Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
13 septembre 2014 6 13 /09 /septembre /2014 15:00
Le sacro-saint ratio de 3% du PIB.... une invention franco-socialiste.
 
Pourquoi le déficit à 3% du PIB est une invention 100%... française généralisée à l'Europe ?
 
Guy Abeille était chargé de mission au ministère des Finances sous Giscard puis au début de l'ère Mitterrand. Il révèle pour La Tribune comment est né, en France et non en Allemagne, le sacro-saint ratio de 3% du PIB pour les déficits publics. A l'origine, il s'agissait d'imposer la rigueur aux ministres socialistes. Puis cette référence cardinale a fait école, bien qu'elle fut dépourvue du moindre sens économique.

Par les temps qui courent, les attentions sont focalisées sur les déficits publics. Il vous intéressera peut-être de savoir quelle est la toute origine du seuil de 3% de déficit public rapporté au PIB - référence devenue cardinale, et critère retenu par le traité de Maastricht.

Sources : La  Tribune Extraits du témoignage publié par Guy Abeille publié le 01/10/2010

Je suis un ancien chargé de mission.... du Ministère des Finances, où, jeune diplômé de l'ENSAE (Ecole Nationale de la Statistique et de l'Administration Economique), je fus en fonction d'octobre 1977 à juin 1982, à la Direction du Budget, 1ère sous-direction....

 

J'y fus chargé de suivre, analyser et commenter au mois le mois l'exécution du budget de l'Etat, et de fournir tout au long de l'année, et de façon de plus en plus pressante quand approchait la fin de l'exercice budgétaire, la prévision de son solde d'exécution - en l'espèce, de son déficit. Cette mission se concrétisant par la rédaction d'une "note au ministre" mensuelle, révisée et visée par mon chef de bureau... et de là filant aux cabinets de Matignon et de l'Elysée.

 

Et en fin d'exercice, nous recevions mandat, selon la météo électorale - c'est à dire explicitement selon l'horizon des plus proches élections -, de jouer des marges de liberté que pouvaient nous ménager quelques zones de flou de la comptabilité publique pour améliorer (ou dégrader si les élections étaient à deux ans) le résultat qui serait pour finir gouvernementalement publié, transbordant donc d'un exercice à l'autre l'impedimentum de telles ou telles recettes ou dépenses miraculeusement devenues migratoires. En réalité, en ces temps rivoliens... c'était moi, et moi seul, qui, entre décembre et février (le mastodonte budgétaire, en certains de ses organes, s'étale de deux mois sur l'année suivante), étais officieusement chargé de faire preuve d'inventivité, de sagacité, et de doigté..., pour établir la liste chiffrée, et manuscrite (rien ne serait imprimé), de ce qu'il était possible de faire; ou de faire encore, car d'année en année nous finissions - moi, et ceux qui d'un goupillon cardinalice, hiérarchique et discret bénissaient mes trouvailles - par griller nos successives cartouches, ne pouvant revenir impunément sur une règle que nous avions nous même hautement, et bruyamment hélas, proclamée l'année précédente parce qu'elle arrangeait la présentation comptable voulue cette année-là par nos ministres. Cela sans autre soutien, on l'aura compris, que l'approbation - orale - donnée par mes autorités (habituellement le mistigri était lestement repassé jusqu'au cabinet du Ministre), et en prenant garde de ne pas faire trop monter le rythme des hoquets ni d'exagérer le niveau des remontrances qui ne manqueraient pas d'être, hoquets et remontrances, émis par la Cour des Comptes - mais deux années plus tard, en fait, au moment de la loi dite de règlement, à laquelle, au vrai, plus personne n'accorderait intérêt. Durant deux mois, ainsi, tout allait son train par téléphone et additions, ou soustractions, sur de petits papiers ; et début mars le rutilant résultat bugétaire était porté sur les fonts médiatiques (cela, il faut bien le reconnaître, mais telle est l'incurable myopie politico-technocratique, dans l'indifférence colossale éprouvée par l'électeur de base, pour la financière édification duquel pourtant toutes ces habiletés avaient été tissées).

Le sacro-saint ratio de 3% du PIB.... une invention franco-socialiste.

- L'entrée en déficits

J'en viens au seuil magique - pour un peu, chamanique - du déficit à 3% du PIB.

  • Le premier choc pétrolier se produit à l'automne 1973 : quadruplement du prix - la bombe la plus nocive de la guerre du Kippour est celle qui frappe l'économie mondiale. Exit les Trente Glorieuses.
  • La crainte première est celle du déséquilibre extérieur et de l'inflation : Giscard d'Estaing, tout nouveau Président, y répond par le "plan de refroidissement" Fourcade. Plan qui se traduit par un volontaire et notable excédent budgétaire. Stop and go d'anthologie: le plan de relance Chirac qui le suit en prend le contrepied (un modèle de relance keynésienne, qu'on cite encore dans les écoles). Nous sommes en 1975, les finances publiques viennent d'entrer lourdement dans le rouge. C'était il y a 35 ans. Nul ne le sait encore: la trappe s'est ouverte, elles n'en sortiront plus.
  • Pourtant, s'il ne tenait qu'à lui, Raymond Barre[1] gèrerait les finances à l'équilibre (on sait combien il aime à se portraiturer en bon père de famille). Giscard d'Estaing, c'est à dire la nécessité électorale (la gauche passe à un cheveu de la victoire en 1978), lui en impose autrement. Même l'exquis soulagement qu'apportent les législatives de mars 1978 ne lui donne pas le loisir de ressaisir ses principes. Car le vent souffle d'ouest, Thatcher et Reagan bientôt seront élus: après l'austérité des années 76-77, l'air se fait libéral (on se souvient des barristes "bois mort" et autres "canards boîteux", comprendre textile, sidérurgie...).
  • Ainsi après un premier tour de piste en début de septennat, arrive pour la fin du mandat la seconde figure du tango économique qu'aura conduit Giscard, accordéoniste télégénique mais de faible renom: un pas sur l'inflation (refroidissement Fourcade, austérité des premières années Barre), un pas sur le chômage (relance Chirac, libéralisation Barre). Le déficit, tenu en 1976 et 1977 en lisière des 25 milliards, bondit en 1978[2] à un, libéral faut-il croire, 41 milliards de francs.
  • Et voilà que fin 1979 débute le second choc pétrolier. Ainsi, tous les budgets de Giscard (sauf le premier), et de Barre, auront été en déficit. Pour des montants (hormis la relance Chirac, plus massive) légèrement supérieurs à 1% du PIB. Mais en ce temps, nul n'use de cette référence. Ce ratio est absent des esprits; il n'a pas d'existence.

 

Les dernières années, budgétairement Giscard d'Estaing n'a qu'un point de fixation : ne plus laisser au déficit franchir la ligne des 30 milliards de francs ; elle aurait à ses yeux une portée politique.

Les deux budgets d'avant la gauche s'y tiennent vaillamment (-31 milliards de francs chacune des années 1979 et 1980) ; au prix, s'il m'en souvient, d'un art de l'évitement dans la confrontation avec l'écueil comptable, qu'après trois années de pratique à la Direction du Budget, je commence à assez posséder.

Le sacro-saint ratio de 3% du PIB.... une invention franco-socialiste.

- Arrive 1981

Le budget a été présenté avec un déficit de 29 milliards de francs (on reconnaît là la limite fétiche, et un sens du marketing d'étiquette que nous aurons souvent vu à l'oeuvre chez Giscard d'Estaing, dès lors qu'il s'agissait de publier des chiffres - prière d'annoncer, par exemple, que les prix augmenteront de 9,9% et non de 10%).

 

Cependant, dans les quelques mois qui précèdent le vote, la compétition électorale est gagnée par de vives ardeurs, on a des inquiétudes, et tout Barre qu'on soit, il faut bien en accepter les contingences financières collatérales : on n'aurait garde de ne pas s'attacher ceux qui pourraient pencher pour soi, ou bien seraient possiblement tentés de regarder ailleurs; ces saisons ne sont guère propices à une gestion retenue des finances publiques.

 

Et quand, au terme du combat, la gauche tient sa victoire, on n'en est plus à résister sur la ligne des 30 milliards de francs. Sans que rien n'en eût filtré en dehors de nos murs (d'ordinaire le fonctionnaire est loyal), les élections ont fait sauter, sinon la banque - après tout, on n'en est encore qu'à sept années de dette -, du moins le seuil. Je me revois ainsi, au surlendemain de l'élection, enfiler un des longs couloirs du Louvre, dans l'aile Richelieu où depuis cent dix ans comme un coucou nichait le Ministère des Finances (aujourd'hui le marbre ailé d'Apollon poursuivant Daphné a remplacé l'airain terrible du Budgétaire traquant la Dépense stérile), pour donc informer le rond, le gai et l'affablement zézayant Jean-Paul Huchon, chef du bureau Agriculture et Communautés européennes (lier les deux c'est déjà toute une époque), lequel est au sein du Budget un des représentants connus de l'état-major socialiste (adjoint de Rocard à la mairie de Conflans-Sainte-Honorine, il sera dès le 22 mai, et pour dix ans, son directeur de cabinet), l'informer que le déficit sur lequel il faut tabler, avant même tout geste du nouveau pouvoir, n'est pas en deçà des 30 milliards de francs jusqu'ici proclamés, mais maintenant au delà des 50 milliards: dans les chaleurs pré-électorales, le libéralisme de Giscard et de Barre s'est dénudé en libéralité.

 

Deux mois plus tard, la première loi de finances rectificative socialiste en prendra acte, actualisant le déficit à 55 milliards; et dès le début juin, sans attendre, Laurent Fabius va rendre ce chiffre public.

 

Car le ministre qui nous est dévolu s'appelle Laurent Fabius.... Laurent Fabius a obtenu d'inaugurer le titre, jusque là inconnu au bataillon, de Ministre délégué.... Ce qui lui donne, tout de même, droit de présence aux conseils des ministres, et, car il l'a obtenu, signature des lois de finances sans le ternissant voisinage de Jacques Delors, son ministre de prétendue tutelle.

