents.

 

Sur les questions écologiques, comme sur les articles sur le pouvoir d’achat, le même bloc LR, LREM et RN s’est opposé aux amendements proposant d’autres solutions, ou à minima limitant dans le temps le recours aux énergies fossiles.

 

Pour toutes ces raisons, il était inconcevable de voter une telle loi climaticide et organisant la perte de notre pouvoir d’achat et donc de pouvoir de vivre de nos concitoyens.

Il est nécessaire maintenant que les salariés se battent partout par la grève et les manifestations pour obtenir de leurs dirigeants les augmentations de salaires que le gouvernement et ses alliés de LR et du RN ont refusé de leur donner.

 

Notes :

[1l'ensemble du projet de loi portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat (première lecture)

[2] En juin 2022, les prix à la consommation augmentent de 5,8%

[3] Pour le seul premier trimestre 2022, les loyers ont augmenté de 2,48%

[4] Prime Macron : près de 4 millions de bénéficiaires en 2021

[4bis] Loi pouvoir d’achat : les députés LREM et RN empêchent le gel des loyers, la hausse plafonnée

[5] Le CAC 40 va verser 80 milliards d'euros à ses actionnaires au titre de 2021

 

Pour en savoir plus :

- « “La prime Macron” creuse volontairement le déficit de la Sécurité sociale »

 

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31 juillet 2022 7 31 /07 /juillet /2022 09:32
NUPES : les armes à gauche ?

Alliance selon les uns, reddition selon les autres... la Nouvelle Union Populaire Ecologique et Sociale, la fameuse Nupes[1], rebat les cartes de la gauche française.

 

 

Sources : Eric Durand | mis à jour le 09/07/2023

-  Dénouement d'une Présidentielle porteuse d'espoir pour le parti de Jean-Luc Mélenchon, et tragique pour le Parti Socialiste. 
Pourtant, il y a 10 ans, le PS était plus puissant que jamais : il détenait l'Elysée, la majorité à l'Assemblée Nationale, le Sénat, la plupart des grandes villes, la quasi- totalité des régions...

 

En 2017, après 5 ans d'exercice du pouvoir, il est victime du siphonnage de ses troupes et de ses voix par la République en marche. Durant 5 ans, 30 députés socialistes siègent à l'Assemblée, mais ils semblent inaudibles, là où les 17 Insoumis adoptent la stratégie du «  bruit et de la fureur ». Face à la vague insoumise, le PS semble englouti...


Comment et pourquoi la gauche  française s'est alignée sur les positions " radicales " de la France insoumise ?
Regards croisés entre François Hollande, fervent défenseur de la social-démocratie, et Jean Luc Mélenchon fer de lance de la gauche " radicale" selon certains. 

 

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26 juillet 2022 2 26 /07 /juillet /2022 12:59
Le Président Macron et la « nation organique »

Face à la dérégulation économique et politique, qu’il encourage par ailleurs, Macron espére rassurer son électorat à peu de frais en jouant la carte de la nation !

 

Par Manouk Borzakian Géographe, postdoctorant à l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL).

Dans son allocution du 14 juillet 2022, Emmanuel Macron a qualifié la nation de « tout organique ». L’expression puise dans la tradition intellectuelle de la géopolitique dite « classique », dont les théories ont notamment servi de fondement à l’expansionnisme nazi.

 

 

Sources : Manouk Borzakian | mis à jour le 08/08/2022

- Une nation un tout organique ?

En entendant Emmanuel Macron expliquer qu’« une nation, c’est un tout organique », difficile pour les géographes de ne pas penser à un encombrant père fondateur de leur discipline, Friedrich Ratzel[1]. Une notion a assuré la postérité à ce scientifique allemand de la fin du 19e siècle : l’espace vital (Lebensraum). Dans sa Politische Géographie, publiée en 1897, le zoologiste devenu géographe compare les États à des « organismes qui entretiennent avec le sol un rapport nécessaire » et entreprend de les étudier avec les outils de la biologie. Appliquant la théorie darwinienne à ces « organismes », Ratzel décrit la tendance de tout État à étendre son territoire à mesure qu’il croît et, le cas échéant, à s’approprier l’espace de ses voisins.

 

 

- De la « Geopolitik » à l’expansionnisme nazi

Cette théorie de l’espace vital, malgré ses bases scientifiques fragiles, aura une riche descendance intellectuelle. Le Suédois Rudolf Kjellén[2], auquel on doit le terme « géopolitique », reprend les idées de Ratzel pour alimenter une science des États conçus comme des organismes vivants. Son ouvrage au titre évocateur, L’État comme forme de vie, publié en 1916, influencera Karl Haushofer[3], fondateur de l’école allemande de géopolitique. Comme Ratzel et Kjellén, Haushofer considère la géopolitique comme une science naturelle étudiant les interactions entre des organismes s’affrontant pour étendre leur territoire respectif. Il défend une vision quasi mystique des frontières, appelées à se mouvoir au gré du développement des États et de leur population.

 

Au lendemain de l’humiliation du Traité de Versailles de 1919, Haushofer veut fournir des outils théoriques aux dirigeants allemands. Car cette géopolitique « classique », qui se développe durant la première moitié du 20ème siècle en Allemagne, mais aussi en Grande-Bretagne et aux États-Unis, se pare de scientificité mais s’adresse surtout aux responsables politiques et vise à justifier leur politique extérieure. Même si Haushofer s’est par la suite défendu de tout soutien au nazisme, il est l’ami de Rudolf Hess[3] et rencontre à plusieurs reprises Hitler, qui lui emprunte la notion d’espace vital.

 

- Une vision du monde périmée
S’ils étaient le plus souvent de farouches nationalistes, ces pères fondateurs de la géopolitique avaient aussi quelques excuses : ils exploraient un champ nouveau, dans un contexte intellectuel marqué par une vision biologisante des sociétés – même si Darwin a été le premier à s’opposer au « darwinisme social[5] » et à ses déclinaisons. Et même si, déjà à cette époque, des auteurs comme Albert Demangeon[6] et Jacques Ancel[7] ont souligné le manque de rigueur scientifique des travaux de Ratzel et de ses suiveurs.

 

Depuis, les géographes ont pointé les présupposés de la géopolitique classique : conception anthropomorphe et quasi mystique de l’État national, visées nationalistes et impérialistes peu ou pas dissimulées, obsession de l’échelle étatique[8], etc., trop d’éléments relèvent de la croyance plus que de la science.

 

 

- À qui profite le crime ?
Considérer la nation comme un organisme en lutte permanente avec ses semblables est donc un anachronisme intellectuel et un non-sens scientifique. Cette vision du monde continue pourtant de nourrir des théories plus ou moins scabreuses. On retrouve, dans le Choc des civilisations[9] de Samuel Huntington[10], socle idéologique de la guerre contre le terrorisme, une vision du monde découpé en grandes entités homogènes condamnées à s’affronter éternellement. Quant au néo-eurasisme[11], il postule l’existence d’un continent entre Occident et Orient, l’Eur-Asie, appelé à être uni sous la domination russe. Son courant le plus nationaliste s’inspire de la géopolitique allemande des années 1920 et défend l’expansionnisme russe. Son principal représentant, Alexandre Douguine[12], par ailleurs connu pour ses accointances avec la Nouvelle Droite française, a inspiré les discours nationalistes de Vladimir Jirinovski[13] et, aujourd’hui, fournit une partie de ses arguments à Vladimir Poutine[14].

 

Ce renouveau de la pensée ultranationaliste russe a coïncidé avec l’effondrement de l’URSS : il fallait un modèle explicatif capable de combler le vide idéologique et (géo)politique postsoviétique. De la même manière, en France et ailleurs, les discours plus ou moins rigides sur l’identité et l’unité nationales prospèrent dans un contexte d’incertitude : la mondialisation économique, via les progrès du libre-échange[15] et le pouvoir de décision accru des grandes firmes multinationales, fragilise la souveraineté nationale. Face à cette dérégulation économique et politique, qu’il encourage par ailleurs, Macron peut espérer rassurer son électorat à peu de frais en jouant la carte de la nation – à la manière de Trump finançant le mur entre les États-Unis et le Mexique.

 

Et puis, comme le rappelle l’historien Nicolas Lebourg[16], l’organicisme, au cœur de la pensée d’extrême-droite, sert aussi à mettre sous le tapis la lutte des classes.

  • La nation, tel un corps vivant, fonctionne selon un principe d’unité et de complémentarité entre ses membres : pas question de les opposer entre eux. Une idéologie de l’ordre, en somme.

 

Notes :

[1Friedrich Ratzel, né le 30 août 1844 à Karlsruhe et mort le 9 août 1904 à Münsing, est un pharmacien, zoologiste puis géographe allemand. Proche des milieux colonialistes et impérialistes, il est le premier géographe à avoir formulé la notion de Lebensraum (« espace vital »).

[2] Johan Rudolf Kjellén (né le 13 juin 1864 à Torsö (Suède) et mort le 14 novembre 1922) était professeur de science politique à l'université de Göteborg. Sa réflexion le poussa à associer la science politique à la géographie, qu'il enseigna par la suite, avant de créer de nouvelles disciplines consacrées à l'État.

[3Karl Haushofer, né le 27 août 1869 à Munich et mort par suicide le 10 mars 1946 à Pähl (Haute-Bavière), est l'un des plus importants théoriciens de la géopolitique allemande, dont certains travaux (notamment ceux qui abordent la notion d'Espace vital) sont repris et réinterprétés par une partie des penseurs du nazisme, bien que lui-même n'aie jamais été membre du parti nazi.

[4] Rudolf Hess 

[5] LE « DARWINISME SOCIAL »

[6Albert Demangeon, né à Cormeilles (Eure) le 13 juin 1872 et mort à Paris le 25 juillet 1940, est un géographe français.

[7Jacques Simon Ancel, né le 22 juillet 1882 à Parmain en Seine-et-Oise et mort à Paris en décembre 1943, est un géographe et géopolitologue français.

[8] l’échelle étatique

[9« Choc des civilisations » A l’origine d’un concept

[10Samuel Huntington, né le 18 avril 1927 à New York et mort le 24 décembre 2008 à Martha's Vineyard dans le Massachusetts, est un professeur américain de science politique, connu pour son livre intitulé Le Choc des civilisations paru en 1996.

[11Alexandre Dugin : esquisse d'un eurasisme d'extrême-droite en Russie post-soviétique

[12Alexandre Guelievitch Douguine, né à Moscou le 7 janvier 1962, est un intellectuel et théoricien politique nationaliste russe. Il est l'auteur de nombreux essais.

[13Vladimir Volfovitch Jirinovski, né Eidelstein le 25 avril 1946 à Alma-Ata (République socialiste soviétique kazakhe, Union soviétique), et mort le 6 avril 2022 à Moscou, est un homme politique russe, président du parti d'extrême droite LDPR.

[14Alexandre Douguine est le prophète réactionnaire de l’ultranationalisme russe

[15] l'exemple du blocage du canal de Suez ?

[16Dans son interview du 14 Juillet, le chef de l’Etat a expliqué qu’«une nation, c’est un tout organique». Une notion prisée par l’extrême droite dans son histoire, explique l’historien Nicolas Lebourg.

 

Pour en savoir plus :

- Pétain « grand soldat », « pays réel », « nation organique » : Macron, le nauséabond glissement vers la rhétorique d’extrême-droite

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10 juillet 2022 7 10 /07 /juillet /2022 18:02
Meeting_1er_mai_2012_Front_National_Paris
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Les qualificatifs attribués au FN/RN ne manquent pas extrême droite ; fasciste ; national – populiste ; droite radicale pour ne retenir que les termes génériques...

 

Ce n’est donc pas le passé fasciste[0] du FN/RN qui devrait nous inquiéter mais son devenir-fasciste....

 

Car le FN/RN de Marine Le Pen, est un néofascisme à la française[0bis]....

 

 

Marine Le Pen a accédé au second tour de la présidentielle de 2022 avec 41,6 % des suffrages exprimés. Au premier tour le total des voix d’extrême droite 32,28 % dépassait le score de Macron 27,85 %.

Le total des sièges obtenus à l’Assemblée nationale aux législatives de 2022 est de 89 pour le RN.

Avec l’élection d’une députée RN à la vis présidence de l’Assemblée nationale, voici donc un tableau qui va rendre difficile l’acceptation du qualificatif « antirépublicain » ou « fasciste » aux yeux d’une majorité de l’électorat[1].

La situation se complique encore si l’on se rappelle que l’une des caractéristiques de l’extrême droite était dans un passé récent, son antiparlementarisme, ce qui n’est évidemment pas le cas actuellement pour le RN.

Il est donc opportun de s’interroger sur la nature du FN – RN et du fascisme à la lumière de l’histoire de ce parti et de l’histoire du fascisme au XXe siècle notamment en France.

Donc comment caractériser cette idéologie et ce projet ?
Devenu Rassemblement National (RN) sans que rien de fondamental ne change dans son programme
[2] ou sa stratégie, le Front national est de moins en moins caractérisé par les observateurs, mais aussi par les militant-es et organisations de gauche ou syndicales, comme un parti fasciste ou néofasciste.
Réputée approximative et militante, cette catégorisation ferait l’impasse, nous dit-on, sur toute une série de traits propres au fascisme qui seraient absents dans le cas du FN/RN.
Comme le montre ici Ugo Palheta dans un texte en 2 parties, caractériser ainsi le parti de Marine Le Pen permet au contraire de saisir les propriétés distinctives de son projet.

Ce texte d’Ugo Palheta est extrait de La Possibilité du fascisme[3] (La Découverte, 2018). Sociologue, membre de l’Observatoire national de l’extrême droite, Ugo Palheta est l’auteur de nombreux articles pour Contretemps, et, plus récemment avec Ludivine Bantigny, de Face à la menace fasciste[4] (Textuel, 2021), et avec Omar Slaouti de Défaire le racisme, affronter le fascisme[5] (La Dispute, 2022). 

 

 

Sources : Contretemps - Contretemps | mis à jour le 12/02/2024

- Politiquement, le fascisme se caractérise comment ?

Politiquement, le fascisme[6] se caractérise spécifiquement par la volonté – incarnée par un chef et portée par une organisation – d’œuvrer, par une vaste opération de « purification », à la renaissance ou plus modestement à la défense d’une nation glorieuse mais en voie de décomposition.

