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15 février 2016 1 15 /02 /février /2016 09:17
En 1991, la guerre en Irak a été la première guerre suivie en live à la télévision.

En 1991, la guerre en Irak a été la première guerre suivie en live à la télévision.

Il y a 25 ans, une coalition de 49 pays envahissait l’Irak. La guerre, l’embargo qui a suivi, une nouvelle guerre et une occupation ont laissé derrière eux un pays sans ressources. Mais l’Irak n’est pas mort. L’opposition et les protestations n’ont jamais cessé et sont l’antidote contre le militarisme et l’occupation.

 

Sources : Solidaire par Dirk Adriaensens le 15 janvier 2015

- La guerre du Golfe de 1991

Le 17 janvier 1991, 29 pays, parmi lesquels la Belgique et quelques pays arabes, envahissaient l’Irak. Le but était de chasser l’armée irakienne du Koweit, qu’elle avait envahi en août 1990. En 43 jours, une coalition internationale effectuait 100 000 bombardements aériens, lançait 450 roquettes Tomahawk et larguait 265 000 bombes. Une grande partie des infrastructures sociales et économiques d’Irak était détruites. Le pays était rejeté dans l’ère pré-industrielle pour une très longue période. 

 

En 1991, la guerre en Irak a été la première guerre suivie en live à la télévision. Les premiers bombardements sur Bagdad, le 17 janvier, ont été montrés en direct et de manière quasi triomphale sur CNN (photos ci-dessus). Beaucoup d’images infographiques ont également été utilisées pour illustrer les prétendues « frappes chirurgicales ». En réalité, celles-ci ont été bien moins précises que les images le laissaient croire. Elles ont coûté le vie à des milliers de gens, alors qu’on évoquait des « dommages collatéraux ».  

 

Le 26 février, l’Irak se retirait du Koweit. Les troupes qui se repliaient étaient également attaquées. Rien que là, on a compté 25 000 morts irakiens. Au total, 125 000 militaires irakiens ont trouvé la mort, contre 125 Américains. 

 

Après le retrait irakien du Koweit, le Conseil de sécurité des Nations Unies organisait un embargo jusqu’à ce que toutes les armes non-conventionnelles (chimiques, biologiques et atomiques) soient détruites. La commission des Nations unies UNSCOM était chargée de cette mission. Jusqu’au mois d’août, 340 équipes UNSCOM ont contrôlé 9 346 sites où des armes auraient pu être entreposées. Après ces contrôles, il n’y avait plus d’armes de destruction en Irak. L’embargo serait d’application jusqu’en mai 2003, après la chute du président Saddam Hussein. 

 

La guerre du Golfe a coûté 676 milliards de dollars, ce qui correspondait à ce moment-là à la moitié du montant de la dette du tiers-monde.

 

 

- Après la guerre militaire, la guerre économique : l’embargo 

Le nombre de morts dus à l’embargo est énorme. D’après les chiffres du ministère irakien de Santé publique (chiffre pour fin 2002), 1 806 915 victimes civiles, dont 750 000 enfants de moins de 5 ans, sont mortes à cause de l’étranglement économique. Avant la guerre du Golfe, l’Irak importait 70 % de sa nourriture : pour 2 à 3 milliards de dollars par an. Sous l’embargo, à peine la moitié entrait encore dans le pays. La production locale n’a pas non plus pu se rétablir. 

 

L’embargo a été une punition collective, imposée à toute la population irakienne pour exercer une pression sur le gouvernement irakien. Les changements que le pays subissait après dix ans de sanctions sont incommensurables. Les indicateurs de base (alphabétisation, santé, enseignement...) qui mesurent le niveau de bien-être des gens étaient en Irak avant l’embargo parmi les meilleurs du monde. En 2000, l’Irak régressait jusqu’au 20 % les plus bas. En dix ans, la mortalité infantile passait de l’une des plus basses au monde à l’une des plus hautes. 

 

Même quand la guerre du Golfe était officiellement terminée, il y avait encore des bombardements tous les jours sur une grande partie du pays. Entre 1991 et 2001, les forces armées américaines et britanniques ont effectué 280 000 vols de combat au dessus de l’Irak et tué des centaines de civils.

 

L’infrastructure était également gravement touchée. L’Irak a quand même réussi à reconstruire toute seule une partie importante de ses infrastructures vitales.

 

Highway of Death (l’autoroute de la mort) : l’attaque sur les troupes irakiennes qui se retiraient du Koweït vers l’Irak via l’autoroute côtière a fait à elle seule 25 000 morts. L’avant du convoi a été bombardé. Comme il y avait des champs de mines sur les côtés, impossible de prendre une autre voie. Des milliers de soldats irakiens réfugiés dans des tranchées ont été enterrés vivants dans le sable par des bulldozers. (Photo Joe Coleman / Wikimedia Commons)

 

- Les buts stratégiques des États Unis

Les États-Unis avaient cinq buts stratégiques pour le Moyen-Orient : 

  • Assurer le contrôle des réserves pétrolières du Moyen-Orient pour déterminer les quantités produites et faire baisser les prix. 
  • Maintenir les structures politiques de la région, surtout celles des Émirats et de l’Arabie saoudite qui assuraient le contrôle de l’Occident sur le pétrole. 
  • Détruire le potentiel économique et militaire de l’Irak.
  • Installer des bases militaires pour imposer les diktats de l’Occident.
  • Sécuriser la suprématie d’Israël sur tous les pays arabes.

Comme grand producteur de pétrole, l’Irak avait nationalisé ce secteur en 1972 et investissait les revenus de ce pétrole pour son propre développement. Les pouvoirs occidentaux et les compagnies pétrolières n’ont jamais pu l’accepter.

 

Dans les années 1990, la France et la Russie avaient conclu des accords avec l’Irak pour exploiter le pétrole irakien après la levée des sanctions. Ces contrats concernaient au total 1 100 milliards de dollars. Les États-Unis étaient exclus de l’accès au développement futur des plus grandes réserves de pétrole au monde (à un près). 

 

L’Occident avait aussi un problème par rapport à l’économie socialiste (socialisante) d’Irak. A la fin de l’année 2000, le gouvernement irakien décidait de ne plus travailler avec le dollar pour les opérations pétrolières parce qu’il était une « monnaie ennemie ». Toutes les transactions se faisaient, depuis la fin de 2000, en euros, et le siège des comptes pétroliers n’étaient plus situé aux USA mais à Paris. « Dans le monde réel (...), le seul facteur à la base de la prospérité américaine est le maintien du dollar comme monnaie de réserve mondiale. Ceci ne peut se faire que si les pays producteurs de pétrole gardent le dollar pour calculer le prix du pétrole. Le dernier clou au cercueil de Saddam Hussein a été sa décision de commencer à vendre son pétrole en euros », commente Richard Benson, analyste de Citibank et Chase Manhattan.

 

Tout cela était une raison suffisante pour les États Unis pour entreprendre une action déterminante et envahir une nouvelle fois l’Irak.

