La dangerosité des pesticides est aussi un problème de santé publique... nous exigeons une véritable transition agricole !
Pesticides en Charente-Maritime : « les études scientifiques ne font pas bouger les pouvoir publics[0] »
Avenir Santé Environnement et plus de 40 autres organisations lancent appellent à manifester le 16 septembre 2023 à 14h devant la Gare de La Rochelle !
Pétition à l'adresse de Emmanuel Macron - Président de la République Française, Elisabeth Borne - Première Ministre, Marc Fesneau - Ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté Alimentaire, Christophe Béchu - Ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, François Braun - Ministre des Solidarités et de la Santé, Mesdames et Messieurs les Eurodéputé.e.s de France, Mesdames et Messieurs les Député.e.s, Mesdames et Messieurs les Sénatrices et Sénateurs par Avenir Santé Environnement[1]
L’association Avenir santé environnement[1] située sur l’agglomération de La Rochelles’est constituée en 2018 à la suite de la multiplication de cancers pédiatriques sur la commune de Saint-Rogatien et de l'alerte sanitaire lancée par le CHU de Poitiers à l'Agence régionale de santé (ARS) concernant ce territoire.
Dès 2018, une étude épidémiologique a révélé un excès de risques pour la tranche d’âge des 0-24 ans sur la commune de Saint-Rogatien[3].
Pesticides près de La Rochelle :33 molécules chimiques détectées dans l’air en 2019[5] ;
Qui en sera étonné ? :En Charente-Maritime : les ventes de pesticides explosent depuis dix ans[6] est dénoncé en 2018.... et en 2023 " Pesticides en Charente-Maritime : toujours sur la première marche du podium pour le glyphosate[9] "
Depuis maintenant trois ans, les résultats d’études mettent en évidence la présence massive de pesticides autour de La Rochelle et plus particulièrement dans la plaine d’Aunis.
- La Charente-Maritime détient de bien tristes records en termes de pollution de l’air et de l’eau aux pesticides (NDLR : le Fleuve Charente, le plus pollué de France grâce au glyphosate et autres pesticides[7]) ;
- Et qu’en est-il de la pollution des sols ?
- Qu’en est-il de l’effet cocktail occasionné par l’exposition multiple à des substances dont les niveaux dépassent les normes sanitaires (NDLR : « Peu importe les quantités, ces substances sont dangereuses »[8]) ?
- Quel risque de développer des maladies chroniques et des cancers (NDLR : Agglo de La Rochelle : pourquoi le cancer frappe-t-il plus fort qu’ailleurs ?[10]) ?
Nous exigeons une véritable transition agricole qui passera par :
L’organisation d’un plan de conversion de notre modèle agricole et de ses filières ;
Un engagement concret portant sur un plan de SORTIE des pesticides de synthèse avant 2030 ;
Un investissement massif avec éco-conditionnalité à destination des agriculteurs ;
L’application immédiate et systématique du principe de précaution lorsque l’impact des pesticides sur les populations est prouvé ;
L’interdiction immédiate d’utilisation de tous les pesticides de synthèse sur les aires d’alimentation de captages d’eau potable ;
La révision immédiate des textes réglementaires censés encadrer l’usage des pesticides notamment le décret dit de Protection des personnes pour qu’il protègent vraiment les populations fragiles ;
La mise en place immédiate d’un Registre Territorialisé des Cancers sur l’ensemble du territoire français ;
La publication obligatoire et publique de l’interaction de toutes les molécules présentes dans la formulation d’un pesticide avant de valider une autorisation de mise sur le marché ;
La prise en compte du cumul des facteurs d’exposition et de la toxicité chronique des pesticides dans les recherches d’impacts.
Pourquoi c'est important ? En septembre 2022, plus de 80 associations, collectifs, syndicats et personnalités ont répondu favorablement à l’appel de l'association Avenir Santé Environnement en signant une tribune commune intitulée “Nous ne pourrons plus dire que nous ne savions pas ”[2].
Cette tribune établissait alors un constat glaçant de l’impact de notre système agricole et de l’usage des pesticides sur les milieux, la biodiversité et la santé humaine.
Les autorités ont été interpellées, les ministères et les ministres informés mais malheureusement nos dirigeants n’ont pas saisi l’urgence dans laquelle nous nous trouvons.
Et pourtant nous les avions prévenu ! Nous avions alors dressé, en nous appuyant sur plus d’une trentaine d’études, un état des lieux des savoirs en matière d’impact des pesticides en France.
Ces faits sont toujours d'actualité :
La France est à l’heure actuelle l’un des principaux consommateurs de pesticides en Europe ;
L’air est contaminé ;
Les sols sont contaminés ;
La quasi-totalité des cours d’eau en France est contaminée ;
L’eau du robinet est concernée par la contamination aux pesticides ;
Les pesticides impactent la biodiversité ;
Les pesticides contaminent les cultures biologiques et menacent l’apiculture ;
Les plans de réduction d’usage des pesticides sont en échec ;
Certaines pathologies développées suite à une exposition aux pesticides sont désormais reconnues comme maladies professionnelles ;
Il existe de fortes présomptions entre l'exposition aux pesticides et la survenue de certains cancers pédiatriques ;
Récemment, il a même été démontré que les pesticides contiennent des résidus de pétrole et des métaux lourds non déclarés ce qui peut aggraver leurs toxicités[4].
Chacun de ces points est développé dans la version longue de notre tribune a retrouver juste ici[2].
Les données scientifiques sont suffisamment avancées pour agir immédiatement ! L’Etat Français ne peut donc plus les ignorer, ni renier perpétuellement ses engagements !
Pour rappel, à l’automne 2021, le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies reconnaissait dans la résolution 48/13que disposer d’un environnement propre, sain et durable est un Droit Humain[11].
En juillet 2022, L’Assemblée générale des Nations Unies a déclaréà son tour que tous les habitants de la planète ont le droit à un environnement sain[12].
La France a cosigné ces deux résolutionset s’est engagée à travailler à ce que tous les Français et Françaises aient le droit à un environnement sain.
Conformément à ses engagements, nous demandons à l’Etat Français de reconsidérer sa position sur les pesticides de synthèse qui dégradent la santé, l’environnement, et l’avenir de nos générations futures. Le modèle agricole dominant se soucie plus de la balance commerciale que de son impact sur la société.
Cela ne peut plus durer.
Parce que nous ne pourrons pas dire à nos enfants que nous ne savions pas,
Soyons tous au rendez vous !
Écoutez ou réécoutez bien les scientifiques de l’INRAE et du CNRS !
Les démonstrations étayées scientifiquement sont implacables
La trop lente substitution des pesticides dangereux
Dans un rapport publié mardi 12 septembre, l’association Générations futures remet en question l’expertise rendue par deux agences réglementaires de l’Union européenne, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) et l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) sur la toxicité du glyphosate, herbicide le plus utilisé dans le monde.
Comme le montrent ces données compilées par la Fondation Heinrich Böll, Friends of the Earth Europe, BUND, le Pesticide Action Network Europe et La Fabrique écologique dans leur Atlas des Pesticides[13], en 2021, 44 pesticides qui devraient être remplacés selon la réglementation de l’UE étaient toujours utilisés en France. Ils étaient à peine moins nombreux à être utilisés en Allemagne (39), et c’est en Hongrie qu’on en trouvait le plus (51).
Il va falloir choisir : l’unité ou un gouvernement d’extrême droite en France. Plutôt Le Pen que Mélenchon, Monsieur F. Roussel[0] ?
Il est urgent que la NUPES s’organise au niveau local pour mener des batailles idéologiques unitaires dans les villages des bourgs et les villes. C’est dès maintenant qu’il faut commencer ce travail et ne pas attendre la veille des élections.
Les jeunes de la NUPES qui ont fait un appel à l’unité[1] l’ont parfaitement compris.
Le percept, le concept est le réel. Il n’est pas nécessaire d’être un expert en ingénierie sociale ou en marketing pour savoir que la perception du réel à plus d’importance que le réel lui-même dans l’imaginaire d’un individu qu’il soit considéré comme consommateur, producteur ou citoyen.
Dans un domaine proche, rappelons que pour Louis Althusser, l’idéologie et le rapport imaginaire des individus avec leurs conditions réelles d’existence vont de pair.
La manipulation des perceptions fait partie de toutes les formes de propagande.
Ainsi, en politique la forme rhétorique, le ton d’un discours à plus d’impact que son contenu argumentaire. Le comportement des acteurs politiques les uns envers les autres peut avoir plus d’importance que les programmes. Se pose alors la question centrale : qui a le contrôle de la manipulation du monde des perceptions ?
La réponse est simple : pour l’essentiel, les médias dominants[2].
Examinons maintenant quelques exemples. La réalité est que la NUPES est arrivée à se mettre d’accord sur 650 mesures pour un projet de gouvernement[3] : c’est cette réalité qui a permis de présenter un candidat unique de la gauche aux élections législatives de 2022.
Cet accord a été rendu possible par le score de 22 % obtenus par Jean-Luc Mélenchon à l’élection présidentielle de 2022 Et la faiblesse des scores du PS, de EELV et du PCF[4].
Les médias n’ont pas beaucoup insisté sur l’existence de ce programme préférant présenter cette alliance comme purement opportuniste.
-Le temps passant, différentes prises de position individuelles de personnalité appartenant aux différentes composantes de la NUPES surviennent :
sur la politique « d’apartheid » du gouvernement israélien contre les palestiniens ;
sur ce que devrait être la stratégie de France Insoumise en milieu rural ;
des articles de Clémentine Autain dans Libération et de Raquel Garrido dans Le Parisien (repris par Gala) critiquant le manque de démocratie au sein de France Insoumise ;
une multitude de tweets, y compris de Mélenchon exprimant telle ou telle position.
tout cela, sans même parler d’une multitude d’interventions intempestives et irresponsables de type clanique de Fabien Roussel ;
une division pour les sénatoriales 2023 qui prive la NUPES de 10 parlementaires malgré la proposition d'union portée par LFI[5bis][5ter] ;
et enfin, pour couronner le tout, des prises de position, sans discussion préalable, de responsables de la NUPES pour se présenter isolé aux prochaines élections européennes.
Toutes ses prises de position intempestives ont évidemment été montées en épingle par les médias répétant inlassablement : la NUPES se disloque, éclate, n’existe plus, etc.
Alors, que font apparaître les médias dans le monde des perceptions : il n’existe pas de projet de la NUPES, de la gauche en France. La NUPES n’est qu’un jeu d’appareil sans lendemain.
Et qui est victime de cette manipulation du monde des perceptions ? Des pauvres gens incultes, sans expérience politique… ? et bien, non ! Un homme comme Roger Martelli, (avec lequel je partage un grand nombre d’analyses politiques) tombe dans le panneau. À aucun moment dans son interview, il ne mentionne l’existence de ce projet de gouvernement.
Il ne parle à aucun moment du travail considérable d’élaboration collective qu’a demandé la mise au point de l’Avenir en commun[6].