 

Débarrasser cette nation mythifiée de toutes les formes d’altérité et de contestation qui en menaceraient l’identité, l’unité et l’intégrité, permettrait de mettre un coup d’arrêt au processus de décadence mis en branle indistinctement par le cosmopolitisme du capital et l’internationalisme de la gauche, la finance « apatride » et les immigrés « déracinés »[7]. Or c’est bien dans ce cadre marqué par le désir d’une révolution spirituelle qui amorcerait une régénération nationale, et non simplement dans la (si commune) référence au peuple, décelable sous des formes différentes chez tous les courants politiques, que s’inscrit clairement la politique du FN/RN. À Marseille le 19 avril 2017, après un appel à une « insurrection nationale », Marine Le Pen affirmait :

  • « Nous sommes sous la menace d’une dilution de notre identité nationale. Posons-nous les questions : allons-nous pouvoir vivre encore longtemps comme des Français en France ? Alors que des quartiers entiers deviennent quasiment des zones étrangères ? Alors que des règles ou des modes de vie venus d’ailleurs tentent de nous être imposés ? ».

 

 

- Plusieurs précisions sont toutefois nécessaires.
Tout d’abord, même si le FN/RN est fondé sur une matrice politique qui n’a guère changé depuis la création du Front national en 1972, malgré les ravalements successifs de façade, il ne constitue assurément pas le décalque des parts partis fascistes classiques, en particulier parce qu’il ne dispose pas de milices armées de masse. C’est seulement dans des circonstances spécifiques que le FN/RN pourrait être amené à se développer en véritable mouvement militant de masse capable d’être présent partout, au-delà de la scène électorale ou médiatique, et d’exercer la violence par le biais de telles milices. Ce n’est donc pas le passé fasciste du FN/RN qui devrait nous inquiéter mais son devenir-fasciste. Comme l’écrivait Maurice Duverger en 1962 : « Le microbe fasciste restera dépourvu de virulence réelle tant qu’il ne trouvera pas un terrain pour germer[8] ». Le « microbe fasciste » a depuis trouvé ce « terrain » dans les contradictions du capitalisme néolibéral, le durcissement autoritaire de l’État, l’aiguisement du nationalisme français et la montée de l’islamophobie.

 

 

- Ensuite, caractériser le FN/RN comme néofasciste n’implique nullement que l’ensemble de ses militant·es, et encore moins de ses électeurs·rices, soient favorables ici et maintenant à l’installation d’une dictature d’extrême droite, ou se réfèrent au fascisme comme à un modèle.

Pour autant, on ne saurait écarter ni une dynamique de radicalisation politique qui pourrait s’emparer d’une partie du corps social dans des circonstances exceptionnelles de crise ou au terme d’un processus plus progressif de polarisation politique, en particulier car le terrain a été préparé par des décennies de diffusion et de respectabilisation de la xénophobie et du racisme, ni la possibilité que le FN/RN s’appuie sur cette base électorale pour parvenir au pouvoir par la voie légale. L’exemple des fascismes italien et allemand durant l’entre-deux-guerres montre en effet que ces mouvements ont pu l’emporter et se maintenir durablement aux commandes de l’État en disposant d’une audience de masse et en s’alliant avec des pans de la droite conservatrice mais sans parvenir à obtenir le soutien de la majorité de la population.

 

Dans le cas allemand, le maximum du soutien dont les nazis purent se prévaloir avant janvier 1933 fut de 37 % (bien davantage d’ailleurs que Mussolini en Italie avant son accès au pouvoir), et si leurs électeurs partageaient sans doute pour beaucoup un ultra-nationalisme et un antisémitisme plus ou moins viscéral, leurs motivations étaient hétérogènes. Ils étaient pour la plupart loin d’adhérer à l’intégralité de la politique mise en œuvre par Hitler dans les années suivantes, en particulier à la volonté de guerre expansionniste et a fortiori à la « solution finale »[9]. Cela n’empêcha nullement les nazis de conquérir le pouvoir politique et de mener au désastre d’une nouvelle guerre mondiale et du génocide. Nous n’en sommes évidemment pas là, mais on ne saurait prendre prétexte du fait que les électeurs du FN/RN n’ont qu’une connaissance très partielle de son programme ou ne souhaitent pas l’avènement d’une dictature pour nier ou minimiser le danger.

 

 

- Ajoutons encore qu’il n’y a pas de « nature » immuable du FN/RN.
Comme tout parti, il n’est pas figé et pourrait se transformer en profondeur en fonction de dynamiques internes et de son environnement externe. En particulier, il n’est nullement interdit de penser qu’il puisse évoluer dans les années à venir vers un parti de la droite conservatrice. Le poids croissant des élus au sein du FN/RN pourrait engager un processus de notabilisation, amenant peu à peu sa direction à subordonner le maintien de son programme historique, de son indépendance politique et de l’objectif de la conquête du pouvoir national, à la sauvegarde des postes obtenus dans les institutions, nationales ou locales. Néanmoins, le FN/RN ne cherche pas véritablement, du moins pour l’instant, à construire des alliances au sommet avec la droite traditionnelle et continue de mener une guerre de position pour parvenir au pouvoir seul, ou en détachant des pans entiers de la droite. Si ses dirigeants n’étaient que de simples opportunistes en quête de postes dans les institutions, ils rallieraient sans délai les partis de la droite traditionnelle ou chercheraient par tous les moyens, notamment en reniant ou en édulcorant certaines de leurs positions, à nouer des alliances électorales régulières avec ces partis afin d’obtenir bien davantage de sièges d’élus. Or, depuis sa création en 1972, le FN devenu RN – comme les organisations fascistes de l’entre-deux-guerres – a toujours maintenu son indépendance politique et ne s’est allié qu’exceptionnellement à la droite.

 

 

- Il nous faut évoquer ici la question de la violence.
À nouveau, on aurait tort d’imaginer une rupture franche entre le FN de Jean-Marie Le Pen et celui de sa fille. Dès la fondation du parti, l’objectif de constituer une vitrine électorale de l’extrême droite impliquait la mise en sourdine, sinon le refus, des trop visibles batailles de rue avec la gauche révolutionnaire. Le FN/RN dispose néanmoins avec le DPS – « Département protection sécurité », également surnommé du temps de Jean-Marie Le Pen « Dépend du président seulement » – d’un service d’ordre partiellement militarisé, par l’emploi de techniques militaires et par son recrutement parmi d’anciens militaires, policiers ou vigiles[10]. Outre les fonctions classiquement assumées par un service d’ordre (protection des dirigeants, des meetings et des apparitions publiques), le DPS a pu procéder parfois – selon des témoignages rassemblés à la fin des années 1990 – à des actions offensives, essentiellement contre des militants anti-FN (dénommées « missions punitives »)[11 - 12]. Dans la dernière période, pour laquelle on dispose de moins d’informations, il semblerait non seulement que le DPS – qui avait beaucoup pâti de la scission mégrétiste – ait été progressivement marginalisé par la présidente du FN en raison de l’attachement de ses membres à Jean-Marie Le Pen, au profit de l’entreprise de sécurité d’Axel Loustau (ex du GUD et proche de Marine Le Pen)[13], mais qu’il ait en outre cessé d’assumer des fonctions offensives (expéditions punitives contre des « ennemis »).

 

 

- Pour le FN/RN, l’époque est à la « guerre de position » au sens de Gramsci, donc moins à la prise du pouvoir par des moyens insurrectionnels qu’à la conquête progressive de l’hégémonie permettant de préparer l’accès au pouvoir politique.
Néanmoins, la présence en son sein d’anciens dirigeants du Bloc identitaire (Philippe Vardon notamment), la collaboration avec des figures de l’extrême droite passées par le GUD, ainsi que le soutien apporté aux identitaires ou à d’autres groupuscules (notamment Bastion social), semble attester d’une certaine division des tâches : vitrine électorale et vaisseau amiral de l’extrême droite, le FN délèguerait l’exercice de la violence – notamment contre les mobilisations étudiantes dans la période récente – aux groupuscules qui gravitent autour de lui. Pour ne prendre que quelques exemples récents : au printemps 2018, les principaux dirigeants du FN/RN se félicitaient de l’initiative de « Génération identitaire » au col de l’Échelle, visant à s’opposer symboliquement, mais aussi physiquement, à l’entrée en France de migrants[14]. Durant la même période, alors que des militants fascistes agressaient régulièrement des étudiant·es mobilisé·es dans plusieurs universités, Louis Aliot appelait à la télévision à « virer manu militari » les « bloqueurs » et se félicitait de l’offensive gouvernementale contre les « zadistes » à Notre-Dame-des-Landes[15]. Cela signale une fois de plus que, face à la contestation sociale, le FN/RN se tient toujours du côté de l’ordre, soutient les gouvernements désireux d’employer la force et maintient un projet ultra-autoritaire, aspirant à aller plus loin et plus vite dans l’écrasement de toute opposition. Il faut enfin rappeler l’influence et l’implantation du FN/RN au sein des appareils répressifs d’État, en particulier dans les services les plus violents (BAC, CRS, etc.)[16 - 17]. Cette situation peut faire passer pour superflue aux yeux de ses dirigeants le fait de se doter de milices préposées au harcèlement et à la répression des opposants.

 

 

- Délégitimation de la violence politique et l’objectif de la conquête du pouvoir

Ces deux concepts contraignent ainsi le FN/RN à limiter au maximum la possibilité d’actes violents rappelant trop visiblement l’ancrage du parti dans les traditions brutales de l’extrême droite, et à empêcher l’existence en son sein de groupes aspirant à jouer un rôle équivalent à celui des SA au sein du parti nazi (fonction que François Duprat avait assignée aux groupes nationalistes-révolutionnaires dans les années 1970 lorsqu’il était une figure majeure du FN[18]). Néanmoins, le FN/RN prépare les esprits à un usage intensifié de la violence en recourant fréquemment à la rhétorique de la « guerre civile ». Comme l’affirmait Marine Le Pen elle-même : « Depuis quarante ans au moins, tout observateur lucide et objectif voit monter les problèmes quand depuis trop d’années, d’intimidations en intimidations et d’agressions anti-françaises en actes terroristes, la perspective de la guerre civile n’est plus un fantasme[19] ». Le FN prétend ainsi être seul à même d’en empêcher la survenue tout en ne cessant pas de souffler sur les braises de l’islamophobie, de la romophobie et de la xénophobie, en agitant la menace d’une « cinquième colonne » islamiste ou d’une destruction de la nation française.

  • Quelle politique croit-on qu’un parti prétendant depuis tant d’années que la France est « submergée » et « colonisée » par des éléments considérés comme « anti-nationaux » et « inassimilables », mènerait s’il parvenait au pouvoir ?
  • Pense-t-on sérieusement qu’un tel parti ne ferait que prolonger les politiques menées par les gouvernements bourgeois traditionnels ?

 

 

- Il y a une double tentation lorsqu’on cherche à appréhender la place du racisme dans le projet actuel du FN/RN.
La première consiste à refuser d’opérer la moindre distinction entre les forces dominantes qui composent et structurent le champ politique français, au nom des convergences indéniables qui se sont accomplies entre elles sur les politiques migratoires et l’islamophobie ; distinguer reviendrait à absoudre droite et gauche de leurs responsabilités dans le développement du nationalisme et du racisme dans le champ politique.

 

La seconde amène, au prétexte de certains remaniements politiques et programmatiques du FN/RN – en particulier l’éviction de Jean-Marie Le Pen et de militants exprimant trop ouvertement leur antisémitisme, mais aussi la place plus grande prise par les questions socio-économiques dans le discours et le programme frontiste[20]) –  à considérer que la xénophobie et le racisme n’auraient plus qu’une place marginale au sein du FN, qu’il s’agisse des options de ses dirigeants et de ses membres, des aspirations de son électorat ou de ses fondements idéologiques, et un rôle secondaire dans son ascension.

 

 

- Il importe au contraire de rappeler deux constats, simples mais politiquement cruciaux

  • 1 : le FN/RN constitue – avec Reconquête, le parti récemment fondé par Zemmour – la composante la plus brutalement raciste du nationalisme français ;
  • 2 : le racisme a joué – et joue toujours – un rôle central dans son idéologie et dans son développement (ce qui ne doit pas être confondu avec l’idée qu’il serait central en chaque moment dans sa propagande).

Contrairement à ce qui est bien souvent affirmé, le parti de Marine Le Pen n’a en rien rompu – et ne semble pas en voie de rompre dans les mois ou années à venir – avec le projet politique qui fut celui de l’extrême droite française lorsque celle-ci s’est engagée dans la construction du mouvement au début des années 1970 : une prétendue régénération de la nation et de son unité, fondé sur la volonté d’une purification, par la mise au pas – sinon la soustraction violente – de tous les éléments considérés comme « étrangers » voire « traîtres » à la nation, ou perçus comme des sources potentielles de désordre et de division. Ses dirigeants maintiennent ce socle idéologique du mouvement par des déclarations ciblant prioritairement les musulmans et les migrants. Mais ils visent aussi les élites qu’ils désignent comme « mondialistes » – aussi bien de droite que de gauche – parce qu’elles seraient complices de l’« invasion migratoire », assimilée à une entreprise de destruction délibérée de la nation et de l’identité françaises. D’où la double cible de Marine Le Pen dans ses discours de campagne : « le totalitarisme islamiste et le totalitarisme mondialiste[21] ».

 

 

- On affirme pourtant que l’ultra-nationalisme, la xénophobie et le racisme ne joueraient plus le même rôle qu’autrefois dans le développement du FN
Ses électeurs ne seraient plus mus essentiellement par l’hostilité aux « étrangers »[22], mais aussi par des revendications sociales. On constate également, à raison, que le racisme et la xénophobie sont présents dans d’autres segments de la population qui, pour autant, ne votent pas en faveur du FN/RN. Or c’est là manquer le fait primordial : ce qui fait la particularité de l’électorat du FN/RN, c’est à la fois son niveau d’hostilité nettement plus élevé à l’égard des immigrés, des musulmans, des juifs ou des Roms et le fait qu’il considère l’immigration, la sécurité et la « menace terroriste », mais aussi les valeurs et l’« identité française », comme les enjeux politiques centraux[23].

 

Aucune question économique et sociale ne figure au premier, deuxième ou troisième rang des motivations du vote frontiste. Or les inégalités et les injustices sociales étaient la première motivation du vote en faveur de Mélenchon et Hamon en 2017 (NDLR et Mélenchon en 2022[24]), et la situation économique et l’emploi celle du vote pour Macron et Fillon. Le FN/RN est ainsi perçu comme le parti qui s’oppose le mieux, non à la détérioration de la situation économique et sociale ou aux inégalités croissantes, mais à ce qui est perçu par ses électeurs comme un danger de dissolution démographique de la France, de destruction culturelle de l’« identité française » et/ou de marginalisation sociopolitique des « vrais Français ».