 

 

- Invasion illégale et occupation de l’Irak

Le 19 mars 2003, les États-Unis et la Grande-Bretagne attaquaient illégalement l’Irak. 41 000 vols de combat étaient effectués et 27 000 bombes étaient larguées. A peu près 200 000 soldats prenaient part aux opérations au sol. Les gouvernements des États-Unis et de la Grande-Bretagne n’avaient pas l’approbation du Conseil de sécurité des Nations Unies pour une telle attaque. Ils ont alors eu recours à des mensonges pour pouvoir envahir l’Irak : ce pays détiendrait des armes de destruction massive et aurait un lien avec les terroristes d’Al Qaïda ; et la guerre apporterait la démocratie en Irak... Le président Bush et ses ministres ont menti exactement 935 fois entre le 11 septembre 2001 et le 19 mars 2003 pour justifier leur invasion. Et cette désinformation a été coûteuse. En 2009, le ministère américain de la Défense a dépensé au moins 4,7 milliards de dollars pour « gagner les cœurs et les esprits » dans le pays et à l’étranger. 

 

 

- Le coût de la guerre : plus de 3 000 milliards de dollars

Le budget de la Défense des États-Unis a augmenté de 335 milliards de dollars en 2001 à 637 milliards de dollars en 2015. Le prix Nobel d’économie Joseph E. Stiglitz a déclaré à ce sujet : « Une guerre gratuite n’existe pas. L’aventure de l’Irak a sérieusement affaibli l’économie américaine et la misère va bien plus loin que la crise des hypothèques. On ne peut pas dépenser 3 milliards de dollars pour une guerre ratée à l’étranger sans en ressentir le mal à l’intérieur du pays. » 

 

D’après Stiglitz, les États Unis dépensent en ce moment 5 milliards de dollars par an en Afrique : « 5 milliards d’euros, c’est environ 10 jours de combats. Cela vous donne une idée du gaspillage de moyens. »

 

 

- La destruction intentionnelle de l’État irakien 

Après 25 ans de guerre, d’embargo, d’occupation et de chaos, il est évident que la destruction de l’État irakien a été voulue sciemment par les États-Unis. Les architectes américains de cette guerre avaient déjà prédit depuis des années qu’une invasion de l’Irak provoquerait la fin de l’État irakien. Dans un rapport de 1996, des auteurs néoconservateurs décrivaient l’inévitable déclin de l’Irak après une invasion militaire, affirmant qu’un changement de régime mènerait à « un déchirement de l’Irak par la politique des seigneurs de guerre, des voleurs, des clans, des sectes et des familles importante. » Ces mêmes auteurs sont pourtant par la suite devenus les défenseurs les plus agressifs d’une invasion. Les effets désastreux du point de vue culturel et humain de la destruction de l’État irakien de 2003 à 2011 – déjà fort affaibli par la guerre du Golfe en 1991 et par les sanctions économiques – sont énormes. Plus d’un million et demi de citoyens ont perdu la vie, l’infrastructure sociale – électricité, eau potable, égouts et institutions publiques – était détruite, des académiciens et des professionnels étaient assassinés, à peu près 2,5 millions de personnes devenaient des réfugiés dans leur pays (IDP) et 2 764 000 personnes ont fui. 

 

 

- Socialement et écologiquement invivable 

La destruction sociale est inestimable. Le niveau de l’enseignement et de la santé se situent aujourd’hui encore loin en dessous de celui d’avant l’invasion. Les minorités nationales irakiennes (chrétiens, Assyriens, Mandéens...) sont au bord de l’éradication. Certaines de ces minorités religieuses et ethniques irakiennes ont cohabité en paix dans la région pendant plus de 2 000 ans. Les droits des femmes ont été complètement supprimés, comme le droit à la protection de la maternité, le permis de travail et les soins de santé. De grandes parties du pays sont devenues écologiquement invivables. Des régions entières sont contaminées par l’uranium appauvri et par d’autres pollutions militaires, des millions de tonnes de déchets ont été abandonnés et ont non seulement porté atteinte au système écologique fragile de façon irréversible mais ont également provoqué une forte augmentation des malformations génétiques et des cancers. Le bas niveau de l’eau des lacs et rivières a provoqué des catastrophes parce que l’absence d’égouts a rendu l’eau impropre à la consommation humaine et animale. 

 

Du point de vue économique, l’Irak est devenu un immense paradis du marché libre, où les Irakiens n’ont aucun pouvoir. 

 

 

- L’occupation crée l’opposition 

L’opposition contre l’occupation étrangère a commencé tout de suite après l’invasion. Des officiers de l’armée irakienne, avec l’appui de la population, ont commencé immédiatement une guérilla qui a débouché sur une véritable rébellion civile. L’opposition a mené en moyenne 185 attaques par jour contre les forces d’occupation (chiffre de juin 2007). Les voitures piégées et autres attaques kamikazes ne sont qu’une petite partie de toutes les attaques. 90% des attaques kamikazes en Irak ont été effectuées par des combattants étrangers liés à Al Qaïda en Irak, et non pas seulement par l’opposition, d’après les statistiques de l’armée américaine elle-même. Les troupes irakiennes de sécurité du gouvernement comptaient 330 000 hommes. En mars 2011 ils étaient 670 000. Ils étaient souvent utilisés comme unités de choc pour l’armée d’occupation et il n’est donc pas étonnant qu’ils aient également été visés par l’opposition. 

 

En 2008, 157 800 militaires américains, plus de 150 000 mercenaires, 41 000 membres de la « National Police » (précédemment les escadrons de la mort) et 144 000 personnes des services de surveillance devaient essayer de maîtriser l’opposition massive irakienne. 

 

 

- Les américains sèment les germes de conflits 

Quand, en juillet 2013, le diplomate américain Paul Bremer créait l’organe de direction provisoire, l’Iraqi Governing Council (IGC), il a sélectionné les gens sur base de leur provenance religieuse et ethnique,  mentionnant leur appartenance derrière leur nom. L’identité irakienne a été totalement effacée du dictionnaire des occupants. Au lieu de construire un État avec des droits et des devoirs égaux pour tous les citoyens, les arabes sunnites ont été marginalisés, et le gouvernement, surtout constitué de certains groupes chiites et kurdes, les a très mal traités. La poudrière en Irak a été créée par l’occupation américaine. 

 

Le 15 décembre 2001, une marche internationale pour la paix avait lieu à Bruxelles. (Photo Solidaire, Salim Hellalet)

- La sale guerre 

Quand les armées américaine et britannique ont été confrontées à une opposition sérieuse, ils ont changé drastiquement leur tactique. « La seule façon que nous avons de gagner, c’est de passer à des moyens conventionnels. Nous devrons jouer leur jeu. Guérilla versus guérilla, terrorisme versus terrorisme. Nous devons terroriser les Irakiens et les obliger à se soumettre », ont-ils estimé. Pendant la période qui a suivi, des rapports ont vu le jour à propos des escadrons de la mort et de purification ethnique. Les médias ont, eux, parlé de « violences sectaires ». Une partie de la violence était peut-être spontanée, mais il y a cependant des preuves écrasantes que la plus grande partie était le résultat des plans décrits par les divers experts américains en décembre 2003. 

