Sur La Rochelle la question du logement est au cœur des problématiques de « la vie en communauté», et si, nombre d'idées sont mises en débat, il y a urgence à passer aux actes.
Sources : Eric Durand | mis à jour le 17/02/2020
Partons du constat partagé, y compris par la Fédération des promoteurs immobiliers, les prix des logements neufs ont bondi de 17% depuis 2008, pénalisant les classes modestes, moyennes et les jeunes[13].
Dans ce contexte, La Rochelle arrive en première position en termes de prix du mètre carré loué sur un ensemble de 200 villes du Sud-Ouest, avant même la capitale régionale Bordeaux et la station balnéaire Biarritz (Pyrénées-Atlantiques). En moyenne, un bien y est loué entre 13,60€ et 15€ le mètre carré[5].
Ainsi, sur La Rochelle la question du logement est au cœur des problématiques de la vie en communauté », et si, nombre d'idées sont mises en débat, il y a urgence à passer aux actes.
J'affirme d'entrée que le logement ne saurait être une marchandise dopée par les dispositifs de défiscalisation, mais une condition indispensable à la dignité de l’Homme tel que reconnu par l’article 25 de la Déclaration des droits de l’Homme qui doit relever de l’action publique et des citoyens.
On ne change pas la société sans changer la ville, mais cela ne se fera pas sans la prise en main par les habitants de l’avenir de leur quartier et l’exercice d’une vraie citoyenneté urbaine qui nécessite la concertation avec les populations concernées, en amont des projets d’urbanisme, leur association à toutes les étapes de la conception à la réalisation avec pouvoir de décision réel.
La crise du logement est réelle, même si La Rochelle est déjà très dotée en la matière, comptant 34 % de logements sociaux (66 % des logements sociaux de Charente-Maritime sont sur La Rochelle alors que la population rochelaise ne représente que 12,6 % du département) l’objectif de 5000 logements sociaux à construire en 12 ans est à atteindre tout en poursuivant la rénovation des quartiers.
Loger c’est impulser une nouvelle politique
Parce que le la politique du logement doit en priorité répondre aux problémes posés à France appauvrie n’est pas périurbaine. La France qui subit le plus lourdement les effets de la crise est bien loin d’être la France pavillonnaire du périurbain. La pauvreté et les inégalités se concentrent dans les grandes villes. Le taux de pauvreté [1] atteint son maximum – 18% - dans les villes de 100 000 à 200 000 habitants. Dans les communes des banlieues défavorisées ou les quartiers populaires des grandes villes, le taux de pauvreté dépasse souvent les 40 %. Les quartiers les plus en difficulté – parfois présentés comme bénéficiaires du dynamisme des métropoles – ne sont pas des ghettos à l’abandon, mais paient un tribut beaucoup plus lourd à la crise que la campagne ou la France pavillonnaire. Le taux de pauvreté y atteint 36 %, trois fois plus que le reste du territoire urbain. Entre 2006 et 2011, ce taux a augmenté de 6 points, contre 0,8 hors des zones urbaines sensibles[2].
- Dans le me même temps, le poids du logement dans les revenus est incontestablement un problème : 30% en France..... contre 18% en Allemagne[6].
Cette politique doit se traduire par :
- notamment, la rénovation concertée des quartiers délaissés (ex : Bongraine qui n’a que peu évolué depuis sa création dans les années 1920) ;
- une action pour une juste répartition de l’effort de logement social sur toutes les communes de la CDA dans le respect de la Loi SRU (Nieul-sur-Mer, Lagord, Puilboreau, Périgny, Aytré, Angoulins, Châtelaillon-Plage) ;
- le développement d’un habitat de type nouveau dans les projets de construction ou de réhabilitation « l’habitat coopératif » qui peut être sous forme de « village vertical » où les résidents de ce type de « village » :
- disposeront chacun d’un logement dans un même immeuble ;
- pourront mutualiser certains espaces et moyens ;
- pourront créer de véritables solidarités de voisinage, dans un projet à taille humaine alliant convivialité, responsabilité, économies, entraide, écologie et démocratie.