 

 

- Le FN/RN n’est donc pas simplement parvenu à rendre acceptables, et même respectables, des « analyses » et des propositions autrefois jugées scandaleuses.
On l’a vu, il a bénéficié en cela du travail accompli par des dirigeants de droite mais aussi de gauche[25] : tous ont prétendu répondre aux succès frontistes en empruntant à Le Pen certaines de ses propositions et surtout son langage. Il est bien évident par ailleurs que le racisme et la xénophobie n’ont pas attendu le FN/RN pour être présents au sein de la population française[26], dans les classes possédantes comme parmi la petite bourgeoisie et la classe ouvrière (même quand cette dernière était largement acquise à la gauche, notamment au PCF). Le véritable coup de force du FN, c’est d’avoir réussi à imposer au cœur de la politique française un clivage opposant les nationaux aux « étrangers » mais aussi la nation à des menaces diverses (les différents « mondialismes »). Or ce clivage était resté marginal entre 1945 et le début des années 1980. L’ascension du FN/RN est donc incompréhensible si l’on ne place pas au centre de l’attention le racisme et la xénophobie, qui ont eu une triple fonction, auprès de son électorat mais aussi de sa base militante : mobiliser les émotions d’une frange de la population (affect), souder une communauté imaginaire (culture)[5] et rationaliser une vision du monde (idéologie). Il n’y a de ce point de vue rien d’anodin au fait que, lors des meetings de Marine Le Pen, c’est lorsque les questions d’immigration sont abordées que le public apparaît le plus mobilisé, en particulier à travers le slogan très largement repris : « on est chez nous »[27].

 

 

- Mais l’immigration ou l’identité nationale ne prennent-ils pas objectivement moins de place dans le discours frontiste, en raison de la stratégie de « dédiabolisation » et du « tournant social » ?
Cela est évident, au vu des deux campagnes présidentielles de Marine Le Pen. Mais c’est que le FN/RN n’a plus besoin aujourd’hui de rappeler sans cesse ses positions en la matière. Au contraire, pour élargir son audience à des franges de la population jusqu’ici éloignées, il lui faut faire des incursions sur des terrains – services publics, écologie, droits des femmes, laïcité, etc. – qui n’étaient pas déjà les siens. Pour autant, il ne s’agit généralement pas d’une reprise telles quelles de positions « de gauche », mais d’une traduction dans le langage politique propre à l’extrême droite : celui de la nation menacée de décadence et de dégénérescence du fait de l’immigration, de l’affirmation de l’islam et de la mondialisation économique. Durant sa dernière campagne présidentielle, Marine Le Pen a ainsi construit l’essentiel de ses discours autour de la menace d’une « disparition », d’une « dissolution » ou d’une « soumission » de la France sous l’effet de deux « mondialismes » qui constitueraient deux « totalitarismes » : le « mondialisme financier et affairiste » et le « mondialisme djihadiste » ; ou encore « la mondialisation d’en bas avec l’immigration massive, levier du dumping social mondial, et la mondialisation d’en haut avec la financiarisation de l’économie ». La rhétorique prophétique et catastrophiste de la « destruction de la France », régulièrement employée par Marine Le Pen, n’a d’autre objectif que de servir un nationalisme radical et exclusiviste. Ce dernier demeure en effet la formule génératrice de la quasi-totalité des analyses et des propositions avancées par le FN, et charrie immanquablement la xénophobie et le racisme.

 

 

- Le FN/RN a-t-il rompu avec l’antisémitisme, qui a constitué depuis la 2ième moitié du xixe siècle l’un des fondamentaux de l’extrême droite ?
Il importe sur ce point de distinguer les électeurs·rices et la direction. L’antisémitisme des sympathisant·es du FN/RN – tel que le mesurent les enquêtes d’opinion[28] – se situe à un niveau bien supérieur à celui des autres franges de l’électorat. Cela devrait d’ailleurs suffire à démentir le lieu commun médiatico-politique, relayé bruyamment par quelques idéologues et dirigeants politiques, selon lequel la gauche radicale et les « arabo-musulmans » auraient aujourd’hui le monopole de l’antisémitisme (rebaptisé « nouvelle judéophobie »), du fait de leur antisionisme. Au passage, comme cela a été montré par Nonna Mayer il y a déjà une quinzaine d’années et confirmé par de nombreuses études depuis[29], c’est parmi les électeurs·rices de la gauche radicale que les stéréotypes antisémites et la méfiance à l’égard des juifs est la moins élevée (au début des années 2000, 18 % exprimaient des opinions méfiantes à l’égard des juifs). À l’inverse, c’est parmi les électeurs·rices d’extrême droite que ces stéréotypes et cette méfiance étaient les plus forts (40 % d’opinions méfiantes), de même que les stéréotypes et l’hostilité à l’égard des musulman·es, des Rom·es, des immigré·es, des étrangers·ères, etc. Que des dispositions racistes soient aisément transférables d’une minorité à une autre, des musulman·es aux juifs·ves ou l’inverse, ne devrait d’ailleurs guère prêter à étonnement.

 

 

- Le RN/FN veut-il en finir avec la négation ou la minimisation du génocide des juifs d’Europe ?
Reste qu’il y a bien eu une volonté consciente de la part de la direction du FN/RN d’empêcher les saillies antisémites de sa base militante, notamment de ses candidat·es aux élections, et d’en finir avec la négation ou la minimisation du génocide des juifs d’Europe.


Vice-président du FN, Louis Aliot déclarait ainsi en décembre 2013 : « En distribuant des tracts dans la rue, le seul plafond de verre que je voyais ce n’était pas l’immigration ni l’islam… D’autres sont pires que nous sur ces sujets-là [sic]. C’est l’antisémitisme qui empêche les gens de voter pour nous. Il n’y a que cela. À partir du moment où vous faites sauter ce verrou idéologique, vous libérez le reste. […] Depuis que je la connais, Marine Le Pen est d’accord avec cela. Elle ne comprenait pas pourquoi et comment son père et les autres ne voyaient pas que c’était le verrou. […] C’est la chose à faire sauter[30]. » C’est donc de manière purement opportuniste que le FN a abandonné l’antisémitisme : la stigmatisation des juifs ou les sympathies négationnistes que manifestaient à intervalles réguliers ses dirigeants, de Le Pen à Gollnisch, sont à présent davantage perçus par la direction du FN comme un boulet que comme un levier pour attirer vers le parti d’extrême droite de nouveaux segments de l’électorat. Et d’ailleurs, comment penser qu’il y a là davantage que de l’opportunisme quand la quasi-totalité des cadres du RN actuel, dont Marine Le Pen évidemment, ont commencé à militer lorsque Jean-Marie Le Pen et n’ont jamais émis la moindre critique à propos de ses propos antisémites ou négationnistes ?

 

- Une stratégie sans fin ?
Le FN/RN actuel ne s’est pas arrêté là puisque, s’inscrivant dans la rhétorique de la « nouvelle judéophobie », il a cherché ces dernières années à dresser les juifs contre ceux qui seraient ses véritables ennemis, à savoir les musulman·es et la gauche radicale. Il a été soutenu en cela par la Ligue de défense juive (LDJ) [qualifiée de "groupe terroriste" par le FBI en 2001[31]], que Marine Le Pen a défendue lors des manifestations de l’été 2014 en solidarité avec Gaza[32]. Au cours de ces dernières, ce groupuscule d’extrême droite – d’ailleurs interdit dans plusieurs pays (notamment les États-Unis) – avait tenté d’agresser des manifestant·es.

 

En 2018, après avoir insulté et menacé des élus de la France insoumise et les avoir contraints à quitter la Marche blanche en l’honneur de Mireille Knoll[33], les militants de la LDJ ont escorté les dirigeant·es du FN/RN. De même doit-on se souvenir, car cela n’a rien d’anecdotique, que Rogier Cukierman, alors président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), avait pu déclarer en 2002 que le score de Jean-Marie Le Pen « est un message aux musulmans pour qu’ils se tiennent tranquilles[34] ». Cette rhétorique de la « nouvelle judéophobie », dont les musulman·es et la gauche radicale seraient les agents, a été mise en circulation dans les années 2000 par des « intellectuels » comme P.-A. Taguieff ou A. Finkielkraut. Elle a récemment été réactivée telle quelle via une tribune rédigée par Philippe Val et signée par « trois cents intellectuels, artistes et hommes politiques »[35]. Or il est indéniable qu’elle fournit au parti d’extrême droite un argument imparable pour se débarrasser d’un encombrant stigmate, alors même qu’un parti dont l’électorat demeure à ce point empreint d’antisémitisme pourrait être tenté de réintroduire ce venin dans des circonstances où cela lui semblerait nécessaire.

 

 

- Mais si l’antisémitisme a été pour l’instant abandonné par la direction du FN/RN, au moins superficiellement et pour des raisons de respectabilité, c’est pour mieux lui substituer un racisme ciblant spécifiquement les musulmans.
Cette islamophobie est beaucoup moins susceptible que l’antisémitisme d’être condamné politiquement et elle se situe dans le prolongement des formes structurelles prises par le racisme en France, qui affectent principalement les descendants de colonisés. Si le racisme demeure central dans la construction et le renforcement du FN/RN, c’est d’abord qu’il constitue le ciment idéologique de sa base militante et d’une partie importante de son électorat : 80% des sympathisant·es du FN/RN s’estimaient eux-mêmes « racistes » (« plutôt racistes » ou « un peu racistes ») en 2014, un chiffre très élevé et pourtant certainement minimisé du fait du sentiment d’illégitimité qui continue d’entourer une telle déclaration[36]. Encore doit-on préciser que c’est avant tout sous la forme d’une violente hostilité aux musulmans (réels ou présumés) que se manifeste aujourd’hui le racisme de l’électorat d’extrême droite : un « trait caractéristique des sympathisants du FN est une polarisation anti-islam exacerbée, bien plus marquée que leur antisémitisme[37] ».

 

 

- L’électorat du FN continuait sur ce point de se distinguer des sympathisant·es d’autres partis...
En effet, Nonna Mayer précise à quel point, malgré la progression constatée de l’islamophobie dans l’ensemble de la population entre 2009 et 2014, l’électorat du FN continuait sur ce point de se distinguer des sympathisant·es d’autres partis :  « Le refus des sympathisants FN de voir dans les musulmans des citoyens comme les autres dépasse de 48 points celui qu’on observe chez les sympathisants des autres partis (contre 23 points dans le cas des Français juifs), leur jugement négatif de la religion musulmane est supérieur de 42 points (contre 20 pour la religion juive), leur sentiment que les musulmans forment un “groupe à part” de 35 points (contre 14 quand il s’agit des juifs) et leur refus de sanction judiciaire pour des propos insultants de 28 points (contre 21). » L’islamophobie, on l’a vu, se retrouve – sous des formes brutales ou euphémisées, revendiquées ou détournées – dans la quasi-totalité du champ politique. Reste que le FN/RN en est l’expression politique la plus assumée et la plus violente, autrement dit la plus à même de mettre en œuvre, sinon le rêve sinistre d’Éric Zemmour d’une déportation de millions de musulman·es, du moins une politique de mise au pas, de discrimination systématique de ces derniers·ères et d’institutionnalisation complète de cette discrimination. Cela impliquerait non seulement l’interdiction d’exister publiquement en tant que musulmans mais l’institution d’une complète inégalité des droits, à laquelle les gouvernements ont d’ores et déjà contribué ces quinze dernières années.

 

 

- C’est donc moins un changement de « nature » du FN/RN, ni d’ailleurs de sa stratégie d’ensemble, qui s’est trouvé au cœur du conflit entre Jean-Marie Le Pen et sa fille, qu’une divergence de tactique politique.
Le véritable changement impulsé par Marine Le Pen – qui, sur ce point comme sur d’autres, a fait du « mégrétisme sans Mégret » – c’est d’avoir mis au premier plan le « problème de l’islam ». Ainsi a-t-elle radicalisé par l’islamophobie la rhétorique xénophobe du FN[38], tout en opérant un recodage « républicain » du discours frontiste. Si a pu s’imposer l’illusion d’une transformation profonde du FN, c’est du fait de la très large diffusion de l’islamophobie, qui tend à rendre acceptable l’hostilité publiquement manifestée à l’égard des musulmans, mais aussi du discours public faisant de l’immigration et des immigrés un « problème » à résoudre, et ce depuis les années 1970. Cette double progression de l’islamophobie et de la xénophobie, couplée à l’affirmation d’une « nouvelle laïcité » permettant de stigmatiser les musulmans au nom de la défense de la « République », tend ainsi à légitimer par avance toutes les sorties les plus ouvertement racistes du FN, du moins dès lors qu’elle vise les musulmans et les migrants (extra-européens ou roms). On doit d’ailleurs remarquer que l’antagonisme entre le père et sa fille, présenté fallacieusement comme une controverse entre une ligne « dure » et une ligne « modérée », n’a pas éclaté lorsque Jean-Marie Le Pen, évoquant le prétendu « risque de submersion » de la France par l’immigration, avait affirmé en mai 2014, faisant allusion à l’épidémie qui sévissait alors en Afrique, que « Monseigneur Ebola peut régler ça en trois mois ». Cette déclaration n’avait alors suscité aucune condamnation de la part de la direction du FN et de sa présidente ; bien au contraire, elle l’avait soutenu[39].

 

 

- Il est vrai que Marine Le Pen ne rechigne jamais elle-même à employer la rhétorique de l’« invasion », de l’« occupation » ou de la « colonisation » de la France
En effet, Marine Le Pen ne rechigne jamais elle-même à employer la rhétorique de l’« invasion », de l’« occupation » ou de la « colonisation » de la France par les populations étrangères, et plus spécifiquement extra-européennes et musulmanes. Elle retrouve là, non simplement Renaud Camus[40], mais le Drumont de La France juive ou encore l’écrivain préfasciste Maurice Barrès[41]. Ainsi pouvait-elle affirmer en septembre 2015, à propos de l’afflux de réfugiés : « L’invasion migratoire que nous subissons n’aura rien à envier à celle du ive siècle et aura peut-être les mêmes conséquences[42]. » La présidente du FN s’est par ailleurs présentée aux élections régionales de 2015 sur un programme aspirant, entre autres, à « dénoncer et éradiquer toute immigration bactérienne[43] ».
Quelques semaines plus tard, elle n’hésitait pas utiliser la rhétorique de la guerre civile : « Nous n’avons pas d’autre choix que de gagner cette guerre. Si nous échouons, le totalitarisme islamiste prendra le pouvoir dans notre pays, comme il l’a pris en Libye avec l’aide de Nicolas Sarkozy, comme il tente de le prendre en Syrie, en Égypte, en Tunisie, etc. […] La charia remplacera notre Constitution, l’islam radical se substituera à nos lois, nos bâtiments détruits, la musique prohibée, l’épuration religieuse avec son cortège d’horreurs, etc.[44] »

 

 

- Peu auparavant, elle invitait dans un tweet à relire Le Camp des saints, un livre d’anticipation devenu un classique de l’extrême droite et fondé sur le postulat d’une « incompatibilité des races lorsqu’elles se partagent un même milieu ambiant ».