  • Nous arrivons fin juin, et s'il y a urgence pour adapter l'action budgétaire à la nouvelle donne, plus grande elle est encore pour préparer le budget de l'année 1982, qui sera la première de plein exercice pour la gauche au pouvoir. Las ! Malgré l'autorité toute neuve due au Ministre délégué, et à son rang, il nous revient assez vite que, dans l'effervescence de cette aube nouvelle, camarade ! et l'inaccoutumance des néo-ministres aux règles de gouvernement, ces derniers multiplient à qui mieux mieux les visites du soir auprès du Président pour plaider in vivo leurs besoins en crédits (or, l'expérience séculaire du Budget montre qu'en réalité il n'existe pas de demandes de crédit qui ne soient authentiquement justifiées - le gouvernement, du moins le budgétaire, commence avec l'art de faire tomber l'oukase du refus). Et, au vu des données qui s'agglomèrent peu à peu sur mon bureau, il apparaît assez vite qu'on se dirige bon train vers un déficit du budget initial pour 1982 qui franchira le seuil, jusque là hors de portée mentale, des 100 milliards de francs, chiffre que les plus intrépides d'entre nous n'auraient même en secret pas osé murmurer.

 

 

- Une commande, un soir
C'est dans ces circonstances qu'un soir, tard, nous appelle Pierre Bilger..., devenu le tout récent n°2 de la Direction du Budget à son retour du poste de directeur de cabinet de Maurice Papon (...Ministre du Budget...).
Donc nous voici convoqués, c'est à dire moi-même, et Roland de Villepin, cousin de Dominique..., récent chef de bureau.... Formés à l'ENSAE, nous sommes considérés dans la faune locale comme appartenant à l'espèce, rare au Budget, des économistes (les autres sont des énarques, ces grands albatros de l'administration généraliste), et plus spécialement, car passablement mâtinés de mathématiques (nous sommes des ingénieurs de l'économie, en quelque sorte), de la sous-espèce des économistes manieurs de chiffres - sachant faire des additions, nous plaisante-t-on, en référence, évidemment, aux agrégés-sachant-écrire.

 

Bilger nous informe en quelques mots du ballet budgétaire élyséen en cours, et il nous fait savoir que le Président a urgemment et personnellement demandé à disposer d'une règle, simple, utilitaire, mais marquée du chrême de l'expert, et par là sans appel, vitrifiante, qu'il aura beau jeu de brandir à la face des plus coriaces de ses visiteurs budgétivores.

 

 

 

 

 

 

 

  • Il s'agit de faire vite. Villepin et moi nous n'avons guère d'idée, et à vrai dire nulle théorie économique n'est là pour nous apporter le soutien de ses constructions, ou pour même orienter notre réflexion. Mais commande est tombée du plus haut. Nous posons donc, d'un neurone perplexe, l'animal budgétaire sur la table de dissection.
  • Nous palpons du côté des dépenses, leur volume, leur structure, avec dette, sans dette, tel regroupement, tel autre, ou leur taux d'accroissement comparé à celui de l'économie. Il y aurait bien moyen de détailler à la main quelques ratios consommables, mais tout cela est lourd et fleure son labeur: norme flasque, sans impact, aucune n'est frappante comme une arme de jet, propre à marquer l'arrêt aux meutes dépensières. Nous retournons la bête du côté des recettes : impôts d'Etat sur revenu national ? mais les impôts fluctuent avec la conjoncture, plusieurs sont décalés d'un an... Surtout, nous ne pouvons échapper à l'attraction des prélèvements obligatoires, dont la fiscalité d'Etat n'est guère qu'une part : peut-on valablement se cantonner à elle ? le débat ne manquera pas de naître, à juste titre, et prendra vite le tour d'un brouhaha technique. Tout ça sera confus et sans force probante, au rebours du principe-étendard que nous avons reçu commande de faire surgir pour ostension publique. La route des recettes est coupée.

 

Le sacro-saint ratio de 3% du PIB.... une invention franco-socialiste.

Donc ce sera le ratio déficit sur PIB. Simple; élémentaire même, confirmerait un détective fameux. Avec du déficit sur PIB, on croit tout de suite voir quelque chose de clair.

 

 

 

 

 

 

- Un critère douteux
Arrivé à ce point, un peu de réflexion s'impose.

- On commencera par noter que le déficit est un solde ; c'est à dire non pas une grandeur économique première, mais le résultat d'une opération entre deux grandeurs. Ce simple fait, trivial, emporte deux remarques.

 

- La deuxième observation touche à la pertinence du ratio lui-même : ne divise-ton pas des choux par des carottes ? Car un déficit n'est rien d'autre qu'une dette : il est le chiffre exact de ce qu'il faut, tout de suite, emprunter, c'est à dire, cigale, aller demander à d'autres ; et donc de ce qu'il faudra épargner - au fil des années suivantes - pour rembourser ceux qui auront prêté. Autrement dit, afficher un pourcentage de déficit par rapport au PIB, c'est mettre en rapport le flux partitionné, échelonné des échéances à honorer dans les années futures avec la seule richesse produite en l'année origine. Il y a discordance des temps[3]. Où l'on saisit que le seul critère pertinent est celui de la capacité de remboursement à horizon donné (qui est celui de l'emprunt) ; laquelle est elle-même fonction, non pas tant du déficit consenti une année donnée, que de la dette globale accumulée - cette année-là, mais aussi celles qui ont précédé et peut-être celles qui suivront - et de la prévision qu'en regard on peut faire des ressources futures, c'est à dire du couple croissance et rendement fiscal. Le reste n'est qu'affichage.

 

- Dernière observation enfin, plus générale : on conçoit bien qu'un déficit n'a pas le même sens économique selon qu'il est purement ponctuel, rupture dans une série d'années à l'équilibre, laquelle sera réabsorbée en une à trois années par la réactivation même de l'économie que ce choc aura provoquée (keynésianisme pur) ; ou selon qu'à l'inverse il n'est que le morne jalon d'une longue chronique de déficits, courant les décennies, installés, devenus entière partie prenante, mode de fonctionnement même de l'économie, si usuels, si métabolisés, à elle si consubstantiels que c'est le retour à l'équilibre, la désaccoutumance, qui a un effet de choc (du keynésianisme à rebours en somme). Je rappelle qu'en 2010, la France en est à sa... 36ème année de déficit ininterrompu, et donc de dette couche à couche empilée, cumulée - 36 années, bien plus qu'un tiers de siècle -, et dont elle ne pourra mécaniquement se délester d'un coup: à vue humaine il est probable qu'au point où nous en sommes et où en sont les perspectives longues de notre économie, nous finirons par avoir stocké, dans la meilleure des hypothèses, de la dette pendant pas loin d'un demi-siècle, continûment, tenacement, c'est à dire sans avoir jamais commencé de seulement la rogner ; laquelle, pour finir, soit sera remboursée (perspective vertueuse, ou bien enchanteresse), soit détruite (par inflation, ou restructuration comme on dit pudiquement), soit plus vraisemblablement aura été traitée par un mixte empirique des deux, c'est à dire fonction des rapports de force dans la partie à trois entre gouvernements, Banque Centrale et marchés.

 

 

Où l'on aura compris que fixer le projecteur sur le déficit d'une année donnée n'a guère de sens ; et que le rapporter au PIB de cette même année lui en fait perdre un peu plus. Le ratio déficit sur PIB peut au mieux servir d'indication, de jauge : il situe un ordre de grandeur, il soupèse une ampleur, et fournit une idée - mais guère plus - immédiate, intuitive de la dérive. Mais en aucun cas il n'a titre à servir de boussole ; il ne mesure rien : il n'est pas un critère. Seule a valeur une analyse raisonnée de la capacité de remboursement, c'est à dire une analyse de solvabilité : n'importe quel banquier (ou n'importe quel marché, ce qui revient au même) vous le dira.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

- Certes ; mais la question politique - politique, et non économique - demeure : comment transmuter le plomb d'une analyse raisonnée de solvabilité en l'or apparent d'une règle sonore, frappante, qui puisse être un mot d'ordre ? C'est, dans son prosaïsme, la question qui se pose à nous, et l'impossible auquel nous nous heurtons, en ce soir de juin 81.

 

 

- Fabriquer une norme
Pressés, en mal d'idée, mais conscients du garant de sérieux qu'apporte l'exhibition du PIB et de l'emprise que sur tout esprit un peu, mais pas trop, frotté d'économie exerce sa présence, nous fabriquons donc le ratio élémentaire déficit sur PIB, objet bien rond, jolie chimère (au sens premier du mot), conscients tout de même de faire, assez couverts par le statut que nous confèrent nos études, un peu joujou avec notre boîte à outil. Mais nous n'avons pas mieux. Ce sera ce ratio. Reste à le flanquer d'un taux. C'est affaire d'une seconde. Nous regardons quelle est la plus récente prévision de PIB projetée par l'INSEE pour 1982. Nous faisons entrer dans notre calculette le spectre des 100 milliards de déficit qui bouge sur notre bureau pour le budget en préparation. Le rapport des deux n'est pas loin de donner 3%.

 

C'est bien, 3% ; ça n'a pas d'autre fondement que celui des circonstances, mais c'est bien.

 

 

 

 

Nous remontons chez Bilger avec notre 3% du PIB, dont nous sommes heureux, sans aller jusqu'à en être fiers. Et lui faisant valoir que....., foi d'économistes, c'est ce qu'actuellement nous avons de plus sérieux, de plus fondé en magasin. En tout cas de plus présentable.... On sait ce qu'il en est advenu.

 

 

- L'envol du 3%
Le Franc très vite plonge. Il faut écoper le vaisseau.

 

Dans le combat des influences qui se joue cet automne, Delors reprend la main. Il ose parler de pause (un spectre hante la gauche, celui de Blum en février 37 demandant "une pause nécessaire dans la montée des finances publiques..."). Et il est le premier à faire expressément savoir que le déficit ne doit plus franchir les 3% du PIB, et cela pour l'ensemble des comptes publics (il sera bien le seul à être aussi strict, et précis, et complet). Fabius d'affirmer hautement, trois semaines plus tard : "Pour le budget, j'ai toujours posé comme règle que le déficit n'était acceptable qu'à condition de ne pas dépasser un montant raisonnable, de l'ordre de 3% du PIB".