Les 55 livrets thématiques (42 + 13) qui détaillent le programme de La France Insoumise, devenue première force politique de gauche en France, quoiqu’il en pense. Ces 55 livrets figurent-ils dans sa bibliothèque ? Y trouve-t-on le livre de Jacques Généreux « L’Autre société ?[6bis] » On peut en douter.Oui, il existe un projet de société à gauche mais encore faut-il qu’il soit connu y compris par les organisations de gauche !
À plusieurs reprises, j’ai constaté dans des interviews sur le site Regards, qu’il était affirmé que La France Insoumise avait des prétentions hégémoniques (ou accepterait mal le partage des responsabilités avec ses partenaires) et supporterait mal le pluralisme.
Il s’agit là encore d’une fable construite par les médias dans le champ des perceptions. Ségolène Royal, aux amphi d’été[7], a fait remarquer avec justesse, que " de nombreux candidats de France Insoumise à la députation se sont effacés pour permettre à des communistes, des socialistes, des écologistes de pouvoir se présenter dans certaines circonscriptions. Si la direction de France Insoumise avait appliqué des pourcentages obtenus aux élections présidentielles, pour la répartition des candidats dans les circonscriptions, ses partenaires auraient obtenu moins de députés ".
D’autre part, aux élections européennes prochaines,France Insoumise est d’accord pour permettre aux écologistes d’avoir toutes les têtes de liste[8] ! En réalité, prisonniers d’un esprit clanique, un certain nombre de responsables du PS, EELV et du PCF supporte mal que France insoumise soit devenue majoritaire : pour eux, majoritaire signifie hégémoniste !
Quand on affirme que France Insoumise manque de démocratie ou de pluralisme, ceux qui tiennent ce propos devraient faire l’effort d’analyser et de comprendre en détail comment se construit et fonctionne France Insoumise à tous les niveaux.
Certains députés élus insoumis comme Clémentine Autain semblent avoir une connaissance insuffisante du fonctionnement du mouvement auquel ils appartiennent. L’esprit accaparé par leur travail de député, certains parlementaires insoumis semblent avoir perdu le contact avec la réalité du fonctionnement de leur mouvement qui les a pourtant conduits à être élus. Rappelons le lien permettant d’accéder à la rubrique :
.Qu’est-ce que La France insoumise d'aujourd'hui[10] ?
🔴La France Insoumise échappe pour une large part à l’esprit de clan pour une raison très simple :ce n’est pas un parti mais un mouvement qui reste poreux avec son environnement social. Le parti est une forme moderne de clan ou de tribu avec son intérieur et son extérieur. Spontanément une autre organisation politique même idéologiquement très proche est perçue comme rivale, concurrentes et non comme partenaire confraternel.
🔴Les vieux routiers de la politique perçoivent avec circonspection cette forme mouvement etpréfèrent la forme parti, plus structurée, moins volatile, moins imprévisible.
🔴C’est tout le mérite de Jean-Luc Mélenchon d’avoir été capable d’avoir tiré les conséquences des inconvénients de la forme parti et d’avoir eu la force d’imaginer, avec d’autres, une forme nouvelle qui peut avoir évidemment des inconvénients.
Résumons : d’un côté des prises de position publique individuelles dans des médias manipulateurs et sans aucune prise en compte de l’image renvoyée dans le champ des perceptions des électeurs. L’image renvoyée est celle de la division, de l’incohérence, de personnalités à l’égo surdimensionné ou faisant passer les intérêts de leur clan avant tout. Cette image désastreuse n’est pas non plus sans effet sur les adhérents ou sympathisants des organisations de la NUPES qui vont finir par croire, eux aussi, qu’il n’existe pas de projet commun.
Et pendant ce temps, Marine Le Pen, silencieuse, grimpe dans les sondages !
D’un autre côté, une méconnaissance de la nature et du fonctionnement réel de France Insoumise de certains observateurs et acteurs politiques qui deviennent alors d’autant plus influençables par ce monde des perceptions construits et manipulées par les médias.
Fort heureusement, la plupart des cadres et adhérents de France Insoumise échappent à la critique précédented’autant que cette organisation(la FI) est la seule à avoir proposé, dès le départ, unité de la NUPES pour les différentes élections à venir.
On ne peut qu’ apprécier par exemple, la discrétion, la fermeté tranquille de Manuel Bompard.
Réflexion sur les réactions claniques d’un certain nombre de responsables des partenaires de La France Insoumise. En un temps record (6 ans), :
La France Insoumise acquiert une audience à gauche(21,95% aux présidentielles 2022).
Elle se distingue notamment par une certaine radicalité économique et écologique.
En même temps, ce n’est pas un mouvement d’extrême gauche: son anticapitalisme n’a pas la radicalité de Lutte ouvrière ou du NPA. Par exemple, il n’est pas question de nationaliser toutes les banques, toute l’industrie pharmaceutique. Ainsi, certains socialistes dans la lignée de Jaurès peuvent adhérer à France Insoumise.
Ainsi, le PCF se trouve concurrencé par un mouvement dont la radicalité économique est au moins égale à la sienne.
En outre, ce mouvement développe de nombreuses actions pour défendre les intérêts des classes populaires.
🔴Alors, que reste-t-il au PCF pour se distinguer ?
- Pas grand-chose sinon sa défense de l’énergie nucléaire et un écologisme moins radical ;
- Pour se distinguer médiatiquement,il ne lui reste plus que gesticulations, provocations en comptant sur l’appui des médias de droite voire d’extrême droite.
- Par un tel comportement désespéré et irresponsable,Fabien Roussel devient le diviseur remarqué au service du Capital.
Même réflexe identitaire :hier la crainte du PCF de se dissoudre dans le Front de Gauche, aujourd’hui la crainte de se dissoudre dans la NUPES avec ce redoutable solvant c’est France Insoumise !
🔴Côté EELV, ce parti trouve un concurrent redoutable par son écologie radicale.
Plusieurs responsables écologistes sont d’ailleurs passés du côté de France Insoumise.
Alors que faire pour se distinguer et ne pas disparaître ? :
- Accentuer au maximum les éventuels points de divergence, notamment sur l’Europe.
- EELV défend l’idée d’une Europe fédérale et une Europe des régions.
- Ce n’est évidemment pas le cas de France Insoumise plus attachée à la notion de souveraineté nationale. Souveraineté populaire.
🔴Enfin, pour le PS, comme vu ci-dessus, le programme de France Insoumise n’est pas d’un anticapitalisme ultra radical, loin de là.
François Ruffin n’a pas complètement tort de parler de programme social démocrate à l’ancienne.
Alors que reste-t-il pour éviter de disparaître et d’être absorbé par France Insoumise ?
- Encore une fois, l’Europe et peut-être une russophobie héritée de la guerre froide et de l’anticommunisme soviétique des socialistes.
- L’attachement à l’OTAN, comme pour une partie des Verts peut-être aussi une marque distinctive.
En conclusion Il est urgent que la NUPES s’organise au niveau local pour mener des batailles idéologiques unitaires dans les villages des bourgs et les villes. C’est dès maintenant qu’il faut commencer ce travail et ne pas attendre la veille des élections.
Les jeunes de la NUPES qui ont fait un appel à l’unité l’ont parfaitement compris.
Il va falloir choisir : l’unité ou un gouvernement d’extrême droite en France.
Plutôt Le Pen que Mélenchon, Monsieur F. Roussel ?
----------------------------------
Mais pour Aurélie Trouvé, députée LFI-NUPES de Seine-Saint-Denis : à la NUPES, on a des désaccords mais on avance !
Référendum d'initiative citoyenne, avenir de la NUPES, annonces de Macron sur la sécurité : retrouvez l'intégralité du passage de Manuel Bompard dans la matinale de Public Sénat du jeudi 5 octobre 2023.
Une liste Nupes aux européennes en 2024 ?
" Si les appareils ne veulent pas faire l’union, j’appelle les électeurs à le faire. Nous souhaitons porter le programme de la Nupes. " et ine fine, " C'est aux électeurs de faire l'union ! "
J’ai déjà écrit une première lettre ouverte sur l’obligation de l’union, approche et concept qui dépasse celui de la nécessité[0].
Le 28 juillet 2023, 3 h du matin, une nuit d’orage et de colère
Les dirigeants ne sont pas en effet seuls à décider, à partir de la situation de leur organisation, de leurs calculs politiciens, et de leurs fantasmes d’enfants égocentriques, les décisions prises le sont dans un cadre politique précis, qui surplombe les décisions prises : « Les hommes font leur propre histoire, mais ils ne la font pas de plein gré, dans des circonstances librement choisies ; celles-ci, ils les trouvent au contraire toutes faites, données, héritage du passé. La tradition de toutes les générations mortes pèse comme un cauchemar sur le cerveau des vivants ». K.Marx, « Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte ».
Chaque dirigeant politique de la NUPES a donc une responsabilité historique, face à ce qui s’annonce et de dévoile un peu plus chaque jour, et ceux qui aujourd’hui refusent l’union, encore plus que les autres…
Ce qui s'annonce et se dévoile
Lors du premier mandat de Macron, on avait déjà vu les dérives, pas simplement néolibérales et économiques, mais aussi autoritaires, visant à réduire le pays à une simple « start-up » pour ne pas dire l’aveugler, pour l’empêcher de voir et se comprendre : « Suppression des observatoires de la délinquance, de la laïcité, des inégalités , de la pauvreté etc… » au nom des économies budgétaires (allouées par la suite aux cabinets Mc Kinsey sans doute). Or supprimer un observatoire, dont la mission est d’observer, c’est se rendre aveugle volontairement et se réveiller le lendemain avec des émeutes-révoltes urbaines que l’on n’avait pas vu venir…
C’est surtout empêcher le pays lui-même (les citoyens) de savoir ce qu’il est, ce qu’ils sont. Or « la dictature s’épanouit sur le terrain de l’ignorance ».
Un observatoire c’est glace qui réfléchit ce que nous sommes comme Nation au tréfonds de nos rapports sociaux, et c’est là où pour un pouvoir néo-libéral autoritaire, le bât blesse.
Rajoutons les petites phrases blessantes et humiliantes : « Les analphabètes », « des gens qui ne sont rien », « un pognon de dingue », « traverses la rue »…révélant le mépris du peuple comme les « Capet » en 1789.
C’est sans doute le mélange de tous ces aspects, avec la goutte qui fait déborder le vase, du prix de l’essence qui explique la première jacquerie des gilets jaunes[1], où le pouvoir du château trembla sur ses bases et fut déjà sauvé par les « nouveaux gardes suisses » du régime (Police).
De 2022 à nos jours dans le réel
Le second mandat de Macron fut obtenu lors d’une élection tronquée et truquée, tronquée car le monarque refusa tout débat démocratique, imposant son système de « lui » et les autres, truquée car choisissant par avance, via les médias aux ordres, son adversaire du second tour (Le Pen) (NDLR avec la complicité de la gauche PS - EELV - PCF qui refusèrent la proposition de fédération populaire proposée par LFI en avril 2019[2]) jouant la roue de secours du système, sans compter le rôle dévastateur sur l’opinion des sondages empêchant pour 200.000 voix Mélenchon d’être au second tour. La bourgeoisie affairiste immobilière et financière tremblait. A ce propos, Poutine n’aurait pas fait mieux. La France est-elle encore une République démocratique ?
