« Rien ne doit exclu[1] », a déclaré Emmanuel Macron le 26 février 2024, à propos de l’envoi de troupes de notre pays en Ukraine. Un dérapage ? Non, le chef de l’Etat a persisté et signé en déclarant quelques jours plus tard : « il n’y a aucune limite[2] » dans la guerre face à la Russie.
Macron persiste et signe dans Le Parisien : " il faudra (peut-être) avoir des opérations sur le terrain, quelles qu'elles soient, pour contrer les forces russes (...). La force de la France, c'est que nous pouvons le faire[12] ".
« Nous ne voulons pas de la guerre sur le continent européen ! La République française doit travailler à construire la paix », avait réagi Jean-Luc Mélenchon à Paris[3].
Seuls les groupes de La France Insoumise et communiste ont voté contre l’accord d’assistance de sécurité entre la France et l’Ukraine signée par Macron et Zelinsky.
Le 12 mars 2024, l’Assemblée nationale a débattu de l’accord franco-ukrainien sur la sécurité, signé par Emmanuel Macron et Volodymyr Zelensky le 16 février dernier[4]. Celui-ci engage Paris et Kiev pour une durée de dix ans, comprenant notamment un renforcement de la coopération militaire. Il pose également deux objectifs politiques : l’entrée de l’Ukraine dans l’Union européenne et dans l’OTAN, ce à quoi les insoumis s’opposent. S’ensuivra un vote purement symbolique.
Sources : Eric Durand | mis à jour le 17/03/2024
Pour le détail pour chaque groupe
Les députés ont débattu mardi de la stratégie française d’aide à l’Ukraine et voté, de manière non contraignante, sur l’accord bilatéral de sécurité signé avec Kiev. Ils l’ont approuvé à 372 voix pour, et 99 voix contre. Au total, 101 députés se sont abstenus[5].
- Les 169 députés Renaissance ont voté pour ;
- Les 88 élus RN se sont abstenus ;
- Les 75 députés « insoumis » ont voté contre ;
- Chez Les Républicains, 49 ont voté pour et 11 se sont abstenus. Deux n’ont pas pris part au vote ;
- Au MoDem, 49 députés ont voté pour et il y a une abstention ;
- Les 31 députés socialistes ont voté pour ;
- Les 30 députés Horizons ont voté pour ;
- Chez les écologistes, 20 élus ont voté pour et une a voté contre. Un député n’a pas pris part au vote ;
- Chez les communistes, les 22 élus se sont opposés à l’accord ;
- Dans le groupe LIOT, 20 d’entre eux ont voté pour et deux députés n’ont pas pris part au vote ;
- Enfin chez les non-inscrits : David Habib, Jean-Charles Larsonneur, Hubert Julien-Laferrière et Emmanuelle Ménard ont voté pour, Nicolas Dupont-Aignan a voté contre et Véronique Besse s’est abstenue.
👉 voir aussi le site de l’Assemblée nationale avec les résultats nominatifs et par groupe[6].
🔴 Le 12 mars 2024, en application de l’article 50 – 1 de la constitution (et non de l’article 53), les 75 membres de France Insoumise et les 22 membres du groupe communiste ont voté contre le traité d’assistance de sécurité entre la France et l’Ukraine.
🔴 Ils constituent donc les 99 votes contre. Il y a eu 372 votes pour dont les votes du parti socialiste et les votes du parti écologiste. Les 88 députés du RN se sont abstenu. Il y a eu au total 101 abstentions.
Ukraine : le vote de La France Insoumise est parfaitement cohérent car contre l’escalade militaire de Macron, LFI prône la négociation pour la paix[3]
Conférence des frontières, garanties de sécurité mutuelle : ce que propose LFI pour mettre fin à la guerre
- Dès le début du conflit, LFI s’est distinguée par la défense d’objectifs clairs et simples : cessez-le-feu, retraite des troupes russes, discussion sur la sécurité en Europe dans le cadre de l’OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe) où siègent les États-Unis et la Russie. Quelques heures après l’agression russe sur le sol ukrainien, le jeudi 24 février 2022, Jean-Luc Mélenchon dénonçait une invasion qui « change le cours de l’Histoire en Europe » et constitue un recul alors que le recours à la force n’était plus considéré comme un des moyens pour régler les conflits sur le vieux continent.