 

Ici, une station s'impose : ainsi viennent de naître, et, pire, d'infiltrer les esprits comme un contaminant, les notions de "déficit acceptable" et de "montant raisonnable" : tomber en très lourd déficit, cela ne s'analyse qu'en référence à l'année dont on parle et non au parcours d'endettement sur lequel on s'inscrit, et, ainsi myopement circonscrit, ce n'est plus un défaut de ressources qu'il faudra, au plus vite, remonter, c'est un acte par nature conforme à la raison, aux Lumières pour un peu, mais à la condition, bien entendu, car on est aussi l'ennemi pondéré de tout ce qui est excès, qu'on ne rajoute guère à tout ce qu'on doit déjà que, bah, bon an mal an, une centaine de milliards - acceptable, raisonnable... superbes déplacements du sens : ou ce que la langue assouplie à l'ENA fait de la rhétorique d'Ulm.

  • Une seule voie nous reste : le déficit. Le déficit, d'abord, du citoyen lambda au Président de format courant, ça parle à tout le monde : être en déficit, c'est être à court d'argent ; ou, si l'on préfère, tirer aujourd'hui un chèque sur demain, qui devra rembourser. Ensuite, le déficit a depuis Keynes acquis ses lettres de noblesse économique : il figure vaillamment dans les théories, il est une des plus visiblement opératoires variables des modèles. Lui seul, c'est évident, a la carrure et la netteté pour nous tirer d'affaire. Le déficit ! mais qu'en faire ? à quelle contrainte le plier pour en extraire une norme ?
  • Le coup est vite joué. La bouée tous usages pour sauvetage du macro-économiste en mal de référence, c'est le PIB : tout commence et tout s'achève avec le PIB, tout ce qui est un peu gros semble pouvoir lui être raisonnablement rapporté.
    • La première, c'est qu'un même déficit peut être obtenu par différence entre des masses dont l'ampleur est sans comparaison : 20 milliards sont aussi bien la différence entre 50 et 70 milliards qu'entre 150 et 170.
    • Or, et c'est la deuxième remarque, on conviendra qu'il ne peut être tout à fait indifférent à la marche de l'économie que la masse des dépenses et recettes publiques soit d'une certaine ampleur (moins de 35% du PIB, comme aux USA ou au Japon) plutôt que d'une autre, bien plus grande (nettemment plus de 50% comme en France ou dans les pays scandinaves) ; sans même parler du contenu de chacune des masses : ce n'est pas la même chose d'aspirer un certain volume de recettes avec une TVA à 10% et un impôt sur le revenu montant jusqu'à 80%, qu'avec une TVA à 20% et un impôt sur le revenu de 30% au pire ; ou bien encore d'aligner un même volume de dépenses, mais avec 5% de subventions d'investissement dans un cas ou 20% dans l'autre. On voit donc que s'intéresser au déficit en soi, à son montant seul, n'a qu'un sens relatif. Première observation.
    • 1% serait maigre, et de toute façon insoutenable : on sait qu'on est déjà largement au delà, et qu'en éclats a volé magistralement ce seuil ;
    • 2% serait, en ces heures ardentes, inacceptablement contraignant, et donc vain ; et puis, comment dire, on sent que ce chiffre, 2% du PIB, aurait quelque chose de plat, et presque de fabriqué. Tandis que trois est un chiffre solide ; il a derrière lui d'illustres précédents (dont certains quon vénère). Surtout, sur la route des 100 milliards de francs de déficit, il marque la dernière frontière que nous sommes capables de concevoir (autre qu'en temps de guerre) à l'aune des déficits d'où nous venons et qui ont forgé notre horizon.
    • Mitterrand déleste le budget 1982, en cours de finition (on le présente en septembre), du déficit de 120 milliards où il se propulsait jusqu'à celui de 95 milliards qui sera annoncé, soit bien visiblement moins que le seuil symbolique - chiffon... rouge pour marchés en émoi - des 100 milliards de francs (nos 3% du PIB). Et c'est en août que Fabius..., pour la première fois dans toute l'histoire de la langue publique universelle (car nul encore nulle part, serait-ce à l'étranger, n'a jamais avancé ce ratio), réfère le déficit au PIB - pour le rendre bénin sans doute, et couvrir sa rudesse d'une gaze savante: car enfin, ces 2,6% du PIB qu'il cite aux journalistes sans s'y appesantir, presque comme en passant, comme une chose qui serait dans les moeurs, et du moins ne saurait inquiéter qui a fait des études et sait de quoi il parle, ces 2,6%, que pèsent-ils au fond, sinon le poids d'une pincée de PIB ? - et non la centaine de milliards de francs que rajoutés aux autres il faudra un jour, avant la fin des temps, ou avant la faillite, par l'impôt rembourser.
    • Mais l'automne déjà, ses bourrasques ; et le Franc balayé avec les premières feuilles : il faut dévaluer (dans la govlangue on dit "réajuster"), non sans avoir âprement négocié, négocié et plaidé, comme de juste, comme chaque fois, avec l'Allemagne - l'Allemagne au mark toujours trop fort, à l'inflation trop faible, à l'industrie trop fiable, l'Allemagne, ce modèle irritant et exténuant voisin qui construit sa confiance, interne et externe, comme ses machines-outils et comme ses berlines, sur le long terme, et sans désemparer, sans versatilité, unanime à ne pas tolérer que quiconque jamais y porte une ébréchure, tandis que nous changeons de pied, désunis, impatients et fragiles, plus inquiets d'affirmer une autorité que de faire autorité, plus sensibles à l'effet produit sur le théâtre de l'intelligence qu'à l'effort soutenu dans l'avancée commune.
Le sacro-saint ratio de 3% du PIB.... une invention franco-socialiste.

Dès lors dans les déclarations - Fabius, Delors, Mauroy - le 3% du PIB revient comme une antienne. Il est le phare qui balise la route (quand il n'est guère que le quinquet qui suit la descente à la dette). Tandis que les attaques contre le Franc reprennent de plus belle, et que la préparation du budget 83, sous la pression énervée des ministres, livre des premiers scénarios assez époustouflants (à son plus haut le décompte produit un déficit de 210 milliards de francs), le 3% du PIB, désormais bien en selle, devient le marqueur proclamé, martelé, d'une "politique maîtrisée des finances publiques" - en somme, on peut dévaler la pente de l'endettement sur un cheval qu'on cravache, mais à la condition, raisonnable, qu'il ne s'emballe pas. Le petit calcul discutable, mais malin, et tout de circonstance que nous avons commis un soir d'il y a quelques mois est maintenant devenu une norme publique, qui vaut principe, affiché, assumé, presque revendiqué, pour la conduite du gouvernement. Assurément, un succès assez rare.

 

  • Ce calcul, ce principe, il lui reste à recevoir encore, par les voies les plus solennelles, l'onction du Président. C'est chose faite le 9 juin 1982... ; lors de sa seconde conférence de presse du septennat, le Président dans son intervention liminaire déclare: "Le déficit est d'environ 3% et il ne faut pas qu'il dépasse ce pourcentage appliqué au produit intérieur brut. J'attends du gouvernement qu'il respecte - je n'ai pas lieu d'en douter sachant l'engagement du gouvernement tout entier - ce plafond de 3% et pas davantage." (... sachant l'engagement du gouvernement tout entier : on imagine qu'un ange - armé d'un coupe-coupe budgétaire -, fors Delors, sur les ministres passe).

 

Le processus d'acculturation est maintenant achevé ; on a réussi à déporter le curseur : ce qui est raisonnable, ce n'est pas de voir dans le déficit un accident, peut-être nécessaire, mais qu'il faut corriger sans délai comme on soigne une blessure ; non, ce qui est décrété raisonnable c'est d'ajouter chaque année à la dette seulement une centaine de milliards (en francs 1982). C'est cela, désormais, qu'on appelle "maîtrise" : en dessous de 3% du PIB, dors tranquille citoyen, la dette se dilate, mais il ne se passe rien - quand le sage montre la lune, l'imbécile regarde le doigt, dit le proverbe chinois ; quand le sage montre l'endettement, l'incompétent diplômé regarde le 3% du PIB.

Le sacro-saint ratio de 3% du PIB.... une invention franco-socialiste.

- Extension du domaine du ratio
Puis un jour le traité de Maastricht et le TSCG[4] parurent sur le métier. Ce 3%, on l'avait sous la main, c'est une commodité ; en France on en usait, pensez ! chiffre d'expert ! Il passe donc à l'Europe ; et de là, pour un peu, il s'étendrait au monde.

 

Sans aucun contenu, et fruit des circonstances, d'un calcul à la demande monté faute de mieux un soir dans un bureau, le voilà paradigme: sur lui on ne s'interroge plus, il tombe sous le sens (à vrai dire très en dessous), c'est un critère vrai. Construction contingente du discours, autorité de la parole savante, l'évidence comme leurre ou le bocal de verre (celui dans lequel on s'agite, et parade, sans en voir les parois) : Michel Foucault aurait adoré.

 

Parfois lorsque j'entends, repris comme un mantra, le 3% du PIB, je m'amuse de ce trois que nous avons choisi. Me revient le souvenir du numero deus impare gaudet - le nombre impair plaît à la divinité - qu'on trouve dans Virgile. Et la traduction qu'en donne Gide dans Paludes : le nombre deux se réjouit d'être impair. Et il a bien raison, ajoute Gide.

Le 3% du PIB se réjouit d'être critère... Et il a bien raison.

 

 

  • Et en 2016..... ?

- L’inventeur des "3% de déficit" avec lesquels les Etats européens continuent de se débattre doute de la validité économique de son équation

Sources : La Rédaction de France Info mercredi 24 février 2016

Guy Abeille, créateur du fameux objectif de 3% de déficit public avec lesquels les Etats européens continuent de se débattre aujourd’hui, a reconnu mercredi soir sur France Info qu’"avec le recul", il aurait "peut-être la main qui tremblerait" au moment d’établir cette équation.