Dans ce livre, l’écrivain Jean Raspail décrivait la colonisation de la France par un million de migrants et la résistance armée de quelques « Français de souche », tirant sur les « envahisseurs » et finalement trahis par un gouvernement « multiracial »[45]. Si Marine Le Pen disait espérer une fin différente, elle défendait l’ouvrage en prétextant de son « acuité » et de sa « modernité incroyables ». De même avait-elle loué le livre de Michel Houellebecq, Soumission, en affirmant que la prophétie sur laquelle était fondé l’ouvrage – la victoire présidentielle d’un candidat islamiste en 2022 après deux mandats de François Hollande… – « pourrait un jour devenir réalité ». Elle avait aussi félicité son auteur pour avoir pointé la « complicité » de l’UMP et du PS comme moteur de la progression du « fondamentalisme islamiste »[46]. En employant cette rhétorique de la « colonisation » de la France par des éléments allogènes, Marine Le Pen s’inscrit pleinement dans une vieille stratégie frontiste. François Duprat lui-même, l’un des principaux stratèges de l’extrême droite néofasciste dans l’après-guerre (et un moment numéro 2 du FN[47]), avait explicité dès 1976 : « Quiconque croit que notre nation est colonisée acceptera tôt ou tard nos méthodes d’action en vue de sa libération[48]. »

 

 

- Les dirigeants frontistes défendeurs d'un prophétisme identitaire de la renaissance de la nation française
Les dirigeants frontistes mettent ainsi d’autant plus en avant un prophétisme xénophobe et islamophobe de la conquête de la France par « l’islam »[49] qu’ils défendent un prophétisme identitaire de la renaissance de la nation française. Mais ils le font en prétendant que l’immigration ne serait visée qu’en tant que phénomène sociopolitique, et non les immigrés en tant que personnes. Ces derniers subiraient actuellement, non pas les politiques anti-migratoires, mais la destruction des nations par le « mondialisme » (sous la forme du déracinement et de la perte des repères culturels) : s’opposer à l’immigration constituerait paradoxalement la seule véritable défense des immigrés. Cette tactique rhétorique ne tient pourtant généralement pas longtemps. Marine Le Pen a ainsi multiplié les déclarations dans lesquelles elles présentent les immigrés extra-européens et/ou les musulmans (dont une grande partie ne sont pas immigrés mais descendants d’immigrés, sans même parler des convertis) comme une menace, une cinquième colonne, voire une force d’occupation. Dès 2010, Marine Le Pen développait ce discours de l’« occupation » – faisant à l’évidence jouer le sous-entendu de l’occupation de la France par l’Allemagne nazie – pour évoquer les prières effectuées par des musulmans dans la rue, en prenant grand soin d’en exagérer l’ampleur et d’en dissimuler la cause (le faible nombre de mosquées en France de 2 400 à 2 500)[50].

 

 

- Mais les dirigeants du FN/RN ne s’arrêtent pas à l’idée d’occupation ou de colonisation
Les immigrés extra-européens et leurs enfants sont systématiquement assimilés à la délinquance, voire aux crimes les plus révoltants, ce qui ne peut pas ne pas apparaître comme un appel implicite, non seulement à les expulser, mais à les punir de la manière la plus brutale. Lors de son meeting au Zénith de Paris en avril 2012, elle répondait aux milliers de personnes vociférant « on est chez nous » : « Et parce que vous êtes chez vous, vous avez le droit de ne plus vouloir de ces Franco-Algériens comme Mohammed Merah, de ces Franco-Angolais comme l’assassin de Bouguenais, de ces Franco-Maliens comme le forcené de Paris ! Nous voulons des Français amoureux de leur drapeau, fiers de leur pays ![51] » Dans un autre discours, tenu à Nantes le 25 mars 2012, elle affirmait : « Combien de Mohamed Merah dans les bateaux, les avions, qui chaque jour arrivent en France remplis d’immigrés ? […] Combien de Mohamed Merah parmi les enfants de ces immigrés non assimilés ? » Ces propos ne prêtent guère à ambigüité : selon Marine Le Pen, les immigrés extra-européens, mais aussi leurs enfants (Mohamed Merah n’étant pas lui-même immigré puisqu’il est né à Toulouse), doivent être considérés non seulement comme des fauteurs de troubles potentiels, mais comme des assassins et terroristes en puissance, et traités en conséquence.

 

 

- L’un des problèmes rencontrés par le FN/RN dès sa création a été de donner une forme acceptable aux obsessions purificatrices qui ont toujours été au centre du projet fasciste.
La condamnation universelle du nazisme, dans le contexte post-1945, rendait nécessaire une sophistication de la xénophobie et du racisme. Ceux-ci ne pouvaient plus se dire qu’au travers d’euphémismes, de sous-entendus, de références codées ou d’expressions à double sens – sous peine de vouer les héritiers de Maurras, Barrès, Doriot ou Brasillach aux condamnations judiciaires et à la marginalité électorale. Les enquêtes historiques et sociologiques donnent à voir le travail effectué, au sein du FN, pour façonner des militants et former des cadres capables d’atténuer dans leurs discours la violence raciste inhérente à l’extrême droite.

 

L’historienne Valérie Igounet, qui a pu accéder aux brochures de formation, cite ainsi une note interne de l’IFN rédigée et diffusée au début des années 1990, intitulée « L’image du Front national », dans laquelle on peut lire : « Pour séduire, il faut d’abord éviter de faire peur et de créer un sentiment de répulsion. Or dans notre société soft et craintive, les propos excessifs inquiètent et provoquent la méfiance ou le rejet dans une large partie de la population. Il est donc essentiel, lorsqu’on s’exprime en public, d’éviter les propos outranciers et vulgaires. On peut affirmer la même chose avec autant de vigueur dans un langage posé et accepté par le grand public. De façon certes caricaturale, au lieu de dire “les bougnoules à la mer”, disons qu’il faut “organiser le retour chez eux des immigrés du tiers-monde [52]. »

 

 

- Recyclage du vieux fonds raciste de l’extrême droite en épousant le processus de culturalisation du racisme

Le remaniement identitaire de l’idéologie frontiste – empruntant sans le dire, et souvent sans le savoir, aux élaborations théoriques du GRECE[53] – a permis de recycler le vieux fonds raciste de l’extrême droite en épousant le processus de culturalisation du racisme. On l’a vu, ce processus se retrouve bien au-delà du FN/RN depuis les années 1980, et les jeunes militants ont aujourd’hui largement incorporé ce remaniement. « À travers le discours différentialiste, l’extrême droite a en fait trouvé un mode de traitement symbolique original de l’immigration légitimant une certaine xénophobie tout en s’adaptant à la condamnation politico-juridique du racisme[54]. » On doit d’ailleurs remarquer que, même au temps où le racisme biologique s’affichait sans fards, le racisme culturel – c’est-à-dire l’altérisation, l’infériorisation et la discrimination d’un groupe au nom de traits culturels présumés – n’était jamais très loin, y compris dans le cas de l’antisémitisme nazi[55]. Peut-être regarderait-on d’ailleurs d’un autre œil les propositions frontistes d’interdire l’abattage rituel en France[56], si l’on prenait au sérieux le fait que le parti nazi organisa à plusieurs reprises des campagnes contre l’abattage rituel lié à la religion juive. L’objectif évident était de stigmatiser publiquement les juifs en les présentant à la fois comme radicalement étrangers aux « traditions allemandes » et comme coupables de barbarie[57].

 

  • Si la progression du FN/RN a reposé en bonne partie sur la banalisation de ses thèses par des partis et des intellectuels de droite comme de gauche, s’il n’aurait pu s’enraciner sans le processus d’imprégnation xénophobe et raciste, il serait erroné et dangereux de prétendre que son accès au pouvoir ne ferait que prolonger les politiques d’ores et déjà menées.
  • Un parti dont le succès repose à ce point sur la xénophobie et le racisme, qui est perçu à ce point comme le meilleur défenseur de l’intérêt des Blancs, ne pourrait accéder et se maintenir au pouvoir sans donner en permanence des gages à son électorat.
  • Il lui faudrait lâcher la bride à des appareils répressifs d’État dont une partie importante des membres sont d’ores et déjà acquis à ses positions, et donc aller beaucoup plus loin dans l’entreprise d’assujettissement des immigré·es et descendants d’immigré·es postcoloniaux, des musulman·es, des Rom·es et certainement des juifs·ves (quoi qu’en disent actuellement les dirigeants du FN/RN).

Notes

[0] Les anciens SS ont reconstruit l'extrême droite française après 1945

[0bisDossier : Le FN/RN de Marine Le Pen, un néofascisme à la française

[1] Portrait – Hélène Laporte, le vrai visage de la vice-présidente RN pistonnée par la macronie

[2] Bonnet blanc, blanc bonnet ? Les programmes de Zemmour et Le Pen décryptés

[3] La possibilité du fascisme : France, la trajectoire du désastre

[4] Face à la menace fasciste : Sortir de l’autoritarisme

[5] Défaire le racisme, affronter le fascisme

[6] Fascisme. Fascisation. Antifascisme.

[7] Sur ce point, voir La Possibilité du fascisme, chapitre 1

[8] Cité in J.-P. Gautier, Les extrêmes droites en France, Paris, Syllepse, 2012

[9] W. S. Allen évoque dans son livre les sentiments « mitigés » que nourrissaient les électeurs du NSDAP à son égard, le percevant comme un mixte de gens « convenables » et de « voyous ». Voir : Une petite ville nazie, op. cit., p. 122-123. Plus généralement, voir : I. Kershaw, L’opinion allemande sous le nazisme, Paris, CNRS Éditions, 1995 [1983]. Pour une critique de l’idée que les « masses » auraient « désiré le fascisme », voir : N. Poulantzas, « À propos de l’impact populaire du fascisme », in M.-A. Macciocchi, Éléments pour une analyse du fascisme, tome 1, Paris, 10/18, 1976

[10] Front National, service d’ordre, barbouzeries et opérations armées

[11] Voir les auditions effectuées lors de l’enquête parlementaire sur le DPS menée en 1999

[12] Voir également à propos de Claude Hermant, membre du DPS pendant six ans et récemment condamné à sept ans de prison pour trafic d’armes (dont certaines auraient servi à Amedy Coulibaly dans la tuerie de l’hypercacher : R. Dély et K. Laske, « Confessions d’un fantôme », Libération, 6 juin 2001

[13] Voir : A. Mestre et C. Monnot, « Crise au FN : Marine Le Pen écarte le service d’ordre historique au profit d’un proche », Droites extrêmes, 3 septembre 2015. Sur les liens entre Marine Le Pen et Axel Loustau, voir : M. de Turchi, “ Marine est au courant de tout…”. Argent secret, financements et hommes de l’ombre, Paris, Flammarion, 2017 "

[14] Migrants : le «coup de com» des Identitaires salué par le FN

[15] Louis Aliot juge qu’il faut “virer manu militari” les étudiants qui bloquent les facultés

[16] Radicalisation policière : le poids de l’extrême droite dans les forces de l’ordre

[17] Gendarmes mobiles : un danger pour la république ?

[18] François Duprat a-t-il pu écrire : « Notre conception révolutionnaire est, elle aussi, fort simple : nous devons savoir faire cohabiter une organisation de combat et une organisation de formation et d’encadrement. Sans les SA, jamais le NSDAP n’aurait pu prendre le pouvoir, mais sans la Politische Organisation les SA n’auraient pas mieux réussi que les Corps francs de Kapp et Luttwitz, lors du putsch de 1920… Dans l’hypothèse où le mouvement nationaliste-révolutionnaire dispose des forces nécessaires à une lutte violente et soutenue, si ces forces sont disciplinées et organisées, il peut rallier à lui les masses de droite, qui recherchent toujours une force susceptible de les rassurer. [Il faut que s’accentue la crise économique, que l’État s’affaiblisse et] une solution radicale pourra devenir acceptable pour des millions de Français… Une Révolution ne pourra s’accomplir que si nombre de conservateurs paisibles cessent d’être tentés par la perpétuation de l’ordre régnant. [Si la Révolution se fait par un coup de force permis par la crise], seul le mouvement capable de lancer dans la rue de nombreux militants, combatifs et disciplinés, pourra remporter la victoire et sauver notre civilisation ». Cité in : N. Lebourg et J. Beauregard, François Duprat. L’homme qui réinventa l’extrême droite, op. cit., p. 204

[19] Le Pen: " Depuis 40 ans ", l'immigration a engendré " la perspective de la guerre civile "

[20] Sur ce point, voir le chapitre consacré au FN/RN dans La Possibilité du fascisme (chapitre 5)

[21] On notera au passage que la rhétorique du « totalitarisme islamique » ou « islamiste » comme ennemi principal était partagée aussi bien par F. Fillon que par M. Le Pen lors des dernières élections présidentielles, le premier ayant fait paraître quelques mois avant l’élection un ouvrage intitulé : « Vaincre le totalitarisme islamique »

[22] Il faut rappeler combien cette catégorie juridique d’ « étranger » fonctionne, dans l’idéologie raciste de l’extrême droite, comme une catégorie ethno-raciale, distinguant les « vrais Français » (dits aussi « Français de souche ») et les autres, c’est-à-dire les non-Blancs, qu’ils soient de nationalité étrangère ou française (dans ce dernier cas ils seront considérés comme des « Français de papier », selon une vieille expression d’extrême droite qui continue d’être employée au FN, et récemment par Nadine Morano, ancienne ministre de N. Sarkozy, à propos de Rokhaya Diallo)

[23] Parmi de nombreuses études sur les motivations des votes, Voir « Comprendre le vote au 1er tour de l’élection présidentielle », p. 28

[24] Didier Eribon : « Mélenchon a mobilisé un électorat qui ne votait plus »

[25] Mais pourquoi Olivier Faure du PS a t-il peur, en 2022, d'une baisse du FN/RN ?

[26] Les nomades (gens du voyage ? Roms ? Gitans ? Tsiganes ? Romanichels ? Bohémiens ?)

