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25 juillet 2014 5 25 /07 /juillet /2014 09:20
Martine Billard co-secrétaire nationale du Parti de Gauche «Notre responsabilité est de recréer de l’espoir»

Martine Billard, coprésidente du Parti de gauche avec Jean-Luc Mélenchon dresse le bilan de la récente séquence électorale.

Nous poursuivons notre tour d’horizon de la gauche sociale et écologiste avec Martine Billard, qui revient sur les désaccords entre son parti et le Parti communiste lors des municipales, et envisage les alliances possibles entre Front de gauche, écologistes et socialistes « frondeurs ».

 

Sources : Politis.fr interviewée par Denis Sieffert et Sarah Masson

- Politis.fr : Où en le Parti de gauche après les municipales et les européennes ?

Martine Billard : Les élections européennes ont indéniablement été un échec. Certes, le Front de gauche a maintenu son score, mais pas à la hauteur de l’exigence du moment et de nos espoirs. La principale cause reste la cacophonie autour des élections municipales, qui a évidemment eu un impact sur les européennes. On ne peut pas faire campagne main dans la main avec le Parti socialiste et, trois semaines plus tard, appeler à voter Front de gauche.

 

 

- Politis.fr : N’avez-vous pas trop dramatisé ce différend avec les communistes ?

Martine Billard : Nous étions dans une contradiction : soit nous acceptions tout, comme d’habitude, soit nous disions stop. Nous souhaitions des listes autonomes Front de gauche pour les élections municipales et nous avons tout fait pour établir ces listes. Nous avons même pris peu de têtes de liste afin d’en laisser davantage au Parti communiste ou à Europe Écologie-Les Verts (EELV). Cela, parce que nous pensions que la priorité était de faire en sorte que ces listes existent plutôt que de se battre pour les têtes de liste. Mais, à Paris, nous ne pouvions pas accepter que le Front de gauche apparaisse sur une liste avec le PS.

 

 

- Politis.fr : L’autre raison de ce demi-échec électoral n’est-elle pas que toute la gauche est éclaboussée par la politique gouvernementale ?

Martine Billard : Oui, à l’heure actuelle, nous sommes bien dans cette situation. Lors de la campagne, les électeurs les plus politisés nous disaient que cela ne changerait rien, comme en a témoigné la politique menée malgré le « non » au Traité constitutionnel européen en 2005. Les moins politisés manifestaient leur résignation face à la politique actuelle de ce qu’ils appellent « la gauche ». Il est donc vrai que le Front de gauche comme Europe Écologie-Les Verts ont été touchés par la désaffection citoyenne qui résulte de la politique du gouvernement.

 

 

- Politis.fr : Où en êtes-vous des contacts avec les autres forces de gauche « fréquentables » ?

Martine Billard : Il faut le reconnaître, nous sommes dans une période de tâtonnements. Notre responsabilité est de recréer de l’espoir et d’offrir des perspectives. Mais cela suppose de la clarté. Redevenir une alternative crédible aux yeux des citoyens suppose d’être ouvert et de discuter avec tous ceux qui sont critiques avec le gouvernement, y compris les « frondeurs » du PS, tout en étant très clairs sur le fond. Et le fond, c’est la critique de la politique du gouvernement. Sans cela, nous ne nous lancerons pas dans une aventure qui sèmerait la confusion tout en attisant la désespérance et la colère. À cet égard, je regrette que les parlementaires EELV aient voté la loi prévoyant la libéralisation du rail. On voit bien que l’intégration d’EELV à la majorité présidentielle a fait perdre aux élus tout sens critique.

 

 

- Politis.fr : Êtes-vous prêts à accepter l’intégration de nouveaux courants au Front de gauche, comme la gauche du PS et des Verts ?

Martine Billard : Nous pouvons les associer, mais je ne sais pas si une intégration serait pertinente.

 

 

- Politis.fr : Où en sont les relations avec le PC ?

Martine Billard : L’enjeu est de ne pas s’enfermer dans un tête-à-tête PG-PC. Nous avons clairement dit au Parti communiste que nous ne repartirons pas dans le même cirque que celui des élections municipales. Il faut qu’il fasse clairement un choix entre une totale autonomie et l’association avec le PS pour avoir des élus. Il y a des débats au sein même du PC, et tout le monde n’est pas d’accord. Nous comprenons l’importance d’avoir des élus, mais cette stratégie ne marche plus.

 

 

- Politis.fr : La gauche a toujours mis entre parenthèses ses critiques contre le PS quand il s’agissait de battre la droite. Ne pensez-vous pas que ce réflexe est en train de disparaître ?

Martine Billard : Effectivement. Le chantage du PS consistant à crier : « Attention, danger Front national, votez pour nous ! » ne marche plus. Et c’est la déroute qui attend le PS s’il continue. Aujourd’hui, les gens ne veulent plus sauver le PS. Il y a un vrai risque que Marine Le Pen arrive au pouvoir si elle parvient au second tour de la présidentielle face à un candidat de l’UMP ou à François Hollande, car les électeurs de gauche déçus par le PS ne voteront pas.

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23 juillet 2014 3 23 /07 /juillet /2014 17:00
Manifestation contre l'austérité, le 12 avril 2014. (NICOLAS MESSYASZ/SIPA)

Manifestation contre l'austérité, le 12 avril 2014. (NICOLAS MESSYASZ/SIPA)

Source : Aude Lancelin, le Nouvel Observateur

Le PS mène-t-il encore une politique de gauche ? Pourquoi le Front de Gauche ne profite-t-il nullement de ses déboires électoraux ? Eric Fassin et Laurent Bouvet ont répondu aux questions de "l'Obs".

 

- Le NOUVEL Obs. : Le Premier ministre, Manuel Valls, a récemment évoqué une mort possible de la gauche. Etes-vous d'accord avec l'idée d'une singularité totale de la crise actuellement traversée par le PS ?

Laurent Bouvet : Les partis politiques sont mortels, les cas sont nombreux dans l'histoire. Toutefois le PS a connu, en un peu plus d'un siècle d'existence, de nombreuses crises dont il s'est toujours sorti. Aujourd'hui, le PS doit sans doute se refonder comme il l'a fait en 1969-1971. Les "deux corps" du PS sont en effet touchés. Son "corps immatériel", doctrinal, est entièrement à reconstruire. Le PS ne produit plus d'idées, de projet de société ou même d'orientations politiques fortes, identifiables, depuis un long moment. La nouveauté, c'est que désormais son "corps matériel", ses élus, ses militants, ses réseaux, ses affidés... est gravement touché. La perte de 30.000 élus aux municipales et de 25.000 militants depuis 2012 est un signe du délitement de l'ensemble organisationnel et réticulaire que représentait le PS.

 

Eric Fassin : Manuel Valls parle aux socialistes ; mais il choisit, pour une fois, de s'inquiéter de "la gauche". C'est une manière de ne pas évoquer la mort annoncée du PS. Il est vrai que le PS entraîne aujourd'hui toute la gauche dans son naufrage. La crise de la social-démocratie, c'est plutôt un renoncement idéologique qu'un échec politique - un peu partout en Europe : Blair et Schröder avant Valls. François Hollande "assume", dit-on, d'être social-démocrate. Mais le pacte de responsabilité n'a rien à voir avec la social-démocratie : au lieu d'arbitrer entre capital et travail, le président négocie avec le patronat en oubliant les syndicats ! Serait-il social-libéral ? En réalité, il n'est ni social ni libéral : il met l'Etat au service des banques et des marchés. Il est donc néolibéral. Mais beaucoup sont dans le déni. Regardez : en Europe, Hollande et Renzi ont soutenu Juncker ; et il est des éditorialistes qui ont salué un "virage à gauche salutaire" !

 


- Le NOUVEL Obs. : Outre les classes populaires, quelles sont les autres catégories de la population dont le décrochage explique la faiblesse actuelle du vote socialiste ?

Laurent Bouvet : Outre les classes populaires que le PS a "perdues" depuis longtemps, l'ensemble de son socle électoral s'est dilué depuis deux ans (partielles, municipales, européennes). Les choix économiques et "sociétaux" divisent profondément l'électorat de François Hollande de 2012. Ainsi, le vote PS à telle ou telle élection pour un électeur de gauche est devenu en soi un problème. Pour beaucoup d'électeurs des catégories moyennes et supérieures, les augmentations d'impôt jouent un rôle dissuasif comme on l'a vu dans les enquêtes faites à l'occasion des municipales. Pour les agents publics la baisse des dépenses publiques est vécue comme une menace sur leur activité même - sans parler des mesures sectorielles qui passent mal, comme les rythmes scolaires auprès des enseignants. S'est ajoutée à cela la démobilisation de certains électorats insatisfaits sur des questions plus spécifiques comme le mariage pour tous ou le genre.

 

Eric Fassin : L'électorat que perd le Parti socialiste, c'est d'abord l'électorat de gauche. Pourquoi voter pour un parti qui n'est plus de gauche ? On a voulu nous faire croire que le PS perdait le peuple pour garder les "bobos". Qu'il sacrifiait les classes populaires aux minorités, et qu'il s'occupait du mariage plutôt que du chômage. Mais ce gouvernement ne fait rien pour les banlieues ; ni contre les discriminations. Quant aux droits des minorités sexuelles, c'est fini ! Bref, on ne pourra plus dire que c'est à cause des questions "sociétales" qu'on ne s'occupe pas de la "question sociale"...

 


- Le NOUVEL Obs. : Les déboires du PS ne semblent pourtant aucunement profiter à la gauche de la gauche, comme l'a montré le résultat des dernières européennes. Comment l'expliquez-vous ? Pourquoi la France ne produit-elle pas de phénomène à la Syriza, parti de gauche radicale arrivé en première position en Grèce ?

Eric Fassin : C'est effectivement la grande question. Puisque François Hollande mène la même politique économique que Nicolas Sarkozy, on pourrait imaginer que la critique de la dérive néolibérale bénéficierait autant à la gauche de gauche qu'à l'extrême droite. Or ce n'est pas le cas. Pourquoi ? D'une part, le PS donne raison au FN qui dénonce l'"UMPS". Et l'alternance sans alternative alimente le rejet de la démocratie - par le vote d'extrême droite, mais aussi par l'abstention. Comment croire à la démocratie si l'élection ne change rien ?

 

D'autre part, le FN a fini par imposer son langage identitaire, non seulement à l'UMP, mais aussi au PS (qu'il s'agisse des immigrés, des musulmans ou des Roms). L'hégémonie économique, c'est le front UMP-PS ; mais l'hégémonie culturelle, c'est le front FN-UMP-PS. Dans ces conditions, pas facile de faire entendre autre chose. Le principal espoir, c'est "l'hypothèse Syriza" : l'effondrement complet du Pasok [le Parti socialiste grec, NDLR] a enfin ouvert un espace à gauche, et donc une alternative. Du coup, en Grèce, on s'abstient moins, on vote moins pour l'extrême droite, et on vote plus pour la gauche de gauche. Aujourd'hui, en France "l'hypothèque PS" obstrue le paysage de la gauche.

 

Laurent Bouvet : Le Front de Gauche tient un discours en décalage par rapport à son électorat. Son discours porte sur les conséquences néfastes de la mondialisation et du capitalisme, et s'adresse en priorité à leurs victimes (aux plus exposés et aux plus faibles). Or les solutions proposées pour y remédier (l'augmentation des dépenses publiques et le renforcement du rôle du service public) apparaissent comme pouvant profiter d'abord à des populations (les agents publics) moins exposées aux risques de la mondialisation (chômage ou délocalisation notamment). Ce hiatus entre discours, propositions et électorat est à mon sens au coeur des difficultés du Front de Gauche.

 

 

- Le NOUVEL Obs. : Vous semblez toutefois considérer, Laurent Bouvet, que le socialisme incarné par Valls est la bonne voie pour la gauche, notamment dans la reconquête du vote populaire. Que répondez-vous à ceux qui considèrent aujourd'hui que la gauche actuellement au pouvoir n'est rien d'autre qu'une "droite complexée" ?

Laurent Bouvet : Je ne sais pas si c'est la "bonne voie" pour la gauche ! Ce que je constate, plus modestement, c'est que la proposition politique de Manuel Valls - en gros le retour à une forme d'autorité dans la manière dont l'action publique est menée articulée à un projet économique ouvertement social-libéral - offre un choix clair aux socialistes et à la gauche en général, au regard d'une autre proposition, plus interventionniste sur le plan économique mais aussi plus libérale pour ce qui concerne les questions de société (incarnée par EELV notamment). Il faudra voir en 2017 comment ces deux propositions s'incarnent et laquelle l'emporte à gauche face à celles de la droite et de l'extrême droite.

 


- Le NOUVEL Obs. : La gauche est devenue électoralement dominante en 2012 à un moment où sa décomposition doctrinale était déjà très avancée. Qu'est-ce qui n'a pas été fait selon vous et quelle serait la thérapie de choc à adopter ?

Eric Fassin : L'hégémonie idéologique de la droite décomplexée repose sur une gauche complexée. Nos gouvernants se croient réalistes ; en fait, ils croient seulement que la réalité est de droite. Pour compenser, ils prétendent se rapprocher du peuple en s'en prenant aux Roms, par exemple. C'est parier sur l'idée que le peuple serait de droite. Il faut inverser la logique : revendiquer une idéologie de gauche. C'est ainsi qu'on pourra enfin espérer rencontrer un électorat de gauche.

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21 juillet 2014 1 21 /07 /juillet /2014 14:40
Communiqué du Front de gauche : Amplifier la solidarité avec le peuple palestinien, défendre le droit de manifester
Sources : par le Front de Gauche le lundi 21 juillet 2014
Ce week-end, la guerre engagée par le gouvernement israélien a franchi un pallier supplémentaire dans l’horreur. Il faut en finir avec cet engrenage meurtrier, ce qui suppose un arrêt immédiat des bombardements et le retrait des troupes israéliennes déployées dans Gaza.
 
Plus largement, il est grand temps de mettre un terme au blocus qui asphyxie Gaza depuis 7 ans, de libérer les prisonniers palestiniens, d’en finir avec la colonisation et de démanteler les colonies existantes en territoires occupés.
Israël doit enfin se conformer au droit international dans le cadre des résolutions des Nations Unies. Une paix juste et durable suppose l’existence de deux états dont un état palestinien dans les frontières de 1967 avec Jérusalem-Est pour capitale.
 
Dès aujourd’hui, la France devrait œuvrer à sanctionner durement le gouvernement Israélien en commençant par mettre tout son poids dans la balance pour que l’Union européenne suspende son accord d’association avec Israël qui accorde des avantages économiques à ce pays.
 
Malheureusement, le gouvernement français n’en prend pas le chemin. Au contraire, le président de la République, son premier ministre et sa diplomatie apportent leur soutien à l’agression israélienne. C’est d’autant plus inacceptable que François Hollande s’était engagé en 2012, à agir pour favoriser la paix et la sécurité entre Israël et la Palestine, à soutenir la reconnaissance internationale de l’Etat Palestinien (engagement 59 du candidat François Hollande).
 
Le Front de gauche dénonce également la décision du gouvernement Valls qui a conduit à l’interdiction de la manifestation de samedi 19 juillet à Paris au motif d’incidents intervenus le dimanche précédant dont l’origine ainsi que le rôle de la Ligue de Défense Juive donnent lieu à des versions contradictoires.
 
Cette interdiction constitue une atteinte intolérable au droit de manifester ; elle témoigne aussi du choix du Premier Ministre d’une stratégie de la tension qui est insupportable car potentiellement dangereuse pour le débat et la démocratie !
 
Dans de nombreuses régions comme dans les grandes villes européennes, les manifestations se sont déroulées avec des cortèges massifs et sans heurts. Ce qui confirme que l’interdiction de manifester et le dispositif policier et sécuritaire déployé sont à l’origine des tensions.
 
Le Front de Gauche participera aux prochaines manifestations prévues en solidarité avec le peuple palestinien et appelle à la poursuite de la mobilisation et à son renforcement car il y urgence !
 
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Pour en savoir plus :

- Mon dossier Palestine

- pour le Parti de Gauche, François Hollande est complice des crimes du gouvernement israélien

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12 juillet 2014 6 12 /07 /juillet /2014 10:58
"Les socialistes dissidents doivent s'autonomiser" Jean-Luc Mélenchon

Le 3 mai 2014, Jean-Luc Mélenchon était l'invité d'i>télé.

Il a appelé les socialistes dissidents à "s'autonomiser" en créant un groupe politique à l'Assemblée nationale, ce qui permettrait de faire contrepoids à gauche à la ligne politique adoptée par Manuel Valls.

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12 juillet 2014 6 12 /07 /juillet /2014 09:40
Une question qu’il faudra maintenant trancher une bonne fois

Marie-Noëlle Lienemann et la tambouille de « l’alternative à gauche »

 

Sources : Blog de Jean-Luc Mélenchon

Dans le registre des couteaux sans lame, on sent bien que la gamme va s’élargir bientôt fort vite. Après avoir voté le budget Valls, Marie-Noëlle Lienemann tenait une presse le 11 juillet avec l’ancien ministre Paul Quilès, flanqués de Pierre Laurent du PCF et Emmanuelle Cosse d’EELV.