 

L’ancien chargé de mission à la direction du Budget sous François Mitterrand avait alors divisé la "perspective de déficit de 100 milliards de francs" avec le produit intérieur brut, ce qui avait donné 3%.
 
Il s’est toutefois interrogé sur la "validité économique" de ce chiffre de nos jours, même si cet objectif  reste "une règle qui permet de rassurer en particulier les marchés et de mettre une barrière, qui sert de référence. "

Notes :

[1] passe aux manettes de l'économie en 1976

[2] Dette française : les aveux effarants de Michel Rocard sur la loi de 1973

[3] « l’endettement public atteint 1 650 milliards d’euros sur un PIB de 1 950 milliards d’euros, soit 85 % du PIB » ; Absurde. Le PIB, c’est le PIB d’une année. La dette, ça court sur plusieurs années ; C’est comme si on comparait les revenus d’une personne sur 1 an avec l’emprunt qu’il a fait sur 25 ans pour acheter son appartement ; dans ce cas, son niveau d’endettement serait non pas de 85 %, mais peut-être de 200 % ou 300 % ! La durée moyenne d’un emprunt d’Etat est de 7 ans et 30 jours : il faut donc comparer le niveau d’endettement au PIB de la France pendant 7 ans, soit près de 14 000 milliards d’euros ; Et une dette de 1 650 milliards d’euros, ça fait seulement 12% du PIB de la France sur 7 ans..... moins que l'endettement de nombre de ménages qui parfois dépassent les 30% des revenus !

[4] TSCG : Le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance impose une « règle d’or » : les États doivent afficher des comptes publics « en équilibre ou en excédent ». Aux 3 % de déficit budgétaire maximum, imposé par le traité de Maastricht, le TSCG ajoute que le déficit structurel (calculé sur la croissance du PIB à moyen terme) ne doit pas dépasser 0,5 %,...

 

Pour en savoir plus :

Commentaires de J.L. Mélenchon après l’adoption du TSCG

- Nous déclarons la mort du Traité de l’austérité (TSCG)

Partager cet article
Repost0
20 août 2014 3 20 /08 /août /2014 21:20
Dette française : les aveux effarants de Michel Rocard sur la loi de 1973

Sources : BLOGPARES publié le 8 janvier 2013 par El Don

Fin décembre 2012, au micro d’Europe 1, dans l’émission « Médiapolis », face à des journalistes relativement atones au regard des propos tenus, Michel Rocard a été l’auteur de déclarations effarantes, quoique connues déjà de pas mal de monde, sur les causes de la dette française. Il ne fait que confirmer que la crise de la dette actuelle est bien une création et non le résultat de comportements dispendieux fautifs. Les pigeons ne sont pas ceux que l’on croit.

 

Sieur Rocard revient sur la fameuse loi bancaire de 1973, dite Pompidou ou Rothschild qu’il qualifie de « stupéfiante ». Cette loi , rappelons-le, interdit à la Banque Centrale de prêter directement à la France  et  l’oblige désormais à prêter d’abord à des banques privées qui reprêteront ensuite à l’Etat français, prélevant au passage des sommes considérables par une simple hausse des taux de crédit.

 

Selon Michel Rocard, « La Banque de France a financé l’Etat français sans intérêts depuis sa création en  1801 jusqu’en 1973 et si on en était resté là, notre dette ne serait aujourd’hui que de 16 ou 17 % du PNB »[...] « et non à 90,  91% du PNB ». Soit, pour le dire autrement, à trois fois rien et on en serait pas là comme aujourd’hui. Ni l’Union européenne puisque cette loi scandaleuse a été reprise par le traité de Maastricht.

 

Exit tous ces traités qui s’empilent depuis comme le TSCG, le MES le MES, et sans doute bien d’autres choses dont on rapporte quotidiennement les horreurs.

 

Comment ne pas être scandalisé voire indigné par cette loi et même par le ton  morne et blasé de Michel Rocard? Par ailleurs, n’en déplaise au triste auteur de cet article du monde destiné à ceux qui osent critiquer cette loi, Michel Rocard n’est pas un extrémiste de droite ni un extrémiste de gauche, pas plus que nous d’ailleurs.

 

 

- On fait quoi maintenant ? On continue la pigeonnade ou on arrête ?

embedded by Embedded Video

Reste à essayer de comprendre le pourquoi de cette loi pour le moins « scélérate » pour reprendre le qualificatif somme toute assez juste de Dupont-Aignan . Comment peut-on renoncer à des prêts à taux zéro et s’imposer des taux à 4, 5% au bénéfice de banques ou de marchés privés ?

 

Pour Etienne Chouard, la loi Pompidou retirant à l’Etat français le droit d’imprimer sa propre monnaie a été une opération à grande échelle menée par les élites et leurs grandes banques privées, qui aujourd’hui amène les plus riches à ne plus payer d’impôts. Selon lui, c’est un renversement des valeurs depuis la révolution citoyenne de 1789. C’est ce qu’Etienne  Chouard (et bien d’autres) appellent une contre-révolution.


- Enquête sur la Loi du 3 janvier de Pierre-Yves Rougeyron

Il montre, point par point, comment la France a été mise en esclavage par la dette avec juste un simple texte anodin. Il montre comment l'élite des hautes fonctionnaires a renoncé, pas à pas, à la Nation française, à son âme et à son indépendance. C'est l'histoire des manipulations successives, organisées et pilotées pour ne profiter qu'à une seule entité : les banques privées.

 

Grâce à cette loi, la France a été conquise sans bruit, sans une balle tirée et sans aucune résistance : chaque semaine, ce sont 4 nouveaux milliards, empruntés par l'État pour payer retraites, salaires et aussi... intérêts de la dette, qui s'ajoutent aux 1700 milliards déjà dus, alors qu'au même moment 800 emplois industriels sont détruits chaque jour. Ce livre est le récit de la pire trahison de l'Histoire de France.

 

Sur le même sujet, pour en savoir plus :

- Dette publique et "loi Rothschild" : le silence des médias

 

Partager cet article
Repost0
20 août 2014 3 20 /08 /août /2014 09:15
Photos : CC A. Golden (Une) et CC Gonzalo

Photos : CC A. Golden (Une) et CC Gonzalo

Sources : BASTAMAG par Agnès Rousseaux modifié le 8 février 2015

La dette ? Une construction sociale, fondatrice d’un pouvoir arbitraire, estime David Graeber, anthropologue et économiste états-unien, considéré par le New York Times comme l’un des intellectuels les plus influents actuellement. Les pays pauvres et les personnes endettées sont aujourd’hui enchainés aux systèmes de crédit. Piégés dans des relations basées sur la violence, les inégalités et justifiées par la morale, décrit l’auteur, dans un ouvrage qui retrace 5000 ans d’histoire de la dette. « Rembourser ses dettes » est devenu un dogme, impossible à contester. Et si, malgré tout, on décidait d’effacer l’ardoise ? Avec le mouvement Occupy Wall Street, David Graeber lance des actions de désobéissance civile pour démontrer l’absurdité du système capitaliste actuel. Entretien.

 

 

- Basta ! : A quel moment dans l’histoire le crédit est-il apparu ? Qu’est-ce qu’une dette ?

David Graeber [1] : La dette est une promesse, qui a été pervertie par les mathématiques et la violence. On nous a raconté une histoire : « Il était une fois des gens qui utilisaient le troc. Voyant que cela ne marchait pas très bien, ils ont créé la monnaie. Et l’argent nous a amené le crédit. » Du troc au crédit, une sorte de ligne droite nous amènerait donc à la situation actuelle. Si on regarde plus attentivement l’histoire, cela s’est passé bien différemment ! Le crédit a d’abord été créé. La monnaie physique est apparue quelques milliers d’années plus tard. Cela permet de poser les questions différemment : comment sommes-nous passés d’un système où les gens disaient « je vous dois une vache », à un système où l’on peut mesurer la valeur exacte d’une dette ? Ou l’on peut assurer, formule mathématique à l’appui, que « 340 poulets sont équivalents à cinq vaches » ? Comment une promesse, une obligation de remboursement, est devenue une « dette » ? Comment l’idée que nous devons une faveur a-t-elle été quantifiée ?

 

 

- Basta ! : En quoi quantifier une dette est-elle un problème ?

David Graeber : Quantifiable, la dette devient froide, impersonnelle et surtout transférable : l’identité du créancier n’a pas vraiment d’importance. Si je promets de vous rencontrer à cinq heures demain, vous ne pouvez pas donner cette promesse à quelqu’un d’autre. Parce que la dette est impersonnelle, parce qu’elle peut être exigible par des mécanismes impersonnels, elle peut être transférée à une autre personne. Sans ces mécanismes, la dette est quelque chose de très différent. C’est une promesse qui repose sur la confiance. Et une promesse, ce n’est pas la négation de la liberté, au contraire, c’est l’essence de la liberté ! Être libre, c’est justement avoir la capacité de faire des promesses. Les esclaves ne peuvent pas en faire, ils ne peuvent pas prendre d’engagements auprès d’autres personnes, car ils ne sont pas sûrs de pouvoir les tenir. Être libre, c’est pouvoir s’engager auprès d’autrui.

 

 

- Basta ! : Au contraire, le « remboursement de la dette » est devenu un dogme moral...

David Graeber : La dette a été transformée en une question d’arithmétique impersonnelle, en l’essence même de l’obligation morale. C’est ce processus que nous devons défaire. Il est fascinant aussi de voir le lien entre la notion de dette et le vocabulaire religieux, de constater comment les premières religions débutent avec le langage de la dette : votre vie est une dette que vous devez à Dieu. La Bible par exemple commence avec le rachat des péchés... Devenue dogme moral, la dette justifie les dominations les plus terribles. On ne peut comprendre ce qu’elle représente aujourd’hui sans un détour par cette longue histoire de la dette comme justification morale de relations de pouvoir inégales. Le langage de la dette permet de justifier une relation de pouvoir arbitraire. Et il est très difficile d’argumenter face à un pouvoir arbitraire sans adopter le même langage.

