Jean-Luc Mélenchon, candidat à la présidentielle de 2017
Chaque élection présidentielle voit ses manœuvres d’appareil et ses stratégies bancales se mettre en place. Ce sont souvent les mêmes modes de fonctionnement, les mêmes arrangements de coin de table. Les lignes politiques ne sont finalement jamais mises en discussion et c’est la course de petits chevaux qui se lance. On est bien loin de l’implication populaire que chacun brandit comme un mantra.
Sources : ARNAUD GUVENATAM | Mis à jour le 09/09/2020
Lors de la campagne de 2017, l’alpha et l’oméga de la réflexion politique pouvait se résumer à cela : lutter-et-faire-barrage-à-la-droite-et-l’extrême-droite.
De réflexion, en définitive, il s’était agit plus de postures pour empêcher qu’une gauche plus radicale ne s’installe dans le pays. Pourtant, cela n’a pas empêché Jean-Luc Mélenchon de réunir près de 20% des suffrages à l’élection présidentielle[1].
Pourquoi ?
Parce que le choix des électeurs ne s’est pas porté sur des postures anti-droite-et-extrême-droite, mais bien sur des visions politiques, des propositions concrètes. Nous avions beaucoup travaillé en amont, et sous les radars médiatiques sur les questions économiques, sociales, démocratiques et européennes. L’attelage Hamon-Jadot[2] s’est fracassé parce que les gens ne voyaient pas vraiment la différence entre ce qui sortait du quinquennat Hollande et la candidature d’une personne du PS, membre du gouvernement Hollande, soutenue par des écologistes eux-mêmes membres du gouvernement Hollande. Ils étaient atones sur les questions essentielles que sont la géopolitique, le rapport aux institutions européennes et sur une vision clairement anti-libérale de l’écologie.
Si 2017 avait son mantra contre la droite et l’extrême-droite, on voit maintenant que la tendance est sur la question écologique.
Pour l’heure, chacun avance ses pions. Génération.s de Benoît Hamon a compris qu’il ne serait qu’une force d’appoint. Le sens de la candidature d’Hamon aux européennes en 2019 avait son sens. Se compter pour voir où son mouvement se situait sur l’échelon politique. L’échec fût cuisant. Et ce n’est pas faire injure aux camarades de Génération.s que de le dire. Ils se mettent dans la roue d’EELV[3], qui sort a priori renforcé de la séquences européennes/municipales. Je dis bien a priori car aux européennes, le peu de gens qui ont voté ne l’ont pas fait sur des questions d’orientations politiques et pour les municipales, là où les verts sont partis seuls, ils n’ont pas fait de miracles[4]. L’enracinement local de leurs partenaires a joué à plein et tirer des plans sur la comète pour une élection si particulière qu’est l’élection présidentielle semble franchement présomptueux.
A cette heure, la presse en fait des tonnes sur la candidature de Jadot[6], les ambitions présidentielles d’Eric Piolle[6], le fait que Macron ne se sentirait menacé que par Anne Hidalgo, que Jean-Marie Bigard[5] sera candidat ou que Michel Onfray[5] prendrait la tête des « souverainistes des deux bords ».
- Dans la vraie vie, tout ça, c’est de la littérature.
- A l’heure où nous parlons, que ce soit le PS[7] ou EELV, aucune de ses forces ne dispose d’une ligne politique claire. Ils n’ont pas de programme, personne ne connait leurs orientations, et tout le monde sait que les liens avec le libéralisme, le marché, la flexibilité du marché du travail et autres ne seront pas coupés. L’écologie de marché, c’est le même tarif. On peut présenter sous l’angle que l’on veut, avec un joli papier cadeau, cette ligne politique reste minoritaire et les français n’en veulent pas[8].
A chaque élection, c’est la même chose.
La seule question qui vaille et à laquelle tout ce petit monde ne veut surtout pas répondre est la suivante :
- le tout sauf Mélenchon[8bis], pour faire quoi ?
Il ne s’agit pas ici de faire les victimes des méchants camarades qui ne veulent pas travailler avec la France insoumise. C’est une réalité. A de nombreuses reprises, le PS ou les Verts ont expliqué que la gauche réunie, c’est sans Mélenchon. La posture d’exclusion de base, avec de l’expérience, chacun le sait, ça ne rassemble pas grand-chose. Les sondages sont ce qu’ils sont, mais en août 2020, Jean-Luc Mélenchon est crédité de 13%[9] des intentions de votes, (le seul qui franchit la barre des 10 % d'intentions de vote malgré tout ce qu’il a subi depuis 2017), quand Jadot monte tout juste à 8%[9] et le PS à 3%[9]. Qui plus est, en politique, les pourcentages ne s’additionnent pas forcément et malgré cela, un attelage PS/EELV resterait malgré tout derrière Mélenchon.
Malgré les déconvenues européennes et municipales, la France insoumise reste, qu’on le veuille ou non, le moteur de la révolution citoyenne dont le pays a besoin. En 2015, Mélenchon émargeait à 8% dans les sondages. En 2020, à deux ans de l’élection, il est déjà à 13%. S’il y a un attachement des français, jeunes, précaires ouvriers et salariés pour sa candidature, c’est parce qu’il incarne une ligne constante, claire et cohérente avec ses engagements de longue date.
2022 sera un tournant pour notre pays.
Trois options s’offrent aux français :
- le repli xénophobe ;
- la logique ultra-libérale ;
- et enfin la mise à plat et la redéfinition du cadre collectif.
Je reste persuadé que nous avons besoin d’une sixième République, d’un président avec moins de pouvoirs, d’une règle verte et d’une planification écologique, d’une réindustrialisation du pays, d’un réel partage de la richesse, et d’apaiser les tensions qui s’exacerbent dans la société.
Pour cela, nous avons besoin de clarté et de cohérence...
Pas de ces jeux de petits chevaux et d’accords de coin de table.
Notes :
[1] Jean-Luc MÉLENCHON : 7 059 951 voix et 19,58% des exprimés
[2] Présidentielle : Jadot et Hamon fêtent leur alliance approuvée par les écologistes
[3] Les Verts attirent Génération.s dans leur sillage
[4] En l'absence d'étude sur les municipales, voir les ressorts du vote EELV aux élections européennes de 2019
[5] LE POTENTIEL ÉLECTORAL DE JEAN-MARIE BIGARD ET MICHEL ONFRAY
[6] Présidentielle 2022: Jadot contre Piolle, la nouvelle guerre des "Verts"
[7] Le Macronisme, la maladie infantile du Parti Socialiste
[8] Nouvel épisode de droitisation en vue au PS et à EELV ?
[8bis] Pour sauver la gauche, faut-il sacrifier Mélenchon ?
[9] Juin 2020, IFOP Les intentions de vote à la prochaine élection présidentielle
Pour en savoir plus :
- De la nécessité de la fédération populaire
- Jean-Luc Melenchon : Notre programme contre le piège de l’union nationale
- Rouges, verts et recomposition : ce dont il est question.
- Yannick Jadot roue de secours du MEDEF à la tête de la Ripoublique en 2022 ?
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