[27] Il suffit de visionner quelques discours de meeting pour le constater. Voir par exemple le discours prononcé par Marine Le Pen au Zenith de Paris le 17 avril 2012

[28] Voir N. Mayer, « Le mythe de la dédiabolisation du FN », La Vie des idées, 4 décembre 2015

[29] Voir « Nouvelle judéophobie ou vieil antisémitisme ? », Raisons politiques, 2004, 4, n°16. Pour des données plus récentes, Voir l’étude publiée en décembre 2017 par l’IPSOS pour la Fondation du judaïsme français, qui montre une fois de plus que c’est parmi les sympathisants du FN que les préjugés antisémites sont de loin les plus répandus

[30] Voir V. Igounet, « Jean-Marie Le Pen est-il trop antisémite pour le ‘‘nouveau’’ FN ? », 6 mai 2015

[31] La Ligue de Défense juive (LDJ) est l'émanation en France de la Jewish Defense League, qualifiée de " groupe terroriste " par le FBI en 2001

[32] Le vendredi 1er août 2014, elle déclarait sur RTL : « S’il existe une Ligue de défense juive, c’est qu’il y a un grand nombre de juifs qui se sentent en insécurité. Ils ont le sentiment que monte un nouvel antisémitisme en France et qui est le fait de confrontations communautaires »

[33] Marche blanche - Déclaration du groupe « La France insoumise »

[34] Voir S. Johsua, « Cukierman, valse avec Le Pen », Regards, 3 mars 2015 

[35] Voir « Manifeste “contre le nouvel antisémitisme” », Le Parisien, 21 avril 2018, et voir la critique de ce texte par D. Vidal : « Contre l’antisémitisme, avec détermination et sang-froid », Mediapart, 23 avril 2018

[36] Quoi qu’en dise sa présidente, le Front National n’a jamais cessé d’être raciste et xénophobe, à en juger par l’opinion de ses adhérents et sympathisants. 

[37] Voir N. Mayer, art. cit.

[38] Bruno Mégret et le Mouvement national républicain (MNR) – parti qu’il a fondé après son exclusion du FN – avaient en effet développé un discours violemment islamophobe dès le début des années 2000, soit dix ans avant le FN. Sur l’histoire sinueuse de l’islamophobie à l’extrême droite, Voir N. Lebourg, « Marine Le Pen, l’extrême-droite et l’islamophobie », Le Nouvel Observateur, 2 mai 2012

[39] Voir : « Marine Le Pen affirme que les propos de son père sur Ebola ont été “dénaturés” », Libération, 22 mai 2014

[40] Celui-ci note au passage que « maintenant, le FN aimerait bien récupérer le contenu [de la théorie du “grand remplacement”]. Il en est donc à déclarer, un peu ridiculement, qu’il y a bien remplacement, oui, mais qu’il n’est pas grand ; que “grand” ajoute à la tournure un on ne sait quoi de suspect, de non scientifique. […] Car enfin, si le remplacement n’est pas grand, qu’est-ce qu’il leur faut ? Un génocide en bonne et due forme ? ». Voir « Renaud Camus : ‘‘ Si le remplacement n’est pas grand, qu’est-ce qu’il leur faut ? ’’ »

[41] Sur les origines anciennes de la rhétorique du « grand remplacement », Voir G. Kauffmann, « Le Nouveau FN. Les vieux habits du populisme », Paris, Seuil, 2016, p. 88-91. Sur Maurice Barrès, Voir « Z. Sternhell, Maurice Barrès et le nationalisme français », Paris, Fayard, 2016 [1972]

[42] Voir « Pour Marine Le Pen, l’afflux de migrants pourrait ressembler aux invasions barbares « du IVe siècle » », Le Parisien, 14 septembre 2015

[43] Voir « Régionales : ‘‘ éradiquer l’immigration bactérienne ’’, l’improbable proposition de Marine Le Pen », Libération, 10 novembre 2015

[44] Voir « Marine Le Pen : « Si nous échouons, la charia remplacera notre Constitution » », Le Point, 3 décembre 2015

[45] Voir D. Albertini, « L’un des livres favoris de Marine Le Pen décrit une apocalypse migratoire », Libération, 16 septembre 2015

[46] Voir « Pour Marine Le Pen, le dernier livre de Houellebecq « pourrait devenir une réalité » », Le Lab politique/Europe 1, 5 janvier 2015

[47] Voir N. Lebourg et J. Beauregard, « François Duprat. L’homme qui réinventa l’extrême droite », Paris, Nouveau Monde, 2012

[48] Ibid., p. 205

[49] Dès 1987 le FN diffusait des affiches où figurait une prétendue citation d’un responsable du Hezbollah énonçant : « Dans vingt ans, c’est sûr, la France sera une république islamique ».

[50] Voici ses mots, qui ne prêtent guère à ambigüité : « Maintenant il y a dix ou quinze endroits où, de manière régulière, un certain nombre de personnes viennent pour accaparer les territoires. Je suis désolée, mais pour ceux qui aiment beaucoup parler de la Seconde Guerre mondiale, s’il s’agit de parler d’occupation, on pourrait en parler, pour le coup, parce que ça c’est une occupation du territoire. C’est une occupation de pans du territoire, des quartiers dans lesquels la loi religieuse s’applique, c’est une occupation. Certes y a pas de blindés, y a pas de soldats, mais c’est une occupation tout de même et elle pèse sur les habitants ». Voir V. Igounet, « Une histoire d’un hold-up idéologique sur le FN loin d’être terminée »

[51] Au Zénith de Paris, Marine Le Pen agite le spectre des " Franco-Algériens comme Mohamed Merah "

[52] V. Igounet, Le Front national, op. cit., p. 230.

[53] Sur le GRECE, voir notamment : P.-A. Taguieff, Sur la Nouvelle Droite. Jalons d’une analyse critique, Paris, Éditions Descartes et Cie, 1994. Concernant l’influence de la Nouvelle droite sur le FN, Voir J.-Y. Camus, « Le Front national et la nouvelle droite », in S. Crépon, A. Dézé et N. Mayer, « Les faux-semblants du Front national. Sociologie d’un parti politique », op. cit.

[54] Voir « S. Crépon, La Nouvelle extrême droite. Enquête sur les jeunes militants du Front national » Paris, L’Harmattan, 2006.

[55] Sur ce point, Voir R. Eatwell, « Fascism and Racism », in J. Breuilly (ed.), The History of Nationalism, Oxford, Oxford University Press, 2013.

[56] Voir par exemple : « Le Pen veut interdire l’abattage des animaux sans étourdissement préalable », Le Point, 25 avril 2017

[57] Voir notamment : William S. Allen, Une petite ville nazie, Paris, Tallandier, 2016 [1967], p. 89 : « Les nazis décidèrent ensuite de soulever la colère populaire contre les méthodes employées par les juifs pour l’abattage du bétail. En conséquence, ils organisèrent une réunion sur ce sujet, avec projections en couleurs et discours prononcé par le président d’une société hanovrienne pour la protection des animaux. Au cours de la réunion, les dirigeants nazis de Thalburg firent savoir publiquement qu’ils étaient opposés aux pratiques israélites ».
 

- Pour en savoir plus :

- Portrait – Frédéric Boccaletti, député RN condamné pour violence avec arme

- Des nazis dans la police

- Jean-Luc Melenchon : « Le destin de LREM, de LR et du RN est de se regrouper sous la houlette de Le Pen ».

- Pour nos organisations, interagir et dialoguer avec le groupe RN à l’Assemblée nationale, c’est non !

- Jean-Luc Mélenchon en 2015 : " Les chiens votent Front National ! Certains chats aussi ! "

- Délation, harcèlement et menaces de mort : les méthodes ignobles de l’extrême droite contre une enseignante

- Martine Billard : " France : Tentation fasciste ? "

 

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9 juillet 2022 6 09 /07 /juillet /2022 09:13
Plutôt Hitler que le Front Populaire dans les années 30, plutôt Le Pen que Mélenchon aujourd’hui

Quand Frédéric Lordon prédisait le retournement du barrage républicain pour Marine Le Pen contre Mélenchon

 

Avril 2021, plateau de La Bas si J’y Suis[1]. Le philosophe Frédéric Lordon est l’invité de Daniel Mermet pour présenter son nouvel ouvrage sur le communisme co-écrit avec Bernard Friot. Un passage de l’émission mérite d’être ressorti aujourd’hui. Il est d’une clarté éclairante.

 

Sources : l'Insoumission | mis à jour le 16/07/2023

- Le philosophe commence par décrire la haine des médias à l’encontre de Jean-Luc Mélenchon

« Mélenchon est celui qui l’objet du traitement de défaveur le plus appuyé de la totalité des médias mainstream. Il est l’objet d’un déferlement de détestation proprement viscéral. On lui choisit toujours la photo la plus désobligeante, on lui déforme ses propos. Au moindre écart de conduite ou de langage, il en a pour 3 jours. Je me dis que c’est un bon signe : quelqu’un qui s’attire, à ce point, une haine universelle de l’ensemble des institutions formelles et informelles de la démocratie bourgeoise ».

 

 

- Le deuxième point de Frédéric Lordon, sur le barrage républicain, est savoureux
Je l’ai écrit il y a des années « Cette connerie du front républicain pourrait se donner une nouvelle occurrence en se reformant contre Mélenchon. Je suis prêt à parier que Mélenchon contre Le Pen, d’une part, version faible, le front républicain n’est pas du tout garanti en faveur de Mélenchon, d’autre part, version forte, il se pourrait qu’une front républicain se reconstitue mais contre Mélenchon ». ...La situation politique de juin / juillet 2022.

 

- Jean-Luc Melenchon : « Le destin de LREM, de LR et du RN est de se regrouper sous la houlette de Le Pen ».

 

 

Cela se passera de la manière suivante[2] : " L’Assemblée nationale va devenir la casserole dans laquelle ils vont mettre à cuire leur soupe. Lorsque le gouvernement affirme qu’il travaillera à des majorités de projets, il sait parfaitement que cela ne fonctionnera pas avec nous. Ils présenteront donc des textes sur lesquels LR fera de la surenchère pour tenter de grignoter des parts à l’extrême droite. Ce qui fait du RN le maître du jeu de la recomposition de la droite. Mme Le Pen n’a jamais eu un autre projet que celui de M. Zemmour, qui n’a cessé d’appeler à la jonction de la droite et de l’extrême droite. Ce n’est pas une surprise pour moi. Dès 2012, j’avais affirmé sur France 2 que, « face à la crise, cela se finirait entre le RN et nous[3]. » "

 

 

Et dans les faits : 👇

Le processus est déjà en marche...

 

 

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20 juin 2022 1 20 /06 /juin /2022 09:33
Le vote d’ouvriers et d’employés pour des candidats d’extrême droite : une problématique à ne pas esquiver

Le RN, ou l’illusion d’une opposition à Macron[1bis]

 

Hervé Debonrivage a, en mai dernier, rédigé cette analyse du vote RN. Il a eu raison de pointer l’importance de ce sujet comme le résultat du 2iéme tour des législatives le confirme...

Je me limite ici à cinq remarques complémentaires par Jacques Serieys :

- lorsque le programme et l’action politique de la "gauche" ne défendent pas les milieux ouvriers et populaires, pourquoi ceux-ci continueraient-ils à voter à gauche ? d’autant plus que beaucoup de médias valorisent le RN comme leur représentant. Cela entraîne surtout de l’abstention car une majorité de familles ouvrières ne sont pas dupes du fait que l’extrême droite fait partie du monde de la droite et du capitalisme.

- malgré quelques mots prétendument en faveur du peuple, l’extrême droite ne constitue en rien un appui pour ces milieux ouvriers et populaires, ne cherche en rien à les protéger contre le "mondialisme" et les "gros" capitalistes. Mussolini par exemple, est passé d’un discours social de ce type à la division par deux du salaire des femmes après l’arrivée au pouvoir. Plusieurs dirigeants du RN sont passés en une semaine de ce type de discours "social" au programme terriblement anti-ouvrier de Zemmour.

- les catégories sociologiques de l’INSEE ne prennent pas en compte le fait majeur des quarante dernières années : le salariat représente aujourd’hui plus de 80% des citoyens (ouvriers, employés, professions intermédiaires, cadres d’entreprise et professions intellectuelles supérieures, retraités ex-salariés). Globalement, ce salariat correspondant à une place dans les rapports capitalistes de production, vote plus pour La France Insoumise et la NUPES que la population française dans son ensemble. Le principal point d’appui électoral de la gauche, de LFI et de la NUPES à présent, ce sont les "professions intermédiaires" que de nombreux analystes préfèreraient voir intégrées dans un bloc avec les ouvriers et employés.

- si l’on accepte le concept de "classe populaire", il faut ajouter à ce salariat la catégorie INSEE définie par le terme d’INACTIFS. Il s’agit largement d’individus précarisés. Eux aussi votent plus pour LFI et la NUPES que la population globale et que pour le RN.

- la couche sociale englobée sous le concept "OUVRIERS" a beaucoup changé depuis 40 ans avec une nette baisse des ouvriers d’entreprise en CDI et une hausse par exemple des femmes de ménage et précaires en contrat court.

- La dernière étude sur les intentions de vote pour les législatives prévoit pour la NUPES : 43% parmi les professions intermédiaires, 32% parmi les employés, 32% parmi les cadres d’entreprise et professions intellectuelles supérieures, 41% parmi les "inactifs, 25% parmi les ouvriers, soit un engagement nettement plus important en faveur de la NUPES que pour le RN. Il est vrai que ces intentions de vote évoluent en fonction de l’offre politique ; le programme actuel de la NUPES répond évidemment plus à la demande du milieu salarié et populaire que les imbroglios permanents de François Hollande.

- Préambule : retour préalable sur le second tour des législatives 2022

Que l'on ne vienne pas nous dire que la France est pays de fascistes !

  • La faute de Macron est énorme : diaboliser la #Nupes (en mettant dans le même sac des " extrêmes " a contribué à multiplier par 10 le nombre de députés pour le RN, ce que l'insoumission dénonçait en mars 2022[1].
  • Le résultat de Le PEN à selon moi deux origines :
    • LREM et ses candidats, qui préfère soutenir en catimini le RN (sur 65 face à face entre la Nupes/RN, les donneurs de leçons de la macronie ont refusé de s'engager par une consigne claire dans 52 cas) de peur que la Nupes ait la majorité, car, comme je le publiais en mars 2021 « S'il existe encore un barrage pseudo-républicain en France, c'est désormais contre la gauche antilibérale »[2] ;
    • l'abstention du peuple porteur d'exigences de gauche, écœuré, dégouté par la trahison, par les engagements non tenus et dont le septennat Hollande a été l'un des plus gros contributeur. En effet, si Le Pen comptait sur l'abstention de gauche pour battre Macron aux présidentielles, elle comptait aussi dessus pour les législatives... et le résultat en atteste.

 

Le nouveau visage socio-professionnel des députés à l'issue des législatives 2022. 👉 Moins de 1% des députés sont ouvriers, contre 19% dans la population active.

 

  • A retenir : nous sommes l’expression politique des plus pauvres, des chômeurs, des oubliés de ce pays.
    • Parmi les 10% des circonscriptions où il y a le plus de pauvres, 80% ont été gagnées par la NUPES.
    • Nous avons la fierté d’avoir construit le + grand parti populaire depuis la Libération.

