Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
20 janvier 2025 1 20 /01 /janvier /2025 20:30
PHOTO DR

PHOTO DR

La question des retraites figurait sans aucun doute parmi les sujets les plus attendus du discours de politique générale de François Bayrou. Dès les premières minutes, le 14 janvier, le Premier ministre a donc abordé ce chapitre. Il a promis de le « remettre en chantier », mais a surtout insisté sur les déficits qu’entraînerait notre système. « Sur les plus de 1 000 milliards de dette supplémentaires accumulés par notre pays ces dix dernières années, les retraites représentent 50 % de ce total », s’est insurgé le chef du gouvernement.

Ses propos posent plusieurs problèmes : d’abord, la méthode de chiffrage choisie par François Bayrou est discutable. Ensuite, ce discours alarmiste participe à alimenter la « politique des caisses vides ». C’est ce qu’explique l’économiste Michaël Zemmour (Michael Zemmour, né en 1983, est un économiste, enseignant-chercheur à l’université Lyon 2 et chercheur associé à Sciences Po. Il travaille sur les systèmes et les financements de protection sociale et des services publics, et sur les politiques de redistribution, notamment des retraites).

 

 

Sources : Alternatives Economiques Propos recueillis par Audrey Fisné-Koch | mis à jour le 24/01/2025

- AT : Chaque année, le Conseil d’orientation des retraites (COR) évalue la situation économique du système des retraites. Or, ses dernières estimations sont loin des chiffres évoqués par François Bayrou[1]. Pourquoi ?

Michaël Zemmour : Les partenaires sociaux, les présidents successifs de ce conseil – même s’ils n’ont pas la même sensibilité –, les économistes ou encore les journalistes ont tous une grille de lecture commune sur les retraites qui est fournie par le COR.


Mais le raisonnement de François Bayrou ne correspond pas du tout au cadre comptable de ce conseil. Ce dernier montre qu’il y a effectivement un déficit modéré du système de retraite [Un solde de - 0,2 % du PIB en 2024 et - 0,8 % du PIB en 2070, d’après le rapport annuel 2024, NDLR.]. Mais la convention retenue n’équivaut pas aux chiffres avancés par le 1er ministre. Toute comptabilité est conventionnelle, mais celle employée par François Bayrou est particulièrement fantaisiste. Le financement de notre système de retraite est mixte, c’est-à-dire qu’il est très majoritairement financé par les cotisations mais aussi par l’Etat.

 

Les cotisations employeur de l’Etat sont particulièrement élevées (beaucoup plus que dans le privé). Pas parce que les retraites du public sont très élevées  –  elles sont comparables à celles du privé en moyenne –, mais parce que l’Etat doit compenser deux phénomènes :

  • la baisse (relative) du nombre de fonctionnaires ;
  • et le gel du point d’indice.

C’est donc parce qu’il a fait de sévères économies budgétaires sur la masse salariale du public (et non parce qu’il dépense sans compter !) que l’Etat doit cotiser (par fonctionnaire) un montant très élevé pour les retraites.
 

 

Par ailleurs, l’Etat concourt par différents mécanismes de solidarité aux financements de l’ensemble des retraites. Le raisonnement utilisé par François Bayrou, qui avait circulé il y a quelque temps déjà sans être reconnu par les économistes spécialistes de la retraite, consiste à dire que tout ce qui n’est pas financé par des cotisations, c’est de la dette. C’est absurde.

 

 

- AT : Pourquoi choisit-il de présenter le déficit du système de cette façon ?
Michaël Zemmour : Cela correspond à une dramatisation du déficit, dont l’objectif est de forcer à faire des économies, ce qu’on appelle « la politique des caisses vides ».

 

Objectivement, les retraites ne sont pas à l’origine du creusement de la dette ces dernières années, sauf à considérer que c’est une dépense particulièrement illégitime, mais elle ne l’est pas plus que les dépenses d’éducation ou les dépenses militaires. Ce discours sur la « dette cachée » des retraites vient complètement brouiller cette légitimité. C’est un élément qui n’est pas très favorable à ce que des solutions émergent.

 

 

- AT : Justement, pour aboutir à des solutions, François Bayrou a, dans un premier temps, demandé une mission flash à la Cour des comptes pour dresser un état des lieux du système des retraites. Que peut-on dire cette méthode ?

Michaël Zemmour : Rappelons qu’il y a deux instances dont le suivi du financement et des paramètres des retraites est le métier :

  • le Conseil d’orientation des retraites, que j’ai déjà évoqué, qui a une vraie expertise dans le domaine, qui rend un rapport annuel et qui est un lieu de dialogue social[2].
  • Et le comité de suivi des retraites (CSR), qui faisait des recommandations au gouvernement sur la base du rapport du COR, mais qui n’a pas été renouvelé depuis le mois de juin.