De la NUPES proposées par La France insoumise dans le cadre des législatives[3] [3bis] : Alors vient le coup de génie de la NUPES, et par l’alliance des « gauches » enfin unie (L.F.I, E.E.L.V, P.C.F, P.S, Génération) la NUPES gagne le premier tour de l’élection législative, alors s’organise concrètement le pseudo « l’arc Républicain [4] » pour empêcher la matérialisation au second tour, préférant Le Pen à un député Insoumis. Voilà le réel.
Les crises sociales : Les crises sociales se succèdent jusqu’à celle des retraites, immense, profonde, soutenue. Unité syndicale sans faille permettant l’organisation et le succès de 14 journées de mobilisation[5].
La crise politique : c’est déjà un régime fragile, qui choisit de passer en force en utilisant tous les articles possibles de la constitution (du 37.1 au 49.3[6]), en vue d’empêcher le débat parlementaire et jamais les députés, détenteurs de la souveraineté du peuple, entre deux élections n‘ont pu voter le texte.
La crise institutionnelle : Le conseil constitutionnel aux ordres valide le texte, et de plus retoque la démarche de demande de référendum partagé[7]…
La crise des casseroles : Voilà que comme en 1789, devant la surdité du pouvoir engage la révolution pacifique des casseroles, élément historique ventant des profondeurs de notre histoire.
Coup d’Etat et dictature : Avec la réforme des retraites, la loi censée être votée par les députés, dans un régime démocratique, a été décidée par 12 personnes (le Président de la République, la première ministre, les 9 du conseil Constitutionnel et la Présidente de l’Assemblée nationale). « Les 12 salopards » étaient un film, mais désormais la réalité dépasse la fiction.
Dictature ? Pour les ignares, qui ne voient en dictature que le régime de Pinochet ou de Poutine, sachez que la définition de dictature, est : « Individu ou groupe d’individus détenant tous les pouvoirs », ce qui correspond exactement à ce qui s’est passé pour la loi sur les retraites (voir plus haut). Rappelons aussi que pour « Montesquieu » (forme de Mélenchon des temps passés), la démocratie se fonde sur le principe suivant : « je veux que par la disposition des choses, un pouvoir arrête le pouvoir[8] ». Or à aucun moment ce processus ne s’est vérifié. Le pouvoir est au-dessus du peuple.
Libertés en danger : Déjà lors des manifestations des gilets jaunes, la répression des « gardes suisses » du régime a été terrible entrainant éborgnement, mains arrachées et morts, car il s’agissait de planifier et d’organiser une politique de la peur et de la terreur, visant à dissuader de manifester…La prise de pouvoir de la police sur le pouvoir politique était déjà perceptible mettant en danger les libertés publiques des citoyens tel que rédigés en 1789, dans la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, au point que la France fut rappelé à l’ordre par le conseil de l’Europe et l’O.N.U, se déclarant préoccupé par les « droits de l’homme » en France[9].
La police au-dessus des lois et de la constitution[10] : Rappelons qu’avant l’actuel mouvement de la police, il y eut un précédent le 19 mai 2021, manifestant aux cris de « le problème de la police, c’est la justice[10bis] » et certains dirigeants syndicaux appelant à « rompre les digues de la constitution et de la loi ». Ceci devant être mis en relation avec l’appel des généraux[11].
La police tue : Oui la police tue, le cri d’alarme émis par Jean-Luc Mélenchon[12], une fois de plus avant tout le monde, à propos d’une jeune femme de 19 ans, tuée alors que passagère d’un véhicule ayant refusé d’obtempérer, et ce en plein Paris, où c’est connu les caméras de surveillance n’existent pas, sauf pour arrêter les « fauteurs de trouble en manifestation », mais jamais pour les « black books », c’est curieux, ça » (NDLR : « En Allemagne, il y a eu un tir mortel en dix ans pour refus d’obtempérer, contre 16 en France depuis un an et demi[13] » )…
Nahel : S’en est suivi l’assassinat du jeune Nahel, 17 ans et malheureusement pour la police, une citoyenne a filmé la scène, d’une horreur absolue et surtout contredisant la thèse des policiers, aussitôt reprise par les médias aux ordres, de la légitime défense.
Emeutes ou révoltes urbaines ? Les « gardes suisses » pris la main dans le sac, si je puis dire, les quartiers se révoltent, pas simplement pour Nahel, mais pour toutes les exactions commises par les « gardes suisses » du régime, depuis longtemps des contrôles au faciès aux arrestations illégitimes et violentes entrainant la mort (Traore). Le calme ne peut revenir que par la Justice… égale pour tous en Démocratie[14]. Les révoltes se propagent dans tout le Pays y compris en campagne comme lors de la « grande peur » précédant la nuit du 4 aout, mais en Macronistan, l’obscurité règne en maitre. Il faut « utiliser la constitution » et non l’appliquer. Décidément, « il fait bien noir, au pays des lumières » (Graffiti urbain).
La responsabilisation parentale individuelle : Tel est la nature des régimes néo-libéraux dictatoriaux, de ne jamais regarder ses responsabilités politiques (non-application du plan Borloo, rejeté par Macron[15]) et de toujours reporter la responsabilité sur les individus. Observons de plus que par principe les parents, pour leurs enfants font tout ce qu’il faut par principe, mais que peut faire une mère isolée, pour garder et éduquer ses enfants quand elle travaille à horaire décalé, comme femme de ménage, pour les cadres blancs des « tours du business » de la métropole affairiste ??? La « responsabilisation » individuelle se conjugue avec le « ruissellement ».
Ça pourrait être votre fils (sauf s’il est blanc et porte Rolex, étiquette de la bourgeoisie) : A Marseille en marge des « émeutes-révoltes urbaines » Hedi, un jeune à été tiré au champs de foire et ça pourrait être votre fils, sauf s’il est blanc et porte Rolex[16].
De la République policière à la république fasciste : Maintenant que la police a pris le pouvoir, la prochaine étape est le fascisme. Dirigeants plus qu’autistes (aveugles et sourds), comme citoyen et militant politique je vous demande de lire l’article de Frédéric Lordon, qui lui aussi alerte : De la république policière à la république fasciste[17] ? :
On s’endort en république et en démocratie et on se réveille dans le fascisme Il faut se rappeler l’Histoire : « celui qui ne connait pas l’Histoire est condamné à la revivre » K.Marx.
Le Régime était démocratique et républicain quand Mussolini prit le pouvoir ;
Le régime était démocratique et républicain quand Franco prit le pouvoir ;
Le régime était démocratique et républicain quand Hitler, pas fou, mais soutenu par la bourgeoisie industrielle, prit le pouvoir ;
Le régime était démocratique et républicain quand Pétain prit le pouvoir imposant le régime de Vichy, la collaboration avec Hitler) et le pacte (« honneur, famille, patrie[18] »), en lieu et place de « liberté, égalité, fraternité ».
Le régime était démocratique et républicain quand Pinochet prit le pouvoir au Chili (coup d’état fomenté par la C.I.A) et assassinant Allende et des dizaines de milliers d’opposants.
Dit autrement, on s’endort en république et en démocratie et on se réveille en dictature.
Qu’est ce que vous ne comprenez pas ou vous ne voyez pas voir encore, dans les événements qui se succèdent et s’accumulent, toujours dans le même sens, dirigeants plus qu’autistes (aveugles et sourds) ?
Seul vos égos de petits dirigeants vous font fermer les yeux et les oreilles sur le réel du tsunami qui se prépare !
Savez-vous que « tant qu’il n’est pas au pouvoir, jamais le fascisme ne montre son vrai visage. Et qu’après il est trop tard »…
Dirigeant de pacotille d’EELV, du P.C.F et du P.S (les responsables de la F.I par leurs interventions ont compris ce qui se tramait et sont à hauteur de l’Histoire, ne cessant d’appeler à l’union[20]), savez-vous que le peuple vous regarde et que vous porterez pour l’Histoire, la trace indélébile d’une « gigantesque farce »:« Hegel fait quelque part cette remarque que tous les grands événements et personnages historiques se répètent pour ainsi dire deux fois. Il a oublié d'ajouter : la première fois comme tragédie, la seconde fois comme farce. » K.Marx / « Le 18 brumaire de Louis Bonaparte / 1851 Depuis sa tombe le spectre revient et vous contemple en souriant dans sa barbe espiègle.
Même les jeunes ont compris l’urgence et l’ardente nécessité.
Ma supplique de militant actif de plus de 50 ans d’activités, en quelques mots : " l’union n’est pas un souhait, un désir, ou même une nécessité, elle s’impose comme condition historique supérieure qui vous surplombe ".
MON APPEL : Quel que soient vos futures décisions n’ayant aucune confiance en vous (confiance, concept du marché), j’appelle à ce que partout en France (dans chaque commune) des « comités locaux de la liberté » se constituent regroupant de manière large des militants syndicaux, politiques, associatifs et des citoyens, en vue de défendre la démocratie. Sachons imposer aux dirigeants de pacotille l’ardente obligation de l’Union.
« Tant qu’il n’est pas au pouvoir, jamais le fascisme ne montre son vrai visage, après, il est trop tard ».
- P.S 1 :Observons que les temps actuels de crise sociale, financière économique et politique renvoie à la période des années 30 avec en plus la crise climatique et écologique. « L’histoire ne se répète pas, elle bégaie » (répétition en pire). - P.S 2 : L’autisme est une maladie involontaire, mais souvent les autistes savent mieux voir et entendre… l’égocentrisme politique est une volonté individuelle qui refuse de voir et d’entendre.
Face à la dérive anti NUPES de Roussel et Chassaigne, des communistes réagissent.
Une tribune est signée par 206 membres du #PCF dont 15 maires et ex-maires, 13 parlementaires et ex, des élu-es municipaux, régionaux, départementaux.
" L'heure est grave, la démocratie vacille. L'heure est à l'union à gauche "
Si certains refusent de parler de problème systémique à propos de violences policières,les réactions collectives venant de policiers, de syndicats de police, et soutenues par la plus haute hiérarchie ne peuvent qu'inquiéter fortement la gauche et au-delà toutes celles et ceux qui sont attachés à la démocratie[19]...
S’il faut en passer par la pure ignominie politique pour défendre l’ordre bourgeois, ainsi sera-t-il.
On savait déjà très exactement où en est le signifiant « républicain » après un communiqué ouvertement raciste et factieux de syndicats policiers d’extrême droite, invoquant comme il se doit « l’ordre républicain » pour lancer la chasse à l’homme, plus précisément à ceux des hommes considérés comme des « nuisibles ». Tout à son habitude de confondre modération et aveuglement, le journal Le Monde avait jugé le communiqué « révélateur de l’exaspération des troupes », là où il aurait plutôt fallu y voir la fascisation caractérisée de l’appareil de force — et en concevoir un chouïa plus d’inquiétude.