 

Il s’agissait de faire connaitre un document « base de travail » pour « une stratégie alternative » à gauche. On a compris qu’il s’agissait d’un travail confidentiel mené de longue main. Pourtant, il y a une semaine, nous rencontrions, avec le même Pierre Laurent et tout le Front de Gauche, Emmanuelle Cosse et l’état-major des Verts. Ni Pierre Laurent ni Emmanuelle Cosse n’évoquèrent la prochaine parution de cette plateforme. Mais il est exact qu’Emmanuelle Cosse répondant à Clémentine Autain récusa sans ambiguïté que son projet soit de « créer une plateforme alternative ». Puis, répondant à Martine Billard, elle confirma que son intention était bien d’organiser un dialogue avec le PS lui-même. Son objectif assumé est de former « la passerelle entre l’autre gauche et le PS ». L’initiative Lienemann/Quilès a le même projet de façon concurrente.

 

- On sait où ça coince.

Détail révélateur, Lienemann se donne la peine d’informer que sa « porte n’est pas fermée » au Parti de Gauche, dont elle affirme qu’il « n’a pas souhaité s’associer aux travaux » de bricolage qu’elle conduit. Air connu. Cambadélis parle la même langue. L’objectif est le même : briser le Front de Gauche en isolant les irréductibles opposants à l’alliance avec le PS. Cela ne peut aboutir d’aucune manière. Le Front de Gauche n’est pas une étiquette, c’est une stratégie. Il est tout à fait possible de débaucher des composantes du cartel comme les élections municipales l’ont montré. La stratégie ne sera pas abandonnée pour autant, comme l’ont également montré les élections municipales.

 

Evidemment, comme dit le proverbe berbère : « la seconde fois que tu te fais avoir, c’est de ta faute ». Nous sommes prévenus. La samba des sénatoriales menées de nouveau sans vergogne au nom du Front de Gauche montre que l’addiction au PS est parfois irrémédiable. Elle recommencera avec les cantonales et les régionales, et ainsi de suite.

 

Nos devoirs pour la rentrée comportent donc une question qu’il faudra maintenant trancher une bonne fois pour que le peuple à son tour puisse trancher par ses bulletins de vote, le moment venu.

 

 

- Rappel :

Selon Jean-Luc Mélenchon, "Les socialistes dissidents doivent déjà s'autonomiser"

 

Le 3 mai 2014, Jean-Luc Mélenchon était l'invité d'i>télé.

Il a appelé les socialistes dissidents à "s'autonomiser" en créant un groupe politique à l'Assemblée nationale, ce qui permettrait de faire contrepoids à gauche à la ligne politique adoptée par Manuel Valls.

- L'analyse de Martine Billard co-secrétaire du Parti de Gauche

Sources : Blog de Martine Billard

Ces derniers jours ont été riches en rebondissements politiques dont certains surprenants et d'autres sinistres.

 

En début de semaine, le vote sur le collectif budgétaire de la sécurité sociale voyait cette fois-ci 35 députés PS s'abstenir, ainsi que 13 députés EELV et 1 députée apparentée EELV voter contre. On ne peut que regretter qu'ils n'aient pas tous voté contre ce qui aurait provoqué le rejet de ce budget qui prévoit entre autres le gel de plusieurs prestations sociales. C'est un petit pas par rapport à l'approbation du collectif budgétaire de la semaine précédente. Mais lorsqu'on voit que ce soir sénateurs PS et EELV ont tous adopté la loi qui organise l'ouverture du transport de voyageurs au secteur privé, on se dit que cette opposition est bien timide et surtout pas à la hauteur des enjeux .

 

Le problème n'est pas d'attendre le prochain congrès du PS pour y prendre la majorité, ce qui est fort honorable bien que je doute totalement du fait que le PS redevienne un parti de gauche. Je crois que l'évolution au centre, comme tous les autres partis de la social-démocratie européenne, est maintenant bien ancrée.

 

Il est urgent de répondre aux attentes de toutes celles et ceux qui n'en peuvent plus dans ce pays. Pour les plus riches, pas de problème, tout va bien pour eux, les 500 les plus fortunés ont vu leur patrimoine progresser de 15% sur un an et 67 d’entre eux ont un patrimoine qui dépasse le milliard d'euros. Cela ne les empêche pas de se plaindre constamment qu'ils sont étranglés par les impôts !

 

Au sénat, les parlementaires du PCF ont voté contre les collectifs budgétaires et la loi ferroviaire comme les députés l'avaient fait avant eux.

 

- Aussi, quelle n'est pas ma surprise de trouver le 8 juillet, le communiqué ci-dessous du PCF

 

Sénatoriales : Pourquoi le Parti Socialiste fait le mort ?

Suite aux résultats des municipales, la majorité du Sénat risque de passer à droite au lendemain des sénatoriales de septembre. Pour la première fois depuis 1945, le Sénat pourrait compter en son sein des sénateurs d’extrême-droite !

Comment expliquer le silence de la direction nationale du Parti Socialiste vis à vis de plusieurs forces de gauche dont le PCF sur la possibilité dans plusieurs départements de réélire un sénateur de gauche ou d’en gagner un du fait de la proportionnelle. Il n’est pas pensable que le Parti Socialiste préfère un Sénat avec une majorité de droite plutôt qu'une majorité de gauche, certes insoumise à des réformes gouvernementales.

Bien évidemment, un accord sur tout le territoire national est rendu extrêmement difficile en raison des divergences profondes au sein des forces de gauche. Le PCF n’en fait pas la demande : il demeure en revanche disponible pour examiner certaines situations départementales qui, selon le mode de scrutin (majoritaire ou nouvellement proportionnel dans 17 départements) permettraient de battre la droite.

Des accords départementaux sont encore possibles dans le respect mutuel et sans rien retrancher de nos différences et de nos divergences sur l’avenir de notre pays, sur des réformes gouvernementales et particulièrement celles des collectivités territoriales.

L’apport des cinq sénateurs et sénatrices du groupe CRC renouvelables est décisif dans l’objectif du maintien d’une majorité de gauche. Comment ne pas y voir un atout contre l’élection d’un(e) président(e) de droite et pour l’élection d’un(e) président(e) de gauche au Sénat ? Le 28 septembre, le PCF entend offrir le moyen de s’exprimer, par leur vote, à des milliers de grands électeurs de gauche.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

- J'avoue que les bras m'en tombent.

Il n'y a pas de majorité gouvernementale au sénat actuellement. Les sénateurs communistes votent assez souvent et à juste titre contre les projets de loi présentés par le gouvernement et encore ces dernières semaines contre les collectifs budgétaires et contre la loi ferroviaire. On ne voit donc pas quel serait l'intérêt du PS de faire élire des sénateurs du PCF qui ensuite vont aller voter contre lui. Et comme de plus, le PS sait qu'il va perdre des sénateurs et la majorité relative au sénat, il est bien décidé à ne partager aucun des postes qu'il pourrait sauver. Europe Ecologie l'a bien compris qui, devant le refus du PS de lui proposer une alliance lui permettant d'obtenir un ou plusieurs sénateurs, a décidé de présenter des listes autonomes.

 

- Pourquoi le PCF n'en fait-il pas autant ? Pourquoi une telle posture de quémandeur ?

Pourquoi ne choisit-il pas de présenter des listes du Front de Gauche partout, représentant bien sûr la diversité du FdG et non des listes PCF qu'on est prié de soutenir sans discuter sous peine d'être traité de diviseur. Voilà ce qui serait la bonne stratégie : des listes autonomes du Front de Gauche faisant campagne contre la réforme territoriale pour la 6ème République, contre la politique d'austérité et le Grand Marché Transatlantique et leurs conséquences sur les collectivités territoriales.

 

Le PCF se plaint du silence du PS mais a tout simplement oublié de discuter avec ses partenaires du FdG.

 

Pour le PG, c'est clair, nous sommes cohérents : aux sénatoriales, nous ne soutiendrons aucune liste avec le PS.
 

Aujourd'hui Pierre Laurent participait à une conférence de presse avec Marie-Noëlle Lienemann (PS) et Emma Cosse (EELV), pour lancer un "nouveau pacte majoritaire à gauche". A cette occasion il déclarait «ce rassemblement est impossible autour de l'actuelle politique gouvernementale».

 

Or ce soir, nous apprenons que Pierre Pierre Laurent se rendra à l'université d'été du PS à La Rochelle pour participer à une table ronde avec Jean-Christophe Cambadélis, Emma Cosse (EELV), Jean-Michel Baylet (PRG), Robert Hue (MUP) et Jean-Luc Laurent (MRC) dont "L'idée est d'avoir une discussion globale et stratégique sur l'unité de la gauche", selon Daniel Assouline."

 

- Quelle photo de famille, Unité de la gauche avec le PS qui mène la politique que nous subissons en ce moment ?

Avec Jean-Marie Le Guen qui n'a pas hésité à traiter de "pseudo-socialistes" les quelques députés PS qui osaient émettre des critiques sur la politique économique et sociale actuelle ?

 

Ce qui en restera n'est pas que Pierre Laurent voulait convaincre les militants PS présents de rompre avec la politique du gouvernement. Non, le symbole ce sera, ils sont tous ensembles pour s'entendre entre eux.

 

Voilà qui va réjouir toutes celles et ceux qui chaque jour se demandent ce que ce gouvernement va encore pouvoir inventer pour leur réduire le peu de droits qui leur restent. Discuter avec toutes celles et ceux notamment au PS qui sont critiques avec la politique gouvernementale, bien sûr. Mais là c'est autre chose : c'est une mise en scène pour montrer que le PS n'est pas isolé et que le gouvernement est soutenu.

 

Quelle erreur d'y aller !

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9 juillet 2014 3 09 /07 /juillet /2014 18:25
Le Front de gauche et la tectonique des pauvres

Sources : Cerises en ligne et Ensemble

Comment comprendre que le Front de gauche échoue à constituer une force politique puissante, un front populaire. Pour le sociologue Richard Dethyre, son problème majeur est précisément de s’intéresser, de s’adresser et faire avec les catégories populaires, et tout particulièrement avec les chômeurs, les précaires et tous les "sans".

 

L’échec du Front de gauche prend sa source dans son incapacité à s’enrichir de ce qui pourrait faire sa force. Le vote des chômeurs, des jeunes, des ouvriers pour 30 à 35 % d’entre eux pour le FN est analysé chez "nous" avec ce qui me semble être une distance sociale qui éclaire ou révèle la nature du problème que je voudrais développer ici. Chacun peut sans mal établir un lien entre ce vote, les abstentions massives, la crise sociale, la crise de confiance, le désespoir, le sentiment d’abandon… Ce qui me parait plus difficile, c’est d’évaluer réellement les ruptures que cela recouvre, et de tenter d’y pénétrer. Par exemple, en s’interrogeant sur la disparition du "sujet chômeur" dans les campagnes successives des élections municipales et européennes ; ou en s’interrogeant sur les raisons pour lesquelles aucun maire de la gauche alternative ne tente de réunir ceux qui sont privés de travail afin de leur donner une place, une visibilité politique, de les aider à se rassembler.

 

 

- Culpabilisation et individualisation

S’interroger, c’est se plonger au cœur de la crise de la politique. Hier encore, à la fin des années 90, les maires réunissaient 850 chômeurs à Saint-Denis, 250 à Ivry, 400 à Aubervilliers, 350 à Vitry, et bien d’autres à Champigny, Valenton, Gentilly, Stains, Bobigny, Chevilly, Choisy-le-Roi, Montreuil, etc. En lieu et place de cette belle démarche, beaucoup d’élus ont ces dernières années créé des "forums pour l’emploi" avec stands pour apprendre à établir des CV, évaluer son employabilité… Que s’est-il donc produit pour renoncer à ce qui était si précieux ? Se poser la question, ou tenter d’y répondre, c’est déjà reconnaitre qu’il y a là un problème qui nous concerne directement. Alors, comment décortiquer la chose ?

 

Les campagnes de culpabilisation des chômeurs et la mise en place de suivis personnalisés par les institutions ont fait reculer l’approche collective, l’image du collectif, la responsabilité collective, la mobilisation collective. La massification du chômage n'est plus évaluée comme un phénomène relevant de décisions économiques et politiques. De fait, sur fond de campagne de culpabilisation, l’idée que pour y faire face il faut mettre en place des stratégies individuelles s’est imposée. Les institutions ont multiplié des programmes qui sont baptisés remobilisation, accompagnement. Laissant entendre que le retour à l’emploi passe par la capacité individuelle des chômeurs à être dans le moule duquel ils seraient sortis ou dans lequel ils ne seraient jamais entrés. Ces programmes, à l’efficacité desquels personne ne croit, personne ne veut envisager les effets politiques et sociaux pervers qu'ils produisent.

 

Après les récents résultats électoraux, à lire ce qui est couramment écrit, on croirait que personne n’ose considérer le sujet, comme s’il nous renvoyait une image que l’on ne veut pas voir.

 

 

- Un séisme caché, nié

Il nous faut déjà illustrer cette profonde rupture par les chiffres officiels (bien qu’ils soient largement triturés) : il y a 8,5 millions de chômeurs et travailleurs précaires ; 1 offre d’emploi pour 57 demandes, 130 millions de repas distribués au resto du cœur. Il s’agit du marqueur le plus tragique de la France d’aujourd’hui. Après avoir été licenciés, les "fins de droits" font la queue à la soupe populaire. Double humiliation.

 

La massification de la précarité

L’émiettement du travail, c’est notamment l’explosion du nombre de contrats à durée déterminée : en dix ans, il y a eu + 120 % des CDD de moins d’un mois et + 80 % des CDD de moins d’une semaine. 45 % des inscriptions mensuelles à Pôle emploi sont des fins de CDD. S’y ajoute le recours systématique aux emplois aidés.

35 % des SDF ont une feuille de paie. 10 % des plus pauvres ont 38 % de leurs ressources qui dépendent des allocations. Notre solidarité glisse vers un système de perfusion sociale minimale. La charité privée vient en relai de la charité publique. 2 290 000 personnes sont au RSA.

 

 

- Cette réalité là, un véritable séisme, n’a pas sa place dans la vie politique d’aujourd’hui. Pourquoi ? Qu’est ce qui est en jeu ?

Au-delà des chiffres, la connaissance de ce qu’ils représentent est essentielle. Parmi les forces militantes de la gauche alternative une distance sociologique s’est établie avec ce peuple. On assiste à une certaine "gentrification" de la gauche alternative. Qui révèle et alimente une désincarnation de son rapport à la société réelle, une distance avec le peuple tel qu’il est aujourd’hui ; à cela s’ajoute le dictat des comptables et des gestionnaires. Ainsi, rien ne pourra bouger si nous ne modifions pas la place que doit avoir le peuple dans une démarche de rassemblement : réelle, concrète, symbolique. Il faut avoir l’ambition première d’être POPULAIRE. Comment ?

 

C’est un long, mais indispensable processus. Bougeons nos représentations, notre manière de voir, nos priorités, notre militantisme. Mettons-nous résolument aux côtés de ceux qui sont délaissés, méprisés, humiliés, oubliés : comment parler du peuple sans rien partager avec lui ? J’ai lu pas mal de contributions intelligentes, mais aucune ne m’a convaincu quant à une réponse à ce besoin crucial.

 

Quelques fois, quand l’actualité est dramatique, Pôle emploi apparaît comme un lieu actif d’invalidation identitaire pour ceux qui y sont soumis… Mais qui s’y rend en portant un regard militant ? Quelles expériences échangeons-nous ? De quelles nouvelles pratiques est-il question ? Pour moi, la plus grande défaite, c’est de ne pas voir que le terrain de combat essentiel se trouve là, dans ces lieux de détresse. On peut en fait y puiser les arguments, les sujet et … les mots, y fourbir les armes. Comment faire émerger face aux logiques libérales la parole du peuple qui dit "Non, je ne peux pas payer les transports, ni mon loyer" ? Comment créer un rapport des forces à Pôle emploi, qui va vous demander pour la troisième fois le papier que vous avez déjà fourni, qui aura perdu votre dossier, qui soutiendra que vous ne l’avez pas déposé ? Nous sommes remplis d’émotion lorsque les frères Dardenne ou Robert Guédiguian mettent en scène la réalité sociale… Le réel est tout aussi émouvant.

 

On assiste à une certaine "gentrification" de la gauche alternative, qui révèle et alimente une désincarnation de son rapport à la société réelle, une distance avec le peuple tel qu’il est aujourd’hui.

 

 

- A-t-on réellement idée de ce qu’endurent tous ceux qui se heurtent aux guichets de la Sécu, de Pôle emploi ?

Ou celui qui subit l’accueil glacial en mairie pour n’avoir pas payé la cantine ou la colo, ou pour qui les courriers de sommation se succèdent. Ce sont les mêmes qui ne peuvent pas payer de loyer, les mêmes dont les enfants arrivés en âge de partir resteront à la maison surpeuplée. Mais qu’y pouvons-nous ? Nous ne sommes pas responsable du manque de logement, ce sont les gouvernements… Et comme le dit un maire adjoint : « On est bien obligé de faire un premier tri en fonction des ressources, il n’y a pas de logement. »

 

Que veut dire être privé de resto, de vacances, de projets ? Jamais de ciné, la voiture trop vieille que l’on ne peut plus réparer. Tout cela, pour le savoir, il faut le partager. Les plus fragiles sont poussés à une consommation à haut risque. Si tu n’as pas, tu n’es pas, dit la publicité ! À l’angoisse de ne pas pouvoir s’ajoute la honte, les humiliations, le sentiment de ne pas être capable. Ne jamais être en paix, et puis abandonner, ne plus demander, renoncer tellement tout parait difficile, impossible, et puis ruminer. Comme une lente maladie, la dérive s’impose et fait passer des millions de personnes de l’autre côté de la rive.