 

La Cour des comptes écrit aussi sur les retraites – elle peut le faire sur tous les sujets –, mais en l’occurrence c’est un peu étonnant de la mettre en avant comme base de discussion, surtout si l’on veut encourager la discussion sociale. La Cour des comptes n’est pas un haut lieu du diagnostic social partagé. On peut voir ce choix comme une forme de contournement et peut-être de défiance vis-à-vis des instances qui existent. Ça laisse perplexe.

 

 

- AT : Dans un deuxième temps, le Premier ministre propose que les partenaires sociaux négocient pendant trois mois pour trouver un « accord d’équilibre et de meilleure justice » au sujet des retraites. Est-ce une avancée ?
Michaël Zemmour : Depuis l’élection d’Emmanuel Macron, les partenaires sociaux ont été particulièrement maltraités et ignorés. De leur point de vue, être remis au centre du jeu est un point positif. Néanmoins, cette discussion ressemble très fortement au cadre de négociation qui était posé pour l’assurance chômage : il laissait préjuger à l’avance qu’il n’y aurait pas d’accord parce que le patronat avait tout intérêt à ne pas en trouver, sachant que le gouvernement trancherait derrière.

 

🔴 Pour les retraites, c’est pareil : on ne voit pas très bien pourquoi le patronat, favorable à la réforme[3], changerait de position. Il s’est toujours opposé à l’augmentation des ressources du financement, les cotisations par exemple.

 

Le choix de ne pas arrêter la réforme de 2023 pendant les débats est un grand changement par rapport à ce que l’on a connu avec les négociations pour l’assurance chômage. Les conditions ne sont pas très propices à une évolution possible de la réforme car le temps joue en sa faveur, elle continue de s’appliquer. L’âge légal et la durée de cotisation progressent rapidement[4].

 

🔴 Au fond, si un accord devait s’appliquer dans les prochains mois sans mise en pause, le changement ne porterait plus que sur un tiers de la réforme : savoir si on s’arrête à 63 ans ou si on va jusqu’à 64 ans (et sans plus discuter de la durée de cotisation portée à 43 ans de manière accélérée)

 

 

- AT : « Pas de totem, pas de tabou, pas même celui de l’âge », a dit le chef du gouvernement. Mais il a tout de même fixé une règle d’or : « ne pas dégrader l’équilibre financier ». Peut-on aboutir à une réforme plus juste, sans augmenter les recettes ?

Michaël Zemmour : La raison pour laquelle les gouvernements précédents n’ont trouvé aucun accord, c’est parce qu’ils refusaient d’affecter le moindre centime supplémentaire au système des retraites. Ils imposaient même l’idée que baisser les ressources était nécessaire. Si la proposition des partenaires sociaux doit réellement être à budget constant, ils ne vont pas pouvoir discuter de grand-chose.

 

D’autant que, face à un risque social qui augmente – plus de chômage, plus de maladies, plus de retraités –, cela paraît assez naturel de mettre des recettes supplémentaires. C’est le cas pour n’importe quelle assurance. Si l’assurance contre les intempéries fait face à davantage d’intempéries, on ne trouve pas absurde de se poser la question d’augmenter les cotisations.

 

Ne pas augmenter les recettes pour les retraites est une position relativement extrême. L’espace de négociation qui est, par ailleurs, réclamé par l’ensemble des organisations syndicales consiste justement à dire qu’il ne faut pas exclure des recettes supplémentaires du pilotage du système de retraites dans le futur.

 

Si François Bayrou les exclut une par une – ou dit que les recettes qui existent déjà ne sont pas des vraies recettes –, cela ferme une porte qui n’a même pas été tout à fait ouverte.

 

 

* * * * * * * * * * * * * * * * * * * * *

 

 

- Manuel Bompard, député La France insoumise des Bouches-du-Rhône, était l'invité de BFMTV ce mardi 14 janvier 2025.

Réforme des retraites: " François Bayrou a donné un droit de veto au Medef ", affirme Manuel Bompard[5]

 

Réforme des retraites: "François Bayrou a donné un droit de veto au Medef", affirme Manuel Bompard (LFI)

 

- Retraites : quelle voie de réforme est possible ? - Le débat économique

Le débat éco entre Thomas Porcher, membre des Economistes Atterrés et professeur à la Paris School of Business et Dominique Seux, éditorialiste à France Inter et aux Echos porte sur l’avenir de la réforme des retraites.