- Comment mettre fin à une guerre et éviter l’escalade guerrière qui risquerait de provoquer un conflit nucléaire ? « Le cessez-le-feu est la première étape pour construire la paix en Ukraine » pour Jean-Luc Mélenchon et les insoumis, qui plaident pour « discuter des conditions concrètes dans lesquelles le conflit s’arrête ». C’est tout le sens de la proposition portée depuis le premier jour du conflit par le co-président de l’Institut La Boétie. Discuter de la paix en assurant des « garanties de sécurité mutuelle » aux belligérants, aux Ukrainiens comme aux Russes.
- Un certain… Emmanuel Macron proposait la même chose le 3 décembre 2022. « C’est aussi de cela que nous avions discuté avec le président Biden, c’est l’architecture de sécurité dans laquelle nous voulons vivre demain, comment nous protégeons nos alliés et les États membres, en donnant des garanties pour sa propre sécurité à la Russie, le jour où elle reviendra autour de la table », avait déclaré le chef de l’État sur TF1[7]. Une idée qui n’aura pas fait long feu, comme en témoigne la rhétorique guerrière qui a supplanté l’idée d’une conférence pour la paix.
🔴 Deux ans après le début du conflit, cette rhétorique guerrière inonde les débats en France et suspecte de complicité ou de connivence avec le régime poutinien toute voix qui porte la négociation pour la paix. Or, ces deux années l’ont démontré de plus belle : l’issue n’est pas militaire mais bien diplomatique.
Dans ce contexte, Emmanuel Macron et ses partisans avancent sur l’idée d’une adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne ou l’OTAN.
Les insoumis s’y opposent pour plusieurs raisons :
- « Cela n’est pas possible sans harmonisation fiscale et sociale », a avancé le député LFI Arnaud Le Gall ce matin en conférence de presse. Le salaire minimum Ukrainien tourne autour de 200 euros.
- Difficile alors d’entendre l’adhésion de l’Ukraine quand des millions de travailleurs en pâtiraient.
- Quant à l’OTAN, l’adhésion de l’Ukraine irait dans le sens inverse de la garantie de sécurité pour les Russes. Des garanties de sécurité sont nécessaires pour les Ukrainiens comme pour les Russes.
- « Les conditions d’un accord de paix sont sur la table », a expliqué Manuel Bompard, coordinateur national de LFI.
- Le président ukrainien envisage la possibilité de référendums d’auto-détermination.
- De leur côté, les Russes se disent favorables à un cessez-le-feu, pour reconstituer leur défense. Ce n’est pas souhaitable, mais cela ouvre une fenêtre afin que tout le monde puisse se mettre autour de la table.
Les bons esprits affirment que négocier avec Poutine reviendrait à une capitulation de l’Ukraine.
- Une position va-t-en-guerre qui balaye d’un revers de la main le sens même de la diplomatie et de la quête d’un mode de résolution des conflits qui ne passerait pas par les tueries.
- Ce n’est pas parce que quelqu’un a déclenché la guerre qu’on ne peut pas faire la paix. « Il faut sortir de cette idée que créer les conditions d’une négociation, c’est forcément céder à l’ensemble des exigences de Vladimir Poutine. Celui qui a envahi a violé le droit international, il ne s’agit pas de lui donner raison. Si vous voulez la paix, vous devez écouter ce que chacun a à dire. », a précisé Manuel Bompard.
De même, les esprits va-t-en-guerre oublient la démarche unique de LFI quant à l’accueil des opposants au régime poutinien en France[8], une démarche singulière que n’observe aucune autre formation politique à part celle de Jean-Luc Mélenchon.
La prolongation du conflit est particulièrement dommageable pour l’Ukraine... mais pas que !
Déjà 444 000 morts[10], et 486 milliards de dollars de destructions directes[9] dans lequel il faudra compter un affaiblissement considérable du potentiel industriel et agricole. Et à cela s’ajoute une énorme pollution des sols.
- En revanche, les sanctions contre la fédération de Russie ont relancé la croissance économique de ce pays dans tous les domaines : agricole, commerciale et industrielle. Son taux de croissance du PIB est évalué à 3,6 % par la banque mondiale en 2023 contre 0,8 % pour la France.
- Ce sont les pays européens qui, par effet boomerang, souffrent le plus des sanctions contre la Russie.
- Les seuls bénéficiaires de la guerre sont les États-Unis d’Amérique du côté occidental.
La continuation de la guerre va être catastrophique pour l’Ukraine et va provoquer une récession de l’économie européenne.
🔴 La France aura dépensé depuis février 2022 pour près de 15 milliards d’euros pour l’Ukraine. Voici approximativement le décompte : traité d’assistance signé par Macron :
- 3 milliards d’euros ;
- + 8 milliards d’euros (sur les 50 milliards votés par le Parlement européen) ;
- +3,8 milliards d’aides militaires en 2022 et 2023 soit 14,8 milliards ;
- auxquels il faut ajouter environ 600 millions d’euros pour l’aide aux réfugiés. On dépasse ainsi un total de 15 milliards d’euros.