 

Eh bien, toutes ces personnes ne rencontrent pas ceux qui devraient les entendre, leur faire confiance, organiser avec eux l’action. Alors s’installe très vite en lieu et place de la citoyenneté un "Tous les mêmes" désignant tous "les politiques".

 

 

- 180 jours dans les Assedics

Lorsque nous avons créé l’APEIS en 1988, avec Malika, Rabah, ceux d’Arcueil, d’Ivry, de Bonneuil et des 14 villes communistes du Val-de-Marne, nous sommes restés 180 jours et souvent les nuits dans l’Assedic de Créteil, puis dans les autres antennes. Grâce à cette pratique nouvelle et volontaire, notre vision des possibles a totalement changé.

 

En l’absence de notre affirmation politique sur le sujet, ce sont les structures institutionnelles qui ont pris la place. Elles sont d’une froideur cruelle face à ces réalités. Leurs certitudes étouffent le sujet. Elles ont pris l’espace qui devrait être occupé par la citoyenneté. Elles construisent les cloisons étanches entre les catégories sociales.

 

Nous n’avons pas vu que le combat essentiel ne devait pas se mener centralement CONTRE les inégalités mais POUR l’égalité. C’est le socle majeur qui définit les droits de chacun et de tous, base d’adhésion à la société.

 

Y-a-t-il un lien entre ce constat et cette lente mais prévisible Bérézina électorale ? Ça vaut la peine de s’y arrêter. Par exemple, se demander comment est perçu l’écart sociologique que j’ai souligné entre les responsables (militants ou non) disposant d’un capital culturel, économique et social bien au-dessus de la majorité et les précaires, ouvriers, travailleurs pauvres, jeunes sans emploi ? Il faut lire à ce propos Pays de malheur, de Stéphane Beaud et Younes Amrani, où un jeune de cité écrit à un sociologue. Cette lecture m’a fait encore mieux évaluer la crise de l’égalité qui nous frappe. Nous n’avons pas vu que le combat essentiel ne devait pas se mener centralement CONTRE les inégalités mais POUR l’égalité. L’égalité en droit, au logement, à l’éducation, au travail, à la santé, à la justice. C’est le socle majeur qui définit les droits de chacun et de tous, base d’adhésion à la société, et qui construit le sentiment d’appartenance et la citoyenneté.

 

On constate le creusement de l’écart entre les riches et les pauvres… En réalité, c’est plus que ça. C’est une question d’échelle. Un continent, celui des gens précarisés, des chômeurs, des pauvres (salariés ou non), des immigrés, des sans-papiers, des mères célibataires, des jeunes dans la galère, des vieux sans ressources se détache du reste de la société. C’est la tectonique des pauvres. La planète des riches se réchauffe, mais ce sont les pauvres qui grelottent d’indifférence et de désespoir.

 

Personne bien sûr n’est indifférent, mais la précarité semble être un puits sans fond, alors, on s’indigne, mais que fait-on ? « a ne sert à rien de culpabiliser », m’a-t-on souvent dit, « c’est aujourd’hui plus dur qu’hier », puis « Il n’y a pas de perspectives », puis « Il y a moins de force qu’avant », puis « C’est plus le patron qu’on a en face comme avant », puis « Il y a plus d’individualisme », et puis, et puis…

 

Qu’est-ce qui peut expliquer ce vide, cette froideur, cette désincarnation de la vie politique ? Faut-il des abbés, des jeunes acteurs révoltés, qui, une nuit de Noël, transforment les quais d’un quartier bobo en camp de réfugiés dans la cinquième puissance mondiale, pour évaluer cette disqualification ? Où sont-ils les mouvements de révolte des "révolutionnaires" ?

 

 

- Le réel et les représentations

Le peuple, c’est qui le peuple ? Celui des temps chauds de la Commune à 68 en passant par 36 ? Le mouvement des "sans" ? Quelle représentation en avons-nous dans les temps glacés actuels ? Est-ce celle que nous renvoient les électeurs "inclus ? Consciemment ou non, les gestionnaires, sous la pression des populations "prescriptrices", essaient de justifier les politiques de solidarité locales qui subsistent.

Le risque, s’il n'y a pas de visibilité humaine, de dynamique politique, c’est que ces populations considèrent qu'elles sont un fardeau qui coûte cher. Se creuse ainsi le fossé de notre culture de solidarité et d’égalité (56 % des sondés considèrent que les chômeurs ne font pas tout ce qu’il faut…).

 

C’est un danger supplémentaire à souligner : en l’absence de mouvement socio-politique s’agrègent les idées droitières préconçues sur le pauvre et l’immigré. Apparaît le danger de la mise en concurrence des égaux (comme dit Robert Castel). Je crois qu’il faut se rappeler qu’un problème social ne sensibilise que s’il est reconnu comme tel, s’il est identifiable dans le champ politique, s’il pèse sur un rapport des forces, s’il émoustille les consciences. Notre sujet n’échappe pas à cette loi des mouvements sociaux (chômeurs, sans papiers, discriminés de toutes sortes).

 

Lorsque dans "Retour sur la condition ouvrière", Stéphane Baud et Michel Piallou interrogent leurs étudiants sur le nombre d’ouvriers en France, la réponse est très éloignée du nombre effectif de 6,7 millions… Les auteurs évoquent la disparition de l’espace socio-mental dans la société de la classe ouvrière. Quelle représentation a-t-on du peuple aujourd’hui ? C'est bien difficile à analyser, mais on peut partir de quelques ouvrages du côté de la sociologie, qui permettent de plonger dans le champ des représentations et ce qui les alimente. De fait, la classe ouvrière d’aujourd’hui n’est pas celle d’hier. Les chômeurs ne sont pas une classe et les précaires non plus.

 

 

- Pas bien avec les chômeurs, pas bien avec le travail

Le précaire n’est pas à la marge. Il est la figure emblématique du salariat, la variable d’ajustement comptable que l’on considère comme un coût à diminuer. Notre syndicalisme n’est pas en phase avec ce mouvement profond dans le travail.

 

Notre société est "CDI-centrée", "plein-emploi centrée". Bien que la discontinuité dans le travail pour des millions de salariés soit une réalité non choisie, nous continuons dans nos représentations et nos pratiques à évoquer et percevoir le travail "comme il était avant". Il faut un mouvement comme celui des intermittents pour que cette forme d’emploi (contrats courts, travail non rémunéré) qui s’impose désormais dans le monde du travail éclaire notre lanterne sur le sujet. Le précaire n’est pas à la marge. Il est la figure emblématique du salariat aujourd’hui et encore plus demain, la variable d’ajustement comptable que l’on considère comme un coût à diminuer. Le syndicalisme n’est pas en phase avec ce mouvement profond dans le travail. Dominique Lhuillier, professeur au Conservatoire national des arts et métiers, remarquait que la recherche en psycho du travail se concentrait sur le travail, sur la souffrance au travail. Plus rien ou presque n’est étudié, publié sur "l’activité" des chômeurs. Pourtant, la souffrance au travail provoquée par des exigences intenables, un management de folie n’est-elle pas alimentée avant tout par la pression exercée sur le salariat par la menace du chômage ?

 

La coupure entre les partis et la société s’est aggravée. Elle a été spectaculaire à l’orée des années 90. Malgré les sans, Droit au logement, les mouvements des chômeurs comme auparavant ceux des femmes, la marche des beurs…, les grilles de lectures sont bureaucratisées et les appareils sont glacés. Les institutions, la comptabilité se sont souvent substituées à la politique. "Nos" élus ne peuvent plus s’appuyer sur les structures politiques et l’entourage intellectuel d’hier qui leur permettait de reprendre la main sur le sujet et de soutenir, voire d’aider concrètement au rassemblement des diverses catégories de surexploités.

 

Pourtant, une solidarité populaire s’exerce quotidiennement dans les cités en dehors de la représentation que nous en avons. Le pire, c’est que cette distance remarquable nous prive d’un maillon essentiel, mais surtout de l’intelligence qu’ils ont, de la capacité à alimenter ce qui nous manque de la vie réelle, de l’urgence et de la dynamique populaire dont on est privé.

 

Alors, que faire ? Je ne dispose évidemment pas de réponse "clef en main". Mais je suis persuadé qu’il n’y a pas d’autre chemin que celui de réhabiliter dans un même mouvement le collectif et l’altérité, le goût des autres et la démocratie. Cette voie (comme l’écrit Edgar Morin) implique fort heureusement plusieurs entrées, dont beaucoup ne sont pas balisées par le siècle passé.

 

Où sont-ils les mouvements de révolte des "révolutionnaires" ? Les militants investis dans ce champ ont besoin de l’oxygène qu’apporteraient une réflexion et une action faisant du chômage et de la précarité un champ de batailles politiques.

 

Toutefois, je veux partir de mon expérience pour la mettre en débat. Mes 11 années dans l’APEIS me permettent encore aujourd’hui de vivre avec mes amis une expérience formidable : la troupe de théâtre des Z’en Trop. Elles, ils représentent une ressource d’intelligence et de force pour transformer le monde, même s’ils sont largement méconnus et sous-estimés. Mais ils s’efforcent de faire en sorte de réincarner la politique par cette citoyenneté sans laquelle la démocratie s’asphyxie.

 

Faut-il se rappeler de la sentence de Warren Buffett : « Il y a une guerre de classe, c’est nous qui la menons, c’est nous qui la gagnons. » Des défaites idéologiques, nous en additionnons beaucoup trop. On ne transforme pas la société sans mener et gagner les batailles, toutes (même celles qui nous paraissent éloignées de notre périmètre social et culturel). Les militants investis dans ce champ ont besoin de l’oxygène qu’apporteraient une réflexion et une action faisant du chômage et de la précarité (aux conséquences extrêmes) un champ de batailles politiques. Car en réalité, l’oxygène est le produit dialectique entre le rapport à la société réelle et notre connaissance, notre action sur celle-ci.

 

Notre expérience du mouvement des chômeurs nous apprend qu’un lien étroit peut se tisser, une dynamique quasi fusionnelle se forge entre la certitude qu’il faut répondre à des urgences sociales et la nécessité (et la nature) du changement politique. Elle est alimentée par les implications personnelles : je partage, je suis indigné, je le fais partager, on se révolte… Ce refus s’enracine dans une culture qui s’identifie par un goût de la justice et de l’égalité et de la fraternité, que notre culture politique nous a aussi inculqué.

Le Front de gauche et la tectonique des pauvres

Les dernières fois où je suis allé au Resto du cœur, nous avons discuté pour les inviter à voir notre pièce, intitulée Comment ils ont inventé le chômage ? Nous en avons chanté la chanson et, ensemble, travaillé à mettre à distance la honte en évoquant les mécanismes économiques et politiques. Ça nous a fait du bien, ça a fait du lien. Mais il faudra plus. Beaucoup plus, partout et souvent.

 

L’alternative ne peut se construire qu’avec ceux qui semblent avoir disparu comme sujet politique mais qui au fond sont au centre de notre monde du travail. Notre groupe des Z’en Trop est un réel modèle de ce salariat d’aujourd’hui : sans emploi, mais pas sans activité… Sans imaginer que nous sommes exceptionnels, les projets politiques qui permettent de s’adresser aux précaires et chômeurs de Saint-Denis et d’ailleurs ne sont pas assez nombreux. Eh bien, il faut donner de l'éclat politique à ces événements, les soutenir, faire des petits avec... C’est la raison de notre entêtement.

 

Richard Dethyre, 27 juin 2014. Publié sur le site de Cerises.

Une remarque : l’expérience du mouvement des chômeurs, c’est aussi celle de militants expérimentés de la gauche investis de responsabilités élargies. Ni Claire Villiers, ni Christophe Aguiton, Malika Zediri, François Dessanti, Robert Crémieux, ni moi et bien d’autres n’avons été remplacés.

 

Note :

Richard Dethyre : sociologue,  il crée en 1988 l’association pour l’emploi, l’information et la solidarité (APEIS). En 1992, il publie "La révolte des chômeurs" (Robert Laffont), suivi en 1998 de Chômeurs "La révolte ira loin" (La Dispute), puis chez le même éditeur Avec les saisonniers Une expérience de transformation du travail dans le tourisme social, en 2007. En 2010, il coordonne avec Karine Delpas le premier Forum social des saisonniers. En 2012, il est l’un des auteurs de "L’envers de la fraude sociale", ouvrage collectif sous la direction de Philippe Warin (La Découverte). La même année, il participe à la création de la troupe des Z’en Trop. Il est l’auteur de la pièce "Comment ils ont inventé le chômage", mise en scène Muriel Righeschi

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4 juillet 2014 5 04 /07 /juillet /2014 13:41
Clémentine Autain ne tire pas tous les enseignements des derniers scrutins électoraux
Clémentine Autain se déclare : « Pour un rassemblement plus large que le FDG ! »

 

Sources : Politis n°1305 par Denis Sieffert et Léa Ducré

Pourquoi le rejet de la politique menée par le gouvernement n’a-t-il pas profité au Front de gauche ? Clémentine Autain (porte parole d'Ensemble composante du Front de Gauche) livre sa lecture des résultats et les leçons à en tirer. Elle appelle les forces politiques qui le composent à s’unir dans un projet attractif et à s’ouvrir dans une organisation politique plus souple, plus horizontale, qui lui permette de retrouver un véritable élan populaire.

 

- Politis.fr : Quel est votre sentiment au lendemain de ces élections européennes ?

Clémentine Autain : Comme beaucoup de personnes de gauche, je suis malheureuse de voir cette France bleu marine, cette abstention structurelle et la gauche défaite. Cependant, je ne partage pas cette idée de « séisme politique ». Même s’ils sont pires que prévus, les résultats me semblent raccords avec la situation telle qu’elle se trame depuis trente ans. Les politiques néolibérales produisent la désespérance qui est le terreau de l’extrême droite. Face à la crise de régime et de civilisation que nous traversons, la tentation du repli, d’un retour à l’ordre ancien est forte. C’est à nous d’imaginer l’autre chemin, celui de l’émancipation humaine, et de rendre cette voie désirable.

 

 

- Politis.fr : Est-ce que, tout de même, il n’y a pas eu certaines erreurs d’analyse sur le Front national ?

Clémentine Autain : Bien sûr. Dire qu’il y aurait 25 % de fascistes en France serait absolument faux. Il est important d’observer que le parti de Marine Le Pen n’est pas celui de Jean-Marie Le Pen. Le Front national a fait une mue qui le sort de ses outrances d’hier. Ça ne veut pas dire que ce n’est plus un parti raciste, xénophobe, autoritaire, mais il veut aujourd’hui rentrer dans le cadre démocratique. Marine Le Pen veut prendre le pouvoir et, pour cela, flirte avec la droite classique. Et elle capte les préoccupations sociales. Cela pose à la gauche une difficulté réelle. Pourtant, le Front national ne défend pas la protection sociale. Il porte le discours sur les « assistés », contre ces Français prétendus fainéants. Il est du côté de la propriété et du libéralisme économique. L’extrême droite se positionne à la fois dans l’antisystème et dans la réaction radicale. À nous de dire la dangerosité de son projet, notamment pour les catégories populaires. Il faut assumer la confrontation franche avec lui tout en sachant que c’est l’attractivité de notre propre projet qui sera déterminante pour faire reculer le FN. Cela suppose de nous dissocier plus clairement de la politique du gouvernement et de la majorité du PS.

 

 

- Politis.fr : Une autre question se pose tout naturellement : pourquoi n’est-ce pas la gauche de la gauche qui profite de ce contexte de crise ?

Clémentine Autain : La social-démocratie est en déroute partout en Europe, ce qui laisse en effet des potentialités fortes pour une gauche de transformation sociale et écologique. Mais ce n’est pas mécanique. Pourquoi en France le Front de gauche ne remporte pas la mise comme Syriza ? En Grèce, la mobilisation sociale est vigoureuse après les dégâts de neuf plans de rigueur. La France semble, elle, frappée de paralysie devant toutes ces alternances qui ne changent rien, face à ce gouvernement dit de gauche qui mène une politique de droite. Le Parti socialiste a une responsabilité majeure dans la situation actuelle. La politique de François Hollande a emporté toute la gauche, mais la défaillance mortifère du PS ne suffit pas à expliquer pourquoi le Front de gauche n’a pas davantage la main aujourd’hui. Nous devons balayer devant notre porte. On entend dire qu’il faudrait minorer le score du FN parce qu’il y a eu une forte abstention. Comme si tous ceux qui se sont abstenus n’auraient jamais voté à l’extrême droite ! Ce qui compte, c’est de voir quel est le camp qui a réussi à mobiliser le plus. Force est de constater que le FN a réussi, pas nous. Le Front de gauche n’a pas retrouvé les dynamiques de 2005, quand nous avons dit non au traité constitutionnel européen, et de 2012 autour de Jean-Luc Mélenchon pour la présidentielle. Cet essoufflement est la conséquence à la fois d’erreurs tactiques récentes et de difficultés de fond.

 

 

- Politis.fr : Pouvez-vous préciser l’analyse que vous faites de ces erreurs ?