 

La firme de sécurité américaine Blackwater USA a recruté des mercenaires venant du Chili, de Pérou, d’Argentine, de Colombie et du Guatemala. Dans ces pays, on a de l’expérience pour les sales guerres. Les militaires y étaient bien entraînés à fréquenter les éléments subversifs internes. Le but n’était pas d’identifier les vrais combattants de l’opposition, de les arrêter et de les assassiner mais d’atteindre la population civile. C’était une stratégie de terrorisme d’Etat pour couper le lien entre la population et l’opposition et pour briser l’appui de la population à la guérilla. 

 

Des milliers d’Irakiens ont disparu entre 2005 et 2007. Certains étaient attrapés par les milices et chargés sur des camions, d’autres avaient l’air de disparaître tout simplement. Au plus fort des assassinats sectaires, entre 50 et 180 corps étaient largués tous les jours dans les rues de Bagdad. Beaucoup étaient décapités ou abattus par balles et portaient des traces de torture. 

 

 

- « Retrait » des troupes d’Irak

Le 21 octobre 2011, le président américain Obama annonçait le départ des dernières troupes. L’opposition irakienne y a beaucoup contribué. Cependant, le retrait des troupes ne signifiait pas la fin de l’occupation. L’empreinte américaine est toujours solidement présente. Une mission complète américaine de 16 000 personnes était maintenue en Irak, dans la plus grande ambassade américaine du monde. De plus, les États-Unis maintiennent toujours des «conseillers» dans tous les ministères irakiens. 

 

 

- Opposition pacifique d’une partie de la société 

A côté de l’opposition armée l’Irak, des protestations pacifiques d’un mouvement ouvrier fort et de groupes d’intérêt de la classe moyenne sont nées dans les années après l’invasion. Les autorités ont réagi brutalement contre les grèves. Les syndicats indépendants sont interdits et les travailleurs n’ont pas droit à des négociations collectives ni à la grève. Pour museler les protestations, plus de 44 % du budget du régime est consacré à la « sécurité ». Entre-temps, le citoyen irakien vit 18h par jour sans électricité, n’a souvent pas d’eau potable (70%) ou d’équipements sanitaires (80%). A Bagdad, près des deux tiers des eaux usées coulent toujours directement dans les rivières. 

 

En 2011 et 2013, il y a eu des centaines de milliers de manifestants dans les rues. Leurs exigences : suppression de la peine de mort, renforcement des services de base, pas de division entre groupes ethniques et religieux, arrêt de la corruption, lutte contre le sectarisme sous toutes ses formes et maintien de l’unité nationale.

 

 

- Chaos, répression et néolibéralisme ont fait le succès de Daech

Après une année de protestations pacifiques, le Premier ministre irakien Maliki a envoyé son armée et ses milices armées contre les manifestants. Plusieurs villes ont été attaquées et bombardées par les troupes gouvernementales. De ce fait, les islamistes sunnites séparatistes ont commencé à gagner en influence. Malgré les contretemps subis par Daech au cours de l’occupation de l’Irak, le groupe parvenait déjà fin 2012 à porter le nombre de ses combattants actifs à environ 2 500. La terreur semée par Daech est effrayante, mais les méfaits des milices chiites et de l’armée gouvernementale, soutenus par l’étranger, le sont tout autant. A part l’Occident, les États du Golfe comme l’Arabie saoudite et l’Iran, la Turquie aussi commence à jouer un rôle en Irak.

 

Et, pendant ce temps, la population irakienne est prise entre l’enclume et le marteau. Le 15 juin 2015, au moins quatre millions d’Irakiens étaient des déplacés internes. 

Bagdad 2002. (Photo Solidaire, Antonio Gomez Garcia)

 

- La crise humanitaire dans un pays oublié

En 2015, par manque d’argent, les Nations unies ont gelé la plupart des programmes de santé en Irak. Lors d’un appel à donation portant sur au moins 60 milliards de dollars, à peine 5,1 millions sont rentrés. 

 

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a dû fermer plus de 184 services de santé. Les réfugiés et les personnes déplacées n’ont de ce fait plus accès aux soins de première ligne, post-traumatiques, alimentaires et aux services de vaccination En Irak, au moins 8 millions de personnes, soit un tiers de la population, ont besoin aujourd’hui d’aide humanitaire. C’est 3 millions de plus que lors de la dernière enquête de mars 2015, avant l’arrêt des programmes santé des Nations unies.  

 

 

- 2015 : la population irakienne résiste à la terreur de Daech et à celle de son gouvernement 

Malgré la terreur semée par Daech, le peuple irakien ne s’avoue pas vaincu. Les protestations massives débutées le 31 juillet 2015 ont atteint un point culminant le 7 août. 

 

Pour la seule Bagdad, environ un demi-million de personnes ont défilé dans les rues en scandant des slogans contre le gouvernement corrompu. Des centaines de milliers d’autres ont manifesté dans les villes chiites du sud. Des slogans comme « Ni chiites, ni sunnites mais laïcité » et « Le régime religieux nous a trompés » montrent la vraie nature des protestations de la population irakienne. Celle-ci a exprimé sa profonde colère à propos de la pauvreté, de l’insécurité, du non-respect des droits fondamentaux et du gouvernement irakien corrompu et sectaire. 

 

Selon un récent sondage effectué pour la BBC, 66% de la population irakienne estime que le pays va dans la mauvaise direction. 90% croit qu’il est possible de dégager une solution diplomatique aux différends nationaux. 84% pense que Daech a une influence « fortement négative ». 56% est hostile aux attaques aériennes de la coalition. 

 

 

- Laissez l’Irak au peuple irakien 

Il y a actuellement diverses initiatives du monde associatif irakien et des anciens mouvements d’opposition en vue de résoudre les différends nationaux de façon pacifique. Ces tentatives de se mettre autour d’une table sont l’une après l’autre sabotées par le gouvernement irakien et ses conseillers étrangers. 

 

La vente d’armes augmente. L’Occident entame de nouvelles opérations terrestres et aériennes contre des villes syriennes et irakiennes. Cela ne fera que gonfler les rangs de Daech et accroître encore les risques d’actions terroristes en Europe et aux États-Unis. Le monde associatif et les mouvements d’opposition en Irak sont les seules forces qui peuvent venir à bout de Daech et des autres milices. 

 

L’Irak n’est pas morte. Ces dernières 25 années, la résistance et les protestations n’ont jamais cessé et constituent le contre-poison au militarisme et à l’occupation. Le peuple irakien veut reprendre son pétrole en mains propres et il veut une économie saine au service des gens et ce, dans un environnement paisible. L’intervention militaire n’est pas la solution. Celle-ci réside dans la nécessité d’écouter la société civile irakienne et de soutenir les initiatives en vue de la réconciliation. Une Irak vraiment démocratique, souveraine, est une condition absolue si on veut faire disparaître Daech.