Mais jamais Le Monde ne dira un mot de la fascisation en cours : consentir à l’aveu qu’elle se déroule sous les auspices d’un pouvoir qu’il a si longtemps encensé, c’est sans doute trop lui demander. Le Monde peut à la rigueur comprendre le fascisme comme malheureuse irruption venue de nulle part, ou comme curiosité historique sans suite possible, mais jamais n’accédera à l’idée que le fascisme naît « du dedans ». Car notre « dedans », pour Le Monde, c’est « la république » et « la démocratie ». Or comment la république et la démocratie pourraient-elles accoucher du fascisme puisqu’elles en représentent le principe opposé ? Voilà la bouillie qui traîne dans les têtes formées à l’Institut d’Études Politiques, école où l’on n’a notoirement jamais rien compris à ce qu’est la politique....
Le parti pris de cette nouvelle biographie de Robespierre – qui fait sa valeur et son originalité – est le refus revendiqué de toute approche psychologisante, de tout affect et de tout sensationnalisme. Nous voyons ainsi évoluer l'homme parmi ses pairs et ses rivaux, dont beaucoup ont partagé avec lui les mêmes expériences : une enfance difficile, une adolescence studieuse et une réussite sociale, mondaine et littéraire précoce.
A travers ses multiples et successives prises de position politiques, y compris celles qui paraissent mineures, on comprend qu'il s'exprime en réponse aux Danton, Marat, Pétion, Saint-Just, Fabre d'Eglantine, Camille Desmoulins, Hébert, Collot d'Herbois, dans un jeu de bascule permanent, sans pouvoir exercer une quelconque magistrature suprême. Lorsqu'il paraît enfin pouvoir y accéder, il est condamné hors la loi par ses collègues, le 9 thermidor 1794.
En savoir plus Chacun le sait, aucune artère parisienne ne porte le nom de Robespierre, passé à la postérité comme l'archétype du monstre. Sans l'absoudre de rien, sans l'accabler non plus, Jean-Clément Martin explique que cette réputation a été fabriquée par les thermidoriens qui, après l'avoir abattu, voulurent se dédouaner de leur recours à la violence d'Etat : les 10 et 11 thermidor, qui voient l'exécution de Robespierre, de Couthon, de Saint-Just et de près de cent autres, servent en réalité à dénoncer " l'Incorruptible " comme le seul responsable de la " Terreur ". Cette accusation a réécrit l'histoire de la Révolution et s'impose encore à nous.
En historien, l'auteur démonte les mythes et la légende noire pour retrouver l'homme.
Une démonstration sans faille et un livre à l'image de Robespierre : éminemment politique.
Informations sur l’auteur :
Jean-Clément Martin est un historien français, spécialiste de la Révolution française et de la guerre de Vendée. Docteur ès lettres de l'université Paris IV-Sorbonne (1987), il fut professeur d'histoire contemporaine à l'université de Nantes, puis, en 2000, professeur d'histoire de la Révolution française à l'université Paris I-Panthéon-Sorbonne et directeur de l'Institut d'histoire de la Révolution française (CNRS). Depuis 2008, il est professeur émérite à l’Université de Paris I-Panthéon-Sorbonne. Il est membre de la Société des Études robespierristes. Il a dirigé la collection des éditions Geste "en 30 questions".
Il y a un retournement du front républicain, transformé en « front antipopulaire » ?
Une semaine après la mort du jeune Nahel, le chef de file de La France insoumise revient sur la nécessité d’apporter des réponses politiques aux violences policières et à la relégation des quartiers populaires. Et appelle la gauche à « se réveiller » face à l’extrême droite.
Le ton est de nouveau monté, mardi 4 juillet, dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale. Interrogée par la présidente du groupe La France insoumise (LFI), Mathilde Panot, sur l’absence de réponses politiques une semaine après la mort du jeune Nahel, tué à bout portant par un policier, la première ministre s’est encore attaquée au mouvement de Jean-Luc Mélenchon. « Vous sortez du champ républicain », a-t-elle cette fois lancé aux député·es insoumis.
Depuis le drame de Nanterre, les critiques de la droite et de l’extrême droite se sont concentrées sur LFI, gagnant peu à peu les rangs de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes). Le débat sur les violences policières et les quartiers populaires, lui, a été complètement éclipsé. Dans un entretien accordé à Mediapart, Jean-Luc Mélenchon analyse les ressorts de ce basculement, derrière lequel il perçoit l’avènement d’un « front antipopulaire ».
Sources :Médiapart par Mathieu Dejean, Fabien Escalona et Ellen Salvi | mis à jour le 23/08/2023
Mediapart :Cela fait une semaine que Nahel a été tué à bout portant par un policier. Très vite, le débat n’a plus porté sur les violences policières, mais sur celles des jeunes des quartiers populaires. Quel regard portez-vous sur ce basculement ? Jean-Luc Mélenchon :Le président aurait dû répondre, séance tenante, aux problèmes qui ont créé les circonstances de la mort de Nahel, c’est-à-dire immédiatement suspendre cette loi « permis de tuer » Cazeneuve de 2017. Mais comme son intention n’est pas de répondre aux problèmes qui sont ici posés, il en a inventé d’autres. C’est une tactique de diversion.
Il a d’abord pointé la responsabilité des parents – ce qui est un propos insultant, qui manifeste son refus de prendre en compte leur situation sociale. Puis, il a mis en cause les jeux vidéo – ce qui est une assertion digne du café du commerce, car il n’y a aucune étude qui atteste d’un lien entre ces jeux et la violence. Enfin, la majorité nous a pointés, nous, les Insoumis.
Quand j’ai expliqué que nous appelions à la justice, on en a déduit que je n’appelais pas au calme et cela nous a été reproché. Pourtant, nous intervenons sur notre terrain. Nous ne sommes pas des sociologues ou des urbanistes.Notre rôle consiste à formuler une évaluation politique d’un problème politique pour lui apporter des réponses politiques.
Mediapart :Comment jugez-vous celles du pouvoir ? Jean-Luc Mélenchon :Je note que la première réaction de Macron, lorsqu’il a été informé de la mise à mort d’un jeune homme de 17 ans, a été humaine. Comme n’importe quel parent, il a estimé que cet événement était inacceptable, ce qui est vrai. Et il s’est arrêté là, laissant le soin à un ministre d’appeler la mère de Nahel.Il aurait pu l’appeler lui-même ou aller la voir, ce qui aurait été un geste extrêmement fort, pour montrer qu’il n’y avait pas de décrochage entre la population et les autorités.
Au lieu de cela, il a passé son temps à courir derrière la police. Ce qui a été immédiatement compris par les syndicats policiers Alliance et Unsa Police, qui ont produit un communiqué en tous points inacceptable. Or, nous n’avons pas entendu une seule critique. Quand on a interrogé Dupond-Moretti ou d’autres dirigeants, ils ont dit que ce n’était pas leurs paroles, voire qu’ils n’avaient pas de commentaire à faire. Ce qui veut dire que nous sommes plus en danger que nous ne le pensions.
Le président et son gouvernement n’ont toujours pas fait une seule proposition en rapport avec les événements.
L’organisation majoritaire de la police déclare que « l’heure n’est pas à l’action syndicale mais au combat » et même que « les policiers sont au combat car nous sommes en guerre ». Je parle là comme le représentant politique d’une partie de l’opinion des Français, qui se sent menacée par un pouvoir qui se comporte de cette manière face à la population des quartiers populaires. Et qui ne fait rien quand des bandes armées de fascistes viennent dans les rues choper des gamins et les livrer à la police. J’insiste donc : nous sommes en danger car le pouvoir ne contrôle plus la police. Il en a peur. Il lui est soumis.
Voilà la situation au bout d’une semaine. Avec ce constat inouï que le président et son gouvernement n’ont toujours pas fait une seule proposition en rapport avec les événements, à part envoyer 45 000 hommes [chargés du maintien de l’ordre – un chiffre volontairement surestimé par le ministère de l’intérieur, selon Le Canard enchaîné – ndlr] dans tout le pays.Même Jacques Chirac, en 2005, avait tenu un discours qui essayait de préserver un terrain commun, sur lequel les gens de tous bords pouvaient se retrouver.
À l’époque, Claude Dilain, le maire de Clichy-sous-Bois, avait eu cette phrase magnifique au congrès du PS, tenu à la sortie des révoltes urbaines : « Vous souhaitez un retour à la normale, mais c’est la normale qui est insupportable. » Nous savons que la normale est insupportable et que le peuple qui se trouve là la supporte avec un courage et une patience incroyables. La réponse, c’est donc la justice. Autrement dit : le calme, ça se construit.
Mediapart :Vous affirmez que le pouvoir a peur de la police. C’est une parole forte. Est-ce selon vous une situation inédite sous la Ve République ? Jean-Luc Mélenchon :C’est justement une situation similaire qui a donné la Constitution de 1958, car le pouvoir ne contrôlait plus l’armée.Là, il [Ndlr : Macron] ne contrôle plus la police, dont les syndicats majoritaires utilisent des mots directement tirés du répertoire de l’extrême droite, en traitant la population qui lui résiste de « nuisibles ».On avait eu un premier signal d’alerte quand Christophe Castaner s’était prononcé contre les clés d’étranglement. On avait alors été stupéfaits de voir des policiers réclamer que leur soit laissé le droit d’étrangler. À ce moment-là, on avait compris que pour montrer une telle audace, il fallait qu’ils sentent un rapport de force favorable. De fait, M. Castaner y a laissé son ministère.
Mediapart :Comment expliquez-vous qu’il soit devenu impossible d’avoir un discours critique sur la police ? De tout simplement dire qu’il y a un problème de racisme dans la police sans être immédiatement mis au ban de la République ? Jean-Luc Mélenchon :Au point de départ,il y a une confrontation de deux visions du monde et des rapports sociaux : l’extrême droite et les Insoumis.Ceux qui partageaient la doctrine économique du libéralisme se sont retrouvés face à une population qui résistait massivement à leur politique. Ils ont alors accepté le discours de diversion de l’extrême droite, prétendant que le problème c’est l’immigré, et même le musulman, afin d’introduire une coupure dans la population française. Ce faisant, ils ont dévalé la pente. C’est le destin promis à quiconque cède un mètre de terrain à l’extrême droite.
Il y a eu un retournement du front républicain, transformé en “ front antipopulaire ”.
Cette évolution vers le pire se traduit politiquement par ce que les économistes Bruno Amable et Stefano Palombarini appellent le « bloc bourgeois ». On a bien vu au second tour des législatives que le pouvoir considérait que le pire, ce n’était pas l’extrême droite mais nous. Puis, il y a eu le tournant de l’élection partielle en Ariège, où une candidate insoumise, arrivée nettement en tête au premier tour, a vu tous les autres se mettre d’accord pour la battre au second. Aussitôt, nous avons entendu Jean-Pierre Raffarin affirmer qu’un front républicain à l’envers s’était constitué[1]. Et en effet, il y a eu un retournement du front républicain, transformé en « front antipopulaire ».
J’utilise cette expression, car elle rappelle la situation de 1936, lorsque tous les autres s’étaient mis d’accord contre le Front populaire, selon le slogan « mieux vaut Hitler que le Front populaire ».La formation de ce front antipopulaire est une porte ouverte à la catastrophe pour notre pays.