 

 

- Basta ! : Vous citez l’exemple de la mafia...

David Graeber : Parler de dette devient un moyen pour décrire des relations inégales. Les mafieux ont compris cela : ils utilisent souvent le terme de dette, même si ce qu’ils font est en réalité de l’extorsion. Quand ils annulent ou reportent certaines dettes, cela passe pour de la générosité ! C’est comme les armées qui font payer un tribut aux vaincus : une taxe en échange des vies épargnées. Avec le langage de la dette, on dirait que ce sont les victimes qui sont à blâmer. Dans de nombreuses langues, dette, culpabilité et péché sont le même mot ou ont la même racine.

 

La monnaie, qui permet de quantifier précisément la valeur d’une dette, apparaît d’ailleurs dans les situations de violence potentielle. L’argent est aussi né du besoin de financer les guerres. La monnaie a été inventée pour permettre aux États de payer des armées professionnelles. Dans l’Empire romain, la monnaie apparait exactement là où stationnent les légions. De la même façon, le système bancaire actuel a été créé pour financer la guerre. Violence et quantification sont intimement liés. Cela transforme les rapports humains : un système qui réduit le monde à des chiffres ne peut être maintenu que par les armes.

 

 

- Basta ! : Il y a aussi une inversion : le créancier semble être devenu la victime. L’austérité et la souffrance sociale sont alors considérées comme un sacrifice nécessaire, dicté par la morale…

David Graeber : Absolument. Cela permet par exemple de comprendre ce qui se joue en Europe aujourd’hui. L’Europe est-elle une communauté de partenaires égaux ? Ou y a-t-il une relation de pouvoir entre entités inégales ? Est-ce que tout peut être renégocié ? Quand une dette est établie entre égaux, elle est toujours traitée comme une promesse. Nous renégocions des promesses tout le temps, car les situations changent : si je vous promets de vous voir demain à cinq heures, si ma mère meurt, je ne suis pas obligé de tenir ma promesse.

Les gens riches peuvent être incroyablement compréhensifs concernant la dette des autres riches : les banques états-uniennes Goldman Sachs et Lehman Brothers peuvent se concurrencer, mais quand quelque chose menace leur position générale de classe, soudain elles peuvent oublier toutes les dettes contractées si elles le veulent. C’est ce qui s’est passé en 2008. Des trillions de dollars de dettes ont disparu, parce que cela arrangeait les puissants. De la même façon des gens pauvres vont être très compréhensifs les uns envers les autres. Les prêts que l’on fait à des proches sont finalement souvent des cadeaux. C’est lorsqu’il y a des structures d’inégalités, que soudain la dette devient une obligation morale absolue. La dette envers les riches est la seule à être vraiment « sacrée ». Comment se fait-il que Madagascar soit en difficulté quand il doit de l’argent aux États-Unis, mais que lorsque ce sont les États-Unis qui doivent de l’argent au Japon, c’est le Japon qui est en difficulté ? Le fait notamment que les États-Unis ont une puissante armée change le rapport de force...

 

 

- Basta ! : Aujourd’hui, on a l’impression que la dette a remplacé les droits : les droits à la formation ou au logement se sont transformés en droit au crédit ?

David Graeber : Certains utilisent leur maison pour financer leur vie en contractant de plus en plus de prêts hypothécaires. Leurs maisons deviennent des distributeurs de billets. Les micro-crédits pour faire face aux problèmes de la vie se multiplient, en substitution de ce qui était auparavant assuré par l’État-providence, qui donnait des garanties sociales et politiques. Aujourd’hui, le capitalisme ne peut plus offrir un bon « deal » à tout le monde. On sort de l’idée que chacun pourrait posséder un bout du capitalisme : aux États-Unis, chacun était censé pouvoir investir dans les entreprises, qui en fait exploitent chacun. Comme si la liberté consistait à posséder une part de notre propre exploitation.

 

 

- Basta ! : Puis les banquiers ont transformé la dette en produits bancaires, échangeables comme de la monnaie...

David Graeber : C’est incroyable ! Il y a six ans, même des gens très intelligents disaient : « Que ces gens sont brillants, ils ont créé de l’argent à partir de rien ». Ou plutôt avec des algorithmes tellement complexes, que seuls des astrophysiciens pouvaient les comprendre. Mais cette incroyable sophistication s’est révélée être une escroquerie ! J’ai eu récemment des entretiens avec de nombreux astrophysiciens, qui m’ont affirmé que ces chiffres ne veulent rien dire. Tout ce travail semble très sophistiqué, mais en fait il ne l’est pas. Une classe de personnes a réussi à convaincre tout le monde qu’ils étaient les seuls à pouvoir comprendre. Ils ont menti et les gens les ont cru. Soudain, un pan de l’économie a été détruit, et on a vu qu’eux-mêmes ne comprenaient pas leurs instruments financiers.

 

 

- Basta ! : Pourquoi cette crise n’a-t-elle pas changé notre rapport à la dette ?

David Graeber : A cause d’un profond déficit intellectuel. Leur travail idéologique a été tellement efficace que tout le monde est convaincu que le système économique actuel est le seul possible. Nous ne savons pas quoi faire d’autre. Alors nous posons un morceau de scotch sur le problème, prétendant que rien ne s’est passé. Où cela nous mènera-t-il ? A une nouvelle panne. Nous entrons désormais dans une nouvelle étape : celle du jeu défensif. Comme la plupart des justifications intellectuelles du capitalisme s’effondrent, ses promoteurs attaquent aujourd’hui toutes les alternatives possibles. En Grande-Bretagne, après la crise financière, la première chose qu’ont voulu faire les responsables économiques a été de réformer le système scolaire, pour le rendre plus compétitif. En réalité, le rendre plus semblable au système financier ! Pourquoi ? Sans doute parce que l’enseignement supérieur est un des seuls espaces où d’autres idées, d’autres valeurs, peuvent émerger. D’où la nécessité de couper court à toute alternative avant qu’elle ne puisse émerger. Ce système éducatif fonctionnait pourtant très bien jusqu’à présent, alors que le système financier a failli de manière spectaculaire. Il serait donc plus pertinent de rendre le système financier semblable au système éducatif, et non l’inverse !

 

 

- Basta ! : Aujourd’hui, aux États-Unis, des gens sont emprisonnés pour incapacité à rembourser leurs dettes. Vous citez l’exemple d’un homme condamné à la prison en 2010 dans l’État de l’Illinois pour une durée illimitée, tant qu’il n’aura pas réussi à rembourser 300 dollars...

David Graeber : Aux États-Unis, des gens sont emprisonnés parce qu’ils n’ont pas réussi à payer les frais de citation en justice. Alors qu’il est presque impossible de poursuivre des banques pour des saisies illégales ! Les banques peuvent toujours aller voir la police pour leur demander de vous arrêter pour défaut de paiement, même si tout le monde sait qu’il s’agit d’une saisie illégale. Pouvoir financier et pouvoir politique sont en train de fusionner. Police, collecteurs d’impôts, les personnes qui vous expulsent de vos maisons, opèrent directement dans l’intérêt des institutions financières. Peu importe votre revenu, quelqu’un signe votre expulsion [2] et la police vous fait sortir de votre maison.

 

Aux États-Unis, tout le monde croyait faire partie de la classe moyenne. Ce n’est pas vraiment une catégorie économique, plutôt une catégorie sociale et politique : on peut considérer que font partie de la classe moyenne les citoyens qui se sentent plus en sécurité quand ils voient un policier, que l’inverse. Et par extension, avec toutes les autres institutions, banques, écoles... Aujourd’hui, moins de la moitié des Américains considèrent qu’ils font partie de la classe moyenne, contre les trois quarts auparavant. Si vous êtes pauvres, vous supposez que le système est contre vous. Si vous êtes riches, vous avez tendance à croire que le système est avec vous. Jusqu’à présent aucun banquier n’a été mis en prison pour des actes illégaux durant la crise financière. Et des centaines de manifestants ont été arrêtés pour avoir tenté d’attirer l’attention sur ces faits.

 

 

- Basta ! : La dette provoque toujours contestation et désordre dans les sociétés, écrivez-vous. Et depuis 5000 ans, les insurrections populaires commencent très souvent par la destruction des registres de dette...

David Graeber : La dette semble être le plus puissant des langages moraux jamais créés pour justifier les inégalités et les rendre « morales ». Mais quand tout explose, c’est avec une grande intensité ! L’historien britannique Moisis Finley défendait l’argument que dans le monde antique, il n’y avait qu’une seule demande révolutionnaire : abolir les dettes, et ensuite redistribuer les terres. De la décolonisation de l’Inde à l’Amérique latine, les mouvements d’abolition des dettes semblent partout une priorité. Lors de révolutions paysannes, une des premières actions des insurgés est de trouver les registres de dettes pour les brûler. Puis les registres de propriété des terres. La raison ? La dette, c’est pire que si vous dites à quelqu’un qu’il est inférieur, esclave, intouchable. Car cela signifie : « Nous ne sommes pas fondamentalement différents, vous devriez être mon égal, mais nous avons conclu un contrat d’affaires et vous avez perdu. » C’est un échec moral. Et cela peut engendrer encore plus de colère. Il y a quelque chose de profondément insultant, dégradant avec la dette, qui peut provoquer des réactions très violentes.

 

 

- Basta ! : Vous réclamez un jubilé, c’est-à-dire un effacement des dettes – dettes souveraines des États mais aussi dettes individuelles. Quel impact économique cela aurait-il aujourd’hui ?

David Graeber : Je laisse les détails techniques aux économistes... Cela supposerait notamment de revenir à un système public pour les pensions de retraite. Les précédentes annulations de dettes n’ont jamais concerné toutes les dettes. Mais certains types de dettes, comme les dettes de consommation ou la dette souveraine des États, pourraient être effacées sans réels effets sociaux. La question n’est pas de savoir si l’annulation de dette va avoir lieu ou pas : les gens qui connaissent bien la situation admettent que cela va évidemment arriver. La Grèce, par exemple, ne pourra jamais rembourser sa dette souveraine, elle sera progressivement effacée. Soit avec de l’inflation – une manière d’effacer la dette qui a des effets délétères – soit par des formes d’annulation directe. Est-ce que cela arrivera « par en bas », sous la pression des mouvements sociaux, ou « par en haut », par une action des dirigeants pour tenter de préserver le système ? Et comment vont-ils habiller cela ? Il est important de le faire de manière explicite, plutôt que de prétendre à un simple « rachat » de la dette. Le plus simple serait de dire qu’une partie de la dette est impayable, que l’État ne garantit plus le paiement, la collecte de cette dette. Car pour une grande part, cette dette existe uniquement parce qu’elle est garantie par l’État.