 

Nous sommes l’expression politique des plus pauvres, des chômeurs, des oubliés de ce pays.

 

Sources : Hervé Debonrivage | mis à jour le 13/10/2022

- Introduction Classe populaire ? De quoi parle-t-on ?

On entend par cette terminologie une partie de la population active constituée des ouvriers et des employés. On pourrait rattacher à cette catégorie des travailleurs indépendants à faibles revenus, des petits commerçants, des petits artisans, des propriétaires de petites exploitations agricoles.

  • Si l’on veut avoir une connaissance approfondie sur la notion de classe populaire, l’ouvrage le plus complet actuellement existant est le suivant : Sociologie des classes populaires contemporaines éditées chez Dunod ou Armand Colin[3].
  • On peut accéder un résumé détaillé de cet ouvrage collectif en utilisant le lien suivant sur Cairn info[4]

Sur l’évolution de la population active en France et plus particulièrement sur les catégories ouvrières on peut se reporter aux deux articles suivants :

  • Comment évoluent les catégories sociales en France ?[5] ;
  • Statistiques sur l’évolution du monde ouvrier de 1982 à 2020 et des différentes catégories qui le composent[6].

En 1982 les ouvriers représentaient 30 % de la population active, avec 6,9 millions de personnes et en 2020, 20 % de la population active avec 5,3 millions de personnes, les employés représentent quant à eux 25 % de la population active en 2020.

 

 

-  Deux articles concernant le vote des classes populaires pour des représentants de l’extrême droite
Depuis fort longtemps, il a existé des ouvriers et des employés ayant voté pour des candidats de droite ou d’extrême droite.

Mais un phénomène nouveau dont il faut reconnaître la réalité, c’est la croissance quasi continue du vote des classes populaires en faveur de l’extrême droite depuis les années 1980 qui coïncide, comme par hasard, avec la croissance et l’intensification des politiques néolibérales mais aussi avec la décroissance numérique de ces catégories populaires.

  • Une mise en garde préalable concernant l’utilisation des pourcentages par les médias et les instituts de sondage.

Il y a trois manières de calculer le vote ouvrier en faveur de l’extrême droite.

- Si l’on dit « il y a 50 % de votes des ouvriers pour Marine Le Pen » Il faut préciser de quelle quantité on prend le pourcentage. Si c’est 50 % du total du nombre d’ouvriers en France qui est de 5,3 millions, cela fait alors 2,65 millions de personnes

- S’agit-il de 50 % des ouvriers qui votent c’est-à-dire qui ne s’abstiennent pas ? En supposant que le taux d’abstention des ouvriers soit de 45 %, le pourcentage de votants est alors 65 % le nombre obtenu est alors : 50 % de 65 % de 5,3 millions ce qui donne : 1,72 millions de personnes

- Ou encore, troisième possibilité, cela veut-il dire que 50 % des électeurs pour Marine Le Pen sont des ouvriers ? Si l’on prend les 13,3 millions d’électeurs ayant voté Marine Le Pen au deuxième tour des présidentielles de 2022, on obtiendrait alors… : 6,65 millions de personnes : ce qui est évidemment impossible pour cette élection. Il faut donc être vigilant sur la manière dont les médias et les instituts de sondage annoncent leur pourcentage.

 

 

-  Les articles suivants, certes, apportent une ou des explications partielles qui devraient être donc complétées, mais n’en sont pas moins intéressantes.

1️⃣ Comment la gauche a perdu, en trente ans, le vote ouvrier (au profit de l’extrême droite)[7].

- Trente ans de métamorphose de l’électorat frontiste

Une étude de Jérôme Fourquet, directeur du pôle opinion et stratégies d’entreprise à l’Ifop (Institut français d’opinion publique), vient à point nommé pour apporter un éclairage documenté sur la question de savoir où se situe majoritairement, à moins d’un an de l’élection présidentielle, le vote ouvrier. Intitulée « 1988-2021 : trente ans de métamorphose de l’électorat frontiste », cette analyse d’avril dernier rappelle, d’abord, l’ancrage du vote d’extrême droite dans la société française puisque, depuis trois décennies, « un membre de la famille Le Pen obtient un score à deux chiffres lors d’une élection présidentielle ». Et les intentions de vote mesurées pour celle de 2022 ne démentent pas ce constat.

 

1988-2021 : évolution du score du FN/RN au premier tour de l’élection présidentielle. | Jérôme Fourquet/Ifop

Une des mutations prioritaires au sein des strates de l’électorat du Front national (FN), rebaptisé Rassemblement national (RN) en 2018, est fondée sur le niveau de diplôme, selon Fourquet. En 1988, avec Le Pen père, les titulaires d’un diplôme supérieur à bac+2 étaient les plus rétifs à un vote d’extrême droite (9% d’entre elles et eux) et ceux qui avaient un niveau inférieur au bac, les plus enclins (16%). On note que le delta entre ces deux catégories était de sept points. En 2017, avec Le Pen fille, la première catégorie est passée à 8% et la seconde à... 31%. L’écart s’est considérablement creusé pour atteindre vingt-trois points.

 

Le phénomène se diffuse maintenant au niveau des titulaires du bac dans les intentions de vote pour 2022 (mesurées en 2021). Alors que le vote lepéniste est quasi stable dans la catégorie au niveau éducatif le plus élevé (12% au lieu des 9% de 1988), il grimpe à 34% (contre 13% en 1988) chez les titulaires du baccalauréat. Et il s’affirme encore dans la catégorie des détenteurs d’un diplôme inférieur au bac : 33% contre 31% en 2017, comme noté ci-dessus.

 

- Plus de quatre ouvriers sur dix votent Le Pen

  • Cette observation faite en fonction du niveau de diplôme a évidemment une traduction politique puisque les moins diplômés sont cantonnés, beaucoup plus qu’auparavant, dans les métiers les moins en vue et les moins bien payés. « Tout se passe, écrit Fourquet, comme si le parti lepéniste avait progressivement capitalisé sur le ressentiment et le sentiment de relégation culturelle et sociale des publics les moins diplômés au fur et à mesure que le niveau éducatif moyen était rehaussé. » Le résultat électoral de ce mouvement socio-culturel est l’augmentation considérable sur un peu plus de trente ans de la part des ouvriers et des employés votant pour le FN/RN.
  • Alors que la proportion d’ouvriers votant pour le parti lepéniste en 1988 était de 17% –un pourcentage assez peu différent de ce qui était observé chez les employés (14%), dans les professions intermédiaires (15%) ou chez les cadres et dans les professions intellectuelles (14%)–, ce taux a énormément gonflé, passant à 39% lors de l’élection présidentielle de 2017. La part des employés a suivi une tendance de même nature car elle est montée à 30% à l’occasion de ce même scrutin. Les projections qui peuvent être faites au travers des intentions de vote pour 2022 accentuent encore ces phénomènes haussiers : le taux atteint 45% des ouvriers et 42% des employés.

 

1988-2021 : évolution du score du FN/RN au premier tour de l’élection présidentielle dans les milieux populaires. | Jérôme Fourquet/Ifop

  • « Le fait que plus de quatre personnes sur dix appartenant [aux milieux populaires] aient l’intention de voter pour Marine Le Pen au premier tour de 2022, relève Fourquet, témoigne de la très forte emprise idéologique du RN dans ces catégories. » Force est de constater que cette emprise idéologique n’a pas toujours été de ce côté de l’échiquier politique, c’est-à-dire à l’extrême droite. Loin s’en faut.
  • Même si la classe ouvrière a toujours été moins homogène que ce que pensaient et disaient les marxistes pour les besoins de la cause, il n’en demeure pas moins que l’histoire de la gauche, socialiste et communiste, est intimement liée à l’émergence de la notion de classe ouvrière. Créée au début du XXe siècle, la SFIO (Section française de l’Internationale ouvrière, IIe Internationale) ne contient même pas le mot socialiste dans son sigle, tant ouvrier et socialiste recouvrent le même champ politique dans l’esprit de ses initiateurs.

 

- Quand le PCF était le premier parti de France

  • Lors de son congrès de 1920, à Tours, une majorité de congressistes quitte la SFIO pour adhérer, sous l’influence des Soviétiques qui ont pris le pouvoir en Russie en 1917, à la SFIC (Section française de l’Internationale communiste, IIIe Internationale). La SFIC deviendra, en 1921, le Parti communiste français (PCF) qui représente, pour les marxistes, « l’avant-garde de la classe ouvrière ». C’est dire à quel point les communistes voulaient damer le pion aux socialistes comme représentants les plus authentiques du monde ouvrier. Même si celui-ci n’était pas fait d’un seul bloc politique.
  • En effet, même si une majorité, écrasante probablement, des ouvriers révolutionnaires ou réformistes votaient à gauche, notamment pour le PCF jusque dans les années 1970 et en partie pour le PS jusque dans les années 2000, ils coexistaient avec des ouvriers catholiques ou conservateurs dont le vote penchait à droite, comme ce fut notamment le cas pendant la période gaulliste. Cette hétérogénéité est décrite dans une étude du politologue Florent Gougou intitulée « Les mutations du vote ouvrier sous la Ve République » : il constate que « le vote ouvrier n’est donc pas naturellement acquis à la gauche ».

 

Lors du congrès de Tours, en 1920.

  • Il n’en demeure pas moins que le Parti communiste se présentait comme le porteur idéal des aspirations ouvrières qui, à l’en croire, trouvaient leur plein épanouissement dans la « patrie du socialisme ». De fait, le PCF fut le premier parti de France en termes électoraux dans l’immédiat après-guerre. Il jouissait alors, sur le plan intérieur, de l’image du parti des 75.000 fusillés –un chiffre très éloigné de la réalité, ce qui n’ôte rien à la bravoure de militants communistes qui ont sacrifié leur vie dans la Résistance bien avant que l’appareil du parti ne décide de s’y engager à la suite de l’invasion de l’URSS par les armées du IIIe Reich, en juin 1941.
  • Sur le plan extérieur, il profite de l’aura de la Grande Guerre patriotique victorieuse conduite par Staline et l’armée rouge contre le nazisme sur le front de l’Est. Il est vrai que le PCF sera longtemps d’une grande fidélité au stalinisme.

 

La récession de l’âge d’or communiste

  • Lors de l’élection de la première Assemblée constituante, en octobre 1945 (celle qui va clore le cycle de la IIIe République), il obtient 26,2% des voix et 159 sièges : il devance les démocrates-chrétiens centristes du MRP (Mouvement républicain populaire). Il culmine même à 28,3% aux législatives de novembre 1946 (la IVe République a été instaurée en octobre) et détient un tiers des sièges de l’Assemblée nationale... l'ère du « gaullo-communiste[7bis] » ?
  • Grâce au vote ouvrier et au soutien de l’intelligentsia de gauche –les communistes occupent alors une place prépondérante parmi les intellectuels–, le PCF tient le haut du pavé sur l’échiquier politique jusqu’à la fin des années 1970. À l’élection présidentielle de 1969, son candidat, le kominternien Jacques Duclos, obtient 21,3% des suffrages exprimés. Et dix ans plus tard, Georges Marchais, qui conduit la liste du Parti aux premières élections européennes, décroche 20,5% des voix.
  • Mais l’âge d’or est déjà entré en récession par la combinaison d’une multitude de facteurs qui sont défavorables au Parti communiste, en France et en Europe de l’Ouest. On peut citer pêle-mêle les interventions militaires extérieures de l’URSS pour sauver « le socialisme réel », les mutations de la société française après 1968, le rétrécissement progressif de la classe ouvrière au profit d’une classe moyenne aux contours moins déterminés dans les décennies qui suivent, la montée en puissance du Parti socialiste (PS) qui est couronnée par la victoire de François Mitterrand à la présidentielle de 1981, puis celle de 1988, la chute du Mur de Berlin en 1989 et la dislocation de l’Empire soviétique à partir de 1991, le mouvement de désindustrialisation, etc.

 

Le vote ouvrier n’est plus au rendez-vous

  • Le vote ouvrier n’est plus au rendez-vous de la gauche et du PCF en particulier. Selon le politologue Florent Gougou déjà cité, « il semble que le vote de classe ouvrier [atteint] son maximum lors des élections législatives de 1973, avant de décliner progressivement par la suite ». Georges Marchais est surpris par son score (15,4%) à la présidentielle de 1981. Ce recul est confirmé aux européennes de 1984 où la liste du secrétaire général n’atteint que 11,2%, c’est-à-dire qu’il fait jeu égal avec le président du Front national, Jean-Marie Le Pen, dont la liste obtient 11%. Cinq ans avant, la liste d’extrême droite conduite par Jean-Louis Tixier-Vignancour avait fait péniblement... 1,3%.
  • Les nombreux bastions rouges ouvriers de la région parisienne qui firent la grandeur du PCF vont tomber les uns après les autres. À partir de ce basculement, la suite de l’histoire n’est plus qu’une descente accélérée vers les enfers électoraux. À la présidentielle de 1988, André Lajoinie, candidat communiste concurrencé par le dissident Pierre Juquin, n’obtient que 6,8% des voix alors que Le Pen père est à 14,4%. Aux européennes de 1989, le PCF n’a plus qu’un score à un chiffre (7,7%) et l’extrême droite est à 11,7%.

Le vote ouvrier n’est plus au rendez-vous

  • Le vote ouvrier n’est plus au rendez-vous de la gauche et du PCF en particulier. Selon le politologue Florent Gougou déjà cité, « il semble que le vote de classe ouvrier [atteint] son maximum lors des élections législatives de 1973, avant de décliner progressivement par la suite ». Georges Marchais est surpris par son score (15,4%) à la présidentielle de 1981. Ce recul est confirmé aux européennes de 1984 où la liste du secrétaire général n’atteint que 11,2%, c’est-à-dire qu’il fait jeu égal avec le président du Front national, Jean-Marie Le Pen, dont la liste obtient 11%. Cinq ans avant, la liste d’extrême droite conduite par Jean-Louis Tixier-Vignancour avait fait péniblement... 1,3%.
  • Les nombreux bastions rouges ouvriers de la région parisienne qui firent la grandeur du PCF vont tomber les uns après les autres. À partir de ce basculement, la suite de l’histoire n’est plus qu’une descente accélérée vers les enfers électoraux. À la présidentielle de 1988, André Lajoinie, candidat communiste concurrencé par le dissident Pierre Juquin, n’obtient que 6,8% des voix alors que Le Pen père est à 14,4%. Aux européennes de 1989, le PCF n’a plus qu’un score à un chiffre (7,7%) et l’extrême droite est à 11,7%.
  • L’enchaînement des scrutins n’est plus qu’une longue litanie de défaites qui mettent en évidence la perte du cœur électoral du Parti communiste : sa base ouvrière. Les nombreux bastions rouges ouvriers de la région parisienne qui firent la grandeur du PCF tombent les uns après les autres. Jusqu’au fiasco des européennes de 2019 où, avec 2,5% des suffrages exprimés, le PCF n’envoie aucun représentant au Parlement de Strasbourg, quand les lepénistes en propulsent vingt-trois avec 23,3% des voix.
  • Absents des deux dernières consultations présidentielles (2012 et 2017) après s’être rangé derrière Jean-Luc Mélenchon (chef de fil successivement du Front de gauche et de La France insoumise), les communistes ont décidé de présenter leur secrétaire national, Fabien Roussel, en 2022, pour conjurer un retrait définitif du paysage politique français. Pourront-ils compter, comme dans le temps d’avant, sur le vote des ouvriers dont le nombre est passé de 6,9 millions, soit 30% de l’emploi total, en 1982, à 5,3 millions (20%) en 2019 ? Rien n’est moins sûr.