- Les « villageois verticaux » ou autre forme d’habitat coopératif, seront collectivement propriétaires de leur immeuble, et locataires de leurs logements, dans le cadre d’une gestion démocratique interdisant toute spéculation.
Pas de politique du logement sans maîtrise du foncier, c’est une exigence fondamentale !
Alors que La Rochelle se vide de ses populations jeunes et laborieuses, la lutte contre la spéculation foncière est un enjeu prioritaire, pour maîtriser les prix de logements accessibles à tous, mais aussi pour favoriser le développement économique de proximité, facteur d’emploi local.
- La maîtrise du foncier répond à ce double enjeu, car il empêche les promoteurs immobiliers de faire la pluie et le beau temps en matière de prix des surfaces.
- Le sol est un bien commun, et sa maîtrise publique est un enjeu en termes économiques et sociaux, ne serait-ce que pour garantir des coûts accessibles pour les logements, mais aussi en termes écologiques (lutte contre l’étalement urbain…).
C'est d'autant plus vrai avec la politique de Transition énergétique impulsée par le gouvernement qui risque de faire un "flop" car Il n'y aura pas de transition énergétique sans une révolution du foncier[3]. Prix du foncier et transitions ne doivent pas se traduire par une augmentation des inégalités sociales, … et nous amener à une reflexion sur la notion de propriété, telle qu’elle existe en France et son abolition éventuelle[4].
Le pour sa part a formulé un certain nombre de propositions discutables visant à favoriser la libération de terrains, à des prix compatibles avec des opérations de logement. Le mécanisme proposé repose sur une cohérence d'ensemble, visant à taxer davantage la détention et, au contraire, à alléger la fiscalité pesant sur les mutations à destination du logement.
Dans ce cadre, la puissance publique doit assumer ses responsabilités par :
- la constitution de réserves foncières sur ce qui reste disponible, voire en libérant de nouvelles surfaces (ex : parc des expositions) ;
- parmi les outils à disposition, rendre La Rochelle éligible au droit à l'encadrement des loyers[7], mettre en oeuvre une surtaxe de la taxe d'habitation pour les résidences secondaires[8] permettraient de remettre dans le circuit locatif des logements inoccupés et de desserrer la pression existante sur le foncier ;
- la mise en oeuvre du droit de préemption urbain, notamment renforcé aux immeubles en copriopriété[9] permettrait non seulement d'instaurer une mixité sociale très fine, à l'échelle d'une résidence, de revitaliser le caractère populaire du centre ville, de réduire la pression foncière et d'éviter que les familles soient chassées de leur appartement quand celui-ci est mis en vente ;
- la création, comme proposé par [10] d’une « charte des promoteurs » qui engagerait ces derniers à modérer leurs prix de vente (voir la charte de Saint-Ouen qui donne d’excellent résultats) ;
- et d'outils de dissuasion forts en cas de non respect de ces règles[12] ;
- la maîtrise de l’espace urbain et péri-urbain, (contrairement à la politique actuelle), dans le cadre du PLU et du SCOT pour s’opposer à toute extension des zones commerciales périphériques et agir pour le développement du commerce et de l’activité de proximité ;
qui sont autant de leviers pour une politiques foncière conforme à l’intérêt général.
Loger, c’est aussi protéger de l’urbanisation, le choix est fait :
- de protéger et restaurer les zones naturelles du littoral et les zones humides (marais de Tasdon, ...).
- d’instaurer un périmètre de protection des espaces agricoles et naturels péri-urbains à l’échelle de l’agglomération.