Clémentine Autain : Au lendemain de la présidentielle et des législatives, le Front de gauche n’a pas su imaginer une architecture organisationnelle qui permette de pérenniser cette implication. Il s’est coupé de l’élan citoyen et militant. Le cartel d’organisations s’est alors très vite transformé en tête-à-tête mortifère entre le Parti communiste français et le Parti de gauche. Si le fonctionnement pyramidal et caporalisé peut avoir une efficacité à très court terme, il ne marche plus pour structurer et développer un espace politique dans la durée. Tant que nous ne proposerons pas une organisation politique plus souple, plus ouverte, plus horizontale, soucieuse du renouvellement de ses élus, porte-parole et cadres politiques, nous n’aurons pas cette force politique, sociale et intellectuelle porteuse de majorités.

 

 

- Politis.fr : Mais il y a aussi des causes plus profondes…

Clémentine Autain : Oui, le problème, c’est le travail de refondation qu’il reste à produire. Cette ambition s’exprime depuis longtemps mais la rénovation n’est pas prise au sérieux dans les lieux de direction. Le Front de gauche a des partis pris nets et identifiants. Il combat les logiques capitalistes et productivistes, il défend les retraites, le système social, la hausse des salaires, mais son projet n’est pas propulsif, il apparaît souvent comme porteur de recettes anciennes. Il faut faire un effort de novation : s’ouvrir sur la société, à la pensée critique contemporaine, au monde culturel pour inventer un nouvel imaginaire, des mots et une forme politique nous permettant d’être audibles et entraînant dans le monde contemporain. Car il ne s’agit pas de revenir à, mais d’aller vers. De nouvelles questions doivent être traitées, comme le consumérisme ou le droit à la ville. L’articulation entre individu et collectif, comme entre égalité et liberté, mérite d’être repensée. Si nous n’avons pas cette audace de l’expérimentation nouvelle, nous irons toujours dans le même mur.

 

 

- Politis.fr : Dans l’immédiat, quelles initiatives comptez-vous prendre ou soutenir ?

Clémentine Autain : Avant l’été, des initiatives doivent être prises pour initier un rassemblement plus large que le Front de gauche. Il faut tendre la main à tous ceux qui ont envie de s’engager sur cette construction alternative : dans le mouvement social, à Europe Écologie-Les Verts, au PS, à Nouvelle Donne, chez les féministes qui se sont présentées de façon autonome. Je trouve de plus en plus navrant cette coupure entre la gauche et le monde culturel et intellectuel. À Ensemble !, nous portons aussi l’exigence d’une refonte des rapports entre social et politique. Si nous prenons aujourd’hui nos responsabilités en nous renouvelant sur le fond comme sur la forme, il pourrait y avoir un élan populaire pour une gauche de transformation sociale et écologique à la hauteur des défis du XXIe siècle.

 

----------------------------------

Mon point de vue :

Pour un rassemblement plus large que le Front de Gauche certes ! »..... mais pas englobant le PS.... comme s'il n'était pas à la tête du pays et ne menait pas une politique de droite !

 

Pour en savoir plus sur le sujet :

- les articles portant sur le même thème

- Un couac ? Tremblay-Sevran (93) : étrange compromission politique

- Malgré le vote du budget rectificatif de la Sécurité Sociale, Clémentine Autain persiste et signe

- Les "frondeurs" combien de divisions ?

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1 juillet 2014 2 01 /07 /juillet /2014 10:43
(Illustration Stefano Rossetto)

(Illustration Stefano Rossetto)

Sources : Libération

- Des responsables politiques du Front de gauche, d'EELV, de Nouvelle Donne appellent à rompre urgemment avec la politique de Hollande et Valls (voir liste des signataires en bas du texte).

Le choc qu’a représenté la double gifle administrée aux dernières élections n’en finit plus de provoquer des réactions inquiètes, voire effarées. Va-t-on vraiment laisser la gauche s’affaiblir sans limites jusqu’à disparaître comme en Italie ? Pour nécessaires qu’elles soient, ces réactions ont une faiblesse, celle d’être désordonnées, et partant de ne pas dégager une perspective commune et crédible de résistance et de reconquête.

 

La situation que nous connaissons a certainement des causes multiples. Il est donc normal qu’on cherche à les cerner, ce qui suppose que les analyses se développent, s’épaulent voire se confrontent. Mais le rythme de l’analyse n’est pas celui de l’action. Ou plutôt il n’est pleinement productif que s’il est pris dans une dynamique politique qui permette le regroupement plutôt que la culture de son point de vue propre.

 

 

- Or le temps nous presse ; le retard est si grand qu’il va venir bientôt à manquer.

Il existe entre nous un point d’accord fondamental. La responsabilité principale de l’affaissement du soutien aux diverses composantes de la gauche et de l’écologie politique, de la montée de l’abstention et du renforcement de l’extrême droite, réside dans la politique Hollande-Valls. Dans sa forme, tant le reniement des promesses de campagne fut total et provocateur, jusqu’à épouser sans complexe le langage même et les formules de l’adversaire libéral. Et bien sûr sur le fond, les choix successifs durcissant au fur et à mesure la conversion complète aux politiques de la finance et du Medef, imposées y compris contre les mobilisations populaires qui les contestent, qui sont pourtant particulièrement porteuses d’avenir. Politique de l’austérité qui fait pourtant la preuve partout qu’elle est le problème, pas la solution.

 

A quoi il faut ajouter le rejet d’une réelle et profonde transition énergétique, pourtant immédiatement indispensable et potentiellement créatrice de profusion d’emplois non délocalisables. Et l’abandon de la quasi-totalité des réformes sociétales promises, dont l’emblématique droit de vote pour les étrangers non communautaires. Ceci enfin dans une caricature des comportements antidémocratiques d’une Ve République manifestement à bout de souffle.

 

Cette politique est à la racine de nos difficultés. Il faut impérativement rompre avec elle. Il faut qu’elle soit combattue sans compromis (et déjà par le rejet du budget rectificatif, comme, urgemment, par l’abandon du Traité transatlantique) sans quoi il ne restera plus qu’à tenir la chronique d’une catastrophe inévitable.

 

C’est ce à quoi nous appelons. Mais ces appels sont condamnés à prêcher dans le désert s’ils restent dispersés. Nous nous devons de plus de ne pas nous cantonner au refus. Il faut donner à voir les issues possibles. Nous ne manquons pas d’idées pour les énoncer, parfois divergentes c’est vrai, mais bien plus souvent communes sur des points essentiels. Ce qui manque c’est l’affirmation que nous voulons nous y atteler ensemble et un cadre commun pour les discuter. Membres des Socialistes Affligés, d’Europe Ecologie-Les Verts, du PCF, du PG, d’Ensemble !, du Front de Gauche, de Nouvelle Donne, Féministes, Militant-e-s du mouvement social, nous appelons à agir en ce sens. Prendre ainsi nos responsabilités c’est aider à ce que se lève l’indispensable grand mouvement citoyen qui donnera corps à l’alternative à gauche. Nous ne souhaitons pas nous y substituer, mais aider au contraire à son mûrissement.

 

 

- Ne plus tarder, pas une minute.

 

Signataires : Clémentine Autain, porte-parole d’Ensemble !, Julien Bayou, conseiller régional EELV, Françoise Casteix, ancienne députée européenne, Nouvelle Donne, Leila Chaibi, membre du bureau national du PG, Caroline de Haas, militante féministe, François Longérinas, membre du Bureau national du PG, Isabelle Lorand, membre de l’exécutif national du PCF, Elise Lowy, conseillère régionale et membre du bureau exécutif d’EELV, Philippe Marlière, politologue, co-fondateur des socialistes affligés, Myriam Martin, porte-parole d’Ensemble !, Francis Parny, vice-président du conseil régional d’Ile-de-France et membre de l’exécutif national du PCF, Jean-François Pélissier, conseiller régional d’Ile-de-France, porte-parole d’Ensemble !, Danielle Simonnet, conseillère de Paris, secrétaire nationale du PG, Marie-Christine Vergiat, députée européenne, Front de gauche, Marie-Pierre Vieu présidente du groupe Front de gauche Midi Pyrénées.

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28 juin 2014 6 28 /06 /juin /2014 11:05
Des élections européennes aux nouvelles perspectives politiques
 

Source : Martine Billard Co-présidente du Parti de Gauche

Pour tirer les leçons de l’ensemble de la séquence électorale qui vient de se terminer, des affaires à l’UMP, de la politique du gouvernement et des conséquences de tout cela sur la décomposition politique en cours à droite comme à gauche, il était nécessaire de prendre du recul. Et même ainsi, il est encore bien difficile de cerner précisément ce qu’il faut faire dans les mois à venir. C’est le temps du tâtonnement, il faut savoir le reconnaître.

 

 

- Pas la peine de tourner autour du pot : nous avons été battus à l’élection européenne

Les électeurs qui s’étaient mobilisés, portés par l’espoir lors de l’élection présidentielle derrière la candidature de Jean-Luc Mélenchon, n’ont pas vu cette fois-ci la nécessité de se déplacer. Beaucoup a été dit sur les raisons de cette abstention. Il serait erroné et dangereux de l’analyser comme une progression du désintérêt pour la chose publique. En fait, dans le contexte actuel et pour les européennes après le déni du vote démocratique contre le TCE en 2005, nombre d’électeurs n’ont pas vu l’intérêt de se déplacer car ils ont pensé que leur suffrage ne servirait à rien, n’aurait aucun pouvoir sur la modification des politiques européennes. Quant à la frange d’électeurs qui avaient été convaincus par le programme écologique de Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle, ils sont pour beaucoup retournés au vote EELV ou Nouvelle Donne cette fois-ci. Après, il y a tous les problèmes liés à l’image du Front de Gauche ces derniers mois, je ne vais pas développer plus ici car beaucoup a déjà été dit, et je pense que si les conséquences sont réelles, elles n’expliquent pas tout.

 

Dans une telle situation, la première tentation peut être « d’insulter notre électorat », d’un côté les classes populaires qui ne sont pas allé voter, de l’autre les classes moyennes « versatiles ». Pas de plus grande erreur. Il n’y aura pas de révolution citoyenne sans la majorité de la population. Ce n’est donc pas en se repliant sur « la classe ouvrière » parée de toutes les vertus qu’on trouvera la solution pour débloquer la situation. Pour recréer une dynamique, il faut non seulement convaincre les classes populaires, en retrait des élections mais aussi des mobilisations, de reprendre leur place dans le combat pour changer de société. Cela ne se fera pas d’un coup de baguette magique. Ce n’est pas par une incantation au retour sur le terrain -comme si nous l’avions abandonné !- ni à « l’immersion dans les masses », qu’on réglera la question du rapport de force. D’abord, pour ce qui est du PG, nous n’avons que 12 000 adhérents, fatigués à juste titre après 5 années intenses. L’époque où le PC avait des centaines de milliers d’adhérents avec un réseau dense d’organisations dans les communes populaires, de la jeunesse jusqu’aux retraités, est terminée. Et cela ne sert à rien de rêver de le reconstruire. Un seul parti politique ne pourra plus être l’organisateur principal des mobilisations. Sans oublier aujourd’hui le poids du FN et la montée des intégrismes religieux qui détournent nombre de citoyens de la lutte politique vers le conflit ethnique ou religieux.

 

Alors oui il faut résister, mais ce n’est pas la seule somme des combats de résistance qui renversera le système, pas plus d’ailleurs que des heures de débat à ressasser le bilan, sinon nous l’aurions renversé depuis longtemps. Il nous faut trouver l’alchimie entre combats au quotidien indispensables et initiatives politiques globales, articulant anciennes formes de résistances, syndicats et associations, et nouvelles formes qui peuvent apparaître dans la lutte. Mais pour le moment nous ne sommes pas en Espagne. Il n’y a ni mouvement des Indignés ni marées citoyennes en France.

 

La deuxième tentation est le repli sur soi, chacun sur nos partis, qui le PCF, qui le PG, etc., chacun étant évidemment le meilleur et le seul capable de reconstruire le rapport de force. Le repli sur soi amène à considérer que seules « les masses » sont « pures », que tout le reste est politicien. Ce type d’expérience se termine toujours de la même manière : le rabougrissement. J’ai vécu cela à une époque chez les Verts, je connais par cœur. Le NPA a aussi été victime de cette illusion qu’il pouvait se passer de tout le monde, de toute alliance politique. On voit où cela l’a mené.

 

 

- L’isolationnisme ne mène nulle part, sauf au sectarisme.

En période de reflux, il faut au contraire ouvrir les portes, les fenêtres, humer ce qui se passe et être disponible pour toute recomposition, bien évidemment sans tomber dans l’aventure politique ni les combines politiciennes.

 

C’est ainsi que nous avons pratiqué après l’éparpillement des candidatures à la présidentielle de 2007 et le désastre électoral qui s’en est suivi ainsi que la démoralisation et les rancœurs. Cela a pris du temps, des appels par ci, par là, des rencontres. Nous étions tous motivés par la compréhension d’une urgence : si nous n’allions pas vers le rassemblement, vers la recomposition, la gauche française de transformation sociale allait subir le sort de la gauche italienne : elle allait disparaître de notre pays, laissant ainsi le champ libre au social-libéralisme. C’est ce qui a rendu évidente la création du Front de Gauche ainsi que celle du Parti de Gauche.

 

 

- Aujourd’hui tout renforcement du front de forces antiaustéritaires est positif. Toute faille dans le dispositif PS de soutien au gouvernement est utile.

Nous ne pouvons pas rester isolés. Nous avons besoin de rassembler tous ceux qui rejettent maintenant la politique austéritaire, pas pour des raisons de basse cuisine politicienne mais parce que tout affaiblissement des capacités du gouvernement à imposer ses politiques libérales est positif pour la vie quotidienne de nos concitoyens. La marche vers un front politico-social passe aussi par l’élargissement du front politique.

 

Ils mettent du temps à se décider ? Certes, mais ne boudons quand même pas notre plaisir de voir que c’est parce que nous avons eu raison dès le début dans notre analyse sur ce qu’allait être la politique de Hollande, parce que nous n’avons eu de cesse de mener la bataille contre le « il n’y a pas d’autres solutions », montré que tous ceux qui luttaient pouvaient s’appuyer sur notre fermeté, notre cohérence, qu’aujourd’hui d’autres peuvent faire le pas sans avoir peur de se retrouver isolés.

 

 

- Bienvenue donc à EELV qui a décidé de quitter le gouvernement.

Le débat fait rage aussi en son sein entre ceux qui, dans la perspective de la présidentielle de 2017, font feu de tout bois contre le gouvernement et ceux qui espèrent pouvoir négocier leur retour à un moment ou à un autre et encore plus le renouvellement de l’accord électoral qui les a faits sénateurs et députés. Il faut dire que leur sortie du gouvernement a été mal préparée car ceux qui l’ont décidée étaient convaincus que François Hollande, entre perdre les Verts ou s’obstiner à prendre Valls comme 1er ministre, allait choisir de garder les ministres Verts. Erreur d’appréciation qui a obligé Cécile Duflot à annoncer sa sortie sous peine d’être déconsidérée à tout jamais (encore que la politique soit le seul endroit où on voit des résurrections) à la grande fureur de ceux qui rêvaient d’être calife à la place du calife et en l’occurrence d’être ministre à la place de Cécile Duflot et Pascal Canfin.

 

Doit-on refuser de discuter parce que nous avons des désaccords importants sur certains dossiers ? Est-ce jouer le jeu traditionnel du système que de mener le débat politique ? Sommes-nous trop guidés par les élections et les négociations entre appareils ? Non. Ce qui importe ce sont les actes. Le conseil fédéral d’EELV a appelé à rejeter le collectif budgétaire. Ce n’est pas anodin.

 

 

- Bienvenue de même à ceux qui au PS auront le courage de rompre.

Nous nous trouvons encore dans un entre-deux : une fraction de nos concitoyens ne veut plus rien savoir du PS, jusqu’à l’expression d’une haine d’autant plus forte que ce sont des électeurs qui ont voté pour François Hollande au second tour de l’élection présidentielle. Ils ont aussi souvent tendance à mettre toute la gauche dans le même sac : « gauche et droite c’est pareil, ils ne pensent qu’à eux, ils se moquent du peuple ». D’autres hésitent encore et restent attachés à l’idée de gauche. Il nous faut gérer cette contradiction au plus près et de la façon la plus fine possible : ni refuser le débat avec ceux qui hésitent ni apparaître comme uniquement préoccupés de manœuvres politiciennes.

 

Le fait que nous soyons présents dans les luttes sociales, démocratiques, écologiques est la meilleure démonstration de ce qui est notre priorité. Nous n’avons jamais fait passer les élections avant les luttes. Au contraire, nous avons à chaque fois utilisé les périodes électorales qui ouvrent de faibles lucarnes médiatiques : Jean-Luc Mélenchon l’a magistralement fait pendant la campagne présidentielle et nous l’avons de nouveau fait avec le soutien de nos listes autonomes municipales à chaque lutte locale avec laquelle nous étions en phase. Il nous faut marcher sur les deux jambes : luttes et résistances au quotidien d’un côté, bataille politique y compris dans les élections, de l’autre.