 

 

2️⃣ Deuxième article. Front national ou abstention : comment votent les ouvriers ?

- Les ouvriers sont de plus en plus tentés par le Front national MARGAUX BARALON , le 15 mars 2017[8]

FACT CHECKING - Selon Jean-Luc Mélenchon, il " n’est pas vrai " que les classes ouvrières plébiscitent Marine Le Pen. Pourtant, c’est bien la candidate frontiste qui arrive en tête de leurs intentions de vote. " Ce n’est pas vrai ! " Invité mercredi d’une matinale spéciale sur Europe 1, Jean-Luc Mélenchon, leader de la France Insoumise, s’est insurgé contre une question sur le vote des classes populaires, qui serait acquis à Marine Le Pen. " Ce n’est pas vrai que la classe ouvrière vote pour l’extrême droite ", a-t-il martelé. " 60% des ouvriers ne votent pas. C’est là le fond de l’affaire. Ils ne votent pas parce qu’ils sont écœurés par un système politique et médiatique qui les révulse."

 

Pourtant, les enquêtes d’opinion montrent une très forte percée de Marine Le Pen au sein de l’électorat ouvrier. Selon la dernière étude du Cevipof, 44% de ceux qui se disent certains d’aller voter iront glisser un bulletin au nom de la présidente du Front national dans l’urne. C’est plus que toutes les autres catégories socioprofessionnelles, devant les employés (35%) et les agriculteurs (35%), deux autres électorats très tentés par l’extrême droite.

 

Le deuxième candidat le plus plébiscité par les ouvriers est Emmanuel Macron. Mais l’ancien ministre de l’Économie arrive très loin derrière Marine Le Pen, avec seulement 16% des intentions de vote de la classe ouvrière. Jean-Luc Mélenchon, lui, pointe en troisième position avec 14%.

 

Une forte abstention. Concernant l’abstention, le leader de la France Insoumise n’a pas tort : elle est très forte au sein de la classe ouvrière, puisque 42% des ouvriers expliquent ne pas être certains de se rendre aux urnes. Loin des 60% évoqués par Jean-Luc Mélenchon, et moins que les agriculteurs, qui sont plus de la moitié (52%) à être des abstentionnistes potentiels.

 

L’enquête du Cevipof n’est pas la seule à montrer que Marine Le Pen rencontre beaucoup d’écho auprès des classes populaires. Dans le dernier baromètre Elabe aussi, la candidate du Front national est la personnalité préférée des ouvriers, avec 45% d’intentions de vote. Devant Emmanuel Macron (20%) et Jean-Luc Mélenchon (12%). Là encore, le taux d’abstention potentiel chez les ouvriers est non négligeable, avec 47% d’entre eux qui ne sont pas certains de se déplacer pour voter. Mais il n’est pas supérieur à celui des autres catégories de population : 53% des professions intermédiaires sont des abstentionnistes potentiels ; 42% des cadres et professions supérieures.

 

Les ouvriers de plus en plus tentés par le FN.

  • Ces chiffres ne sont pas propres à l’élection présidentielle. Lors des dernières régionales déjà, en 2015, 43% des ouvriers avaient voté Front national. Ils se tournent davantage vers l’extrême droite depuis 1988. À l’époque, 18% votaient Jean-Marie Le Pen au premier tour. En 1995, ils étaient 23%. En 2002, 31%. Après une rechute en 2007, le vote ouvrier en faveur du Front national avait de nouveau grimpé à environ 30% en 2012.

 

- Autre article :
Quel est le profil des électeurs ayant voté Emmanuel Macron au Marine Le Pen aux élections présidentielles de 2022 ?[9]

Selon un sondage figurant dans cet article, 67 % des ouvriers et 57 % des employés ont voté pour Marine Le Pen. Remarque il faut prendre ses derniers chiffres avec précaution : s’agit-il de 67 % de l’ensemble des ouvriers ou de 67 % des ouvriers qui votent ?

 

Si l’on considère en utilisant les sondages précédents que 45 % des ouvriers s’abstiennent, il en résulte que 65 % d’entre eux votent. Ainsi, si l’on prend 67 % de 65 %, on retombe bien sur le chiffre précédent de 45 % d’ouvriers votant pour Marine Le Pen.

 

 

3️⃣ Quels sont les faits explicatifs de la croissance de l’influence de l’extrême droite sur les classes populaires ?
Des causes économiques.

On connaît les ravages sociaux du néolibéralisme destruction des services publics, précarité de l’emploi, chômage de masse, délocalisation des entreprises, désindustrialisation, tertiairisation des métiers ouvriers (plate-forme logistique, chauffeur livreur, etc.). Mise en concurrence accrue des travailleurs entre eux sur un marché du travail ouvrier en contraction.

 

- Des causes sociologiques.

Ces causes économiques ont modifié les rapports sociaux entre les travailleurs : destruction des collectifs de travail et des liens sociaux de solidarité par notamment le recours à l’externalisation de certaines tâches et l’utilisation massive de sous-traitance, etc.

 

Ainsi le taux de syndicalisation n’a cessé de décroître et le syndicalisme non seulement comme moyen de défense des conditions de travail mais aussi comme outil de formation des travailleurs a perdu de sa force. Dans le contexte d’un marché du travail très concurrentiel et de précarité , certains ouvriers peuvent être conduits à faire porter la responsabilité de ses problèmes sur autrui et notamment sur travailleurs immigrés et les « assistés sociaux ».

 

De mauvaises conditions d’habitat et un environnement urbain ou périurbain où règne la délinquance favorisent la réceptivité aux idées sécuritaires et identitaires de l’extrême droite. Selon la Cour des Comptes, il existe en France 1514 « quartiers de non-droit » répartis sur environ 800 communes. Le vote de lois sécuritaires enrobées de com’à usage des fonds de commerce électoraux couplées à une destruction des services publics par les libéraux ne changent en rien cette situation.

 

- Des causes culturelles.

Une autre conséquence du néolibéralisme est le mauvais fonctionnement du système éducatif provoquant un échec scolaire ou universitaire de masse plus ou moins visible. Cela provoque un sentiment de relégation, de déclassement favorable à la désignation d’un bouc émissaire.

 

Les connaissances historiques, les capacités d’analyse critique des jeunes collégiens et lycéens se trouvent ainsi altérées. Ils se trouvent ainsi livrés sur le « marché électoral » sans capacité suffisante d’analyse critique des discours démagogiques voire racistes.

 

Il existe en effet une forme de banalisation du racisme :

  • la France, avec l’union européenne, s’est abstenue en 2014 et en 2021 au vote de la résolution de l’ONU condamnant la glorification du racisme et du nazisme. Les États-Unis et l’Ukraine ont même voté contre ! ( En revanche, tous les pays d’Asie et d’Amérique du Sud et d’Afrique ont voté pour.)
  • Paresse intellectuelle et défiance envers les autres aidant, il est beaucoup plus facile d’accuser le « fraudeur social », l’immigré « qui ne veut pas s’intégrer » pour expliquer la souffrance sociale que de dénoncer la mauvaise répartition de la valeur ajoutée produite par les travailleurs entre salaires et profits sous les Gide de la grande bourgeoisie dominante.
  • Il est bien évident que le simplisme d’un discours de Marine Le Pen tranche avec la relative complexité d’un discours de Mélenchon même si ce dernier déploie de réels efforts pour être pédagogique.

 

Une autre carence culturelle de l’éducation nationale concerne la laïcité

  • L’insuffisance des moyens mis en œuvre pour préserver le système éducatif de la pénétration par l’islamisme politique. Dont le rapport de l’inspecteur général Jean-Pierre OBIN entouré de 90 spécialistes a fait état dès 2004[10]. Ce spécialiste du renseignement de terrain cite dans sa longue interview les deux rapports précités.
  • Comme dans de nombreux domaines, les gouvernements libéraux incapables de donner les moyens financiers et humains pour faire fonctionner correctement nos services publics ne tiennent pas concrètement compte des rapports d’expertise indépendants.

 

En l’occurrence, cette incurie ouvre un boulevard pour tous les manipulateurs d’extrême droite, à des médias en quête d’audience sur des problèmes de conflits religieux et identitaires.

 

Les classes populaires n’échappent évidemment pas, comme d’autres catégories sociales, à cette vaste diversion qui, certes peut reposer sur des problèmes réels mais qui ne sont traités ni économiquement, ni culturellement, ni politiquement.

 

- Des causes politiques.

L’affaiblissement continu du PCF depuis la fin des années 1980 et le peu d’influence des partis d’extrême gauche ne permet plus aux travailleurs d’avoir une formation critique du capitalisme suffisante. Cette carence peut conduire un certain nombre d’ouvriers et d’employés à se réfugier dans le « chacun pour soi », dans le communautarisme, dont l’illusion d’un parti de l’ordre

 

Il est fréquent de lire : « la gauche a abandonné les classes populaires ». Mais encore faut-il être plus précis.

  • Le PS en se convertissant à des politiques économiques néolibérales donc de droite a pris des mesures économiques en contradiction avec les intérêts des classes populaires.
  • D’autre part, le PCF n’a pas su tenir compte des modifications structurelles du salariat ouvrier et des services. Il a abandonné sa politique de formation politique des classes populaires au profit d’une simple gestion des affaires locales et d’une professionnalisation alimentaire de la politique.
  • Un autre élément important à prendre en compte pour expliquer la défiance des classes populaires à l’égard des partis politiques ayant gouverné est le suivant : il n’y a eu que très peu d’élus ouvrier ou employés dans les différentes assemblées locales et nationales ou européennes.

 

Le vieux fond de l’antiparlementarisme d’extrême droite trouve alors un terreau favorable.

En outre, il existe une détérioration des rapports entre les institutions administratives du fait de la pénurie de moyens accordés à ces dernières et d’une numérisation technocratique mal acceptée par les classes populaires. Cela donne un écho favorable à la propagande anti fonctionnaires, anti technocrates, anti fiscaliste de l’extrême droite.

 

- Des causes idéologiques.

Il a été montré sur ce site et ailleurs que l’extrême droite a considérablement accru son influence au sein des grands médias dominants mais aussi sur les réseaux sociaux.

 

Ainsi les thèmes sécuritaires, identitaires voire religieux prennent une place disproportionnée dans l’espace médiatique et contribuent ainsi à augmenter l’électorat de l’extrême droite notamment dans les classes populaires. Rappelons ainsi que si Jean-Marie Le Pen avait obtenu 18 % des suffrages exprimés en 2002, sa fille, 20 ans plus tard, obtient 42 % des suffrages exprimés au second tour des élections présidentielles.

 

On constate ainsi que le score de 45 % pour le vote ouvrier en faveur de Marine Le Pen est légèrement plus haut que la moyenne nationale des suffrages exprimés.

 

À cette diffusion médiatique massive des idées d’extrême droite s’ajoute une propagande spécifique anti France Insoumise ou anti Mélenchon.

  • Islamo – gauchisme reprenant le terme de Judéo – bolchévisme d’avant-guerre ; communautarisme, wokisme.
  • Une autre critique spécifique pouvant toucher les classes populaires : Mélenchon serait un traître car il aurait appelé à voter François Hollande et aurait permis l’élection d’Emmanuel Macron. Or il se trouve que Mélenchon n’a jamais encouragé à voter pour l’un ou pour l’autre.
  • Même si les 13 % ou 17 % de l’électorat de Mélenchon ne s’étaient pas reportés sur Macron, celui-ci aurait de toute façon été élu avec plus de 2 millions de voix d’avance sur Marine Le Pen.
  • Mais les électeurs d’extrême droite lui feront remarquer que néanmoins il n’a pas appelé à faire barrage à François Hollande comme il l’avait dit pour Sarkozy et n’a pas appelé à faire barrage à Macron comme il l’avait dit à l’égard de Marine Le Pen.
  • Mais si l’on suit un tel raisonnement, cela signifierait que Mélenchon aurait dû préconiser l’abstention ou le vote blanc dans chacune de ces situations. Il faut remarquer que vouloir à tout prix appeler à faire barrage à Macron peut aboutir à quitter LFI et adhérer au RN comme ce fut le cas d’Andréa Kotarac lors des élections européennes de 2019 et fut fustigé par Jean-Luc Mélenchon[11] !

 

Mélenchon a évidemment eu raison de condamner une telle attitude mais celle-ci montre le niveau de détestation de Macron qui peut exister dans un électorat qui a voté Mélenchon au premier tour et dont 13 % ont voté pour Marine Le Pen pour faire barrage à Macron. (Sondage réalisé après le second tour et non pas un sondage d’entre deux tours qui indiquaient 18 % pour Le Pen et 37 % pour Macron).

 

L’analyse sociologique de cet électorat est partiellement décrite dans l’article de France 24 avant le second tour des présidentielles : la colère de l’électorat de Mélenchon vise d’abord Macron[12].

 

 

4️⃣ Comment convaincre les classes populaires qui votent pour l’extrême droite ?

Sans tomber dans le simplisme, il faut éviter une argumentation complexe.

  • Il faut simplement montrer que le RN – FN n’a jamais participé à la moindre manifestation pour défendre les salaires, les conditions de travail, les retraites. Quelles sont les propositions de loi du FN – RN à l’Assemblée nationale ou au parlement européen pour améliorer les conditions de vie des travailleurs
  • Quelles sont les politiques sociales envers les plus démunis dans les municipalités où le RN est majoritaire ? On remarquera le silence des grands médias sur cette question.
  • Historiquement, il faut rappeler que l’extrême droite a toujours eu un langage social pour prendre le pouvoir pour ensuite recourir à des politiques antisociales une fois élue.
  • Quant à la défense de la morale et de l’ordre, il faut rappeler que le RN a été mis plusieurs fois mis en cause par la justice pour le financement de ses campagnes électorales.
  • D’autre part, une rétrospective historique sur la vie politique du FN – RN donne l’image d’un parti en proie à de multiples guerres intestines, de rivalités et de nombreux départs : c’est ça le parti de l’ordre ?
  • Les deuxièmes auteurs des actes terroristes dans le monde occidental sont les mouvements d’extrême droite. Voir la liste des attentats d’extrême droite[13].... C’est ça la sécurité ? La paix civile ?
  • Montrer que les allégations du RN concernant la fraude sociale, l’attribution d’aides sociales considérables aux immigrés reposent sur des inexactitudes factuelles ou, au mieux, sur des chiffres biaisés.