Mediapart :Vous et le mouvement LFI avez cristallisé les critiques. Vos détracteurs vous excluent de l’arc républicain. Comment comptez-vous briser cet isolement ? Jean-Luc Mélenchon :D’abord, on ne se sent pas isolés. Nous représentons un secteur de la population. Notre ciblage n’est en fait qu’un prétexte à une autre visée politique, à savoir l’unification des droites. Le défi qui nous est posé, c’est de ne jamais mettre à distance les milieux sociaux que l’on représente, même quand ils ont des contradictions – parce que ça ne fait plaisir à personne que des voitures brûlent. Nous devons empêcher qu’une partie de notre bloc bascule du côté du parti de la répression. Pour cela, il faut continuer d’être l’expression politique de ce bloc, même quand c’est difficile. La justice partout est sa cause commune !
De toute façon, aucune propagande n’effacera les données du problème.
Premièrement,les quartiers populaires ont été mis au ban de la République, avec des populations racisées par le regard des autres, assignées à résidence et à religion, qui bénéficient de moins d’argent, de transports et d’offre médicale que les autres.
Deuxièmement, les riches ont fait sécession. Ils se sont réfugiés dans leurs quartiers avec une vision fantasmée du reste de la société. De manière générale, tout ce qui était de l’ordre de la mise en commun disparaît, avec pour résultat « chacun chez soi ».
Mediapart : Vous évoquez « les riches », mais les comportements de sécession sociale peuvent aussi toucher les classes moyennes… Jean-Luc Mélenchon :Parlons-en. Déjà dans les années 1930, les classes moyennes représentaient un enjeu électoral. Elles étaient plus hétérogènes qu’aujourd’hui, avec beaucoup de boutiquiers et de paysans. La droite opposait le sort de ces groupes à celui des ouvriers, dans son combat contre le Front populaire. Aujourd’hui, on fait face à un milieu plus homogène qu’à cette époque, en raison d’une communauté matérielle de fait dans la dépendance aux réseaux.
Regardons de plus près. Pour que la stratégie de centre-gauche fonctionne, comme dans les années 1970, il faut des classes moyennes ascendantes.Quand j’étais adhérent socialiste à Lons-le-Saunier [dans le Jura – ndlr], ma secrétaire de section était une assistante sociale, mon premier secrétaire fédéral était un maître de conférences à la faculté. Qui étaient ces gens-là ? Des enfants d’ouvriers syndiqués, en ascension sociale et communiant dans des mots d’ordre transversaux, comme celui de l’autogestion.
La différence, c’est qu’aujourd’hui les classes moyennes ne sont plus ascendantes. Elles sont appauvries et en voie de déclassement. Leur rapport à la politique est déterminé par une incertitude : dans la polarisation sociale, de quel côté vont-elles aller ? Là, en ce moment, elles penchent vers le retour au calme. Dans huit jours, cependant, vous aurez une avalanche de documents, d’articles, de tribunes sur les conditions de vie dans les banlieues.À ce moment-là, je pense que les classes moyennes « sachantes » et éduquées vont reprendre leur sang-froid, et seront convaincues qu’il n’y a pas de solution policière à une situation pareille.
Mediapart : Quelle stratégie politique adopter dans une arène médiatique hystérisée et binarisée ? Vous avez pour principe de ne jamais reculer sur vos prises de position, mais n’est-ce pas prendre le risque de devoir vous justifier sans cesse sur la forme, au détriment du fond ? Jean-Luc Mélenchon :Je vous rappelle que nous ne vendons pas des glaces.Nous appartenons à un camp politique, on ne peut pas marchander nos convictions. Et c’est la condition pour être entendus ensuite.
Si nous ne tenons pas bon, qui va le faire ?
De qui gagnerait-on la sympathie en cédant ? Des gens qui s’affolent ? De ceux qui ont peur ? Il faudrait alimenter celle-ci ? Non.
Notre devoir est de tenir bon. À cet égard, je suis formidablement et agréablement surpris par la capacité de résistance du groupe parlementaire des Insoumis. Beaucoup ont été élus pour la première fois de leur vie. Ils ont à peine un an d’Assemblée nationale, avec des reproches constants à supporter.
À chaque étape, à chaque pas, on dit quelque chose à quelqu’un qui se sent plus digne, plus fort.
Nous ne perdons pas de temps à nous expliquer sur la forme, car de forme il n’y en a pas : c’est une pure invention.Aucun d’entre nous n’a appelé à l’insurrection ou à mettre le feu. En revanche, quand je vais à la télévision et que je raconte la situation des mères qui ont du mal à faire face, je suis entendu par des milliers de femmes qui sont la substance du quartier populaire. À chaque étape, à chaque pas, on dit quelque chose à quelqu’un qui se sent plus digne, plus fort.
Mediapart : Revenons à la mort de Nahel. Le gouvernement de Bernard Cazeneuve et François Hollande a fait voter en février 2017 une loi permettant un usage facilité des armes à feu pour les forces de l’ordre. Tout le groupe PS avait voté pour. Est-ce possible aujourd’hui pour la Nupes d’avoir une position commune pour son abrogation ? Jean-Luc Mélenchon :Vous avez raison de pointer cette loi[2]. Ç’eût été le bon sens élémentaire de la suspendre après la mort d’un enfant. Le signal que recevrait la police, c’est : on ne tire plus. En légitime défense, personne n’a jamais discuté du fait qu’ils se servent de leurs armes. Ils le savent. Mais je suis toujours pour limiter la casse.J’avais ainsi été conduit à dire qu’il faut les désarmer pour encadrer les manifestations. Nous défendons aussi le dépaysement immédiat de toute affaire de violences policières, ce qui est une revendication du Syndicat de la magistrature, et la création d’une commission « Vérité et justice ». Nous en avons besoin, car il y a un grand nombre d’affaires où il n’y a pas encore de décision de justice.
Venons à celles et ceux qui ont voté cette loi. Pour commencer, ni les Verts ni les communistes ne l’ont fait – c’est un bon début. Quant aux socialistes, leur groupe à l’Assemblée a fait un communiqué qui dit ceci : « Parce que nous sommes attachés à l’ordre républicain, [...] nous le disons clairement : il faut urgemment redéfinir une doctrine de maintien de l’ordre, travailler à une réforme de la formation des policiers, à une refonte des autorités de contrôle et de sanction de nos forces de l’ordre, mais aussi à une nécessaire évaluation de l’application de la loi de 2017, en vue de la réviser. » Ils veulent donc la réviser, c’est mieux que rien. Quel besoin d’aller ensuite dire qu’ils ont une divergence fondamentale avec moi ? De quoi parlent-ils ?
Mediapart : Juste après la mort de Nahel, vous avez dit que la police devait être « entièrement refondée ». Qu’est-ce que ça veut dire concrètement ? Et que répondez-vous à toutes celles et ceux qui, à gauche, estiment que la police sera toujours une force de répression au service de l’État ? Jean-Luc Mélenchon :Il y a besoin d’une police dans toutes les sociétés, c’est l’évidence depuis que les villes existent. Je ne pense pas qu’on se passera de la nécessité de faire appliquer la loi par des gens qui représentent l’État. Pourquoi ? Parce qu’on ne veut pas que tout le monde s’en mêle. Il y a une police, pour que tout le monde ne la fasse pas, et parce qu’il faut la faire bien. C’est donc un métier et une délégation de pouvoir qui doivent rester sous étroit contrôle politique.Traditionnellement, les grandes forteresses de l’État sont cogérées. Le ministre de l’intérieur compose avec les syndicats de police.Mais entre composer et lui donner le pouvoir, il y a une marge !
Les enquêtes démontrent que près de 50 % des policiers votent à l’extrême droite[3]. Comment se fait-il que le corps chargé du maintien de l’ordre républicain ait majoritairement comme opinion des idées qui ne le sont pas ? Qu’est-ce qui fait qu’un homme de 24 ans tire sur un gamin ? Ou sur une jeune femme ? C’est parce qu’il n’y voit pas son frère ou sa copine.Je ne dis pas qu’ils tirent par racisme, mais leur racisme leur fait oublier sur qui ils sont en train de tirer. C’est ma conviction.
Il faut donc refonder la police, en commençant par la formation, la reprise en main de l’encadrement, le rétablissement du code de déontologie de Pierre Joxe... Je vous rappelle d’ailleurs que lorsque celui-ci était ministre de l’intérieur et que des policiers sont venus manifester en armes sous ses fenêtres, il en a mis à pied cent vingt, et exclu quatre. Je vous garantis qu’après cela il y avait une ambiance de travail. Les revendications, oui, c’est la vie syndicale.Mais le syndicat qui écrit « nous sommes en guerre », ce devrait être une mise à pied directe.
Mediapart : Vous avez évolué sur les questions d’islamophobie. Peut-on dire la même chose à l’égard de la violence en politique ? Jean-Luc Mélenchon : Par rapport à mes 20 ans, incontestablement. À 20 ans, j’étais un admirateur de la guerre de guérilla du Che. Ensuite, après le coup d’État de Pinochet, j’étais d’accord avec ceux qui faisaient de la résistance armée. Et puis, j’ai fait le bilan de tout ça : avons-nous eu un résultat significatif où que ce soit, d’une quelconque manière ? Non, et les meilleurs sont morts.
Je pense définitivement que la violence comme stratégie politique ne mène nulle part.Non parce que je serais une espèce de saint que la violence effraierait, mais parce que ça ne mène qu’à des désastres. Je prône les stratégies non violentes. La seule stratégie révolutionnaire, c’est le vote.
Mediapart : Comment expliquez-vous alors qu’on vous accuse d’être du côté de la violence ? Jean-Luc Mélenchon :Nous devons passer notre temps à nous défendre d’être des violents, alors que c’est le pouvoir qui institutionnalise la violence. Par ailleurs, il y a aussi une dérive sémantique du vocabulaire.Quand j’entends Macron parler de « décivilisation », ça me fait peur. Même lorsqu’on parle d’émeutes, par habitude de langage, cela suggère que c’est un truc fou et aveugle, alors qu’on voit bien que les choses sont plus compliquées.Nous sommes dans une situation de révoltes urbaines.Elles prennent des formes qui épousent le terrain.
Mediapart : Justement, vous insistez beaucoup sur le fait urbain dans votre ouvrage « L’Ère du peuple ». En 1989, déjà, le texte fondateur de la Nouvelle école socialiste théorisait le concept de « social-démocratie urbaine ». Comment les habitant·es des quartiers populaires peuvent-ils reprendre le contrôle collectif sur cet espace ?
Jean-Luc Mélenchon : Mon idée, à l’époque, c’était qu’avec l’urbanisation du monde, les nouvelles organisations progressistes, socialistes et collectivistes naîtraient de la structure urbaine et pas dans les entreprises. La ville n’est pas un décor, elle correspond à son époque. Logiquement, elle a accompagné les diverses mutations du capitalisme.