 

C’est parce que nous avons confiance en notre capacité à ne pas abandonner ce terrain que nous pouvons nous préoccuper aussi de la bataille politique. Les médias ne s’intéressent qu’aux petites phrases ? C’est vrai. Qu’y pouvons-nous ? Ce n’est pas en nous taisant que les médias vont faire des grands reportages sur nos combats au quotidien. Croire cela, c’est se faire de grandes illusions sur le rôle et la place des médias : ils sont au service du système, pour son maintien en place. Qu’il y ait des journalistes qui font bien leur boulot, qui informent sans distorsion ? Bien évidemment il y en a, mais malheureusement pour ce qui est des journalistes politiques des radios, télévisions et des quotidiens ils sont vraiment l’exception. Nous n’y pouvons rien, c’est ainsi. Refuser de leur répondre ? La tentation est souvent grande mais dans ce cas on laisse à d’autres le soin de parler pour nous et en général, pas en bien. Nous ne sommes pas sûrs qu’ils ne vont pas déformer nos propos en les coupant au bon endroit ou en les sortant de leur contexte ? Oui c’est vrai. Aucun choix n’est très satisfaisant. Alors nous faisons de notre mieux. Mais pour ce qui est du Monde, de Libération, du Nouvel Observateur, c’est quand même le microcosme politique, qui certes fait beaucoup parler dans les couloirs du parlement et des médias, avec cet entre-soi entre monde politique et monde médiatique, mais la grande masse de nos concitoyens ne lit aucun de ces journaux et ils ne perdent rien car le temps où cette presse était réellement de gauche relève d’un passé lointain. Aujourd’hui ce sont les meilleurs défenseurs du système.

 

Au niveau de sa direction, le PS a achevé sa mue de parti social démocrate en parti libéral. Il faut maintenant que cela soit intégré par tous les militants du Front de Gauche. Pour toute une génération qui a été formée dans la bataille du Programme commun, de l’Union de la Gauche puis de la Gauche plurielle, du désistement républicain, réaliser que l’époque des alliances avec le PS est terminée, c’est douloureux. Pour celles et ceux qui comme moi n’ont pas baigné dans cette culture, c’est évidemment plus facile. Les rythmes ne sont pas les mêmes selon les années de militantisme, la proximité avec le PS, le type d’insertion dans le monde du travail, les fins de mois plus ou moins difficiles.

Il faut maintenant que nous amenions les militants socialistes sincères à comprendre et à prendre acte de cette évolution et en tirer les conséquences. La seule différenciation du PS avec la droite traditionnelle porte dorénavant, non sur les questions sociales, sans même évoquer les questions économiques, mais sur les questions sociétales. Et encore il n’ose même pas tenir tête à la droite sur tout.

 

 

- Il n’y a plus rien à attendre de l’appareil PS. Donc cela ne sert à rien de l’interpeller, cela fait perdre du temps, de l’énergie et sème la confusion. Le problème n’est pas de rassembler « la gauche » au sens mythique du terme. C’est terminé. C’est autre chose qu’il faut construire. PC et PG avancent la proposition d’un Front du peuple. C’est l’objectif.

En attendant, il y a des étapes, surtout dans une situation politique où le moins que l’on puisse dire est que nous ne sommes pas à l’offensive mais plutôt dos au mur. Malgré toutes ses imperfections, le Front de Gauche, cabossé, critiqué, objet de ressentiment, reste le seul outil que nous avons tant que nous n’arrivons pas à le dépasser en un front plus large, plus ancré à la base, avec plus de capacités de mobilisations citoyennes. Aujourd’hui nous en avons besoin pour organiser le soutien aux luttes car la réaction du gouvernement, à commencer par Manuel Valls, face au mouvement des cheminots est très significative : ayant réussi à casser toute éventuelle unité du mouvement syndical en se mettant la CFDT dans la poche, Hollande-Valls ont décidé d’aller au bras de fer contre la CGT et Solidaires. Et pour cela ils peuvent compter sur les chiens de garde du capital pour tromper les citoyens. En face, hélas, nous n’avons pas les mêmes moyens pour contrer cette misérable offensive contre les travailleurs même si nous faisons tout ce que nous pouvons pour soutenir les cheminots comme notre présence dans les rassemblements ou le tract du PG distribué dans toutes les gares. Ils n’hésitent pas non plus à utiliser la répression contre tous ceux qui résistent que ce soit la Confédération Paysanne, le DAL, les syndicalistes un peu partout et maintenant les intermittents. Quand j’écris cela, j’ai comme un goût amer dans la bouche car j’ai l’impression de réécrire ce que j’ai pu dire du gouvernement Sarkozy. Mais après tout ce n’est pas la première fois que la social-démocratie trahit la « gauche » : c’est un ministre de la SFIO, Jules Moch, qui envoya l’armée contre les mineurs en 1948 faisant 6 morts, de nombreux blessés et plus de 3 000 licenciements accompagnés de l’expulsion des logements. C’est un président du conseil SFIO, Guy Mollet, qui vota les pleins pouvoirs au général Massu pendant la guerre d’Algérie.

 

Mais au-delà du gouvernement ou de l’appareil PS, il reste encore des militants aux convictions socialistes profondément chevillées au corps. Il faut qu’ils comprennent que la ligne Hollande-Valls est maintenant bien installée, que le PS ne redeviendra pas social-démocrate et encore moins socialiste. Le PS français « de gauche » n’était qu’une queue de comète anachronique de l’ex social-démocratie européenne. Il est maintenant rentré dans le rang. Ces militants tiennent à mener la bataille politique à l’intérieur de leur parti. Mais ils doivent se préparer à en sortir car sinon ils vont s’épuiser et se démoraliser inutilement. Nous n’avons pas trop de militants qui veulent se battre pour changer la société, qui refusent le fatalisme, la soumission au système, le « il n’y a pas d’autres solutions ». Nous avons besoin que tous ceux-là restent militants et à un poste de combat qui soit utile.

 

Pour être sortie des Verts, je sais que ce n’est jamais facile de rompre le lien avec un parti auquel on a appartenu des années. Il y a les combats menés en commun localement avec les copains, on espère toujours que demain sera mieux, qu’on va pouvoir reprendre la majorité. C’est tellement éprouvant de reconnaître que tout cela est terminé. Je sais aussi que pendant ce moment de recherche, pour l’extérieur, la décision ne va pas assez vite et on est vite accusé de ne pas vouloir bouger pour garder sa place. Combien de fois pendant ces semaines où à plusieurs militants verts nous discutions sur ce qu’il y avait de mieux à faire, n’ai-je entendu "de toute façon elle ne va pas sortir, elle préfère rester au chaud, garder sa place de députée."

 

Oui une rupture politique est douloureuse. Nous-mêmes lorsque nous avons rompu avec les Verts nous avons pris le temps de construire notre sortie car nous ne voulions pas la concevoir comme une aventure personnelle, mais bien comme une démarche politique construite et utile. Les camarades qui ont quitté le PS pour créer le PG ont fait de même, ils ont pris le temps de préparer leur projet pour le lancer dans les meilleures conditions. Certes la situation est différente aujourd’hui puisque le Front de Gauche existe et que donc toute rupture avec le PS ne rend pas orphelin. Mais on peut comprendre que l’état du FdG aujourd’hui fasse hésiter. Pourtant déjà certains ont commencé à rompre les amarres, responsables de section, élus locaux ou le délégué d’Homosexualité et Socialisme (HES) par exemple. Cela ne sert à rien de mépriser les camarades qui ont du mal à franchir le pas, il faut leur tendre la main. Mais l’attente ne pourra pas durer des mois : les semaines à venir vont être décisives avec le vote du collectif budgétaire.

 

Que ce soit EELV ou les députés PS qui élèvent la voix depuis plusieurs mois, les deux vont devoir choisir : ce lundi 23 juin commence à 16h le débat sur la loi de finance rectificative suivi la semaine suivante de celui sur le financement de la sécurité sociale, donc l’application concrète de la politique d’austérité et des 50 milliards de baisse des dépenses publiques. Le vote qu’ils feront sera regardé de près et déterminera la suite.

 

Mais je ne voudrais pas que certains pensent que seules ces batailles politiques me préoccupent. J’ai dit pourquoi elles ne me semblaient pas anodines et pourquoi il fallait les mener.

 

Mardi j’étais au rassemblement des intermittents, hier à celui des cheminots. La tâche de la semaine c’est le soutien sans faille à ces deux luttes, notamment avec la présence demain à Paris à la manifestation interprofessionnelle. Puis la participation à la journée de grèves et de manifestations de toutes les professions en colère appelée par la CGT le jeudi 26 juin car comme le dit la CGT, des mobilisations se développent également dans les secteurs des transports, électriciens et gaziers, de la santé, et de l’industrie pharmaceutique, services publics, etc."

 

Puis le 1er juillet tous à Amiens pour soutenir les militants de la Confédération Paysanne en butte à la répression pour refuser le projet de la ferme des mille vaches et les 5 et 6 juillet à Notre-Dame-des-Landes

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26 juin 2014 4 26 /06 /juin /2014 14:29
Après la rencontre avec EELV : pour fédérer le peuple, ni laisse, ni muselière !

Sources : blog de Jean-Luc Mélenchon par Jean-Luc Mélenchon

La rencontre au siège d’EELV, rue du Chaudron à Paris, avait été proposée par nos hôtes. Il est vite apparu qu’il fallait y répondre positivement car le contraire eut été tout simplement une marque de sectarisme démoralisant mis à notre charge. Cette considération l’emporta sur l’inconvénient qu’il y a avait à répondre positivement à une invitation également adressée au MoDem. Nous avons d’ailleurs posé la question. Quel pouvait être le sens d’une relance du MoDem par les Verts à l’heure où il vient de reformer une alliance avec l’UDI, proche de l’UMP ? La réponse est que le MoDem avait appelé à voter Hollande. Dès lors, EELV a estimé que cette formation avait sa part à prendre dans le bilan. Puis, très rapidement, on nous informa que de toute façon la question était close : le MoDem n’a pas répondu à EELV ! Ce dont personne parmi ses membres n’avait l’air d’être déçu.

Après la rencontre avec EELV : pour fédérer le peuple, ni laisse, ni muselière !

- La discussion a été libre, argumentée et amicale.

Rien n’est donc venu parasiter l’accès au fond des questions posées. EELV propose un dialogue sur le projet de gauche à construire et suggère trois thèmes pour l’engager, sans exclure que d’autres questions puissent être aussi traitées. Ces thèmes sont : la relance de l’emploi, celle de la transition énergétique et celle de la démocratie. Sur ces trois questions, plusieurs interventions ont permis de se faire une idée de l’intérêt qu’il y aurait à les traiter. Mais franchement, qui en doutait ? Ce n’était pas l’essentiel. Pour ma part, je ne doute pas que, quelles que soient les difficultés, on trouve un point fédérateur sous lequel traiter les contradictions de position. Contrairement aux apparences, ce point n’est jamais le plus petit commun dénominateur mais plutôt le point de la plus haute exigence.

 

Par exemple, parler de la relance de l’emploi est plus facile si l’on part de l’objectif du plein emploi c’est-à-dire au moins quatre millions de poste de travail à créer et stabiliser. Exemple lié : l’agriculture. Si l’on veut venir au modèle de l’agriculture paysanne, il faut trouver quatre-cent mille nouveaux agriculteurs. C’est un défi de formation, mais aussi de niveau des rémunérations de la population paysanne et donc des niveaux des salaires ouvriers consommateurs, et ainsi de suite dans un continuum de politique où le social et l’écologique se tiennent dans un même programme nécessairement touche-à-tout. On sort alors des dissertations abstraites pour entrer dans le domaine très exigeant de la prévision et de la planification. La vraie difficulté n’est donc pas là.

Après la rencontre avec EELV : pour fédérer le peuple, ni laisse, ni muselière !

- Il a été dit que la reconstruction de la gauche elle-même serait le résultat d’une construction commune de projet.

Mais il faut ajouter qu’elle passe aussi par la solidarité et la construction d’une communauté de vue avec le mouvement social. Difficile d’imaginer un projet commun dans les transports si on se coupe du mouvement des cheminots et qu’on vote le paquet ferroviaire… En toute hypothèse, la crédibilité du projet dépend finalement de qui le porte et le prépare. C’est pourquoi tout finit par se concentrer sur ce que l’on va appeler le périmètre de la rencontre prévue par EELV. Clairement, en réponse à Clémentine Autain, il lui fut dit que le projet dont parlait EELV ne visait « pas à être un projet alternatif ». Puis, non moins clairement, il fut répondu à Martine Billard, qui demandait la précision, que le PS en tant que tel serait invité à ces rencontres ! On devine dans ces conditions que la douche fut fraîche ! Mais le mérite de la franchise était là.

Après la rencontre avec EELV : pour fédérer le peuple, ni laisse, ni muselière !

- Deux positions se sont alors exprimées dans la délégation du Front de gauche.

L’une portée par le PCF considérant que ce serait un premier pas que de telles rencontres, l’autre qu’il ne saurait être question de faire semblant de croire que le PS en tant que tel puisse faire autre chose que ce que veut le gouvernement. Ce n’est pas une marque de sectarisme que de refuser le podium commun et la photo de famille avec le PS. C’est la marque d’une certaine compréhension de ce qu’est l’esprit public aujourd’hui. Nous y laisserions notre crédibilité ! Le PS a déjà tué le mot « gauche ». Il mène le pays au chaos social et politique. Sa politique ne peut pas marcher ni produire le moindre mieux dans la situation. Pourquoi aller faire croire qu’on peut débattre d’un projet commun pour le futur avec comme présent le compagnonnage de tels fossoyeurs ? Au demeurant, toute cette construction bizarre fait plutôt penser à un test qu’à une véritable proposition. Peut-être EELV voulait-il vérifier pour ses propres tendances et débats internes que cette voie-là n’existait pas. En effet, elle n’existe pas. En tous cas, pas avec nous. Car ceux qui veulent se réunir avec le PS peuvent déjà le faire dans le cadre du comité de liaison mis en place par Jean Christophe Cambadélis avec le PRG, le MUP du communiste Robert Hue et avec les Verts eux-mêmes.

Après la rencontre avec EELV : pour fédérer le peuple, ni laisse, ni muselière !

- Il ne peut être question d’embarquer le PG ni le Front de Gauche en tant que tels sur ce pont que veut construire EELV avec les autres accompagnateurs du PS. Je pense que nous allons avoir cette discussion à la coordination du Front de Gauche. Je crois que tout le monde sera d’accord pour ne pas engager notre Front dans cette proposition d’EELV. Bien sûr, si le PCF veut toutefois s’y associer, c’est sa liberté de parti et, tout en le regrettant, nous observerons sans commentaires. Et sans regrets, car tout cela n’ira strictement nulle part, c’est une certitude selon nous. Par contre, s’il s’agit de bâtir un rassemblement fédérateur sur la base d’un programme commun alternatif, alors oui, le dialogue peut avoir lieu et la recherche du point fédérateur peut être travaillée. Disons les choses comme elles sont. De notre côté, nous ne passerons pas des mois à jouer de la mandoline et à attendre que les arrangements de toutes sortes se fassent ou se défassent à la carte. Le but de notre travail n’est pas de fédérer des partis mais le peuple lui-même.

 

Le système n’a pas peur de la gauche ! Le système a peur du peuple. Voilà ce que nous avons appris de la période récente. Et la gauche à construire et à réhabiliter, c’est celle qui est fidèle au peuple et à ses demandes et besoins. Ni laisse, ni muselière : les frondeurs devraient y réfléchir.

Jean-Luc Mélenchon

 

Pour en savoir plus :

- Réponse du parti de Gauche à la lettre d'Emmanuelle Cosse rédigée au nom d’EELV

- La rencontre vue par Libération : Ecologistes et Front de gauche apprennent à se parler

- La rencontre vue par le magazine Regards.fr : Les Verts et le Front de gauche se parlent en face

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25 juin 2014 3 25 /06 /juin /2014 09:12
Notre projet en vue de la construction d’un « Front du peuple »

Les trois réunions de conseils nationaux ce week-end portent loin. Elle tendent à constituer un nouveau paysage dans la gauche politique. Les Verts ont donné la consigne de ne pas voter le collectif budgétaire du gouvernement, c’est-à-dire l’inepte pacte de responsabilité. Quand on vote contre le budget, qu’est on, sinon dans l’opposition ? Ainsi, d’un seul coup, quels que soient, pour finir, la réalité et le nombre des votes négatifs des députés Verts, l’opposition de gauche s’élargit d’un parti supplémentaire. Il y a trois mois, ce parti était membre du gouvernement….

 
 
Source : le blog de Jean-Luc Mélenchon "Chaud le moment chaud !"
 

 

 

- Le conseil national du PCF a produit un texte qui m’a enchanté.

En effet, il approfondit la convergence sur le fond doctrinal avec les thèses du Parti de Gauche. Dans un moment où nombreux sont ceux qui prennent un malin plaisir à souligner les divergences et à essayer d’envenimer les débats, cette convergence est un bien précieux. Lors du dernier congrès communiste, les délégués ont déjà adopté la thèse de la « révolution citoyenne ». Je n’en reprends pas ici la description. Mais je crois que je peux rappeler ceci : il ne s’agit pas de nommer sans le dire l’ancienne idée de « révolution socialiste ». Il s’agit d’autre chose. Le mot nomme le processus qui met en mouvement pour « prendre le pouvoir dans tous les domaines du quotidien » un acteur nouveau. Cet acteur, c’est la population urbanisée, ou vivant en mode urbain, en condition salariale ou précarisée ou durablement sans emploi, pauvre ou incluse dans le circuit du système. Une telle révolution se donne pour objectif et pour méthode la démocratie partout et jusqu’au bout, au service du bien de tous. A noter que ce processus se dote de ses propres organes d’action : le comité citoyen ou l’assemblée citoyenne. A ne pas confondre avec une assemblée de base du Front de gauche. En effet, il s’agit ici d’une assemblée de tous, quelles que soient les opinions, quels que soient les votes, en vue d’une appropriation collective d’un problème a régler. Nommer cet acteur est décisif. Il s’agit du « peuple », concept qui inclut le salariat mais ne s’y réduit pas puisqu’il intègre tous ceux que la condition urbaine met en situation d’interdépendance.