 

 

- Basta ! : L’effacement de la dette des États, c’est la banqueroute. Les experts du FMI ou de la Banque mondiale seront-ils un jour d’accord avec cette option ?

David Graeber : Le FMI annule actuellement des dettes en Afrique. Les experts savent que la situation actuelle n’est pas viable. Ils sont conscients que pour préserver le capitalisme financier et la viabilité à long terme du système, quelque chose de radical doit avoir lieu. J’ai été surpris de voir que des rapports du FMI se réfèrent à mon livre. Même au sein de ces institutions, des gens proposent des solutions très radicales.

 

 

- Basta ! : Est-ce que l’annulation de dettes signifie la chute du capitalisme ?

David Graeber : Pas nécessairement. L’annulation de dettes peut aussi être un moyen de préserver le capitalisme. Mais à long terme, nous allons vers un système post-capitaliste. Cela peut paraître effrayant, puisque le capitalisme a gagné la guerre idéologique, et que les gens sont convaincus que rien d’autre ne peut exister que cette forme précise de capitalisme financier. Il va pourtant falloir inventer autre chose, sinon dans 20 ou 30 ans, la planète sera inhabitable. Je pense que le capitalisme ne sera plus là dans 50 ans, mais je crains que ce qui arrive ensuite soit encore pire. Nous devons construire quelque chose de mieux.

 

 

- Basta ! : Dans le cadre du mouvement Occupy Wall Street, vous êtes l’un des initiateurs de la campagne Rolling Jubilee. Quels sont ses objectifs et son impact ?

David Graeber : C’est un moyen de montrer à quel point ce système est ridicule. Aux États-Unis, des « collecteurs » achètent de la dette, à 3% ou 5% du montant de la dette initiale, et vont ensuite tenter de recouvrer la totalité de l’argent en faisant payer les personnes endettées. Avec la campagne Rolling Jubilee, nous faisons comme ces collecteurs de dette : nous achetons collectivement nous-mêmes de la dette – ce qui est parfaitement légal – et ensuite, au lieu d’exiger leur remboursement, nous effaçons ces dettes ! Quand nous atteindrons un niveau où cela commence à avoir un effet réel sur l’économie, ils trouveront sans doute un moyen de rendre ça illégal. Mais pour le moment, c’est un bon moyen de mettre en évidence l’absurdité du système (sur cette campagne, lire notre aticle «Strike debt  : un plan de sauvetage du peuple par le peuple»). En complément, nous développons le projet « Drom », Debt resistors operation manuel, qui fournit des conseils légaux et pratiques aux personnes endettées.

 

La façon la plus simple de désobéir à la finance, c’est de refuser de payer les dettes. Pour lancer un mouvement de désobéissance civile contre le capitalisme, on peut commencer par là. Sauf que les gens le font déjà ! Un Américain sur sept est poursuivi par un collecteur de dettes. 20 % au moins des prêts étudiants sont en situation de défaut. Si vous ajoutez les prêts hypothécaires, sur les 80 % de la population qui sont endettés aux États-Unis, entre un quart et un tiers sont déjà en situation de défaut de paiement ! Des millions d’Américains font déjà de la désobéissance civile par rapport à la dette. Le problème est que personne ne veut en parler. Personne ne sait que tout le monde le fait ! Comment réunir tous ces gens isolés ? Comment organiser un mouvement social si tout le monde a honte de ne pas réussir à rembourser ses dettes ? À chaque fois que vous refusez de payer une dette médicale, une dette « odieuse » créée par la collusion entre gouvernement et financiers – qui piège les gens dans des dettes que vous n’avez d’autre choix que de subir – vous pouvez dépenser votre argent pour quelque chose de socialement important. Nous voulons encourager les « coming-out » sur cette résistance au système. Fédérer cette armée invisible de gens qui font défaut, qui sont déjà sur le terrain de bataille, s’opposant au capitalisme par une résistance passive.

Propos recueillis par Agnès Rousseaux

 

David Graeber, Dette, 5000 ans d’histoire, Editions Les liens qui libèrent, 2013, 620 pages. Vous pouvez commander le livre dans la librairie la plus proche de chez vous, à partir du site Lalibrairie.com.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Notes

[1Docteur en anthropologie, économiste, ancien professeur à l’Université de Yale, David Graeber est actuellement professeur à la London School of Economics. Il est selon le New York Times l’un des intellectuels les plus influents actuellement. Et est l’un des initiateurs du mouvement Occupy Wall Street.

Partager cet article
Repost0
9 août 2014 6 09 /08 /août /2014 11:25
Crédit Photo :  DR

Crédit Photo : DR

Sources : NPA  par Patrick Saurin  |   | Propos recueillis par Henri Wilno
Partager cet article
Repost0
31 juillet 2014 4 31 /07 /juillet /2014 00:11
Dénoncer le chantage à la dette publique par Eric Toussaint

Eric Toussaint, président du Comité pour l’annulation de la dette du tiers-monde (CADTM), était à l’Université d’été d’Attac à Nîmes fin juillet 2013. Il revient sur les différentes raisons pour lesquelles une partie de la dette publique peut être considérée comme illégitime.

Partager cet article
Repost0
7 mai 2014 3 07 /05 /mai /2014 18:03
3% de déficit public : Oui ! Intérêts illégitimes Non !

Source : Robert Mascarell pour le Parti de Gauche Midi Pyrénées à partir du blog de Robert Mascarell

- Moi, européen anticapitaliste, suis pour le respect des 3 %

Je pressens qu’à la lecture de ce titre, nombre de mes camarades du Parti de gauche, dont je suis membre, et plus largement du Front de gauche, vont se demander ce qui m’arrive.

 

Pour aggraver mon cas, j’ajoute que je suis également pour le respect du non-dépassement du taux de 60 % de la dette de la France par rapport au PIB, imposé par l’Union européenne.

 

En écrivant cela, je sais que je vais à l’encontre de tout ce que nous disons. Vient donc le moment de m’expliquer.

 

Avant toute chose, je veux rassurer toute ma famille politique. Je reste résolument ancré à gauche et même formidablement bien au sein du Parti de gauche. Disons qu’il ne me déplaît pas de cultiver le paradoxe, mais pas la provocation. Du moins je l’espère.

 

Comme le Parti de gauche, comme le Front de gauche, j’affirme que notre pays n’est pas en crise économique, mais en crise de la répartition de ses richesses.

 

- La France n’a jamais été aussi riche

Le principal indicateur de la richesse d’un pays est son PIB (produit intérieur brut). Le PIB représente la totalité des richesses créées et produites, chaque année, dans chaque pays. Que ces richesses soient utiles à l’intérêt général ou futiles, ou même nuisibles à la collectivité humaine. L’autre indicateur est son patrimoine bâti (monuments historiques, immeubles), industriel (locaux professionnels) et foncier (terrains agricoles). Il y a d’autres indicateurs de richesse : la qualité des réseaux (routes, voies ferrées, électricité, eau), enfin, la situation géographique, tels que les débouchés maritimes, le tourisme. A noter qu’une grande partie des richesses provenant des autres indicateurs que le PIB, abonde ce dernier par l’activité économique induite.

 

Enfin, il est un autre indicateur de la richesse d’un pays, trop souvent méconnu, c’est celui du montant de l’épargne des ménages par rapport à leurs revenus disponibles. De tous les pays développés, le nôtre est nettement en tête. Fin 2013, notre taux d’épargne s’élève à 15,4 %, alors qu’il n’est que de 9,9 % en Allemagne, 4,5 % aux Etats-Unis, 5,8 % au Royaume-Uni,…..

 

En 1980, notre PIB s’est élevé, en volume, à 445 milliards d’euros. En 2013, il s’est élevé à 2 060 milliards d’euros selon la Banque de France. La multiplication des richesses créées et produites en 33 ans a donc été de plus de 4,6 fois. Bien sûr, ce dernier chiffre doit être pondéré : 1/ par le taux de l’inflation intervenu en 33 ans, 2/ par l’évolution démographique. Il y a plus d’habitants en France en 2013 qu’en 1980.

 

De 1980 à 2013, le taux d’inflation cumulé a été de 208,2 %, soit plus qu’un triplement. Ce taux de 208,2 % est obtenu par la méthode de l’anatocisme. C’est-à-dire, qu’en partant d’une base 100 en janvier 1980, il faut ajouter le taux de l’inflation de la première année à 100. Mettons 2 %, par exemple. A ce chiffre 102 obtenu à la fin de la première année, il faut ajouter le taux de l’inflation de l’année suivante et cumuler ce dernier taux d’inflation à la base 102 atteinte fin décembre 1980, et ainsi de suite jusqu’en 2013.

 

Pour ce qui est de la prise en compte de l’évolution démographique, les instituts statistiques ont la bonne idée de publier le PIB en volume, dont il est question plus haut, et le PIB par tête d’habitant. Le PIB par tête d’habitant permet de comparer son évolution d’année en année de manière plus objective.

 

En 1980, le PIB par tête d’habitant s’est élevé à 8,1 milliers d’euros. En 2013, il s’est élevé à 27,9 milliers d’euros. Soit une multiplication en 33 ans de 3,44. Ce chiffre est un coefficient ou indice, si on le traduit en pourcentage, cela fait une augmentation de 244 % de 1980 à 2013.

 

Maintenant, pondérons cette augmentation de 244 % par l’augmentation de 208,2 % du taux de l’inflation intervenue en 33 ans. Cela signifie que de 1980 à 2011, le PIB par tête d’habitant a réellement augmenté de 35,8 %.