🔴 Pendant ce temps, on nous annonce un plan d’austérité de 10 milliards d’euros ;
- et on nous a annoncé l’obligation d’augmenter l’âge de la retraite de deux ans en raison d’un déficit de 12 milliards pour les retraites.
- Dans le même temps, le déficit de la balance commerciale de la France bat des records historique : 99,6 milliards d’euros en 2023, 164 milliards d’euros en 2022. Ce sont les deux plus gros déficits de la balance commerciale enregistrés depuis 1945.
- Mais ce n’est pas tout : 2022, le déficit du budget de l’État en France s’est élevé à 126,8 milliards d’euros, soit 4,8 % du produit intérieur brut (PIB).
- En 2023, le déficit a augmenté pour atteindre 173,3 milliards d’euros,
Pour éviter des erreurs de jugement, comme celles des médias qui prédisaient voici un an l’effondrement de la Russie et de Vladimir Poutine, il est important d’analyser les rapports de force.
Voici seulement quelques éléments concernant la Russie :
- Selon des documents divulgués des services de renseignement américains citent le FSB russe, les forces russes auraient subi 110 000 pertes au 28 février 2023[11].
- La Russie a augmenté son budget militaire de 68 % en 2024 ce qui ne l’empêche pas d’augmenter dans de nombreux secteurs son potentiel industriel.
- Et l’aménagement de son territoire dans sa partie orientale.. N’oublions pas que le territoire de la fédération de Russie couvre 11 fuseaux horaires
- La Russie dispose de missiles hypersoniques dépassant de plus de 10 fois la vitesse du son les rendant ininterprétables.
🔴 Les dirigeants européens, les sociaux-démocrates et les écologistes aveuglés idéologiquement par une représentation fantasmatique de la Russie ont totalement sous-évalué les capacités économiques, financières, militaires et diplomatiques sur la scène internationale de la fédération de Russie. Ces gens souffrent d’un lourd défaut d’analyse rationnelle et historique de la réalité : je suis tout à fait d’accord sur ce point avec l’analyse de Jacques Baud et de Caroline Galactéros.
🔴 Oui, le vote de La France Insoumise n’est pas seulement pacifiste, humaniste, il est réaliste.
Ukraine : La France doit être à la pointe de la paix !
« Dans l’épreuve internationale, la France doit être un agent de la solution et non une partie du problème. Ce débat est un simulacre, vous avez déjà signé l'accord de sécurité avec l’Ukraine ! En Ukraine, à Gaza, au Congo, la France doit être à la pointe du combat pour la paix ! Être un agent de la solution et non une partie du problème. » Arnaud Le Gall, dépuré France insoumise /Ñupes
Notes :
[1] Guerre en Ukraine : " Rien ne doit être exclu ", déclare Emmanuel Macron au sujet de l'envoi de troupes occidentales à l'avenir
[2] Guerre en Ukraine : Emmanuel Macron dit aux partis qu’il n’y a « aucune limite » au soutien à Kiev
[3] Ukraine : contre l’escalade militaire de Macron, LFI prône la négociation pour la paix
[4] Que contient l’accord de sécurité signé entre la France et l’Ukraine et débattu au Parlement ?
[5] Débat sur le soutien de la France à l’Ukraine : les députés approuvent l’accord bilatéral de sécurité
[6] Le site de l’Assemblée nationale avec les résultats nominatifs et par groupe
[7] Au terme de ma visite d’État aux États-Unis d’Amérique, je réponds aux questions de TF1
[8] À L'ASSEMBLÉE, DES DÉPUTÉS INSOUMIS ET MÉLENCHON ACCUEILLENT TROIS OPPOSANTS RUSSES À POUTINE
[9] Ukraine : assiégée par l'armée russe, la ville ukrainienne d'Avdiïvka "risque" de tomber
[10] En février 2024, le ministère met à jour son bilan des pertes militaires ukrainiennes qui s'établit à 444 000 tués et blessés.
[11] Selon des documents divulgués des services de renseignement américains citent le FSB russe les forces russes ont subi 110 000 pertes au 28 février 2023.
[12] Macron persiste et signe dans Le Parisien : " il faudra (peut-être) avoir des opérations sur le terrain, quelles qu'elles soient, pour contrer les forces russes (...). La force de la France, c'est que nous pouvons le faire ".
Pour en savoir plus :
commenter cet article …