 

Je demande qu’on me pardonne ce résumé abrupt et somme toute assez abstrait. Mais sans doute nombre de mes lecteurs qui suivent mes réflexions sur ce thème y retrouveront un écho de leur propres analyses. Le concept de peuple fut âprement discuté, et je fus copieusement affublé de l’étiquette de populiste pour cela. L’idée de « Front du peuple » se déduit de cette description. Elle ne nie pas la centralité du conflit pour le partage de la richesse ni la place singulière de la lutte en entreprise sur ce terrain. Elle en élargit le domaine d’application à l’ensemble des questions de la vie commune, que l’on soit salarié ou pas. Ce qui importe ici c’est le mode de vie et la relation d’interdépendance étroite entre individu à travers, par exemple, les prestations communes des services publics, ou de l’extension du domaine de l’interconnexion des individus entre eux. Le « Front du peuple » est donc un mot d’ordre pour tous et en tous lieux. Il unit dans un même mouvement la participation politique traditionnelle des partis mais aussi des syndicats, des associations, des secteurs informels, mais surtout des comités et assemblées de citoyens librement associés dans l’action. On est loin de la formule du « Front populaire », traditionnellement réduit à un cartel d’organisations politiques. Une convergence sur un tel espace idéologique est, à mes yeux, essentielle. Plus nous parlerons la même langue, plus nous avancerons facilement ensemble pour comprendre et agir. C’est par la compréhension commune que l’action commune se renforce le plus vite et le plus profondément. Il est encourageant que, sans concertation préalable, nos deux résolutions de Conseil national s’achèvent par la même référence au « Front du peuple ».

Notre projet en vue de la construction d’un « Front du peuple »

C’est pourquoi je veux rappeler comment notre texte conclut : « Voici notre conviction : le pire de la crise ne serait pas les ravages qu’elle provoque. Le pire serait que nous renoncions à en tirer le moyen de faire naître un monde nouveau, libéré des causes des malheurs du présent. Le Parti de Gauche tiendra son poste de combat. Il se donne les moyens de son développement autonome. Mais il sait que rien n’est possible sans que naisse une union large de tous ceux qui ont compris le danger et le besoin d’en finir avec la politique austéritaire. Et bien davantage encore, rien n’est possible sans qu’un Front du peuple ne se lève pour congédier l’oligarchie, préparer les « jours heureux » et avancer vers l’écosocialisme, seul horizon viable de l’humanité. ».

 

 

-  Ce projet d’une action en vue de la construction d’un « Front du peuple » nécessite sans aucun doute bien des discussions pour en approfondir le sens, les voies et les moyens.

Je n’y viens pas à cet instant. J’aurais pourtant bien envie de montrer comment nos marches politico-sociales, et notamment celle du 1er décembre contre l’augmentation de la TVA et pour la révolution fiscale, en ont déjà dessiné les contours. Je ne viens à présent que sur un point. La question de cette construction politique et celle du rapport du Front de Gauche aux dissidents socialistes et Verts. La réunion de mes amis en Conseil national, m’a rendu le service que j’en attendais : y voir plus clair. Un point en particulier m’a frappé. Quelque chose que je n’avais pas vu, du fait de mon implication personnelle dans les discussions avec les partenaires institutionnels de la gauche.

 

 

-  Beaucoup me mettent en garde : les regroupements de groupes et partis politiques ne sont pas l’essentiel à cette heure.

Il existe une lame de fond de rejet de tout ce qui touche à « la politique ». L’activité de ceux qui veulent tourner la page de ce système ne doit surtout pas donner l’impression de résumer sa préoccupation à la préparation d’élections et aux alliances qui vont avec. J’entends ce message et je crois qu’il touche juste. Surtout si l’on tient compte du fait que les « dissidents » socialistes et Verts sont pour l’instant plus forts en mots qu’en actes. Ils ne sont donc ni le centre du monde ni « les nouveaux héros de la lutte des classes », comme le disait Pierre Laurent à propos de Kerviel. Beaucoup d’entre eux veulent surtout négocier des corrections à l’intérieur de la trajectoire définie par le gouvernement. Non, le cœur du moment est dans l’action de combat et dans les luttes à épauler et conforter autant qu’on le peut. C’est là qu’est le moteur du Front du peuple que nous voulons faire émerger. Et c’est là que va se jouer l’année qui vient. Le message venu du terrain est clair : on ne répond pas à l’écœurement général pour la scène politique en donnant l’impression d’ajouter des épisodes à la farce !

 

Que les dissidents de toutes sortes fassent mieux que grogner et se plaindre. Qu’ils agissent, qu’ils rompent les rangs, qu’ils renoncent aux arrangements politiciens. C’est l’urgence. Tout doit être fait pour les y aider. Mais c’est à l’aide aux luttes de terrain qu’il faut s’appliquer. Plus le front social sera actif, plus la scène politique sera ébranlée. L’un commande l’autre à cette heure.

 

 

🔴  Pour compléter la réflexion, l'analyse, le débat sur l'avenir du Front de Gauche, lire aussi :

- par Cédric Clérin l'Humanité.fr : Passer du Front de gauche au front du peuple

 

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24 juin 2014 2 24 /06 /juin /2014 17:28
La gauche a commencé à débattre pour renaitre sans Valls ni Hollande... mais pour quelle politique ?

Source : Médiapart le blog de Paul Alliès

Les 21 et 22 juin, deux centaines de militants socialistes se sont réunis à Bellerive-sur Allier près de Vichy pour débattre du thème: "Rassembler la gauche et les écologistes" proposé par la revue "Démocratie et socialisme" de Gérard Filoche. L'échange entre membres de diverses tendances du PS mais aussi avec les représentants des diverses formations de gauche a été une incontestable réussite. Un moment heureux dans ce contexte de démoralisation entretenu par les propos mortifères de M. Valls et J.C. Cambadelis.

 

La palette des opinions représentées était très large: pour ce qui est du PS, les membres de divers courants de gauche, mais aussi des parlementaires proches de B. Hamon et des amis d'A. Montebourg étaient là. Emmanuel Maurel, l'efficace leader de l'opposition montante (et tout nouveau député européen) incarnait une synthèse des sensibilités qui se dessine semaine après semaine. On croisait des parlementaires comme Marie-Noelle Lienemann, Barbara Romagnan ou Pourria Amirshahi, une bonne dizaine de membres du Bureau National et pas mal d'élus locaux. Tous se sont accordés sur une "ligne anti-austérité" en parfait écho au combat des députés sur le Pacte de responsabilité et le collectif budgétaire (l'appel des 100). Mais ce qui a fait le grand intérêt de leur présence c'est le dialogue public avec la quasi totalité des représentants des formations de gauche : d'Europe Ecologie les Verts au PCF en passant par quatre autres composantes du Front de Gauche ("République et Socialisme", "Ensemble", "Gauche unitaire", "Parti de Gauche"). Julien Bayou, porte-parole d'EE-LV côtoyait le nouveau maire communiste de Montreuil Patrice Bessac ou la première adjointe (PG) au maire de Grenoble, Elisa Martin.

 

De cette confrontation devenue particulièrement rare par les temps qui courent, on retiendra deux choses: la crédibilité d'une alternative à gauche et la promotion d'une 6° République comme bien commun à celle-ci.

 
  • L'alternative à gauche: elle est à plusieurs détentes. Dans le PS, la question est clairement posée d'un dépassement des frontières de motions, donc des courants tels que représentés dans les instances du parti depuis le congrès de Toulouse. Il apparaît que les gauches peuvent converger sur la base de la bataille engagée par les parlementaires contre la politique économique et sociale du gouvernement.  Parmi ces derniers, les amis de Martine Aubry sont aux avant-postes (Jean-Marc Germain et Christian Paul notamment); ils n'étaient pas là ce week-end mais leur travail a été invoqué et ils sont un pôle important dans la construction de cette alternative. L'accord sur quelques points de principe (l'Europe, la République démocratique, la justice fiscale et budgétaire, la relance par l'investissement) devrait faciliter celle-ci. Se dessinerait alors la possibilité d'une majorité de congrès capable de faire le lit des démoralisations et abandons cumulés depuis deux ans. Cette alternative est aussi en débat en dehors du PS. L'échange avec cinq composantes du Front de Gauche (PCF inclus) a fait apparaitre un point d'accord essentiel: la volonté de trouver des bases communes de rassemblement lesquelles se dessinent déjà contre les politiques européennes et nationales d'austérité. Comme l'a souligné Christian Picquet: "on ne s'en sortira pas les uns sans les autres et encore moins les uns contre les autres. Sous quelque forme que ce soit, la "théorie" des deux gauches est un piège mortel".  Dés lors que l'alternance se bâtit avec des socialistes qui concrétisent une démarche autonome (réclamée par Elisa Martin), tout le monde s'accorde en dehors du PS pour considérer celui-ci est un enjeu: ni un cadavre à la renverse, ni un parti de droite ou sans militant ; il peut être, si une nouvelle gauche s'y construit,  un des chainons susceptible d'interrompre le cycle dépressif décrit comme à plaisir par ses actuels dirigeants. Du côté du Front de Gauche, plusieurs comme Lucien Jallamion (République et Socialisme) avancent l'idée qu'il faut aussi revoir le clivage "dans et hors le PS" en allant jusqu'à un travail d'inventaire  de "la gauche de la gauche". Et le dialogue sur des "points de rassemblement" devrait le faciliter, l'exigence d'une nouvelle République étant l'un des plus évidents.

 

  • La  Sixième République est apparue en effet comme un bien commun à toutes les sensibilités présentes.  Le "désastre du présidentialisme" (François Calavet d'Ensemble-Front de Gauche) conduit une nouvelle fois la gauche à un point de non-retour. Le grand renoncement de celle-ci à changer les institutions une troisième fois alors qu'elle est au pouvoir, est un refus d'engager une révolution démocratique qui éloigne encore un plus ses électeurs des urnes et ses militants de l'engagement. Le propos de Mendès-France a été rappelé selon lequel "la question démocratique est partie intégrante de la question sociale: si vous ne réformez pas la République, vous ne pourrez réformer l'école ni mener une bonne politique économique". De même qu'a été rappelé le fait que M. Valls a été l'auteur d'un rapport ("Pour un pacte républicain rénové") en février 2011 où il faisait l'apologie du régime en place. Il avait été retiré de l'ordre du jour du Bureau National du PS par Martine Aubry devant la probabilité de son rejet s'il avait été soumis au vote. Pour autant le PS est le seul parti qui n'ait jamais abordé au fond la question du changement de République. C'est donc un sujet qui devra être au centre de l'alternative de gauche au prochain congrès; mais pas tant sur le principe même du changement que sur ses modalités concrètes, sociales, politiques et juridiques. Sur ce point aussi, le débat de Bellerive a fait bouger les choses: le problème de la Constituante comme point de passage obligé (revendiqué avec force, on s'en souvient par Jean-Luc Melenchon lors da la dernière campagne présidentielle)  a été posé pour ouvrir la voie, a dit Emmanuel Maurel,  "tout de suite, sans attendre, à une 6° République essentielle pour affirmer que la démocratie est une condition préalable d'exercice du pouvoir par la gauche".  Et il a été proposé que ce débat se décline dès la rentrée en débats locaux de tous ordres et dans toutes les formations, avec le concours éventuel de la Convention pour la 6° République, représentée à cette réunion.

 

Une réunion qui vient s'jouter à d'autres du même type. Le samedi 14 juin devant un public nombreux, s'était tenue à la Mairie du XI° arrondissement à Paris une rencontre du même type à l'initiative d'"Un monde d'avance" (le courant de B. Hamon au PS). Jean-Marc Germain (proche de M. Aubry) et Pierre Laurent (secrétaire général du PCF) y avaient pris la parole. Ces réunions sont le signe qu'un mouvement est lancé et qu'il y a une gauche en forme. "Elle peut mourir" a cru pronostiquer M. Valls. Elle a déjà commencé à renaitre. Sans lui.

Paul Alliès

 

- Un appel de Bellerive sur Allier a été adopté à l'unanimité des socialistes présents le dimanche 22 juin.

 

- Notes complémentaires :

  • Expression d'Éric Coquerel Secrétaire National du Parti de Gauche dont l'auteur de l'article omet volontairement de mentionner la présence et l'intervention.

  • Mon commentaire :

Toutes les motions ou résolutions ne valent que pour l’instant ou elles sont adoptées et n’engagent que ceux qui y croient !
La vérité sortira des « actes » !


Et l’appel des 100 députés socialistes va être sous les projecteurs de l’actualité sociale.
En effet, l’examen du projet de loi ferroviaire s’est achevé vendredi 20 juin. Les députés ont voté des amendements au texte notamment en faisant de la SNCF « mère » l’employeur unique pour tous les cheminots, avec un seul comité d’entreprise et un seul CHSCT à l’échelle de la future holding SNCF. C’est sans doute une garantie utile pour les cheminots.

 

En revanche en ce qui concerne le retour à une seule société, force est de constater que le compte n’y est pas. Le Parlement va être amené à voter sur une loi qui entérine la séparation du gestionnaire de réseau et de l’exploitant. Cette absurde gestion par activité qui n’a d’autre but que de préparer l’ouverture totale à la concurrence du rail est maintenue.


C’est à l’examen du vote de chacun d’entre eux sur ce dossier que nous pourrons nous faire une opinion sur la sincérité de leur démarche politique d’opposition aux politiques libérales et d’austérité et visant à un sursaut des socialistes et de toute la gauche.

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11 juin 2014 3 11 /06 /juin /2014 21:23
Du Front de gauche au front commun anti-austérité

Source : |  Par Les invités de Médiapart

Myriam Martin revient sur les élections européennes et le piètre score du Front de gauche, dont elle était tête de liste dans l'Ouest et qui n'a pas su convaincre qu'il représentait une alternative à gauche. Le FDG doit d'abord « dépasser ses limites de cartel », puis constituter « un front commun anti-austérité » et « oser porter un projet de société émancipateur ».

 


- Séisme, tremblement de terre, tout a été dit au lendemain du résultat des élections européennes. Mais le résultat était prévisible, celui d'un FN en tête. Bien évidemment qu'il faut s'en alarmer, j’y reviens plus loin, mais il ne faut pas oublier les raisons d'un tel résultat.

 

Les conditions dans lesquelles s'est menée cette campagne n'étaient pas bonnes. Deux semaines de campagne officielle, des européennes qui suivaient de près les municipales, absence de débats et l'annonce des résultats avant le vote ! Mais là ne sont pas les seuls problèmes, même s'il ne faut pas en nier la portée.

 

Le problème est plus grave et plus profond. Nos concitoyens ne s'intéressent pas à l'Europe ? En réalité c'est l'Europe qui ne s'intéresse pas aux peuples ! Pire même, au fil des ans, cette Europe s'est construite sans eux et contre eux. Et depuis 2010 les politiques austéritaires n'ont eu de cesse d'écraser les peuples, de les asservir. 

 

Comment s'étonner alors de ce soi-disant désintérêt des peuples ? Les peuples ont constaté que la droite et les sociaux-démocrates mènent les mêmes politiques. En France, dans l'électorat de Hollande de 2012, la colère le partage au désarroi voire à la désespérance, ce qui nourrit, au fil des élections, la confusion et aussi le vote FN. Un FN qui surfe avec bonheur sur ce désespoir social, et sur une posture anti-système « UMPS ». Un FN qui parvient à emprunter à tous les répertoires politiques, gauche comprise, et à s’adresser à toutes les classes sociales. La percée des droites populistes, de l'extrême droite, est une donnée de ce scrutin européen. Mais il est marqué aussi par une percée de la gauche radicale en Belgique, aux Pays-Bas, en Irlande, en Grèce, au Portugal, en Espagne ; dans ces quatre derniers pays, là où des plans drastiques d'austérité ont été imposés, là aussi, pour les 3 derniers, où se sont développées les résistances sociales. Une course de vitesse est engagée, pour empêcher que la droite populiste et raciste n'emporte le morceau et ce d'autant qu'il n'y aura aucun changement de cap à la tête de l'Europe. Les politiques libérales sous forme d'austérité toujours plus violente vont se poursuivre. Les mêmes causes provoquant les mêmes effets, la prime ira à ceux qui semblent capables de proposer un projet alternatif, fut-il nationaliste et raciste. 

 

En France, le scrutin a confirmé ces tendances lourdes européennes : abstention très forte, FN arrivé en tête, PS au pouvoir très violemment sanctionné. L'UMP s'en tire très mal et ne profite pas de la débâcle socialiste. Mais surtout, empêtré dans les affaires jusqu'au cou, il apparaît totalement discrédité et donne une image désastreuse de la politique. 

 

Dans ce contexte, on aurait pu imaginer de meilleurs résultats à la gauche du PS. Entre 2009 et 2014, EELV voit son score diminuer de moitié. Quitter le gouvernement en mars n'a pas suffi pour convaincre.

Et le Front de gauche ? Alors que l'on aurait pu attendre un bien meilleur résultat qu'en 2009, le score a été quasi égal à celui obtenu cinq ans auparavant. C'est une très grande déception.