 

Il faut aussi démolir les mythes du « grand remplacement », de la « guerre des civilisations » qui alimentent aussi les courants néonazis au niveau international.

  • Sans nier l’existence d’un certain nombre de problèmes locaux liés à l’immigration et sans nier l’existence d’une action de l’islam politique, ces questions doivent être traitées à partir de rapports d’experts indépendants, d’études de terrain de diverses associations démocratiques et non pas à partir de récupération médiatique et de déclaration bruyante des partis de droite et d’extrême droite. Comme l’ont déjà dit différents représentants de LFI : « moins de com’et plus d’action de terrain ! ».
  • Montrer que le problème essentiel est le partage des richesses entre salaires et profits créés par l’ensemble de la population active en France.
  • Montrer que cette inégalité du partage au profit des actionnaires a pour conséquence de casser les services publics notamment ceux de la santé, de l’éducation et la justice.

 

-------------------------------------

 

 

- Retrouvez la conférence des #AMFIS2022 intitulée : « Qui a voté pour l’extrême droite en 2022

 « Qui a voté pour l’extrême droite en 2022 ? », avec :
• Alexis Corbière, député LFI-NUPES
• Boris Bilia, statisticien et co-animateur d’Intérêt général
• Gala Kabbaj, chercheuse, en charge du programme Stratégies contre l’extrême droite de Transform!
• Lucie Delaporte, journaliste à Mediapart, spécialiste de l’extrême droite

 

 

Notes :

[1] Macron trampoline de Le Pen : Mélenchon vote utile de 2022 ?

[1bisLe RN, ou l’illusion d’une opposition à Macron

[2] S'il existe encore un barrage pseudo-républicain en France, c'est désormais contre la gauche

[3] Classes populaires ou condition laborieuse ?

[4] Yasmine Siblot, Marie Cartier, Isabelle Coutant, Olivier Masclet et Nicolas Renahy, Sociologie des classes populaires contemporaines

[5] Comment évoluent les catégories sociales en France ?

[6] Institut national de la statistique et des études économique

[7] Olivier Biffaud — 19 mai 2021 : Comment la gauche a perdu, en trente ans, le vote ouvrier (au profit de l'extrême droite)

[7bis] L'ére du « gaullo-communiste »

[8] Front national ou abstention : comment votent les ouvriers

[9] Résultats présidentielle : quel est le profil des électeurs d'Emmanuel Macron, de Marine Le Pen et des abstentionnistes ?

[10] L’insuffisance des moyens mis en œuvre pour préserver le système éducatif de la pénétration par l’islamisme politique.. Voir pour plus de détails Wikipédia :

Jean-Pierre Obin qui, lassé de l’inaction des différents gouvernements, a publié en 2020 l’ouvrage : Comment on a laissé l’islamisme pénétrer l’école.

- La commission et le rapport Stasi remis à Chirac en 2003 avait fait état des mêmes préoccupations.

- Pour avoir une idée du mode opératoire du développement de l’islamisme politique en France, on peut écouter l’émission : Thinkerview AlainChouet 35 ans de DGSE

[11] Appel d'un ex-soutien de Mélenchon à voter RN : le chef de file de LFI fustige un "traître"

[12] Présidentielle : "La colère de l'électorat de Jean-Luc Mélenchon vise d'abord Emmanuel Macron"

[13] Liste d'attaques terroristes d'extrême droite

 

Pour en savoir plus :

- Les classes populaires et la démocratie représentative en France : exit, voice ou loyalty ? Patrick Lehingue Dans Savoir/Agir 2015/1 (n° 31), pages 25 à 34 Source : cairn info

- Le référendum sur le projet de traité constitutionnel en 2005, puis le premier tour de l’élection présidentielle de 2007, ont semblé confirmer l’intérêt des classes populaires pour la politique

- Jean-Luc Mélenchon en 2015 : " Les chiens votent Front National ! Certains chats aussi ! "

Le vote d’ouvriers et d’employés pour des candidats d’extrême droite : une problématique à ne pas esquiver
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17 juin 2022 5 17 /06 /juin /2022 21:03
Meeting Mélenchon Parc des expos ©Blandine Le Cain

Meeting Mélenchon Parc des expos ©Blandine Le Cain

Jean-Luc Mélenchon 13/07/2022 : « Une nouvelle histoire de la gauche commence[4] »

 

« Le Monde » : la Nupes rate la victoire entre 0,13 et 0,25 % du total des voix[1]

 

La Nouvelle Union Populaire Écologique et Sociale (NUPES) vient de réussir un exploit : devenir la première force d’opposition lors du premier tour des élections législatives, avec 26,11% des voix, face à un président réélu. Évènement historique dans l’histoire de la Ve République, ce score a également une signification.
En unissant sous une même bannière l’ensemble des partis traditionnels de gauche, la NUPES a imposé dans le paysage politique une ligne de rupture avec le social-libéralisme.
Loin d’une trahison ou d’une soumission, comme l’ont prétendu bon nombre de commentateurs en reprenant les cris d’orfraie de leurs prédécesseurs lors de la campagne de François Mitterrand en 1981, il s’agit néanmoins d’un tournant majeur.
À ce titre,...

 

Sources :  LVSL - Article initialement publié dans El País/Agenda Publíca par Victor Woillet. 

- Il convient de revenir non seulement sur sa portée, mais également sur son origine historique.

Si les rapprochements avec la « gauche plurielle » (i.e. le gouvernement de cohabitation mené par Lionel Jospin de 1997 à 2002) ou encore le Front populaire de 1936 peuvent avoir leur pertinence, l’origine stratégique de ce qu’opère Jean-Luc Mélenchon aujourd’hui est ailleurs. En effet, de nombreuses fois, pour expliquer ce qu’il a souhaité faire avec l’Union Populaire, le représentant de la France insoumise s’est référé à François Mitterrand. Pourtant, une telle analogie ne va pas de soi. 

 

 

- Faire l'union à la base

De ses propres mots, Jean-Luc Mélenchon a qualifié la stratégie derrière l’Union Populaire « d’union à la base » lorsque celle « au sommet » est impossible. Pour comprendre à quoi le représentant de la France insoumise fait référence à travers ces éléments de discours, il faut avoir à l’esprit ce que François Mitterrand a lui-même effectué en son temps. Après avoir mis en ballottage De Gaulle lors de la présidentielle de 1965, Mitterrand constitue une première union de la gauche regroupant l’ensemble des forces anti-communistes (la SFIO, le Parti Radical et le Convention des institutions républicaines). Si cette coalition marque un tournant, notamment lors des législatives de 1967, le Parti communiste français se maintient à des scores extrêmement élevés et obtient 21,3 % des voix lors de l’élection présidentielle de 1969. 

 

Il faut attendre 1972, après le Congrès d’Épinay, pour qu’une nouvelle forme d’union puisse voir le jour. En associant, par la signature du Programme Commun, les communistes à l’union de la gauche, Mitterrand élargit grandement sa base électorale et ne se contente plus d’une union « au sommet ». Ce choix fait d’ailleurs suite à la visite de Mitterrand lui-même au Chili alors gouverné par « l’Unité Populaire » de Salvador Allende, ce qui lui vaudra le surnom « d’Allende français ». 

 

Même si l’union vole en éclat en 1977 à la suite des positions de Mitterrand sur la défense nationale, le tournant a eu lieu. En 1981, grâce au CERES animé notamment par Chevènement et Didier Motchane, François Mitterrand conserve la tête du PS malgré les critiques de la « deuxième gauche » de Michel Rocard. Pour la présidentielle de la même année, si le Programme Commun n’est plus là, les « 110 propositions » qui constituent le programme de Mitterrand alors en reprennent le fond. Arrivé au second-tour de la présidentielle, les communistes se ravisent et finissent par rejoindre la candidature de Mitterrand. Ayant réussi l’union par la base, en élargissant son assise électorale et en intégrant de nombreuses revendications portées par les communistes (la retraite à 60 ans, la nationalisation de nombreux secteurs de l’économie, la diminution du temps de travail…), le sommet suit…

 

 

- Un tournant politique, condition du changement historique
Telle est la logique dans laquelle Jean-Luc Mélenchon se situe lorsqu’il fonde l’Union Populaire dans le cadre de la présidentielle de 2022. Si ce rapprochement discursif et stratégique peut faire l’objet de critiques sur le plan historique, il révèle un élément frappant : la relatéralisation de la gauche française. Le « tournant de la rigueur » budgétaire opéré par le gouvernement de Pierre Mauroy en 1982-1983 ne devait initialement être qu’une « pause », pour reprendre l’expression de Léon Blum en 1937, dans l’agenda des réformes d’inspiration keynésienne défendues face à la situation monétaire d’alors. Ce qui fut présenté comme une pause, une nécessité face à la conjoncture s’est en réalité avéré bien plus long. C’était le début de la « parenthèse néolibérale » française qui n’a jamais réellement été refermée depuis.

 

 

- Cette parenthèse a notamment favorisé les tenants de la « deuxième gauche » au sein du Parti socialiste, autour de Michel Rocard, Pierre Mauroy ou encore Jacques Delors.
Ces derniers, bien plus libéraux que les artisans du Programme Commun, ont occupé de nombreuses places dans les instances partisanes mais aussi institutionnelles. En 1988, après la réélection de Mitterrand, Michel Rocard est nommé Premier ministre. En mars 1990, il s’allie à Lionel Jospin. Un an plus tard, même s’il perd son poste de Premier ministre, il devient premier secrétaire du PS. Lors du gouvernement de coalition de 1997-2002 mené par Lionel Jospin, la « deuxième gauche » rocardienne fait partie du gouvernement d’union des gauches au même titre que ses opposants historiques.

 

 

- Avec le vote majoritaire pour le « non » au référendum pour une constitution européenne en 2005, une première union de la gauche de circonstance apparaît

Cette union de la gauche de circonstance s’oppose aux héritiers de la « deuxième gauche » française qui sont alors particulièrement représentés au sein du Parti socialiste.
Jean-Luc Mélenchon en est l’un des artisans. En 2008, cette union informelle trouve une première tentative de débouché politique : le Parti de Gauche[2], fondé par Jean-Luc Mélenchon et Marc Dolez ainsi que d’autres élus issus des rangs du PS ou des Verts. Dès lors, cette formation n’a cessé d’incarner l’opposition aux représentants d’une gauche favorable au néo-libéralisme et aux contraintes budgétaires, de François Hollande à Emmanuel Macron.  

 

 

- En 2012 puis en 2017 (avec le Front de gauche[3]), Jean-Luc Mélenchon, rejoint par les communistes, a représenté ce courant de la gauche antilibérale au sein du paysage politique français.

Fort de son score à la présidentielle de 2022, attestant d’une base électorale en faveur d’un programme net de rupture avec le néo-libéralisme et les contraintes budgétaires européennes, Jean-Luc Mélenchon a opéré un tournant dans le paysage politique français : la fin de la parenthèse néolibérale qui restait béante jusqu’à maintenant.

 

Deux conditions demeurent cependant pour que ce tournant politique et discursif profond prenne la forme d’un tournant historique :

  • Premièrement le succès de cette union de la gauche française lors du second tour des élections législatives le 19 juin, mais surtout la politique menée par le gouvernement qui accéderait alors au pouvoir.
  • Dans un contexte inflationniste touchant l’ensemble des matières premières, la lutte à mener contre le chômage et en faveur d’un investissement massif dans de nombreux secteurs nécessaires à la transition écologique sera particulièrement âpre, mais elle pourrait bien constituer un véritable signal pour le reste de la gauche européenne et entériner la fin d’une parenthèse qui a tant duré.

 

--------------------------------

 

13/07/2022 - Jean-Luc Mélenchon :

« Par des cheminements intellectuels, la radicalisation de la société va se poursuivre[4]. » ;

« Le sort des élections se joue dans la conjonction des classes populaires et des classes moyennes[4]. » ;

« L’ordre géopolitique va basculer en même temps que l’ordre climatique[5]. »

 

Jean-Luc Mélenchon : « Une nouvelle histoire de la gauche commence » Jean-Luc Mélenchon : « Je lutterai jusqu’à mon dernier souffle. »

 

 

Notes :

[1« Le Monde » : la Nupes rate la victoire entre 0,13 et 0,25 % du total des voix

[2] Le Parti de Gauche

[3] Front de gauche

[4] Jean-Luc Mélenchon : « Une nouvelle histoire de la gauche commence »

[5] Jean-Luc Mélenchon : « Je lutterai jusqu’à mon dernier souffle. »

 

Pour en savoir plus :

- sur les débats récents à propos du  « tournant de la rigueur » de 1983, lire sur LVSL cet article de Neil Warner.

- Jean-Luc Mélenchon : " Après le séisme "

- Législatives 2022 : quel camp peut vraiment se dire « social-démocrate » ?

- Jean-Luc Mélenchon : " « Le Monde » : la Nupes rate la victoire entre 0,13 et 0,25 % du total des voix "

- Recomposition politique en France : Trois blocs et deux perdants

- « Plutôt Le Pen que Mélenchon » : quand le retournement du barrage républicain était prédit par Frédéric Lordon

Georges Marchais, Robert Fabreloeil, Roland Leroy, Francois Mitterrand, la signature Programme commun 1972

Georges Marchais, Robert Fabreloeil, Roland Leroy, Francois Mitterrand, la signature Programme commun 1972

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17 juin 2022 5 17 /06 /juin /2022 14:07

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Rédacteur

  • Pour une Révolution citoyenne par les urnes
  • Retraité SNCF, engagé politiquement depuis l'âge de 15 ans, militant du PCF de 1971 à 2008, adhérent au Parti de Gauche et à la France Insoumise depuis leur création, ex secrétaire de syndicat, d'Union locale et conseiller Prud'homme CGT  de 1978 à 2022.
  • Retraité SNCF, engagé politiquement depuis l'âge de 15 ans, militant du PCF de 1971 à 2008, adhérent au Parti de Gauche et à la France Insoumise depuis leur création, ex secrétaire de syndicat, d'Union locale et conseiller Prud'homme CGT de 1978 à 2022.

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