Sous l’ère fordiste et keynésienne, on avait découpé la ville en morceaux : l’endroit où l’on habite, l’endroit où l’on va se balader, l’endroit où l’on mange, etc.Mais c’était une ville de contrat social, dans laquelle tout le monde vivait ensemble.Puis, on est passé à la ville néolibérale, marquée par une dynamique de gentrification.Aujourd’hui, dans Paris, si vous êtes une famille et que vous n’avez pas 5 000 euros à deux, vous ne pouvez pas y arriver.
La ville produit aussi des formes politiques spécifiques.Lorsque ses habitants sont sans ressources, ils entrent dans des phases de révolte qui sont des éruptions. Il n’y a plus de médiation pour que ça se traduise dans des formes où un compromis soit possible. La ville n’en est pas moins le nouveau terrain de la conflictualité sociale, parce que pour produire et reproduire votre existence matérielle, vous avez besoin des réseaux. Et avec un réseau, on ne négocie pas. L’eau du robinet coule ou elle ne coule pas. Il y a de l’électricité ou il n’y en a pas.
J’appelle chacun à surmonter l’esprit de clan, afin de se mettre à la hauteur des événements.
Mediapart :La coupure de la classe politique avec des quartiers populaires ne date pas d’hier. Jusqu’où la faites-vous remonter et comment renouer le lien entre les habitant·es de ces quartiers et les structures politiques ? Jean-Luc Mélenchon :Cette rupture dépend du rapport de force social. Depuis toujours, les possédants répètent que les classes sociales soumises et opprimées sont dangereuses. Pendant la Commune de Paris, Émile Zola s’en va en disant : « C’est une cause merveilleuse mais elle est mal représentée. »
Quand les syndicats ont perdu leur puissance, détruite par le néolibéralisme, il n’y a plus eu de ligne de résistance sociale et politique. Les partis au pouvoir n’allaient pas donner raison à ceux qui protestaient contre leur gestion, c’est-à-dire les quartiers populaires. L’ultime ligne de défense que nous avions, c’étaient les associations, et elles ont aussi été démontées. On a laissé des millions de gens désarmés. Et le discours des dominants continue : les révoltes sont de la faute des révoltés. Il n’y a absolument rien de nouveau sous le soleil depuis un siècle.
Les Insoumis disposent de 4 000 référents d’immeuble. Il n’y a pas une seule autre organisation qui fasse ça. On est encore loin du compte,il nous en faudrait 4 à 5 fois plus. Il y a aussi la représentation politique. C’est-à-dire faire élire Rachel Keke, Carlos Martens Bilongo, ou Louis Boyard, qui vient lui aussi d’un quartier populaire. Donc, le problème est posé et on essaie d’y répondre.
Mais je considère que c’est la restructuration sociale qui produira sa propre représentation politique. La loi prévoit déjà que les villes de plus de 20 000 habitants doivent faire des comités de quartier. Mais dans combien de villes y en a-t-il vraiment ? À partir du moment où vous avez des immensités urbaines, sans bords, sans limites, il est évident que la question de la gestion se pose différemment, et que la bonne échelle, c’est le quartier.
Mediapart :Le mouvement social contre la réforme des retraites a subi une défaite, on voit l’agenda sécuritaire s’imposer et plusieurs responsables politiques parler comme l’extrême droite. Quelles initiatives concrètes la gauche doit-elle lancer pour ne pas subir cet agenda mortifère ? Jean-Luc Mélenchon :Il faut d’abord que la gauche existe.En politique, nous avons réussi à surmonter la division – au prix de nombreuses difficultés – en proposant la coalition Nupes pour les élections législatives. Mais ça ne suffit pas. La stratégie, c’est l’union populaire[4], pas seulement l’union des partis politiques.L’union populaire, c’est un objectif qui s’adresse à la masse et qui transite aussi par des formes organisées. On l’a vu pendant la bataille des retraites, nous n’avons toujours pas surmonté l’absurde division entre forces sociales et forces politiques. Naturellement, nos adversaires profitent à 100 % de la situation : ils opposent les syndicats aux organisations politiques, puis les organisations politiques entre elles.
Après une semaine de révoltes et sans aucune réponse du pouvoir, sommes-nous capables d’appeler ensemble à une mobilisation ? Pouvons-nous porter des mots d’ordre communs comme « la vérité et la justice » ? Les marches de samedi y répondent [un appel collectif au rassemblement a été lancé pour le 8 juillet – ndlr]. Cela préfigure bien l’union populaire.
Les discussions ont lieu, on fait ce qu’on peut, mais nos adversaires sont très habiles : en me diabolisant, ils essaient de me rendre infréquentable.Ma personne n’est pas le sujet. C’est pourquoij’appelle chacun à surmonter l’esprit de clan, de chapelle et de groupe, afin de se mettre à la hauteur des événements. Quand vous avez des fachos dans la rue, il est quand même temps de se réveiller, non ? Il faut être capable d’y opposer un front non violent, mais qui, pour être efficace, doit être dix fois, cent fois plus massif que celui des violents.
----------------------------
La révolte des quartiers est une lutte de classes
Retrouvez l'intervention de Jean-Luc Mélenchon à l'occasion de l'observatoire politique de La France insoumise ne juillet 2023.
« La mort de Nahel, c’est l’étincelle » : les raisons de la colère[3]...
Le champ journalistique est devenu 1 espace de non – pensée où l’émotion se substitue au raisonnement. La recherche d’un bouc émissaire, la vindicte accusatoire, l’injonction normative fondée sur 1 morale de charlatans occupe tout l’espace.
Il faut donc faire appel à des médias alternatifs où la pensée reste possible pour analyser les révoltes de banlieue d’hier et d’aujourd’hui.
Pourquoi les " jeunes " de banlieue " brûlent tout ? "
Il y a une semaine, le jeune Nahel, 17 ans, a été exécuté par un policier[1] qui a tiré à bout portant à la suite d’un contrôle routier. Mais plus personne ne parle de cet acte criminel dont s’est pourtant rendu coupable un individu dépositaire de l’autorité publique. Et pour cause, les politiques et leurs relais médiatiques ont désigné d’autres coupables : les émeutiers. Les révoltes populaires qui ont suivi la mort de Nahel sont comme venus au secours d’une police gangrenée par la violence et le racisme qui n’a plus à répondre de ses actes[2]. Car débattre de la problématique des violences policières dans les quartiers populaires, c’est questionner la responsabilité de l’Etat. Et ça, l'État s’y refuse. Alors on nous abreuve d’images d’émeutes, de pillages et de guérilla urbaine auxquelles prend part une jeunesse insubordonnée, racisée et qui plongerait le pays dans le chaos.
Qui est responsable de cette violence ? Vous serez tenté de répondre que c’est le policier qui a appuyé sur la gâchette ? Eh bien non, ce sont les réseaux sociaux, les jeux vidéos et les parents qui ne remplissent pas leur rôle. À la désenfantilisation et diabolisation des jeunes des quartiers populaires, s’ajoute la criminalisation de leurs parents qui encourront 2 ans de prison ferme et 30 000 euros d’amende. C’est par la culpabilisation, la fermeté, l’ordre et la répression que la Macronie, et les gouvernements avant lui, règle la question des inégalités, du désoeuvrement, de la précarité, de la marginalisation, de la déscolarisation, du chômage, du racisme, des discriminations à l’embauche et au logement qui plongent les quartiers populaires dans le désespoir et la révolte.
À la fuite et l’analyse superficielle, on a envie de poser les vraies questions.
Pourquoi le scénario de déclenchement des révoltes dans les banlieues françaises est-il toujours la mort, d’une jeune de cité, entre les mains de la police ?
Pourquoi les jeunes des quartiers populaires ont peur et s’enfuient quand ils voient la police ?
Pourquoi ces adolescents et jeunes majeurs brûlent-ils leurs écoles, leurs commerces, leurs gymnases, en somme leurs lieux de vie ?
Pourquoi en viennent-ils à faire du mal, à se faire du mal et à détruire ce qu’ils aiment ? Pourquoi ces jeunes, issus de l’immigration post coloniale, finissent pas s'auto saboter ?
Et au-delà des inégalités, est-ce que cette violence d'aujourd'hui est liée à la violence de la colonisation d’hier ?
Ces questions on a choisi de les poser à Malika Mansouri. Elle est psychologue, psychanalyste, professeure des universités et auteure de " Révoltes postcoloniales au coeur de l’Hexagone ", un ouvrage tiré de sa thèse qui donne la parole à ceux qui ne parlent pas ou peu : les enfants révoltés.
A LIRE : Révoltes postcoloniales au cœur de l’Hexagone Voix d’adolescents Par Malika Mansouri
Au temps de son empire colonial, la France s'était affranchie de sa devise républicaine : Liberté, Égalité, Fraternité, en la rendant sélective. Aujourd'hui, lorsque la mort frappe un adolescent des quartiers de banlieues au cours d'un de ces nombreux et récurrents contrôles policiers, la détresse atteint des sommets, le désamour de la société s'affiche comme radical et irréversible. Ces drames itératifs et impunis sont vécus comme les répliques d'une ancestrale violence policière qui s'enracinent dans l'univers chaotique d'un espace-temps élargi, diluant l'atmosphère du présent dans celle du passé. Dans ces circonstances, chaque nouvelle disparition incarne celle d'un ancêtre dont la mort réelle et/ou subjective n'a pas été réparée. Ce réel d'aujourd'hui se télescopant aux événements déniés du passé colonial, il se forme au cœur de cet héritage d'indignité les ferments d'une révolte dont le déchaînement pulsionnel qualifié « émeutes » explosera sur la scène française en 2005...
Et pourHenri Leclerc, avocat : " Refus d’obtempérer : « La loi de 2017 a presque été interprétée comme un permis de tuer », alerte Henri Leclerc"
Invité de la matinale de public Sénat, Henri Leclerc, le président d’honneur de la Ligue des Droits de l’Homme, est revenu sur les heurts des dernières nuits, survenus après la mort du jeune Nahel à Nanterre ce 27 juin. L’ancien avocat y voit une manifestation de solidarité, et appelle à réformer la loi de 2017 sur l’usage des armes, « interprétée » par les policiers « presque comme un permis de tuer. »
La révolte des quartiers est une lutte de classes
Retrouvez l'intervention de Jean-Luc Mélenchon à l'occasion de l'observatoire politique de La France insoumise ne juillet 2023.
Le principal problème du fret ferroviaire ne vient pas d’un manque d’innovation mais bien de la concurrence avec le transport routier...
Fret ferroviaire, la Suisse pionnière : " La route crée des coûts à la société, nous lui demandons de participer ", un exemple pour la France[9]?
Bruxelles et Macron main dans la main pour liquider le fret ferroviaire public[a] avec préméditation et l'aide du cabinet McKINSEY[12] !
Le 22 octobre 2021, le premier ministre inaugurait en grande pompe la reprise du train des primeurs : le Perpignan-Rungis. Après deux ans de suspension, ce retour fait écho aux mesures annoncées le 27 juillet pour relancer le fret ferroviaire. Cette initiative semble pourtant déjà s’inscrire dans une longue liste de plans de relance qui n’ont pas donné les effets escomptés. Alors, comment expliquer ce déclin du fret ferroviaire ?