 

Pourtant, il était possible d'espérer un score approchant celui obtenu lors de la présidentielle de 2012. Pourquoi un tel échec ? 

 

- Incontestablement, le FDG n'est pas apparu comme une alternative à gauche crédible et utile. Pire même, le FDG subit aussi, de manière atténuée, la sanction réservée à la gauche dans son ensemble. Sans doute plusieurs raisons à cela. Une est à chercher dans la dernière séquence électorale, celle des municipales, durant laquelle le FDG a brouillé son message politique avec la division de ses principales composantes sur la stratégie à suivre, listes autonomes ou avec le PS. Il aurait pourtant fallu incarner une véritable opposition de gauche face à un PS qui impose l'austérité.

 

La deuxième raison est peut-être plus profonde : le FDG n'a pas su relever le défi qui est le sien, celui de montrer que sa construction est synonyme de renouveau et de refondation d'une gauche de combat. Il a laissé s'étioler la dynamique liée à cette campagne. L'espoir suscité alors exigeait des réponses appropriées : faire du FDG un outil au service des hommes et des femmes qui avaient renoué avec la politique et qui manifestaient l'envie de le construire. Ce n'est pas ce qui s'est produit. Il n'y a pas eu de volonté politique au sein des organisations du FDG pour transformer ce cartel en véritable front social et politique. Or rompre avec les formes traditionnelles d'organisation de la « vieille gauche » discréditée et assimilée au système, à laquelle PCF et PG se rattachent par leur histoire, est essentiel. 

 

Pour autant, rien n'est perdu. Face aux enjeux aujourd'hui, les responsabilités du FDG n'ont jamais été aussi grandes : d'abord rassembler le FDG, l'ancrer à la base, dépasser ses limites de cartel. Puis, ensemble le dépasser tel qu'il est aujourd'hui en s'adressant à ceux et celles qui refusent l'austérité, ne se retrouvant plus dans la politique du gouvernement, chez les socialistes et les écologistes notamment. Dans la continuité du 12 avril, il s'agit de proposer à toutes les forces critiques, du NPA à Nouvelle Donne, aux listes féministes jusqu'à la gauche du PS et d'EELV, aux forces syndicales, aux organisations du mouvement social, la constitution d'un front commun anti-austérité. Au-delà, il faut faire preuve d'audace et oser porter un projet de société émancipateur qui s'affirme clairement comme alternative au système capitaliste et productiviste. C’est à cela qu’il faut d’urgence s’atteler.  

 

Myriam Martin, porte-parole d'Ensemble, tête de liste Front de gauche dans l'Ouest aux élections européennes

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2 juin 2014 1 02 /06 /juin /2014 20:20
Réflexions pour le Front de gauche

Source : Médiapart le blog de Roger Martelli  le 30 mai 2014

- 1. La gauche dans son ensemble est au plus bas.

Elle vient d’enregistrer son plus bas pourcentage en suffrages exprimés depuis 1936, toutes élections confondues. La gauche de gauche est elle aussi mal en point : le total du Front de Gauche (FDG) et de l’extrême gauche (8 %) est le plus modeste en scrutin européen, un des trois plus faibles toutes élections confondues (pour le total PCF-extrême gauche). Pendant des décennies, le PCF a reculé sans que nul, à la gauche du PS, ne se montre en état de récupérer ce qu’il a perdu. Entre 1997 et 2008, l’extrême gauche trotskisante a fait une percée non négligeable. Elle s’effondre aujourd’hui, sans que le FDG récupère ce qu’elle perd.

 

 

- 2. Nous avons affaire à une crise politique qui est en même temps une crise de la politique.

Non pas de la politique en général, mais de la politique dans sa forme instituée. Les partis dits de gouvernement sont pénalisés par le recul de l’État, qui les rend incapables de répondre à la demande sociale « d’en bas ». De façon plus générale, le fonctionnement vertical des partis contredit le désir de délibération et de décision directe des individus. Il ne parvient plus à maîtriser le rapport complexe du social et du politique. Désormais, la reconstruction des cadres mêmes de la démocratie et la relance politique doivent se penser en même temps, selon des logiques voisines, à partir des mêmes exigences

 

 

- 3. Il n’y a donc pas de solution purement partisane à la crise politique actuelle.

Inutile d’envisager un parti central, au cœur d’une galaxie étendue, comme le PCF y parvint pendant quelques décennies ; mais un front de partis, fût-il élargi, ne suffit pas non plus. Le contact entre formations politiques est utile ; il n’est pas « la » solution. S’il faut reconstruire, c’est dans deux directions : associer à la construction de projets et d’initiative politique des forces et des individus qui ne sont pas dans le champ étroitement partisan ; bâtir des formes de fonctionnement collectif selon des modèles coopératifs, en réseaux, qui contredisent la tendance forte à confondre centralité et verticalité hiérarchique.

 

 

- 4. Le champ de cette reconstruction n’est pas « toute la gauche ».

Non pas qu’il faille renoncer au dualisme gauche-droite constitutif de la politique française. Non pas qu’il faille cesser de viser des majorités, pas simplement ponctuelles, mais autour de projets transformateurs globaux. Mais cette majorité ne se formera pas en dehors de médiations de plus ou moins longue durée. Depuis que le PCF a cessé d’être « central » à gauche, cette médiation est celle de la formation d’un pôle transformateur, ancré immédiatement dans le refus de la méthode sociale-libérale. La gauche existe encore. Il n’y a pas deux gauches hermétiquement fermées l’une à l’autre. Mais la gauche est polarisée entre la tentation de l’adaptation et de l’accommodement d’un côté, et de l’autre côté la propension à la rupture et au dépassement. Le second pôle est trop faible : il faut le conforter.

 

La structuration de ce pôle n’est pas une fin en soi. Mais si on ne s’y attelle pas de façon spécifique, hors élection et à l’occasion des élections, la gauche tout entière restera en panne. Il ne faut plus reproduire la cacophonie des municipales. Ce qui fit naguère la force de la stratégie d’union de la gauche tenait à deux choses en même temps : le PCF était à 20 % et il proposait la formule de l’union de la gauche partout. Pour assurer la présence d’un pôle transformateur (aujourd’hui minoritaire à gauche), il faut l’affirmer de façon cohérente, si possible à toutes les élections. Si des ajustements concrets doivent se faire, ils se font sur la base d’une orientation commune, valable sur la durée et opiniâtrement suivie.

 

 

- 5. La gauche de gauche française n’a pas disparu, comme elle l’a fait un moment en Italie.

Mais elle est en panne. Quatre traits, à mes yeux, contribuent à la pénaliser : la « peur de gagner », le jeu de la concurrence partisane, l’art de mettre en évidence les sujets qui fâchent, la propension à identifier modernisation et renoncement.

 

  • La « peur de gagner » : chaque fois que l’occasion se présente de prolonger électoralement une dynamique sociopolitique, la gauche de gauche s’emballe et échoue. En 1995, le grand mouvement de novembre-décembre bouscule un paysage politique qui semblait totalement bouché à gauche. Peu après, le PCF choisit la gauche plurielle et la LCR l’enfermement avec LO : à l’arrivée le PC est laminé et l’extrême gauche confortée mais isolée. En 2005, la victoire du Non ouvre un espace formidable à l’affirmation électorale d’un vote de gauche franchement en rupture avec les recentrages de vingt ans. La LCR fait la moue, le PC croit qu’il est le mieux placé : à l’arrivée, les comités antilibéraux explosent et la gauche de gauche est cruellement affaiblie. En 2012, le FDG fait une percée remarquée à la présidentielle. Qu’en est-il aujourd’hui ?

 

  • Le jeu de la concurrence partisane : au mieux, la gauche de gauche sait faire des cartels ; mais un cartel ne fait pas nécessairement « mouvement ». Chaque organisation tient d’abord à son existence : tout se passe comme si le commun (le cartel) n’était accepté que dès l’instant où il servait les intérêts du particulier (le parti). En pratique, chacun est plus ou moins persuadé qu’il est « le mieux placé pour… ». Autant dire que les autres sont moins bien placés pour… Dès lors, dans un cartel, chacun observe l’autre, comme en attente de la faille du partenaire. Au départ, on a des tête-à-tête ; à l’arrivée, on bute sur des face-à-face.

 

  • La passion des sujets qui fâchent. Globalement la gauche de gauche se caractérise par des traits de communauté majeurs : la critique des ajustements « sociaux-libéraux », le refus de la mondialisation financière, la conviction que le développement économe des capacités humaines vaut beaucoup mieux que la concurrence libre et non faussée, le désir d’avancer vers une démocratie d’implication… Mais dès qu’on semble parvenu à un consensus, on s’ingénie à trouver la ligne de clivage qui montre que l’entente est factice. En 2005-2006, la convergence antilibérale fait la preuve de sa force face au PS recentré ? La LCR se met alors à théoriser sur la différence jugée fondamentale et discriminante entre les « antilibéraux » et les « anticapitalistes ». On s’accorde, à la gauche de la gauche, sur la prééminence de la question des droits ? On se débrouille pour s’écharper sur le voile ou sur le post-colonialisme. En quelques années, on a pris l’habitude de penser ensemble les combats locaux, nationaux, européens, planétaires ? C’était trop beau : voilà que renaissent les débats sanglants entre « européistes » et « souverainistes », comme on s’égorgeait naguère entre « fédéralistes » et « confédéralistes », ou entre « girondins » et « jacobins ». À la gauche de la gauche, on aime bien se trouver des ennemis irréductibles dans son propre camp. L’ennemi le plus pernicieux, c’est celui qui vous ressemble le plus.

 

  • La confusion du mouvement et du renoncement. Dans la gauche de gauche, les jours heureux sont volontiers derrière nous. Du temps de la grande Union soviétique, du CNR, de l’État-providence, du keynésianisme, de l’unité jacobine, du jauressisme, de l’union de la gauche… Chacun choisit ses jours heureux. Mais ils sont dans le passé. Si le PS est fustigé, c’est parce qu’il tourne le dos au passé. Tant de renoncements ont été menés au nom de la « modernité » (souvenez-vous de « Vive la crise ! ») que l’on finit par identifier désir de bouger et capitulation devant le capital. Cette méfiance peut se comprendre ; il n’en reste pas moins qu’elle est mortifère. En fait, il faudrait dénigrer le PS parce qu’il tourne le dos à l’avenir. Et pour cela, s’il faut cultiver la mémoire du combat ouvrier et démocratique, il ne faut surtout pas la rejouer sur le même registre. Aimer son passé, ce n’est pas le répéter. Le FDG n’est pas identifié à de la novation : c’est dommage. Y remédier se travaille.

 

-  Pour compléter la réflexion, l'analyse, le débat sur l'avenir du Front de Gauche, lire aussi :

- Par : Gros travail d'introspection qui attend le Front de gauche

- Par François Delapierre, Secrétaire national du Parti de Gauche : Agir pour Reconstruire

- Initiative citoyenne : Appel pour un nouveau départ du Front de gauche

- Débat l'Humanité.fr : Après le choc des européennes, quel type de rassemblement à gauche ?

- Sur le blog Eric Durand : APPEL NATIONAL pour des assises du FRONT de GAUCHE

- Par Eric DURAND : Élections européennes : FN, une victoire par défaut !

- Par Myriam Martin : Du Front de gauche au front commun anti-austérité

- Par Raoul Marc Jennar : Sauver la gauche, ce n’est pas sauver le PS !

- Par Samy Johsua : Gauche, gauche…et gauche

- Par Brice Errandonea pour "Ensemble" : Souveraineté nationale ou souveraineté populaire ?

- Par Eric FAssin :  La gauche, avec ou contre le PS ?

- Par Corinne Morel-Darleux : Réflexions post-européennes en 7 citations...

- Par Eric Coquerel, Secrétaire National du Parti de Gauche : Refondations

- Par Robert Duguet : Résistance ou collaboration, il faut choisir !

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26 mai 2014 1 26 /05 /mai /2014 00:04
Élections européennes : FN, une victoire par défaut !

C'est le peuple de gauche qui a boudé les urnes !

 

Aujourd'hui, l’austérité imposée au peuple non entendu, les promesses trahies provoquent une grave crise politique en France, constituant une véritable sanction contre les partis qui se partagent le pouvoir en Europe.


- En ces instants de choc, je partage l'émotion, la colère, les propos de Jean Luc Mélenchon tenus lors de sa conférence de presse du 26 mai.

 

- Les causes de cette Berizina politique et sociétale sont multiples, variées et cumulatives (voir l'article : "l'échec du Front de Gauche tient à lui même"), mais je soulignerai notamment qu'en France, on peut en effet dire :

  • Merci au PS qui, avec sa politique gouvernementale, est le premier pourvoyeur de voix du Front National et dont les premiers responsables sont à l’Elysée et à Matignon ;

  • Merci à, scrutin après scrutin, la sous représentation de candidats issus des couches populaires et modestes (ouvriers, employés, petits agriculteurs, chômeurs, etc...) ce qui alimente le sentiment d’abandon ;

  • Merci aussi à ceux qui, membres du Front de Gauche, ont choisi, de Paris à la Rochelle, de s'allier avec le PS au premier tour des municipales contribuant à semer la confusion, le trouble, à démobiliser et casser les équipes Front de Gauche, à discréditer la construction d'une alternative à gauche ;

  • Merci aussi à ceux qui, au sein du Front de Gauche, (du PG, du PCF et d'ailleurs) et parmi eux, nombre d'orthodoxes lors du 1er tour des élections municipales à La Rochelle, ont refusé de faire campagne ou de voter, soit pour des désaccords sur la stratégie du FdG vis à vis de l'Euro et de la construction européenne, soit considérant (apprentis sorciers dans une démarche "identitaire") que du chaos sortirait la solution. Ils ont commis une faute politique grave, sont complices et co-responsables du résultat du FN ;

  • Merci aux médias qui, en instrumentant le vote FN, ont servi avec zéle les intérêts de la classe de la finance, des actionnaires et autres possédants poussant, par la surenchére, à une politique encore plus à droite, encore plus austéritaire et anti-sociale.

- Cependant, à l’échelle européenne, avec 43 députés (+8) les partis de la Gauche européenne progressent (dont le Front de Gauche est une composante) et en Grèce, Syriza, avec Alexis Tsipras, est le 1er parti avec 28% constituant un motif d’espoir (voir carte interactive).

 

- Constatons aussi :

- qu'il n'y a pas de raz de marée FN ! Le FN perd 2 274 214 voix sur les présidentielles de 2012 (voir tableau 1 ci-dessous). Mais qui sont ses électeurs et leurs motivations ? (voir étude ICI) ;

- que le Front de Gauche est la seule force politique (hors FN et UDI) qui ne régresse pas selon les résultats définitifs (voir tableau 2 ci-dessous) et progresse même de 158 478 voix en France métropolitaine ;

- que la France ne bat pas des reccords d'abstention, qu'elle est même en recul de 1,8% par rapport à 2009 (voir tableau 3 et 4 ci-dessous) et que c'est le peuple de gauche qui a boudé les urnes !

 

L'urgence est maintenant de refondre la gauche (hors sociaux-libéraux) sur des bases opposées aux politiques libérales menées en France et en Europe et qui nous mênent vers l'abime.

 

Le succès de Syriza en Gréce ne vient-il pas de sa rupture totale avec le PASOK ? Le succès viendra pour le FDG après sa rupture totale avec le PS.

 

Nous devons dans ce cadre face à cet échec historique de la sociale-démocratie, remettre ce chantier en travail et face au gouvernement, à la droite et l'extrême droite, construire une alternative de gauche, élargir le Front de Gauche, construire un Front du Peuple !

 

Les forces existent, avec le Front de Gauche, la gauche du PS, EELV, le NPA...... il suffit qu'ensemble nous le voulions !

 

  • Quelques chiffres :

- 1 - Il n'y a pas de raz de marée FN !

 

Élections européennes : FN, une victoire par défaut !

- 2 - Le Front de Gauche, la seule force politique de gauche qui ne régresse pas (résultats définitifs).

Élections européennes : FN, une victoire par défaut !

- 3 - Comparatif global : PS - EELV et droite en déroute (résultats définitifs).

Élections européennes : FN, une victoire par défaut !

- Le vote FN, c'est aussi la victoire des médias...

Élections européennes : FN, une victoire par défaut !

- 4 - La France ne bat pas les reccords d'abstention (résultat définitif pour la France 57,57%)

Élections européennes : FN, une victoire par défaut !

- 5 - Le rapport de force politique sur les inscrits (sans minimiser son résultat, le FN ne représente que 10,75% de trop du corps électoral).

Élections européennes : FN, une victoire par défaut !
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25 mai 2014 7 25 /05 /mai /2014 22:40
Au soir des élections européennes : communiqué de la liste Front de Gauche Ouest et de Jean Luc Mélenchon

Source : site de campagne du Front de Gauche circonscription Ouest

Le score du FDG bien qu’en légère progression, est décevant et reste en dessous des possibilités ouvertes par la campagne des présidentielles.

 

Ce scrutin des européennes est à nouveau marqué par une abstention importante. Tout a été fait pour qu’il en soit ainsi, un gouvernement aux abonnés absents dans cette campagne, des médias relayant l’idée que quoi qu’il arrive l’abstention sera forte, et le FN deviendra la première force politique, et une campagne pour le moins atone.