 

Loin d’être en crise, notre pays a vu sa richesse croître de 35,8 % en 33 ans. Le malheur, c’est que seule la minorité des plus fortunés a profité, et même très au-delà, de l’accroissement de notre richesse. Autre donnée : la part de la richesse produite prélevée par le capital a triplé depuis 30 ans. Elle était de 3,2% du PIB en 1980, de 5,6% en 1999, elle est passée à 9,3% du PIB en 2011.

 

Etat de nos richesses fait, j’en viens maintenant à l’analyse de la dette publique de la France.

 

- Ce n’est pas la dette qui est illégitime, mais les intérêts

Entre 1980 et 2008, la dette avec intérêts est passée de 239 à 1 327 milliards d’euros. Pendant la même période, la dette, SANS LES INTERETS, est passée de 239 milliards (en fait moins, puisque dans ces 239 milliards il y a des intérêts), à……. 21,4 milliards d’euros. Ainsi, en 2008, nous avons remboursé 1306 milliards d’euros d’intérêts, soit 61 fois plus que la dette de base.

 

Je souligne que, jusqu’au vote de la loi scélérate du 3 janvier 1973, dite Pompidou-Giscard, la Banque de France pouvait prêter de l’argent à l’Etat à taux zéro et que, depuis le traité de Maastricht, la Banque Centrale Européenne prête de l’argent aux banques privées au taux de 1 %, mais qu’il lui est interdit d’en prêter aux Etats membres de l’Union européenne. Ceux-ci sont donc obligés de contracter leurs emprunts auprès des banques privées, à des taux souvent usuraires.

 

Démonstration est faite que dans notre dette ce sont surtout les intérêts qui pèsent. Sans eux, aujourd’hui, notre taux d’endettement ne serait pas de 95 % par rapport au PIB de l’année. Il serait très largement inférieur aux 60 %, dont l’Union européenne a décrété qu’il était la limite supérieure indépassable, sous peine de sanctions pécuniaires.

 

Dans une interview que Michel Rocard a donnée le 28 décembre 2012, sur Europe 1, dans l’émission Médiapolis, celui-ci qualifie la loi du 3 janvier 1973 de stupéfiante. Il précise que si la France avait pu continuer à se financer à l’œil, comme il dit, notre taux d’endettement aujourd’hui ne serait pas de 90 ou 91 % (c’était notre taux d’endettement en décembre 2012), mais de 16 ou 17 %. Pour reprendre son qualificatif, je trouve stupéfiant que, lorsque Rocard était Premier ministre, et alors qu’il connaissait cette « loi stupéfiante », il n’ait rien fait pour l’abroger.

 

Sans ces intérêts illégitimes, les libéraux, qu’ils soient au gouvernement ou dans l’opposition, ne pourraient pas dire que notre pays vit au-dessus de ses moyens depuis trente ans, dixit le Premier ministre Valls, le 14 avril dernier. Qui n’en est pas à une provocation près.

 

Ces intérêts sont d’autant plus illégitimes, qu’ils sont consentis, à tous les pays européens, à des taux plus ou moins largement supérieurs au taux de croissance de chacun de ces pays. Il en résulte un effet boule de neige, au fil des années, un effet d’endettement automatique, totalement indépendant des politiques menées par les gouvernements. La seule responsabilité de ceux-ci étant de ne pas remettre en cause ce système de prêt.

 

La réalité, je crois l’avoir démontrée, et à travers l’augmentation de la richesse de la France, via son PIB, et à travers la faiblesse de sa dette réelle, hors les intérêts illégitimes que notre pays paie, c’est qu’en fait, la France respecte pleinement les contraintes des traités européens (de Maastricht et de Lisbonne). Hors les intérêts illégitimes, le ratio de notre dette publique par rapport au PIB d’une année est très très inférieur aux 95 % (16 ou 17 % disait Rocard en 2012) dont les libéraux nous culpabilisent.

 

En conclusion de ce paragraphe, je réaffirme que ce n’est pas notre dette qui est illégitime, du moins pour l’essentiel, ce sont surtout les intérêts qu’elle génère. Ce disant, je sais bien que je vais à l’encontre de ce que disent mes camarades anticapitalistes. J’assume ma divergence, sachant qu’elle n’est pas fondamentale.

 

Je ne conteste pas que la dette puisse être illégitime, au moins pour partie. Mais en l’espèce, et pour ce qui concerne la France, force est de constater, sans entrer dans le détail de la composition de notre dette, que ce sont les intérêts de la dette qui nous plombent. Cela est d’autant plus scandaleux que, par le biais de ces intérêts, la population, y compris les plus pauvres, reversent de l’argent aux banquiers et autres prêteurs spéculateurs. En somme, c’est de la redistribution à l’envers. Du plus pauvre au plus riche.

 

En ce qui concerne l’autre ratio imposé par l’Europe, celui du non-dépassement du taux de 3 % de déficit budgétaire, je vais démontrer que, là encore, la situation de la France est en réalité excellente.

 

- Depuis 1983, les gouvernements appauvrissent volontairement la France

Chaque année, le gouvernement élabore le budget. Y figurent des recettes et des dépenses. Les recettes sont constituées d’une multitude d’impôts payés par les différentes catégories de Français et par les entreprises. Les dépenses sont constituées des dépenses dites de fonctionnement (les salaires versés aux fonctionnaires), des dépenses dites d’investissements, des remboursements d’emprunts et des intérêts d’emprunts. Nous venons de voir que les intérêts d’emprunts sont de plus en plus lourds depuis la loi française du 3 janvier 1973, reprise en 1992, dans le traité de Maastricht, puis en 2008, dans le traité de Lisbonne.

 

Ainsi, les intérêts d’emprunts interfèrent lourdement aussi bien dans notre taux d’endettement que dans notre taux de déficit budgétaire.

 

Et comme la coupe n’est pas suffisamment pleine, depuis 1983, tous les gouvernements qui se sont succédé ont choisi d’appauvrir délibérément notre pays, en accordant force subventions et exonérations fiscales et sociales aux couches sociales les plus favorisées, ou bien encore en ayant créé des niches fiscales, dont la plupart sont néfastes à l’intérêt national, mais profitables à ceux qui en ont le moins besoin. Sans compter tous les moyens d’optimisations fiscales et autres possibilités d’évasions fiscales vers les paradis fiscaux, et même les fraudes fiscales utilisés sans vergogne par les plus fortunés.

 

Pour exemples :

  • le taux d’impôt sur les sociétés qui était de 50% jusqu’en 1985, est aujourd’hui de 33,33%, et depuis 1993, le taux effectif d’impôt sur les sociétés est beaucoup plus bas en raison, notamment, d’une fiscalité dérogatoire de plus en plus importante. Manuel Valls propose de réduire ce taux à 28 %.
  • Depuis 1986, les tranches composant l’impôt sur le revenu ont été réduites de 14 à 5. La tranche marginale est quant à elle passée de 65% en 1985, à partir de 36 853 euros (241 740 francs), à 45% aujourd’hui.
  • L’impôt de solidarité sur la fortune, établi en 1989 à la suite de la suppression de l’IGF en 1987, n’a pas connu de modification de sa tranche supérieure au cours des dernières années, ni dans son taux, ni dans son seuil, malgré l’accroissement de la valeur des actifs immobiliers et financiers. Il fait en outre l’objet de différents mécanismes de plafonnement.
  • Les exonérations de cotisations sociales, accordées depuis le début des années 1990, soit de manière générale, soit de manière ciblée sur les bas salaires, sont compensées depuis 1994 afin de préserver les finances sociales. Cela grève le budget de l’État d’un montant annuel d’environ 30 milliards d’euros.
  • En 1999, la part salariale de la taxe professionnelle (TP), qui est le principal impôt local, a été progressivement supprimée sur cinq ans. Déjà rabotée en 1987 par un abattement général de 16% de ses bases imposables, la TP a ensuite fait l’objet d’un dégrèvement au titre des investissements nouveaux décidés en 2004, puis un nouveau plafonnement a été introduit. Enfin, la TP a finalement été supprimée en 2010 et remplacée par un prélèvement de moindre valeur (la contribution économique territoriale).

 

Pour compenser ces réductions, les gouvernements, depuis 1983, recourent à l’emprunt générateur de paiement d’intérêts très lourds. La boucle est ainsi bouclée.

 

Particulièrement inégalitaires, ces allègements n’ont en plus jamais permis de favoriser la croissance et l’emploi, au contraire, alors que les gouvernements successifs ne les justifient que dans cette quête.

 

Voilà, les choses sont claires, fin 2013, le taux d’endettement réel de la France n’est que de l’ordre de 17 % par rapport au PIB de cette année-là, et le taux de déficit public est de bien moins de 3 % du PIB, compte tenu de la modicité de notre taux d’endettement et de toutes les ressources dont est délibérément privé l’Etat français.

 

Maintenant, j’espère que vous comprenez mieux pourquoi j’ai commencé cet article en affirmant que, pour la France, je n’étais pas hostile au respect des taux de 3 % de déficit et de 60 % d’endettement, imposés par l’Union européenne. D’ores et déjà, la santé de l’économie française est à ce point bonne qu’en réalité elle est très en deçà de ces taux.

 

Evidemment, sur le principe, je suis opposé à la prétention de l’Union européenne d’imposer à ses membres le non-dépassement de ces taux. Me voilà redevenu "orthodoxement" de gauche.

 

Robert Mascarell, Parti de Gauche Aveyron

Partager cet article
Repost0
29 avril 2014 2 29 /04 /avril /2014 13:30
La dette, la dette ! Mais au fait, c'est quoi cette "dette" au nom de laquelle on veut nous imposer l'austérité ?

Apprenez en quelques minutes ce qu'est la création monétaire par le crédit, le système des réserves fractionnaires, et l'article 123 du traité de Lisbonne... sans lesquels il est impossible de comprendre l'origine des" dettes publiques et privées" qui ravagent l'ensemble des pays développés.... et les solutions à mettre en œuvre pour sortir de l'austérité que l'on nous impose au nom de "la dette".