 

Notes :

[1].Notre système de retraite verse chaque année quelque 380 milliards d’euros de pensions. [...] Les employeurs et les salariés privés et publics versent à peu près 325 milliards par an. Restent 55 milliards, versés par le budget des collectivités publiques, au premier chef de l’Etat, à hauteur de quelque 40 ou 45 milliards.

[2] Les organisations professionnelles et syndicales en sont membres.

[3Pour le MEDEF les 64 ans, est un « socle »

[4] Avec la réforme Touraine adoptée sous le mandat de Hollande l’âge légal de départ augmente progressivement de 3 mois par année de naissance jusqu’à atteindre 64 ans pour les générations nées à partir de 1968. Quant à la durée de cotisation, elle continue elle aussi de progresser jusqu’à 43 annuités requises. 

[5Réforme des retraites: "François Bayrou a donné un droit de veto au Medef", affirme Manuel Bompard (LFI)

 

Pour en savoir plus :

- Retraités : le Gouvernement sauvé par le RN et le PS veut les taxer

La mystification de la retraite par points défendue par le Parti Socialiste

- « Les concessions budgétaires au groupe PS sont un écran de fumée » – L’analyse d’Eric Coquerel après le vote du budget au Sénat

 

Partager cet article
Repost0
4 janvier 2025 6 04 /01 /janvier /2025 09:36

Comme d’habitude, notre président nous a devancé dans ses vœux pour la nouvelle année, qui s’annonce politiquement au moins aussi riche que la précédente. On en parlera dans notre première rubrique et on reviendra ensuite sur la composition de notre nouveau gouvernement de soi-disant cadors, avant de se pencher sur leurs derniers faits d’armes.

Partager cet article
Repost0

Rédacteur

  • Pour une Révolution citoyenne par les urnes
  • Retraité SNCF, engagé politiquement depuis l'âge de 15 ans, militant du PCF de 1971 à 2008, adhérent au Parti de Gauche et à la France Insoumise depuis leur création, ex secrétaire de syndicat, d'Union locale et conseiller Prud'homme CGT  de 1978 à 2022.
  • Retraité SNCF, engagé politiquement depuis l'âge de 15 ans, militant du PCF de 1971 à 2008, adhérent au Parti de Gauche et à la France Insoumise depuis leur création, ex secrétaire de syndicat, d'Union locale et conseiller Prud'homme CGT de 1978 à 2022.

La France insoumise

-Pour une MAJORITÉ POPULAIRE, renforcer la France insoumise pour GAGNER !

🔴  La France insoumise et ses 71 députés sont au service des Françaises et des Français face à l'inflation et l'accaparement des richesses par l'oligarchie.

✅ La dissolution, nous y sommes prêts ! 
Avec la #Nupes, la France Insoumise propose l’alternative 


📌 Pourquoi La France insoumise, ses origines ? La France insoumise : comment ? La France insoumise : pour quoi faire ?

Autant de questions dont vous trouverez les réponses... ✍️ en cliquant ci-dessous 👇

 

Qu’est-ce que La France insoumise ? - Nouvelle brochure

 

-N'attendez pas la consigne !

✅ Pour rejoindre la France insoumise et AGIR ENSEMBLE pour GAGNER : cliquez ci-dessous 👇

 

La France insoumise

 

- La chaîne télé de Jean Luc Melenchon : cliquez ci-dessous 👇

 

- Le blog de Jean Luc Melenchon : cliquez ci-dessous 👇

Jean-Luc Mélenchon le blog

 

Recherche

La France insoumise à l'Assemblée Nationale

 Pour accéder au site : cliquez ci-dessous 👇

Sur les réseaux sociaux  :

Facebook  - Twitter

Le JOURNAL L'INSOUMISSION

✍️ cliquez ci-dessous 👇

L'Insoumission

 

✅ S'inscrire à la Newsletter 👇

 

 

Le site du Parti de Gauche

 Pour accéder au site : cliquez ci-dessous 👇

 

Manifeste pour l'Ecosocialisme

 Pour accéder au site : cliquez ci-dessous 👇

 

Mouvement pour la 6e République

 Pour accéder au site : cliquez ci-dessous 👇

 

Des outils pour combattre le FN et l'idéologie d'extrême droite française

🔴  Observatoire de l’extrême droite de l'Insoumission

 Pour accéder au site (cliquez ci-dessous) 👇

Observatoire de l’extrême droite l'insoumission

 

 Pour accéder au site (cliquez ci-dessous) 👇


🔴  et aussi : Observatoire national pour « mettre sous surveillance » l’extrême droite

 Pour accéder au site (cliquez ci-dessous) 👇