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22 janvier 2016 5 22 /01 /janvier /2016 09:21
DAECH : par François Burgat, directeur de recherche au CNRS

François Burgat[1] est directeur de recherches au CNRS, politologue, spécialiste du monde arabe contemporain, il a été directeur du Centre français d'archéologie et de sciences sociales au Yemen de 1997 à 2003. puis il a été directeur de l’Institut Français du Proche Orient (IFPO). 

 

 

- Il a été entendu le 12 janvier 2016 par le Commission des Lois de l'Assemblée Nationale

Pour le chercheur François Burgat, spécialiste de l’islam, un bon musulman en France, c’est… quelqu’un qui n’est plus musulman ! Auditionné à l’Assemblée nationale française le 12 janvier 2016 à l’occasion d’une commission d’enquête sur Daesh, François Burgat a dénoncé l’instrumentalisation des musulmans par les médias et la classe politique en France et leur représentation néo-coloniale de l’islam. Iconoclaste dans son domaine d’étude, à rebours d’intellectuels très médiatiques comme l’islamologue Gilles Kepel, François Burgat se refuse à toute essentialisation (les musulmans sont terroristes parce qu’ils sont musulmans !) et analyse le radicalisme comme une réaction aux injustices, aux inégalités, à la crise multiforme que connaît la France, mais également à la montée en flèche du discours (et des actes) islamophobes.

 

Note :

[1] François Burgat

 

Pour en savoir plus :

- Mon dossier terrorisme

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2 décembre 2015 3 02 /12 /décembre /2015 09:39
 François Hollande lors d'une cérémonie en Arabie saoudite. (via) ostannews.com.

François Hollande lors d'une cérémonie en Arabie saoudite. (via) ostannews.com.

Persévérer est diabolique !

 

Les attentats du 13 novembre à Paris, leurs 130 victimes au sein de la population ont provoqué un choc émotionnel légitime et partagé. La douleur issue de ces nouveaux meurtres d’une violence inouïe ne doit cependant pas interdire une réflexion de fond sur leur contexte, et sans réduire celui-ci au périmètre étroit des apparences. La France, qui doit nécessairement réagir à ces attentats, a malheureusement opté pour une réponse qui a déjà prouvé qu’elle était inadaptée et contre-productive.

 

Sources : orientXXI le 22 novembre 2015 par Marc Cher-Leparrain

Le Proche-Orient est en feu en Syrie, en Irak, au Sinaï, au Yémen. Nous pourrions prolonger ce sombre tableau vers la Libye et l’Afghanistan. Sur ces foyers de sang viennent souffler les intérêts d’acteurs régionaux comme l’Iran, l’Arabie saoudite, la Turquie, l’Égypte  ; internationaux avec les États-Unis et plus récemment la Russie — pour ne citer que les principaux. Tous les pays de la région, s’ils ne sont pas eux-mêmes des théâtres de guerres sont directement ou indirectement partie prenante. Une seule exception peut-être : le sultanat d’Oman, qui poursuit sa stratégie politique d’intermédiaire entre les mondes sunnites et chiites. Écheveau où des intérêts opposés ou divergents s’entrecroisent, se superposent, s’imbriquent, se nourrissent aussi les uns des autres. Gigantesque orgie de confrontations confessionnelles — nourries par l’opposition de l’Arabie saoudite à l’Iran — , d’intérêts de pouvoirs familiaux, religieux, ethniques, d’appétits de leadership ou de puissance pour certains, de préservation de leur existence pour d’autres. Aucun n’est blanc ou noir, sauf pour des regards partiaux et compromis dans l’un ou l’autre des camps. La France veut rassembler autour du combat contre l’organisation de l’État islamique (OEI)  ?

 

- Soit, mais quid des priorités des acteurs régionaux  ?

  • La priorité de la Turquie est d’empêcher toute autonomie kurde en Syrie, jusqu’à utiliser l’OEI contre l’expansion territoriale du Parti de l’union démocratique (PYD), allié syrien du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Lors de la bataille de Kobané à l’été 2014, elle a empêché des renforts du PYD de rejoindre les éléments de ce parti kurde syrien qui tenaient seuls la ville face à l’OEI. Et n’a autorisé, in extremis, que des renforts de Kurdes irakiens du Parti démocratique du Kurdistan (PDK). Aujourd’hui, son aviation pilonne essentiellement les Kurdes syriens, et non pas l’OEI  ;
  • la priorité absolue de l’Arabie saoudite est l’Iran et son influence régionale, et de fédérer un front sunnite contre ce pays. Pour elle, il faut avant tout renverser Bachar Al-Assad, pion de Téhéran. Sa priorité n’est pas l’OEI. Sa participation à la coalition aérienne dirigée par les États-Unis contre cette organisation est symbolique. Même si le «  califat  » d’Abou Bakr Al-Baghdadi représente un danger pour la monarchie saoudienne, il n’en reste pas moins un adversaire utile actuellement contre les chiites. Au Yémen, l’Arabie saoudite a lancé une campagne militaire meurtrière — dans un silence international assourdissant — pour contrer le mouvement houthiste (zaydite, branche du chiisme) supposé allié de l’Iran. Elle se satisfait de voir Al-Qaida dans la péninsule Arabique (AQPA) combattre le même ennemi commun, et laisse cette branche d’Al-Qaida occuper tout le sud-est du pays et prendre le contrôle de quartiers d’Aden, la deuxième ville du pays  ;
  • l’Irak, que la France aide militairement contre l’OEI, soutient le régime syrien par le biais de nombreuses milices chiites irakiennes. Ces mêmes milices épaulent l’armée irakienne défaillante. Sans elles, l’OEI aurait occupé encore davantage de terrain dans ce pays  ;
  • l’Iran soutient à bout de bras le régime syrien, comme il l’a toujours soutenu, et a engagé à cette fin le Hezbollah libanais mais aussi des Gardiens de la Révolution (pasdaran), ceux-là même qui soutiennent et arment les milices chiites irakiennes en Syrie et contre l’OEI en Irak.

 

De ce champ chaotique qu’aucun acteur ne contrôle, s’étend et prospère le djihadisme comme jamais il n’avait prospéré, avec des branches et sous-branches toujours plus étendues et actives, en Syrie, en Irak, au Yémen, en Égypte, mais aussi au Liban et en Turquie. Autrefois limité et «  hors-sol  », il se crée des territoires, avec «  l’État islamique  » à cheval sur la Syrie et l’Irak, mais aussi avec AQPA au Yémen. Des allégeances se ramifient en Libye, dans le Maghreb, dans le Sahel. Ses noms évoluent, ses formes changent, mais le phénomène s’accroit à tel point qu’il s’inscrit dans l’agenda de tous les acteurs impliqués au Proche-Orient et au-delà, jusqu’aux rues de la France.