 

Cette abstention qui touche toutes les catégories de la population est d’abord le signe d’un rejet des formes actuelles de la délégation de pouvoir, nos concitoyens considérant que de toute façon, les élus ne tiennent pas compte de leur avis. L’expérience du référendum qui a conduit au rejet du Traité constitutionnel européen aussitôt resservi au congrès et voté par une majorité de parlementaires leur donne en partie  raison. Notre faiblesse a été à cette occasion de ne pas porter un nouveau projet de constitution européenne basé sur la coopération entre les peuples et non sur le principe de concurrence libre et non faussée.

 

Le rejet des politiques en place, à l’échelle européenne et nationale, s’est largement exprimé. Le PS, seul aujourd’hui à gouverner, avec moins de 15%, subit une défaite cinglante qui contribue à délégitimer l’orientation de François Hollande et Manuel Valls. Le FN fait un score important y compris dans notre circonscription jusqu’alors préservée. La droite se refait une santé, EELV est en recul par rapport à son score de 2009. Les politiques d’austérité menées depuis plusieurs années provoquent des replis idéologiques et le FN apparait comme un recours aux yeux de nombreux concitoyens.

 

Mais relativisons ces résultats. Que représente le score de chacun quand il y a une telle abstention ?

 

Dans ce contexte le Font de Gauche conserverait 4 élus, en égalisant ou améliorant légèrement son score de 2009.

 

Avec la candidature de Myriam Martin dans l’Ouest, le Front de Gauche a mené une campagne unitaire, dynamique, multipliant les réunions publiques et les rencontres avec  les femmes et les hommes de cette grande région marquée comme d’autres par les fermetures d’entreprise, les plans de licenciements,  les difficultés économiques et sociales, les dégâts écologiques provoqués notamment par l’agriculture productiviste,  mais aussi par les luttes que toutes et tous  mènent pour construire d’autres solutions.

 

Avec tous les élus  soutenus par le Parti de la Gauche Européenne, dont le groupe GUE se renforce au Parlement européen, nous continuerons de mener des luttes pour plus de démocratie,  de justice sociale,  d’égalité, pour la transition écologique,  et pour la coopération entre les peuples européens et les peuples du monde : en commençant par exiger  le rejet de la directive européenne des travailleurs détachés, et la fin de l’indépendance de la banque centrale européenne.

 

Myriam Martin – Xavier Compain – Sylvie Mamet – Patrice Boutin – Marie Claude Robin – Alain Bergeot Candidats du Front de Gauche dans la circonscription Ouest

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Le 26 mai 2014, Jean-Luc Mélenchon tenait une conférence de presse suite aux résultats des européennes.

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22 mai 2014 4 22 /05 /mai /2014 21:20
Alexis Tsipras - Dimanche c'est le jour des peuples ! Votez Front de gauche

Tous les candidats du Front de Gauche en France ICI

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20 mai 2014 2 20 /05 /mai /2014 02:19
Grand débat des européennes, Jeudi 22 mai !

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Grand débat des européennes, Jeudi 22 mai !
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19 mai 2014 1 19 /05 /mai /2014 20:34
10 raisons pour voter Front de gauche aux élections européennes

Source : 19 mai 2014, le site du Parti de Gauche de Charente

Le 25 mai, le peuple va enfin pouvoir dire son mot sur les politiques européennes à l’occasion de l’élection du Parlement européen.

 

  • C’est un vote essentiel car l’Union européenne est en train d’imposer partout des politiques d’austérité avec des conditions dramatiques pour les populations. Les compétences du Parlement européen couvrent de nombreux domaines, il pourrait même bloquer une directive (une loi européenne) contre l’avis du Conseil européen (qui rassemble les représentants des gouvernements). Si des domaines importants lui échappent, comme par exemple la fiscalité ou la politique monétaire, il élit le président de la Commission européenne, le choix des autres membres de la Commission étant soumis à son approbation, et il peut censurer la Commission qui doit alors démissionner. Il faut élire dans ce Parlement un maximum de députés porteurs d’un autre avenir que l’austérité à perpétuité à l’opposé de ce qui est aujourd’hui défendu par la droite et les partis se réclamant de la social-démocratie. Les députés européens du Front de gauche ont été porteurs dans le Parlement européen, au sein du groupe de la Gauche unie européenne – Gauche verte Nordique (GUE-NGL), de propositions alternatives et sont intervenus en appui aux luttes.

 

- 1. Refusons l’Europe de l’austérité

Les peuples d'Europe subissent la crise mondiale du capitalisme financiarisé. Le chômage et la pauvreté explosent, en particulier chez les femmes et les jeunes. La stagnation économique s’installe et la déflation menace. Les dogmes ultralibéraux, les traités européens et ceux qui les défendent encore sont lourdement responsables de la crise en Europe. Hélas ils s’enferrent dans les politiques qui ont échoué. En France, François Hollande a trahi ses engagements et ceux qui lui ont fait confiance en 2012. Il est désormais l'allié de Merkel et de la droite européenne, du MEDEF et des marchés. Ces politiques d'austérité font aujourd'hui l'objet d'un rejet massif des peuples. Des millions de femmes et d'hommes se mobilisent contre ces choix qui dégradent leurs conditions de vie et de travail, qui attaquent leurs droits sociaux et politiques. Il faudra que cette colère s'exprime, il faudra que de cette colère puisse émerger un espoir, celui de celles et ceux qui n'ont pas renoncé au changement et au progrès humain. Avec nos bulletins de vote nous avons le devoir de ne pas laisser faire et d’ouvrir un autre chemin.

 

- 2. Refusons une Europe qui bafoue la démocratie

Les gouvernements n’ont pas cessé de bafouer la souveraineté populaire, tant au niveau national - par exemple en refusant de tenir compte du vote non au Traité constitutionnel européen en 2005 - qu’au niveau européen. Leur objectif est de se mettre à l’abri de de la souveraineté populaire, d’empêcher tout débat démocratique réel et d’exclure le plus possible l’intervention citoyenne dans la sphère économique. Ce processus s’est accéléré récemment avec l’adoption du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) de la zone euro que François Hollande s’est refusé à renégocier malgré sa promesse. Un fédéralisme autoritaire qui tient les peuples le plus possible à distance se met ainsi en place. Notre vote doit le refuser.

 

- 3. Refusons la loi de la finance et le libre échange destructeur

La résorption de la dette publique sert aujourd’hui de prétexte à mener des politiques d’austérité drastique. Les Etats sont obligés d’emprunter à des banques privées, à des taux qui peuvent aller jusqu’à 8 %, des sommes qu'elles empruntent aujourd’hui à 0,25 % à la Banque centrale européenne (BCE). La dette publique est sous l’emprise des marchés financiers qui peuvent spéculer en toute liberté. Les produits financiers toxiques et les opérations à hauts risques ne sont toujours pas interdits. Le libre-échange généralisé donne tout pouvoir aux firmes transnationales. Il est anti-écologique car il pousse à produire à l'autre bout du monde ce qui peut être produit plus près et à envoyer nos déchets toxiques vers les pays pauvres. Il organise un nivellement général par le bas des normes sociales et environnementales et la concurrence entre les salariés.

 

- 4. Refusons le dumping social et fiscal

Au lieu de promouvoir la solidarité entre les peuples, l’Europe actuelle est basée sur la concurrence entre les systèmes sociaux et fiscaux. Au nom d’une course sans fin à la compétitivité, le dumping social et fiscal est devenu la règle. Interdisant tout processus d’harmonisation sociale par le haut, les traités européens ne contiennent même pas le principe de non régression sociale qui protégerait les salariés en empêchant qu’un pays se voie imposer des normes européennes inférieures à ses normes nationales. Les inégalités salariales entre les femmes et les hommes s’aggravent, la précarité du travail se développe, les bas salaires tendent à devenir la règle et l’injustice fiscale s’installe pour le plus grand bénéfice des multinationales et des rentiers.

 

- 5. Refusons le grand marché transatlantique

Le grand marché transatlantique (GMT) est un projet d’accord de libre échange entre l’Union européenne et les États Unis, au service des grandes firmes transnationales. S’il devait être adopté, il destabiliserait nos industries, nos cultures, nos agricultures. Il permettrait l’arrivée en Europe de produits ne répondant pas à nos normes sociales ou environnementales. Le principe du recours à des tribunaux d'arbitrage privés, acté dans le mandat de négociations de la Commission européenne, est inadmissible. Ce mécanisme permettrait par exemple à une entreprise pétrolière de faire condamner la France parce qu’elle refuse l’exploitation des gaz de schiste ! Ce serait une remise en cause insupportable de la souveraineté populaire au profit du capital financier transnational.
Il faut rompre avec cette Europe là pour refonder une autre Europe solidaire et démocratique.

 

- 6. Désobéir aux traités européens et prendre des mesures unilatérales coopératives

Dans la situation actuelle, l’élargissement à 28 Etats membres rend quasiment impossible la modification des traités qui requiert l’unanimité des pays membres. Un seul pays pourrait bloquer tout progrès social ou écologique. Un gouvernement de gauche devrait donc assumer un rapport de force diplomatique, économique et politique pour s'opposer aux projets dangereux, ouvrir le débat sur des propositions alternatives et créer les chocs diplomatiques visant une remise à plat de la construction européenne. Nous essayerons d’obtenir une modification des règles actuelles. Si cela s’avère impossible, il faudra, avec tous les pays qui le souhaiteraient, désobéir aux règles européennes et prendre un certain nombre de mesures unilatérales en expliquant qu’elles ont vocation à être étendues à l’échelle européenne. Il s’agit de mesures unilatérales coopératives, en ce sens qu’elles ne sont dirigées contre aucun pays mais contre une logique économique et politique et que, plus le nombre de pays les adoptant est important, plus leur efficacité grandit. C’est donc au nom d’une autre conception de l’Europe qu’un gouvernement de gauche devrait mettre en œuvre des mesures qui rompent avec la construction actuelle de l’Europe.

 

- 7. Sortir la dette publique de l’emprise des marchés financiers pour relancer l’emploi et la transition écologique

Au niveau européen, nous proposons la tenue d'une conférence sur les dettes publiques qui aboutirait à l'annulation d'une grande part des dettes insoutenables des Etats membres. Si cette solution s’avère impossible, faute d’accord des gouvernements des autres pays, un gouvernement de gauche devrait prendre des mesures unilatérales : la dette publique ferait l’objet d’un audit citoyen qui pourrait déboucher sur un rééchelonnement, un moratoire ou une annulation. Au-delà, il faut un changement radical de politique monétaire. Il faut refonder l’euro pour en faire une monnaie au service des peuples. Il est indispensable que la BCE puisse prêter directement aux Etats et aux collectivités territoriales pour financer les éventuels déficits publics nécessaires aux besoins sociaux et à la transition écologique. Si les autres gouvernements s’y opposent, le gouvernement prendrait des mesures unilatérales.

 

- 8. Contrôler la finance et réguler les échanges

La finance doit être mise au pas. L’impunité, ça suffit ! Les produits financiers doivent être placés sous une surveillance stricte des pouvoirs publics afin qu’ils soient mis au service de la société et non l’inverse. Il faut en finir avec les produits spéculatifs. Les mouvements de capitaux entre l’Union européenne et le reste du monde doivent être contrôlés et réellement taxés. Les conglomérats bancaires doivent être brisés et une stricte séparation instaurée entre les banques de dépôt tournées vers le financement de l’économie et les banques d’affaires intervenant sur les marchés. L’activité de ces dernières doit être strictement encadrée afin qu’elles ne puissent pas perturber le bon fonctionnement de l’économie. Nous proposons la création d'une taxe couvrant toutes les transactions financières. Sans décision européenne, nous appliquerons ces mesures en France. Nous bloquerons tout mouvement de capitaux allant vers un paradis fiscal, y compris au sein de l'UE (Luxembourg, etc.). Loin de la logique patronale de la « compétitivité » qui veut exporter à tout prix, nous favorisons la demande interne. La finalité de la production doit être la satisfaction des besoins. Pour cela, nous appliquerons une taxe kilométrique au niveau national et européen et des visas sociaux et environnementaux aux frontières de l’Union européenne. Ces mesures favoriseront la relocalisation des activités et sont nécessaires au développement de circuit court de production et de consommation. Nous prônons une refondation de la Politique agricole commune (PAC) pour développer une agriculture écologique, paysanne, de proximité. Celle-ci devra favoriser le principe de souveraineté alimentaire.

 

- 9. Engager la transition écologique

La première nécessité de l’Humanité est la préservation de l’écosystème que nous avons en commun. Elle implique la mise en œuvre d’une planification écologique et impose l’application d’une « règle verte » pour solder la dette écologique. Nouvel outil de pilotage des politiques publiques, cette dernière permettra la transition vers un mode de développement qui ne consomme pas davantage de ressources que ce que la Terre peut renouveler chaque année. Cela implique également la mobilisation de budgets au niveau des pays européens pour accélérer la transition énergétique. Cela passe notamment par le développement accéléré des énergies renouvelables pour diminuer drastiquement les énergies productrices de gaz à effet de serre et un débat public national immédiat sur la politique énergétique en France et la place du nucléaire qui se terminera par un référendum. L'Europe doit se mobiliser dès maintenant pour la lutte contre le réchauffement climatique et obtenir, à Paris, en 2015, un accord juridiquement contraignant et différencié de réduction des émissions des gaz à effets de serre, concernant tous les grands pays émetteurs, qui limite le réchauffement au plus à 2°C, ainsi que la création des fonds financiers incontournables dédiés à l’accompagnement des pays du Sud, des pays les moins développés et des pays les plus fragilisés dans leur projet de développement.

 

- 10. Agir pour la paix, les droits et l’égalité

  • Trop souvent, l’OTAN sert de prétexte pour contourner les décisions de l’ONU et s’affranchir du droit international. Nous prônons la sortie de la France de l'OTAN. Nous refusons le projet de bouclier anti-missile de l'OTAN en Europe. Nous mettrons en échec les accords qui livrent les données personnelles des citoyens européens au gouvernement des Etats-Unis sous couvert de lutte contre le terrorisme. Nous refusons le sort fait aux Rroms, érigés en boucs émissaires. Nous refusons cette Europe forteresse qui conduit à l’accumulation des naufragés et des cadavres à nos frontières. Nous supprimerons les zones de rétention administrative qui sont des zones de non droit. Nous renégocierons les accords de Schengen au profit d’une action résolue en faveur de politiques nouvelles de migrations internationales et de codéveloppement. Nous mobiliserons au niveau européen pour l’abrogation de la « directive de la honte » de 2008 qui banalise et généralise une politique d’internement et d’expulsion des migrants en Europe et refuserons de l’appliquer en France. L’Europe doit être laïque et garantir la liberté de conscience. C'est une condition pour garantir l'égalité des citoyennes et des citoyens quelles que soient leurs convictions philosophiques et religieuses. Nous nous prononçons pour une stricte séparation entre les Eglises et les institutions européennes. Nous nous opposerons au statut particulier des Eglises dans le cadre des consultations européennes et à tout financement public d’activité religieuse. L'Europe doit être un espace qui garantit l'égalité entre les femmes et les hommes dans tous les domaines, et qui protège le droit fondamental des femmes de choisir d’avoir un enfant ou non. Le droit européen doit – face à la menace qui plane dans de nombreux pays – garantir l'accès de toutes à l’avortement. Nous sommes pour un principe de non régression et d’harmonisation des droits par le haut. Il faut garantir l’égalité professionnelle et salariale et notamment la revalorisation des métiers féminisés. La précarité de l’emploi doit être combattue notamment par l’interdiction du temps partiel imposé. Les services publics assurant l’autonomie des femmes, notamment les services publics de la petite enfance, de la santé et d’aide aux personnes dépendantes, doivent être développés et améliorés. La lutte contre les violences faites aux femmes doit être assortie de moyens financiers suffisants dans un but de prévention et de protection des femmes, et intégrer une véritable politique abolitionniste par rapport à la prostitution.

 

  • Les peuples ne sont pas restés sans voix face aux politiques d'austérité. Des mouvements puissants se sont développés ces dernières années dans différents pays, ils doivent converger au niveau européen. Les citoyens de Grèce, d’Espagne et du Portugal affrontent courageusement les politiques libérales, alors même que leur gouvernement répond par la répression et la criminalisation des luttes. Ces combats montrent la voie pour unifier les résistances en Europe. Le Front de gauche y est engagé et contribuera à leur renforcement en France et en Europe. Voilà pourquoi il est important d’élire le maximum de député-e-s européens du Front de Gauche capables de relayer les luttes, d’alerter sur les dangers et de mobiliser sur des solutions.

 

  • Dans chaque vote Front de gauche aux élections européennes, il y aura la rupture avec cette Union Européenne libérale et, indissociablement, l'idée d’une Europe refondée sur des bases sociale, écologique, démocratique et pacifique, dans le respect de chaque peuple, de chaque nation, de la souveraineté populaire et la solidarité internationale. Dans chaque vote Front de gauche, il y aura la sanction de ceux qui nous ont conduit là, le refus du repli nationaliste et xénophobe, et surtout le rassemblement de celles et ceux qui sont prêts à prendre un autre chemin avec les peuples européens, les forces de gauche qui résistent et construisent l'alternative partout en Europe.


C'est la démarche de résistance et d'espoir que portera le Front de gauche en France, les listes de la gauche alternative dans les pays européens et Alexis Tsipras, notre candidat commun à la présidence de la Commission européenne.

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