Mai 2023, fret SNCF : 500 emplois supprimés et 20 % de l’activité cédée à la concurrence. Sous la menace d’une liquidation après une enquête approfondie de la Commission européenne, la filiale Fret de la SNCF va être restructurée en profondeur. Les syndicats dénoncent des mesures « inacceptables »[b].
En 1950 les deux tiers des marchandises sont transportées par le rail.
En 1827, la première ligne de chemin de fer ne transportait pas des voyageurs mais des marchandises. Avec seulement 18 kilomètres de voies, la ligne de Saint-Étienne à Andrézieux, tractée par des chevaux, servait à transporter de la houille depuis le port fluvial. Le transport de marchandises par train s’est ensuite développé de manière exponentielle au travers de compagnies privées. En 1882, la France possède alors la plus forte densité de chemin de fer au monde avec 26 000 km de voies. Les marchandises sont échangées dans des halles adjacentes aux gares, avant que le trafic ne soit peu à peu séparé des voyageurs.
En 1938, la création de la SNCF unifie le réseau. Il y a alors 6 500 embranchements jusqu’aux entreprises (les ITE) et plus de 42 500 km de voies. Cette situation continue dans l’après-guerre : en 1950 les deux tiers des marchandises sont transportées par le rail et c’est le transport de marchandises qui fait vivre la SNCF. Alors que les frontières entre cheminots du service voyageur et du service fret ne sont pas établies, on estime que 200 000 d’entre eux travaillent directement ou indirectement dans le transport de marchandises. Pourtant, la concurrence avec la route a déjà commencé. Les camions se multiplient et, en 1984, le ferroviaire ne représente déjà plus que 30% du transport de marchandises[1]. La baisse est brutale : ce chiffre passe à 20% en 1990, puis 17% en 2000 et 9% en 2010.
Aujourd’hui, il reste moins de 5 000 cheminots au service de SNCF Fret et seulement 32 milliards de tonnes-kilomètres[2] sont transportées sur les voies ferroviaires contre 317,3 milliards de tonnes-kilomètres sur les routes.
Le fonctionnement du fret ferroviaire Pour expliquer cette baisse, il faut d’abord comprendre comment fonctionne le fret ferroviaire.
En France, les trains de marchandises circulent le plus souvent sur le même réseau que les trains de voyageurs.
Ils occupent donc des sillons horaires de la même manière que les autres trains. Ces sillons sont des laps de temps durant lesquels les trains utilisent une infrastructure donnée (aiguillage, gare, voie ferrée). Ils sont gérés par un gestionnaire de réseau qui les facture au travers de péages ferroviaires.
Pour le transport de marchandises, il existe deux types de trains.
Le premier est le train massif qui transporte d’un point à un autre des marchandises sans réorganisation du convoi. Il peut s’agir par exemple d’un train au départ d’une usine agro-alimentaire qui va directement à une autre de transformation.
Le second est le train de lotissement. Il est composé de wagons isolés qui doivent être réorganisés dans une gare de triage pour aller dans des directions différentes. Ce serait par exemple le cas d’une usine de voiture en Bretagne qui doit envoyer la moitié de ses wagons dans le Nord et l’autre moitié en Alsace. Le train s’arrête alors dans une gare de triage où les wagons sont remaniés avec d’autres wagons qui vont dans la même direction afin de former un train complet.
Pour les marchandises ne faisant qu’une partie de leur trajet en train, le reste étant effectué par voie maritime ou routière, il existe des terminaux de transport combiné.
Il peut s’agir de conteneurs récupérés dans un port et qui sont ensuite déposés sur des wagons. Le transport combiné peut également avoir lieu entre le rail et la route avec la prise en charge de la remorque du camion ou du camion entier avec sa cabine (dans ce cas, il s’agit de ferroutage).
Enfin, si les trains sont chargés dans des terminaux gérés par la SNCF, certaines voies desservent directement des entreprises, usines ou entrepôts particuliers, on parle alors d’installation terminale embranchée (ITE) ou d’embranchement particulier.
Il existe une autre spécificité : les Opérateurs Ferroviaires de Proximité[3] (OFP). Ces entreprises(NDLR : privées) gèrent une petite partie du réseau ferroviaire avec leurs propres matériels. Au port de La Rochelle par exemple, un OFP se charge des activités ferroviaires sur le port[4]. Ces OFP peuvent soit gérer de manière étanche un réseau entre différents terminaux soit le gérer jusqu’au réseau SNCF où un autre opérateur ferroviaire prend le relais pour des plus longues distances.
Un déclin plus marqué que chez nos voisins Le fret français transportait 57,7 milliards de tonnes-kilomètres en 1984, contre 32 milliards de tonnes-kilomètres en 2018. Cette diminution est également visible dans le mix modal du transport de marchandises :en 34 ans, la part du ferroviaire dans le transport de marchandises a diminué de 70%.
Si la situation est assez inquiétante dans toute l’Europe, le sort de la France est plus dramatique que celui de ses voisins.
En Allemagne, le trafic de fret ferroviaire a connu une hausse de 50% entre 2003 et 2018[5].
La dynamique est aussi positive en Autriche, en Suède, en Suisse et de manière plus nuancée en Italie.
Si l’Espagne et le Royaume Uni ont, comme la France, subi une diminution de leurs volumes transportés par le fret ferroviaire (environ -10% pour les deux depuis 2003),seule la France connaît une chute aussi importante.
Ainsi, alors que les trafics allemands et français étaient équivalents dans les années 1990,le trafic français est aujourd’hui quatre fois moindre que celui de l’autre côté du Rhin. Enfin, alors que la part moyenne du fret ferroviaire dans le transport de marchandise en Europe est de 18%, cette même valeur se situe en France dix points en deçà, à 9%.
Qui a tué le fret ? On peut trouver trois explications au déclin du fret ferroviaire.
1 - Tout d’abord, il faut prendre en compte la situation industrielle et portuaire.
La désindustrialisation a diminué de manière importante les marchandises à transporter sur de longues distances à l’intérieur du pays avec, par exemple, la fin des exploitations minières.
2 - D’autre part, la France n’arrive pas à capter une part importante du trafic maritime international sur ses ports.
Le tonnage de l’ensemble des ports français équivaut aujourd’hui au seul port de Rotterdam aux Pays-Bas. Anvers en Belgique est parfois même qualifiée de premier port français, une particularité surprenante vue la taille de la façade maritime de l’Hexagone, son positionnement stratégique et le nombre de ports prêts à accueillir des marchandises comme Marseille, Le Havre ou Saint-Nazaire. À cette situation s’ajoute une mauvaise liaison entre les ports français et les voies ferrées. Alors qu’à Hambourg près d’un tiers des marchandises transitent par le rail, seules 10% des marchandises dans les ports français font de même.
3 - La concurrence de la route met aussi à mal le fret ferroviaire.
Le transport routier présente pour les entreprises de nombreux avantages : fiable, peu coûteux, les transporteurs y bénéficient également d’un réseau très dense permettant de desservir directement tout le pays. De plus, l’arrivée d’entreprises de transports routiers d’autres États membres de l’UE permet aux transporteurs d’utiliser de la main-d’œuvre étrangère avec des prétentions et des droits salariaux moindre que ceux attendus normalement en France.
Pourtant ces différents facteurs n’expliquent pas l’ensemble du déclin du fret ferroviaire. La situation dans des pays comme l’Espagne, l’Italie ou le Royaume-Uni montre que malgré la désindustrialisation et l’émergence du transport routier, le fret ferroviaire peut persister et maintenir une part de marché plus importante que celle que nous connaissons en France. De plus,le fret ferroviaire demeure moins coûteux que le transport par camion sur les longues distances. Un kilomètre avec un camion de 40 tonnes coûtait ainsi 1,20 euro en 2007 contre 0,51 euro pour un train de 1 800 tonnes ramené au même poids[6].
La violente libéralisation et mise en concurrence voulue par Bruxelles est également responsable de ce déclin.
En 1991, l’Union européenne impose une première réforme ferroviaire exigeant la séparation entre l’exploitation des lignes (pour le transport voyageur et fret) et la gestion de celles-ci. Cette réforme donne lieu à la création, en 1997, de Réseau Ferré de France (RFF), le gestionnaire des infrastructures ferroviaires. Pour se financer, RFF dispose des revenus des péages ferroviaires, ce qui représente en parallèle un nouveau coût pour les exploitants (même s’ils en payaient déjà indirectement une partie).
Au cours des années 2000, sous la pression des gouvernements et de l’UE, la séparation entre les activités fret et voyageurs à la SNCF est renforcée. L’objectif ? Que l’État et les collectivités territoriales évitent de financer le fret avec des subventions à destination des services voyageurs (comme les TER).
Cette évolution entraîne un dédoublement des postes auparavant mutualisés, ce qui augmente les coûts d’exploitation.
Dans la même période,l’Union européenne, qui ne jure que par le culte du «marché libre et non faussé»,interdit aux États de financer leurs activités de fret, une situation d’autant plus compliquée en France que le service fret de la SNCF n’est plus équilibré budgétairement depuis 1998.
En 2004, face à la dette du fret ferroviaire, l’État obtient la permission de l’Union européenne de le recapitaliser à hauteur de 800 millions d’euros (qui s’ajoutent aux 700 millions apportés par la SNCF),en contrepartie de quoi,la France ne doit plus refinancer le fret pendant 10 ans et doit ouvrir cette activité à la concurrence(2005 pour les lignes avec l’étranger puis 2006 sur les lignes intérieures).
L’ouverture à la concurrence de ce « deuxième paquet ferroviaire » est une véritable saignée pour le fret SNCF.Si celle-ci garde la majorité des parts du marché ferroviaire,les opérateurs étrangers vont prendre en charge les trains massifs plus rentables et laisser les wagons isolés, plus coûteux, à la SNCF.
Face à un tel déséquilibre, la crise du fret s’accentue et, deux plans de relance se succèdent en 2004 et en 2007(plans Véron et Marembaud), tentant de limiter les pertes en abandonnant les dessertes de wagons isolés les moins rentables, menant à une baisse directe du volume transporté et des effectifs cheminots.
En 2008, alors qu’il reste moins de 10 000 cheminots dans le fret, la SNCF achète GEODIS, un transporteur routier, et instaure de facto la concurrence au sein même de l’entreprise. La même année, la crise économique frappe de plein fouet le fret ferroviaire (NDLR : la SNCF détenait déjà 42,37% de Geodis, mais le rachat de Géodis par la SNCF s'est effectivement fait en 2008 et a versé 600 millions d'euros pour racheter le reste[6bis]).
Les plans s’enchaînent sans enrayer la crise. Les liaisons avec des wagons isolés sont restreintes et les Installations Terminales Embranchées[7] (ITE) qui constituent un enjeu stratégique pour le développement du fret ferroviaire français fermées(4 535 en 2002, 1 400 en 2015).