 

 

- Un mouvement politique qui manipule le lexique religieux

Depuis le 11 septembre 2001, le «  combat pour la civilisation  » et pour faire «  prévaloir la paix et la liberté  », lancé par le président américain Georges W. Bush pour une «  guerre globale contre le terrorisme  » n’a proposé et appliqué qu’une réponse sécuritaire au djihadisme. Nous voyons le résultat de cette pax romana guerrière dans ce qu’est devenu le Proche-Orient aujourd’hui. Les mêmes mots et principes d’action sont prononcés aujourd’hui par le président de la République française François Hollande, en réaction aux attentats commis en France. Bis repetita. N’a-t-on rien appris  ? Une grande coalition militaire contre l’OEI n’aura d’autre effet que d’abattre au mieux un arbre du djihadisme, tout en entretenant et amplifiant les mécanismes qui le produisent.

 

Contrairement à ce que l’on veut nous faire croire, le djihadisme ne se limite pas à une entité physiquement déterminée qui s’appelle «  Daesh  » ou Jabhat al-Nosra. C’est un mouvement politique qui manipule un lexique religieux qu’il s’approprie. Comme tout mouvement politique, il a des origines, il est apparu et s’est développé en réaction à des événements, à des contextes, à des politiques tierces, parfois spécifiques à deux pays — y compris l’échec des régimes nés des accords Sykes-Picot  à transcender les fractures identitaires, religieuses ou ethniques.

 

On n’abat pas une idéologie politique avec une opération militaire, mais avec des actions politiques. Le champ de la diplomatie est immense, mais elle échouera si elle ne tient pas compte de ce qui a fait naître et qui alimente l’idéologie du djihadisme dans ses différents points d’application. Elle sera vouée à l’échec si, par incapacité et irresponsabilité, elle ne vise que le court terme. En ne rassemblant que des Occidentaux (Russes compris), et même avec la participation symbolique de monarchies du Golfe, l’opération militaire restera perçue comme une nouvelle croisade en terre musulmane. Aucune des racines qui fondent le djihadisme n’est traitée. Chacune des bombes françaises, dont nous ne pourrons éviter par ailleurs les dégâts collatéraux, ne fera que fertiliser le terreau sur lequel il ne cesse de se développer. Avec des réponses uniquement sécuritaires, la France et ses alliés satisfont aux attentes des djihadistes. Ils ont déjà gagné cette première bataille.

 

 

- Paris a soutenu tous les autoritarismes

Dans son discours du 16 novembre 2015 devant le Parlement réuni à Versailles, François Hollande déclare avec force que le but des terroristes est de s’attaquer aux valeurs que la France défend «  partout dans le monde  », et justifie sa décision de «  guerre  » contre l’OEI par la défense de ces valeurs. Mais comment la France défend-elle ses valeurs «  partout dans le monde  »  ?

 

Limitons-nous à l’histoire récente et regardons la lisibilité de la politique étrangère française. La France a soutenu tous les régimes arabes, du Maghreb au Machrek, avant le vent des Printemps. Elle était au mieux avec les régimes de Zine el-Abidine Ben Ali en Tunisie, de Hosni Moubarak en Égypte  ; elle a reçu en grande pompe Bachar Al-Assad et Mouammar Khadafi, ce dernier à des fins mercantiles, notamment pour des contrats d’armements. Elle a courtisé pour ces mêmes motifs mercantiles l’Arabie saoudite et les autres monarchies du Golfe, en passant sous silence leur implication avec des groupes djihadistes, en se taisant sur leurs excès et atteintes à ces valeurs fondamentales des droits humains. Elle cautionne aujourd’hui leur campagne meurtrière au Yémen. La France s’est retranchée derrière ces régimes autoritaires et dictatoriaux pour se protéger de l’islamisme que ces mêmes régimes entretenaient selon les circonstances, ou les utilisaient contre leurs adversaires, ou en répandaient les doctrines les plus obscurantistes et extrêmes, comme le wahhabisme saoudien.

 

Après avoir proposé son savoir-faire en matière de maintien de l’ordre à la police de Ben Ali au début du soulèvement populaire tunisien, la France a encouragé le soulèvement de la population syrienne afin d’être dans le vent de l’histoire. Malgré ses déclarations combatives, François Hollande a laissé cette population à son sort en ne lui apportant que des mots de soutien, alors que la France venait de provoquer une intervention militaire en faveur de la chute du chef d’État libyen, lequel venait d’être reçu dans les jardins de l’Élysée. La France soutient le marchal Sissi en Egypte, dont le régime est pourtant encore plus violent contre toute opposition intérieure — même laïque — que ne l’était celui de Hosni Moubarak. Ce faisant, elle soutient, en lui vendant Rafale, frégates et autres Mistral, un régime qui a mis à bas le processus démocratique que la révolution de janvier 2011 avait amené pour la première fois dans l’histoire de ce pays. Faut-il applaudir l’arrêt d’un processus démocratique sous prétexte qu’il amène un parti islamiste au pouvoir  ? Faut-il alors s’étonner de la radicalisation d’une partie de ces islamistes  ?

 

 

- Une oumma du ressentiment

Et que penser du soutien inconditionnel à Israël, quand la France va jusqu’à approuver sa campagne meurtrière de bombardement de Gaza en 2014, alors que le gouvernement de cet État viole le droit international en toute impunité depuis des décennies dans les territoires palestiniens qu’il occupe  ? Que dire aussi de la compassion sélective exprimée par la France envers les minorités chrétiennes de Syrie et d’Irak alors que souffre tout autant l’immense majorité des populations musulmanes de ces régions  ? Les valeurs de la France laissent penser qu’elles ont une acception différenciée. Le ressentiment est une clef fondamentale. Comment ne pas comprendre que ces errements viennent le renforcer et contribuer à le fédérer dans ce que l’on peut nommer une oumma du ressentiment, qui se prolonge aussi dans le territoire national français  ? L’immense impact qu’ont provoqué dans l’ensemble des populations arabes le simple «  coup de gueule  » de Jacques Chirac en octobre 1996 dans la vieille ville de Jérusalem, ainsi que le discours de Dominique de Villepin à l’ONU en février 2003, s’explique d’abord parce qu’ils étaient, d’une certaine façon, une reconnaissance de ce ressentiment.

 

Mais après tout, que cherche vraiment la France, sans oser le dire ouvertement, derrière les coups de menton pour la défense de ses «  valeurs  » attaquées  ? 17 milliards d’euros de contrats d’armements gagnés en 2015. Une année record. Qui sont ses principaux clients depuis des années  ? Ceux-là même — les monarchies du Golfe — dont elle soutient aveuglément la politique désastreuse au Moyen-Orient qui alimente aussi, en même temps que les bombes des Rafale, le djihadisme, quand ils ne n’en servent pas eux-mêmes pour leurs propres intérêts régionaux face à l’Iran en Syrie, au Yémen. Malheureusement, les 130 morts français du 13 novembre ne provoquent qu’un renforcement des errements français, de sa «  guerre contre le terrorisme  », en nourrissant un peu plus le monstre et ceux qui l’alimentent, voire s’en servent.