 

 

- Comprendre pour débattre, proposer et agir !

L'issue : faire un audit de la dette publique...... et s'affranchir du traité de Lisbonne et construire une autre Europe comme le propose le Front de Gauche.

 

 

- Et voilà ce qu'en disent nos amis belges qui eux aussi sont soumis à l'austérité au nom de la dette.......

 

- La dette de la France résulte des cadeaux fiscaux fait aux riches, révèle une étude

Le discours dominant sur la dette publique prétend qu’elle découle d’une croissance excessive des dépenses publiques. Or un examen des faits montre que la dette publique a été largement constituée par des politiques économiques favorables aux créanciers et aux riches.

 

Cette étude a été réalisée par un un groupe de travail du Collectif pour un Audit citoyen de la dette publique et publiée le 27 mais 2014. Elle se veut une contribution au nécessaire débat public sur des questions cruciales : d’où vient la dette ? A-t-elle été contractée dans l’intérêt général, ou bien au bénéfice de minorités déjà privilégiées ? Qui détient ses titres ? Peut-on alléger son fardeau autrement qu’en appauvrissant les populations ? Les réponses apportées à ces questions détermineront notre avenir.

 

Télécharger la version complète du rapport

 

 

 

 

- Résumé du rapport :

59% de la dette publique proviennent des cadeaux fiscaux et des taux d’intérêt excessifs

Tout se passe comme si la réduction des déficits et des dettes publiques était aujourd’hui l’objectif prioritaire de la politique économique menée en France comme dans la plupart des pays européens. La baisse des salaires des fonctionnaires, ou le pacte dit « de responsabilité » qui prévoit 50 milliards supplémentaires de réduction des dépenses publiques, sont justifiés au nom de cet impératif.

 

  • Le discours dominant sur la montée de la dette publique fait comme si son origine était évidente: une croissance excessive des dépenses publiques.

 

Mais ce discours ne résiste pas à l’examen des faits. Dans ce rapport nous montrons que l’augmentation de la dette de l’État – qui représente l’essentiel, soit 79%, de la dette publique – ne peut s’expliquer par l’augmentation des dépenses puisque leur part dans le PIB a chuté de 2 points en trente ans.

 

Si la dette a augmenté c’est d’abord parce que tout au long de ces années l’État s’est systématiquement privé de recettes en exonérant les ménages aisés et les grandes entreprises : du fait de la multiplication des cadeaux fiscaux et des niches, la part des recettes de l’État dans le PIB a chuté de 5 points en 30 ans.

 

Si l’État, au lieu de se dépouiller lui-même, avait maintenu constante la part de ses recettes dans le PIB, la dette publique serait aujourd’hui inférieure de 24 points de PIB (soit 488 milliards €) à son niveau actuel.

 

C’est ensuite parce que les taux d’intérêt ont souvent atteint des niveaux excessifs, notamment dans les années 1990 avec les politiques de « franc fort » pour préparer l’entrée dans l’euro, engendrant un « effet boule de neige » qui pèse encore très lourdement sur la dette actuelle.

 

Si l’État, au lieu de se financer depuis 30 ans sur les marchés financiers, avait recouru à des emprunts directement auprès des ménages ou des banques à un taux d’intérêt réel de 2 %, la dette publique serait aujourd’hui inférieure de 29 points de PIB (soit 589 milliards €) à son niveau actuel.

 

L’impact combiné de l’effet boule de neige et des cadeaux fiscaux sur la dette publique est majeur : 53% du PIB (soit 1077 milliards €). Si l’État n’avait pas réduit ses recettes et choyé les marchés financiers, le ratio dette publique sur PIB aurait été en 2012 de 43% au lieu de 90 % comme le montre le graphique ci-contre.

 

Au total, 59% de l’actuelle dette publique proviennent des cadeaux fiscaux et des taux d’intérêts excessifs.

 

 

 

 

 La hausse de la dette publique provient pour l’essentiel
des cadeaux fiscaux et des hauts taux d’intérêt

Source : Insee, comptabilité nationale ; calculs CAC

 

Le rapport d’audit propose aussi une évaluation des impacts des paradis fiscaux ainsi que de la crise financière de 2008 dans l’envolée de la dette publique.

 

Au total, il apparaît clairement que la dette publique a été provoquée par des politiques économiques largement favorables aux intérêts des créanciers et des riches, alors que les sacrifices demandés aujourd’hui pour la réduire pèsent pour l’essentiel sur les salariés, les retraités et les usagers des services publics. Cela pose la question de sa légitimité.

 

Le rapport se conclut par une série de propositions destinées à alléger le fardeau de la dette (près de 50 milliards d’euros d’intérêts par an et plus de 100 milliards de remboursements) pour rompre avec le cercle vicieux des politiques d’austérité et financer les investissements publics dont l’urgence sociale et écologique n’est plus à démontrer.

 

La réalisation d’un audit de la dette publique effectué par les citoyens ou sous contrôle citoyen, devrait permettre d’ouvrir enfin un véritable débat démocratique sur la dette publique. Ce débat devrait amener à déterminer quelle partie de cette dette est jugée par les citoyens comme illégitime. Les premières évaluations ici proposées par le groupe de travail du Collectif pour un audit citoyen se veulent une contribution à ce débat.

 

Ont participé à l’élaboration du rapport :

  • Michel Husson (Conseil scientifique d’Attac, coordination),
  • Pascal Franchet (CADTM),
  • Robert Joumard (Attac),
  • Evelyne Ngo (Solidaires Finances Publiques),
  • Henri Sterdyniak (Économistes Atterrés),
  • Patrick Saurin (Sud BPCE

 

Pour en savoir plus :

- Thomas Guénolé : "La dette, la dette, la dette!", cet argument antisocial que l'on vous rabâche est bidon

Partager cet article
Repost0
27 avril 2013 6 27 /04 /avril /2013 13:16
François Delapierre : La bombe de la dette étudiante

François Delapierre est secrétaire national du Parti de Gauche, chargé de la bataille idéologique et du programme.

 

-En savoir plus

Après la crise des subprimes de 2008, une nouvelle bulle financière se prépare à exploser : celle de la dette étudiante. Elle est le fruit pourri de la marchandisation, rampante ou assumée, de l’université. Alors que le temps des études devrait être celui d’une émancipation intellectuelle et sociale, il devient le sas d’entrée dans une prison pour dette.

 

Au Québec, en Grande-Bretagne, au Portugal, en Tunisie… étudiants et jeunes précarisés se sont mobilisés contre la dégradation des diplômes et la déqualification des diplômés. C’est un bras de fer planétaire aux enjeux immenses pour toute la société. Déjà, l’université française est minée par cette nouvelle contradiction du capitalisme.

 

- Par : François Delapierre

Éditions : Les Editions Bruno Leprince

Date de parution : 7 mars 2013

Pages : 76

Disponibilité : chez l'éditeur Les Editions Bruno Leprince

Format : 120 x 170 mm

Prix papier TTC : 3 €

 

 

-La bombe supérieure : l'explosion politique et économique de l'endettement étudiant

Précariat diplômé, qualification dégradée, créance pourries...une nouvelle contradiction menace le capitalisme de notre époque. Conférence de François Delapierre, le mardi 20 novembre, à l'usine.

Partager cet article
Repost0

Rédacteur

  • Pour une Révolution citoyenne par les urnes
  • Retraité SNCF, engagé politiquement depuis l'âge de 15 ans, militant du PCF de 1971 à 2008, adhérent au Parti de Gauche et à la France Insoumise depuis leur création, ex secrétaire de syndicat, d'Union locale et conseiller Prud'homme CGT  de 1978 à 2022.
  • Retraité SNCF, engagé politiquement depuis l'âge de 15 ans, militant du PCF de 1971 à 2008, adhérent au Parti de Gauche et à la France Insoumise depuis leur création, ex secrétaire de syndicat, d'Union locale et conseiller Prud'homme CGT de 1978 à 2022.

La France insoumise

-Pour une MAJORITÉ POPULAIRE, renforcer la France insoumise pour GAGNER !

🔴  La France insoumise et ses 71 députés sont au service des Françaises et des Français face à l'inflation et l'accaparement des richesses par l'oligarchie.

✅ La dissolution, nous y sommes prêts ! 
Avec la #Nupes, la France Insoumise propose l’alternative 


📌 Pourquoi La France insoumise, ses origines ? La France insoumise : comment ? La France insoumise : pour quoi faire ?

Autant de questions dont vous trouverez les réponses... ✍️ en cliquant ci-dessous 👇

 

Qu’est-ce que La France insoumise ? - Nouvelle brochure

 

-N'attendez pas la consigne !

✅ Pour rejoindre la France insoumise et AGIR ENSEMBLE pour GAGNER : cliquez ci-dessous 👇

 

La France insoumise

 

- La chaîne télé de Jean Luc Melenchon : cliquez ci-dessous 👇

 

- Le blog de Jean Luc Melenchon : cliquez ci-dessous 👇

Jean-Luc Mélenchon le blog

 

Recherche

La France insoumise à l'Assemblée Nationale

 Pour accéder au site : cliquez ci-dessous 👇

Sur les réseaux sociaux  :

Facebook  - Twitter

Le JOURNAL L'INSOUMISSION

✍️ cliquez ci-dessous 👇

L'Insoumission

 

✅ S'inscrire à la Newsletter 👇

 

 

Le site du Parti de Gauche

 Pour accéder au site : cliquez ci-dessous 👇

 

Manifeste pour l'Ecosocialisme

 Pour accéder au site : cliquez ci-dessous 👇

 

Mouvement pour la 6e République

 Pour accéder au site : cliquez ci-dessous 👇

 

Des outils pour combattre le FN et l'idéologie d'extrême droite française

🔴  Observatoire de l’extrême droite de l'Insoumission

 Pour accéder au site (cliquez ci-dessous) 👇

Observatoire de l’extrême droite l'insoumission

 

 Pour accéder au site (cliquez ci-dessous) 👇


🔴  et aussi : Observatoire national pour « mettre sous surveillance » l’extrême droite

 Pour accéder au site (cliquez ci-dessous) 👇