- de refuser une densification anarchique et irrespectueuses des résidents, par exemple en mettant en œuvre le concept .
prendre en compte les « usages » dans la conception des espaces publics urbains
Si l’attention aux usages – notamment – dans les aménagements contemporains n’est pas exempte d’, elle peut être un gage de qualité des projets. Morgane Delarc montre, à travers l’exemple du réaménagement de la place de la République à Paris, que la notion « d’usages [14]» peut constituer un analyseur des formes de coopération entre les différents professionnels mobilisés dans les projets urbains. Loger c'est aussi penser à ce que transportent les gens[15].
Comment l'ensemble de ces questions sont-elles prises localement en compte ?
enfin la transparence dans les choix d'attribution des logements sociaux
A tord ou à raison, rop souvent jugé opaque.
La ville "nouvelle" qui entend remettre le citoyen au centre de ces décisions doit être exemplaire y compris en ce domaine.
Quelle solution ? Regarder ce qui se fait ailleurs.
Ce nouveau système repose sur un barème de points attribués suivant une grille de cotation qui s'intéresse au logement, ses conditions d'occupation ainsi que qu'à des critères familiaux. Le nombre de personnes vivant par pièces, le statut du locataire (concubinage, PACS), la situation personnelle et familiale (violences familiales, handicap, assistante familiale), mais aussi l'état du logement, décent ou non, permettent l'attribution de points. En tout, 25 critères consultables sur le site sont pris en compte dans le nouveau système afin de hiérarchiser les dossiers en fonction des points recueillis par chaque demande. Les cinq dossiers recueillant le score le plus élevé sont alors soumis à la commission de la mairie, qui sélectionne à son tour trois dossiers pour les soumettre au bailleur à qui revient le choix final du locataire.
Un nouvel outil à suivre quand à sa mise en oeuvre possible sur l'agglomération rochelaise !
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Note :
[2] Louis Maurin, directeur de l’Observatoire des inégalités. Auteur de « Déchiffrer la société », éditions La découverte, 2009.
[3] Très cher, la rénovation énergétique… Entre 10 000 et 50 000 € selon l’état énergétique du logement, les matériaux choisis et les coûts de main-d’œuvre. Une facture importante que la baisse de la consommation induite ne permet pas de compenser, car celle-ci ne résiste pas longtemps à la hausse constante du prix du kWh. En cinq ans environ le bénéfice est annulé. D’autant que s’ajoute à la bête mais tenace hausse du coût de l’énergie, l’effet de notre psychologie : j’en ai souvent parlé, l’effet rebond rogne de 30 à 50 % les économies réalisées en raison du fait que nous profitons de celles-ci pour, par exemple, monter légèrement la température de consigne de la chaudière toute neuve.
[4] Il n'y aura pas de transition énergétique sans une révolution du foncier
[5] étude menée par l'Observatoire des loyers "Clameur"
[6] Léon Gendre maire de La Flotte et conseiller général
[11]
[14] Quelle prise en compte des « usages » dans la conception des espaces publics urbains ?
[15] Pour construire la ville durable, il faut penser à ce que transportent les gens
Pour en savoir plus :
- Rénover les centres-villes pour réparer les fractures sociales
- Il n'y aura pas de transition énergétique sans une révolution du foncier
La Rochelle : quelle stratégie commerciale pour l'Agglo ?
- La Rochelle : Beauregard, un quartier en ébullition
- Comment la France a tué ses villes ?
- Noéés force de propositions pour juguler le prix du foncier à la Rochelle
- Des pauvres relégués à la campagne Exode urbain, exil rural
- Pendant que Paris se contente de les « encadrer », Berlin gèle les loyers pendant cinq ans
- À Lyon, le premier immeuble construit en terre (Nicolas Meunier fait revivre la méthode ancestrale du pisé, totalement écolo et offrant une climatisation naturelle.)
- Stupéfiant rapport de la fondation Abbé Pierre
- en 2016, sur 51 488 logements recensés sur La Rochelle, 3 328, soit 6% étaient vacants...
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