 

Il y a deux façons de répondre aux attentats qui sont survenus en France. La première est d’en dénoncer les auteurs, l’organisation à laquelle ils se rattachent — en l’occurrence l’OEI — et de s’acharner à les détruire dans leurs périmètres territoriaux et humains ainsi que leurs moyens physiques de subsistance, filières de financement et autres. C’est une approche sécuritaire technique, militaire. Suivie depuis quinze ans par les États-Unis avec des moyens considérables, elle se solde par un échec patent.

 

La seconde est d’envisager l’ensemble des déterminants qui ont provoqué la naissance et le développement de l’idéologie à laquelle s’est greffée cette organisation ainsi que les autres de même nature qui l’utilisent pour leur propres fins, en prenant également en compte que pour chacune d’elles s’ajoutent des paramètres spécifiques de développement (politiques, irrédentistes, sociétaux). C’est une approche politique et diplomatique.

 

François Hollande a mobilisé la France et ses alliés autour de la première solution, sécuritaire et militaire. C’est un déni total du fait que le djihadisme est le fruit d’un ressentiment accumulé. Cela ne rendra que plus difficile la seconde solution, la seule qui puisse réellement contrer le djihadisme, si celle-ci n’est pas abordée au moins simultanément et avec force. Maintenant.

 

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30 novembre 2015 1 30 /11 /novembre /2015 11:31
Petit à petit la réalité des implications occidentales et notamment françaises dans la création et la montée de DAESH perce dans les médias !

Sources : Eric DURAND | mis à jour le 19/05/2021

- Le vent tourne tout simplement

Il y a quelques semaines, nous aurions du aller chercher de telles informations sur les chaînes russes, pour se faire alors dénigrer.

Et pourtant, après une catastrophe parfois tout change !

Du moins c'est l'impression qu'on peut avoir aujourd'hui...

 

 

- France Inter dévoile la véritable raison de la guerre contre Bachar el-Assad

Dans une région dont la complexité sociale politique et religieuse est séculaire, des projets économiques contemporains ont cristallisé la situation : en 2010, l’Iran projette de construire un pipe-line qui passerait par l’Irak et la Syrie pour acheminer du pétrole et du gaz vers la méditerranée. Cela redistribuerait les cartes de la production pétrolière dans le golfe. Or le Gaz pour le Qatar, et le pétrole pour l’Arabie Saoudite, c’est vital.

 

- Roland Dumas nous révèle qui gouverne la France.

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4 juin 2015 4 04 /06 /juin /2015 08:02
La « guerre mondiale contre le terrorisme » a tué au moins 1,3 million de civils
Révélations Humanité Dimanche. Un rapport publié par un groupe de médecins lauréats du prix Nobel de la paix révèle qu’un million de civils irakiens, 220 000 Afghans et 80 000 Pakistanais ont péri, au nom du combat mené par l’Occident contre « la terreur».
 
Sources :  l'Humanité Dimanche par Marc de Miramon Vendredi, 24 Avril, 2015
« Je crois que la perception causée par les pertes civiles constitue l’un des plus dangereux ennemis auxquels nous sommes confrontés », déclarait en juin 2009 le général états-unien Stanley McCrystal, lors de son discours inaugural comme commandant de la Force internationale d’assistance à la sécurité en Afghanistan (ISAF). Cette phrase, mise en exergue du rapport tout juste publié par l’Association internationale des médecins pour la prévention de la guerre nucléaire (IP- PNW), lauréate du prix Nobel de la paix en 1985, illustre l’importance et l’impact potentiel du travail effectué par cette équipe de scientifiques qui tente d’établir un décompte des victimes civiles de la « guerre contre le terrorisme » en Irak, en Afghanistan et au Pakistan.
 
 

- « Les faits sont têtus »

Pour introduire ce travail globalement ignoré des médias francophones, l’ex-coordinateur humanitaire pour l’ONU en Irak Hans von Sponeck écrit: « Les forces multinationales dirigées par les États-Unis en Irak, l’ISAF en Afghanistan (...) ont méthodiquement tenu les comptes de leurs propres pertes. (...) Celles qui concernent les combattants ennemis et les civils sont (par contre) officiellement ignorées. Ceci, bien sûr, ne constitue pas une surprise.


Il s’agit d’une omission délibérée. » Comptabiliser ces morts aurait « détruit les arguments selon lesquels la libération d’une dictature en Irak par la force militaire, le fait de chasser al-Qaida d’Afghanistan ou d’éliminer des repaires terroristes dans les zones tribales au Pakistan ont permis d’empêcher le terrorisme d’ atteindre le sol états-unien, d’améliorer la sécurité globale et permis aux droits humains d’avancer, le tout à des coûts “ défendables ”».


Cependant, « les faits sont têtus », poursuit-il. « Les gouvernements et la société civile savent que toutes ces assertions sont absurdement fausses. Les batailles militaires ont été gagnées en Irak et en Afghanistan mais à des coûts énormes pour la sécurité des hommes et la confiance entre les nations. »


Bien sûr, la responsabilité des morts civils incombe également aux « escadrons de la mort » et au « sectarisme » qui portait les germes de l’actuelle guerre chiitesunnite, souligne l’ancien secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld dans ses mémoires (« Know and Unknown », Penguin Books, 2011).


Mais comme le rappelle le docteur Robert Gould (du Centre médical de l’université de Californie), l’un des auteurs du rapport, « la volonté des gouvernements de cacher le tableau complet des interventions militaires et des guerres n’a rien de nouveau. Concernant les États- Unis, l’histoire de la guerre au Vietnam est emblématique. Le coût immense pour l’ensemble de l’Asie du Sud-Est, incluant la mort estimée d’au moins 2 millions de Vietnamiens non combattants, et l’impact à long terme sur la santé et l’environnement d’herbicides comme l’agent orange, ne sont pas encore pleinement reconnus par la majorité du peuple américain». Et Robert Gould d’établir un autre parallèle entre la sauvagerie des Khmers rouges, qui émergeront d’un Cambodge dévasté par les bombardements, et la récente déstabilisation « post-guerre » de l’Irak et de ses voisins, laquelle a rendu possible la montée en puissance du groupe terroriste dit « État islamique »

 

 

- Total estimé à 3 millions

Bien loin des chiffres jusqu’à présent admis, comme les 110 000 morts avancés par l’une des références en la matière, l’« Iraq Body Count » (IBC), qui inclut dans une base de données les morts civils confirmés par au moins deux sources journalistiques, le rapport confirme la tendance établie par la revue médicale « Lancet », laquelle avait estimé le nombre de morts irakiens à 655 000 entre 2003 et 2006. Depuis le déclenchement de la guerre par George W. Bush, l’étude de l’IPPN aboutit au chiffre vertigineux d’au moins 1 million de morts civils en Irak, 220 000 en Afghanistan, et 80 000 au Pakistan. Si l’on ajoute, concernant l’ancienne Mésopotamie, le bilan de la première guerre du Golfe (200 000 morts), et ceux du cruel embargo infligé par les États-Unis (entre 500 000 et 1,7 million de morts), ce sont presque 3 millions de morts qui sont directement imputables aux politiques occidentales, le tout au nom des droits de l’homme et de la démocratie.