En 2012, alors qu’un tiers du fret est assuré par des opérateurs extérieurs, la SNCF assure encore 400 trains de wagons isolés par semaine. Malgré cette saignée, la Cour des comptes demande en 2017 une nouvelle réduction du nombre de wagons isolés et la cession d’une partie de la flotte de locomotives.
Un an plus tard,le rapport Spinetta demande la recapitalisation et la filialisation du fret ferroviaire. Cette même année, Fret SNCF supprime 754 postes et se fixe comme objectif de restreindre à 4 724 les effectifs en 2021.
Enfin en 2020, à la suite de la réforme du ferroviaire, FRET SNCF devient une Société par Action Simplifiée, prélude à une cession du capital, c’est-à-dire une privatisation.
Le plan Castex, une nouvelle tentative de sauvegarde du fret Le 27 juillet 2021, un énième plan en faveur du fret ferroviaire a été présenté par le Premier ministre, qui a annoncé vouloir s’appuyer sur le développement d’autoroutes ferroviaires, des transports combinés et a garanti la gratuité des péages ferroviaires pour 2020 et la division par deux de leurs prix pour le fret en 2021. A ces annonces s’ajoute une recapitalisation de 150 millions d’euros.
Cette subvention prouve que la libéralisation du fret ferroviaire est un échec.Elle va toutefois permettre à Fret SNCF de repasser dans le vert temporairement. Les syndicats de cheminots s’amusent à dire que cette même subvention, en 2000, aurait permis, au fret, qui transportait alors 17% du trafic de marchandise avec 10 000 cheminots, d’être excédentaire. Désormais, cet argent va uniquement permettre à Fret SNCF de maintenir son trafic actuel,et non d’investir dans les infrastructures.
Une autre annonce concerne les autoroutes ferroviaires.Il nous faut ici expliquer ce terme. On le sait, le transport combiné est composé d’une partie du trajet en camion et une autre en train à partir d’un terminal de transport combiné. L’autoroute ferroviaire allie le transport combiné avec d’importants corridors qui traversent la France et s’inscrivent dans une logique européenne.Ce système, déjà mis en avant par les plans de relance Véron, Marambaud et Nadal, a pourtant de sérieuses limites.
Comme son nom l’indique, il ne relie que peu de points de dessertes et montre donc assez peu de flexibilité.
De plus, le transport combiné s’appuie sur un simple ferroutage : on met un camion sur un wagon. Une technique bien moins économique que le remplissage d’un wagon standardisé. L’annonce de Jean Castex, qui s’appuie déjà sur de précédents projets d’autoroutes, ne peut donc pas entraîner un report massif vers le fret ferroviaire. Et pour cause, en France, 63% du transport de marchandises concerne le trafic intérieur. Comme le dit Laurent Brun, secrétaire général de la CGT Cheminot, « Les autoroutes ne servent à rien sans routes départementales et communales ! »
Un intérêt écologique, mais des entreprises sceptiques Si les plans de sauvetage ou de relance du fret ferroviaire ont pour l’instant tous échoué,la demande citoyenne d’une relance est très présente, notamment pour des raisons écologiques.Le transport routier, aujourd’hui largement majoritaire en France, est à l’origine d’une forte pollution atmosphérique.En 2018, il génère à lui seul 28,6% des gaz à effet de serre (en équivalent CO2), contre 21,3% en 1990. Au sein des transports routiers, les poids lourds représentent en 2018 un quart des émissions (41,3% si on y inclut les véhicules utilitaires).L’ensemble du transport ferroviaire ne représente quant à lui que 0,1% des gaz à effet de serre.
Selon le rapport Bain, le transport routier émet en France 82 grammes de CO2 par tonne-kilomètre (g/t-km) contre huit g/t-km pour le ferroviaire. Pour l’Agence européenne de l’environnement, ce chiffre serait plutôt de 20,97 g/t-km, à l’échelle européenne, contre 75,33 g/t-km pour le routier. Quoi qu’il en soit, le constat est sans appel : le fret ferroviaire émet quatre à dix fois moins de CO2 que la route. En outre, la forte électrification du réseau ferré français et notre important recours à l’énergie nucléaire garantissent une pollution très faible. En 2010, un rapport du Sénat[8], chiffrait ainsi le bilan écologique du transport de marchandises : 2 grammes/km de CO2 pour un train électrique et 55 grammes/km pour un train thermique contre 196 grammes/km pour un seul camion semi-remorque de 32 tonnes et 982 grammes/km pour un utilitaire léger. Par ailleurs, au-delà du bilan écologique, le fret ferroviaire participe à l’équilibre du territoire en reliant des régions parfois mal desservies par la route.
Toutefois, malgré ces divers avantages, les clients de Fret SNCF ne manifestent pas un grand attachement pour le ferroviaire.Plus de quatre clients sur dix s’en disent peu ou pas satisfaits et la moitié déçus du rapport qualité-prix. La ponctualité est également mise en cause : le rapport du Sénat de 2008 pointait ainsi une ponctualité dans la journée de seulement 70% pour les wagons isolés contre 80% dans l’heure pour les trains massifs. Les clients du fret ferroviaire réclament donc une fiabilité plus importante et un meilleur rapport qualité-prix, deux éléments qui les font pencher en faveur du transport routier.
Les solutions pour relancer l'activité Pour aller au-delà des annonces, plusieurs projets existent.
En 2008, le projet EuroCarex a ainsi essayé de créer un TGV fret de nuit. Après un essai en 2012 entre Lyon et Londres, le projet est aujourd’hui au point mort à cause de sa rentabilité à court terme.
En 2014, le projet Marathon a mis sur pied le plus long train de fret d’Europe. Long de 1,5 km, il a transporté 70 wagons, contre 35 habituellement.
En 2015, dans le prolongement de ce projet, le train le plus lourd du réseau ferroviaire, long de 947 mètres et avec une masse de 5 410 tonnes a relié Somain dans le Nord à Uckange en Moselle. Ces deux projets sont aujourd’hui au point mort.
Depuis 2017, c’est le projet de train autonome qui est sur les rails.L’objectif est de développer divers niveaux d’autonomie pour un train (conduite assistée, conduite à distance, voire absence de conducteur) à horizon 2023. Si les conséquences sociales de ce projet ne sont pas encore connues, celui-ci devrait permettre d’améliorer la ponctualité des trains grâce au calcul informatique.
Ces différentes innovations nous amènent à regarder de l’autre côté de l’Atlantique.Aux États-Unis, les trains de fret impressionnent par leurs dimensions, avec deux étages de conteneurs sur un seul wagon et une longueur pouvant atteindre plus de trois kilomètres. Des chiffres d’autant plus spectaculaires quand on les comparent aux 750 mètres des trains français.
Comment expliquer ces différences qui pourraient largement augmenter la compétitivité du fret SNCF ?Le problème réside dans le réseau. Le réseau américain a été adapté au niveau des ponts et des tunnels pour que les trains puissent mesurer plus de 6 mètres de haut contre 4,28 mètres en France. Pour prétendre à ces dimensions en France, il faudrait adapter un nombre très important d’ouvrages. Pour la longueur, le problème vient également des infrastructures. Le réseau français a été construit historiquement pour des trains de 500 mètres de long puis de 750 mètres. Cela signifie que l’ensemble du réseau a été adapté sur ces distances avec des voies de garage et des triages à ces tailles. Aux États-Unis, le réseau est extrêmement long et permet de doubler des trains de plusieurs kilomètres de long. Pour obtenir les mêmes performances que le réseau américain, c’est tout le réseau ferroviaire, les wagons et les infrastructures qui devraient être adaptés en conséquence, ce qui demanderait d’importants investissements.
Le principal problème du fret ferroviaire ne vient pas d’un manque d’innovation mais bien de la concurrence avec le transport routier
Or, ce dernier n’est davantage compétitif qu’en raison de la non-prise en compte des externalités négatives, notamment environnementales, qu’il génère. Outre la pollution, les ballets de camions ont aussi un impact fort sur l’usure des infrastructures routières, sur les nuisances sonores, les embouteillages et les accidents de la route.Autant de facteurs qui plaident pour l’augmentation des impôts et droits de péages sur le fret routier.
Depuis le début du déclin du fret ferroviaire, ce sont 1,8 million de camions qui ont été mis sur les routes.
Un report modal massif du routier vers le ferroviaire aurait pourtant de nombreuses conséquences positives. Mais pour ce faire, trois éléments seront nécessaires :
des investissement massifs dans le fret ferroviaire (cheminots, infrastructures, réseau) ;
la remise en cause de la libéralisation du fret ferroviaire ;
et une nouvelle façon de prendre en compte l’ensemble des conséquences négatives du transport routier (NDLR le tout comme proposé par L'Avenir en Commun[10]).
----------------------------
Et pour aller plus loin...
Sila France bénéficie du deuxième réseau ferré le plus dense d’Europe, avec 29 000 km de voies, elle investit beaucoup moins par habitant dans ses infrastructures que la plupart de ses voisins européens - soit environ deux fois moins qu’en Italie et trois fois moins qu’en Allemagne, comme le montre l'infographie ci dessous[11].
Résultat...
Fédération CGT : REDYNAMISER LE FRET FERROVIAIRE
Contribution de la Fédération CGT des cheminots au comité de suivi de l’engagement national pour le fret ferroviaire.
Cette contribution écrite a pour objectif d’exposer aux membres du comité le positionnement de la Fédération CGT des cheminots sur l’engagement national pour le fret ferroviaire. Sur la base de débats publics qu’elle a organisés ou auxquels elle a participé, des échanges avec les cheminots, les salariés, les cadres dirigeants de Fret SNCF, les élus politiques, les chargeurs…Elle formule des propositions pour redynamiser le fret ferroviaire en France.
📌Accès aux propositions de la Fédération CGT des cheminots 👇
Conclusions :
L’écart est grand entre la tendance à une marginalisation du fret ferroviaire en France observée de 2000 à 2010 et l’objectif d’atteindre une part des modes de transport alternatifs à la route de 25 % en 2022. Les mesures annoncées dans le cadre de l’engagement national ne nous semblent pas être de nature à résorber cet écart. Les propositions de la CGT présentées ci-dessus s’inscrivent dans notre volonté de ne pas assister passivement à un échec qui serait lourd de conséquences pour la collectivité. Nous appelons à un nouveau débat public sur le sujet pour procéder à un diagnostic objectif de la situation actuelle, pour évaluer les évolutions probables à horizon 2022 au regard des orientations mises en œuvre et pour examiner à quelles conditions atteindre une part modale de 25 % pour le fluvial et le ferroviaire.
🔴 Le projet alternatif de la CGT pour sauver le Fret SNCF " ENSEMBLE POUR LA CONTINUITÉ DE FRET SNCF ! " 👇
Liquidation du fret ferroviaire par Macron – ce député cheminot vous dit tout
Bérenger Cernonest cheminot, syndicaliste et depuis sa victoire contre le candidat d’extrême droite Nicolas Dupont-Aignan le 7 juillet 2024, député de la Nation.
Pour tout savoir sur la grève, et la casse du service public ferroviaire par Macron et l’Union européenne, découvrez son entretien à l’Insoumission avec Sylvain Noël, rédacteur en chef.