En conclusion du rapport, les auteurs citent le rapporteur spécial des Nations unies de 2004 à 2010 sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires: selon Philip Alston, qui s’exprimait en octobre 2009, les investigations sur la réalité des attaques de drones (lire encadré) étaient presque impossibles à mener, à cause de l’absence totale de transparence et le refus des autorités états-uniennes de coopérer. Puis il ajoutait, après avoir insisté sur le caractère illégal au regard du droit international de ces assassinats ciblés, que « la position des États-Unis était intenable». Trois semaines plus tard, Barack Obama recevait le prix Nobel de la paix ...

 

 PENDANT CE TEMPS-LÀ, EN IRAK, EN AFGHANISTAN, AU PAKISTAN...

  • Le 20 avril dernier, la « coalition antidjihadistes » dirigée par les États-Unis indiquait dans un communiqué avoir mené en 24 heures 36 raids aériens contre des positions du groupe « État islamique », dont 13 dans la province d’Al-Anbar, à l’ouest de Bagdad. Combien de « dommages collatéraux » civils dans cette région, l’une des plus touchées par les violences depuis l’invasion de l’Irak en 2003 ?
  • Les communiqués militaires demeurent systématiquement muets sur cette question, alors que plus de 3 200 « frappes » aériennes, selon la novlangue moderne, ont été effectuées depuis le mois d’août 2014 et la prise de Mossoul par l ’« État islamique». Le 18 avril, c’est un attentat-suicide, « technique » de combat inconnue en Afghanistan avant le 11 septembre 2001, qui faisait 33 morts près de la frontière pakistanaise.
  • À la fin du mois de mars, des sources sécuritaires pakistanaises faisaient état de 13 « djihadistes » liés aux talibans tués lors d’une attaque d’un drone états-unien.
  • Près de 10 000 soldats américains sont toujours stationnés en Afghanistan.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pour en savoir plus sur le même sujet :

- Les frappes aériennes occidentales ont balayé 52 civils syriens en un jour, aucun djihadiste touché

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23 août 2014 6 23 /08 /août /2014 20:37
Comment le FAMAS est devenu une des armes de l’Etat Islamique d’Irak et du Levant

Drôle d’épopée que celle du fusil d’assaut français FAMAS F1 en Irak et en Syrie! Qui aurait cru un jour que ce bullpup ayant équipé en dotation standard l’armée française durant des années allait se retrouverait un jour en Irak et en Syrie aux mains de quelques “révolutionnaires” syriens et de terroristes de l’armée de l’organisation connue sous le nom de l’Etat Islamique ?

 

Sources : Stratégika 51  publié le par Stratégika 51 | mis à jour le 24 juillet 2015

- La présidence française actuelle a osé faire que que aucun gouvernement français ni autre intermédiaire dans le florissant commerce des armes n’a osé imaginer.

Elle a transformé le FAMAS en une arme de terroriste !

 

Officiellement, il n’a jamais été question de livraison d’armes aux rebelles du Moyen-Orient. C’était à peine si on murmurait entre Londres et Paris que c’était juste quelques armes (babioles) non létales comme un ou deux gilets pare-balles…Et pourtant !

 

L’Angleterre n’osa pas livrer ses SA80. Même pas les plus anciennes versions de ce fusil. Il est vrai que son usage n’est pas du tout populaire et encore moins commode. La France, dans un élan de solidarité sans précédant avec les rebelles dans le monde Arabe est allé jusqu’à vendre la première version de son fusil FAMAS aux rebelles et aux terroristes de l’Etat Islamique. En petites quantités il est vrai, moins de 600 unités selon des indiscrétions. Mais la symbolique est grande.

 

 

- Il fut une période où tous les révolutionnaires de la planètes arboraient le fameux Kalashnikov AK-47.

Trois décennies plus tard, des révoltes du monde arabe aboutissent à deux conflits internationaux dans lesquels des rebelles sont soutenus par une seule puissance hégémonique. En Libye, les FN FAL, les G3 et les G36 remplacent l’AK-47 comme arme de révolutionnaires ! Cela a donné lieu à de nombreuses critiques quant à l’implication trop flagrante de pays de l’Otan aux côtés des rebelles. Chose que l’on a voulu évité en Syrie où l’ensemble des armes livrées par les Etats-Unis, le Royaume-Uni, la France et l’Allemagne aux rebelles syriens est demeuré jusqu’à fin 2013 issu des stocks des anciens pays de l’Europe de l’Est ou bien des arsenaux libyens livrés aux quatre vents.

 

Puis vint le temps du doute cartésien. Al-Assad était fort de l’appui et surtout de la cohésion de son armée et de ses alliances stratégiques. Les rebelles subissaient défaite sur défaite. L’armée syrienne libre, l’un des groupes rebelles que l’Occident considère à tort comme laïc, était minée par les dissensions internes et la corruption au point où on évoquait ouvertement sa disparition. C’est à ce moment que certains pays d’Europe, tentant de faire quelques rentrées d’argent en ces temps de vaches maigres allèrent jusqu’à brader des stocks entiers de vieilles variantes d’armes de guerres issues de leurs arsenaux nationaux.

 

En décembre 2014, une unité de l’armée régulière syrienne prend d’assaut une localité tenue par trois groupes de la rébellion syrienne après que ces derniers aient subi pendant des jours un bombardement aérien en règle.

 

Lors de leur avancée dans le fief rebelle, des soldats syriens rapportèrent avoir entendu un bruit d’arme automatique assez particulier et inhabituel émanant des positions rebelles. Un officier a même consigné dans son rapport radio un possible usage par les rebelles dans cette zone de fusils d’assaut autrichiens Steyr AUG. Ce dernier a été utilisée dès 2012 par les unités d’élite de la rébellion.

 

Mais le bruit n’était pas identique. A la fin des combat, un soldat découvrit la dépouille de ce qui paraissait être un chef de groupe rebelle et à ses côté un fusil d’assaut comportant des inscriptions en français. C’était un Famas F1. Dans un très mauvais état.

 

Avec le temps, l’exploitation de rapports rebelles capturées par les renseignements de l’armée de l’air syrienne révéla que entre autres que les unités de FAMAS F1 livrées par la France n’ont pas rencontré un grand succès parmi les rebelles. Certains de ces derniers avaient eu pas mal de difficultés à trouver des munitions adaptées à cette arme. De plus l’arme est irréparable en cas de casse. Enfin d"autres firent état de difficultés techniques et deux cas d’explosion soudaine de l’arme en plein usage ont été mentionnées.

 

Cela n’empêchera pas la vente de cette arme au design particulier aux radicaux de l’Etat Islamqique dont certains connaissent bien ce bullpup pour en avoir pillé quelques spécimens dans les magasins d’une unité spéciale de la brigade de lutte anti-terroriste irakienne.

 

Porté par un idéal socialiste d’une acception particulière, Hollande a t-il rêvé de voir le FAMAS devenir l’arme des révolutionnaires ?

 

 

 

 

Quoi qu’il en soit, trois FAMAS sont apparus dans des vidéos entre les mains d’éminents chefs de l’organisation l’Etat Islamique en Irak et au Levant, laquelle subit actuellement les foudres de l’aviation américaine au Nord de l’Irak…

 

Pour en savoir plus :

- Mon dossier terrorisme

- Syrie : François Hollande confirme la livraison d'armes aux rebelles

- Comment Sarkozy a armé Boko Haram

- Médiapart : Qui arme et comment l'islamo-fascisme ?

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15 août 2014 5 15 /08 /août /2014 10:35
Une image du 19e siècle représentant la porte d'entrée du temple Yazidi du Cheikh Adi - DR

Une image du 19e siècle représentant la porte d'entrée du temple Yazidi du Cheikh Adi - DR

Qui sont les Yézidis, aujourd'hui chassés par les islamistes de l'Etat islamique ? Ce peuple, dont les représentants ont la réputation d'être des "adorateurs du Diable" en raison d'une religion différente de l'Islam classique, a beaucoup souffert dans l'Histoire.

 

Sources :  L'ORIENT LE JOUR  - propos recueillis par Ray Jabre Mouawad[1] le 11.08.2014

Le monde entier s'émeut, à juste titre, de la catastrophe qui s'abat sur les Yézidis de la région de Sinjar au nord-ouest de Mossoul, menacés d'être exterminés par les jihadistes de l'État islamique (EI) s'ils ne se convertissent pas à l'islam. Des dizaines de milliers de villageois ont quitté précipitamment leurs maisons pour trouver refuge dans les montagnes – qui culminent à 1 356 mètres – sans abris, sans eau ni nourriture.

 

Cette population paisible d'origine kurde traverse sans doute l'une des pires épreuves de son histoire, qui n'en a pas manqué. L'accusation est depuis longtemps (XVIIe siècle) la même : les Yézidis seraient des "adorateurs du diable", réputation complètement infondée qui provient sans doute d'une croyance de la secte en un ange déchu, qu'elle appelle "Malak Tawous", l'Ange-Paon, dont l'histoire ressemble étrangement à celle d'"Iblis", le diable, l'ange déchu du Coran.

 

Dans la tradition zoroastrienne, dont la religion syncrétique des yézidis a préservé quelques éléments, l'Ange-Paon, à cause de son orgueil, perd certes la faveur de Dieu, mais, pris de remords, se réconcilie avec lui. L'Ange-Paon n'est donc pas devenu, comme dans l'islam, la personnification du diable, Iblis, mais un ange qui est resté une émanation bienveillante de la divinité. Pour les Yézidis, le mal comme le bien résident plutôt dans l'être humain, qui lui choisit sa voie.

 

 

- Une religion sans statut

Le problème du peuple Yézidi est que sa religion a longtemps été basée sur des traditions orales. Il n'a eu que tardivement – fin XIXe siècle – des livres sacrés où ses croyances furent consignées. Il a de ce fait été exclu de la catégorie requise par les législations islamiques successives, celle des gens du Livre, qui a été accordée aux juifs et aux chrétiens auxquels elle a conféré un statut légal.

 

Bien que croyant en un Dieu unique, mais n'étant ni musulmans ni gens du Livre, les Yézidis se sont heurtés aux demandes de clarification des gouvernements de l'Empire ottoman dans le cadre de l'administration de leurs provinces, et ce n'est qu'en 1849 que leur communauté a été reconnue par l'Empire. Cela n'a pas empêché qu'ils soient menacés une fois de plus de conversion forcée en 1894, à l'époque du Sultan Abdel-Hamid II (1876-1909).

 

Pour échapper aux persécutions, il arrivait qu'un groupe de Yézidis demande aux patriarches syriaques-orthodoxes résidant au monastère de Deir al-Zaafaran à Mardine – au nord du Sinjar – de les déclarer chrétiens, ce que les patriarches faisaient volontiers. Ils savaient néanmoins que ces "adorateurs du soleil", car les Yézidis prient le matin en direction du soleil, ne feraient que nominalement partie de leur communauté.

 

- Liberté de culte

L'un des principaux centres de pèlerinage des Yézidis est la tombe de cheikh Aadi ibn Musafir, mort en 1162, à Lalish dans le Jabal Sinjar. Cheikh Aadi, originaire de la Békaa libanaise, a fondé au XIIe siècle la confrérie soufie sunnite des Aadawiyyah. Il a été en même temps considéré par les Yézidis, qui croient en la métempsycose, comme une réincarnation de Malak Tawus, l'Ange-Paon. Le pèlerinage à Lalish durant le mois d'avril donne lieu à un festival où les fidèles chantent des hymnes transmis oralement depuis des générations, et dansent.

 

Le sort des Yézidis du Sinjar a longtemps été lié à celui des chrétiens du nord de l'Irak, ou de la région de mardine au sud-est de la Turquie. Durant la Première Guerre mondiale ils ont accueilli au péril de leur vie dans leurs montagnes des dizaines de milliers de refugiés chrétiens arméniens et syriaques qui fuyaient les massacres et déportations ordonnés par le gouvernement turc.

 

Plus tard, dans le cadre du nouvel État irakien, ils ont souffert comme les autres tribus kurdes de la politique d'arabisation forcée menée par le régime de Saddam Hussein. Après la chute du régime baassiste en 2003, tant le gouvernement autonome du Kurdistan que la nouvelle Constitution irakienne leur ont accordé la liberté de culte. Mais celle-ci est remise en question une fois de plus, en même temps que celle des chrétiens de la région de Mossoul, eux aussi menacés par l'EI.

 

Note :

[1]Historienne et chercheure à l'Universite Saint-Joseph, Ray Jabre Mouawad est membre fondatrice de l'Association pour la restauration et l'étude des fresques médiévales

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  • Pour une Révolution citoyenne par les urnes
  • Retraité SNCF, engagé politiquement depuis l'âge de 15 ans, militant du PCF de 1971 à 2008, adhérent au Parti de Gauche et à la France Insoumise depuis leur création, ex secrétaire de syndicat, d'Union locale et conseiller Prud'homme CGT  de 1978 à 2022.
  • Retraité SNCF, engagé politiquement depuis l'âge de 15 ans, militant du PCF de 1971 à 2008, adhérent au Parti de Gauche et à la France Insoumise depuis leur création, ex secrétaire de syndicat, d'Union locale et conseiller Prud'homme CGT de 1978 à 2022.

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